L’importance de connaître son cycle menstruel

Vous pouvez regarder ce podcast sur notre chaîne youtube.

Vous pouvez écouter ce podcast sur :

Les intervenants

  • Amélie Bertschy : physiothérapeute
  • Juliette Corgnet : physiothérapeute

Transcription

Juliette : Bonjour et bienvenue sur le podcast Santé Sport de CapRol. Aujourd’hui nous sommes avec Amélie. Bonjour Amélie. Est-ce que tu peux te présenter s’il te plaît ? 

Amélie : Alors je m’appelle Amélie, j’ai grandi à Fribourg. Je suis actuellement à Vevey en tant que physiothérapeute au Centre Sport Thérapie. Et en parallèle, j’ai terminé cette année mon travail de master en Sport Santé Recherche à Fribourg, qui s’intitule Cycle menstruel et athlète féminine. La thématique d’aujourd’hui. 

Juliette : Exact. C’était athlète féminine sur les sports d’endurance ou sur les sports de façon générale. 

Amélie : C’était principalement sur les sports d’endurance puisque on a choisi un pool d’athlètes qui était dans cette optique de faire des sports d’endurance, du vélo, de la course à pied, ski alpinisme. 

Qu’est-ce que le cycle menstruel ?

Juliette : Ok. Est-ce que tu pourrais déjà nous expliquer un petit peu le cycle menstruel ? 

Amélie : Oui, avec grand plaisir, parce que je pense que c’est toujours un bon rappel. Donc le cycle menstruel, c’est une série de processus physiologiques qui se passent dans un premier instant, dans une optique de grossesse, mais qui se déroulent de la ménarche (première apparition des règles) jusqu’à la ménopause. Cette série de processus physiologiques est régi par le système hormonal, donc des messagers chimiques qui se baladent dans la circulation et qui vont atteindre divers organes et donner des tâches à divers organes. 

Amélie : C’est vraiment quelque chose qui est global au niveau du système hormonal et qui se balade dans la circulation. L’atteinte est plus large, qu’uniquement dans un but de grossesse ou dans un but de procréation.

Amélie : Le cycle menstruel, il est régi par deux hormones prédominantes qui sont l’œstrogène et la progestérone. Il commence au premier jour de règles qui dure un certain nombre de jours, qui est très individuel en fonction des personnes. 

Amélie : Et puis progressivement, il y a une montée d’œstrogènes qui composent la phase folliculaire. Donc ça c’est la première phase du cycle. Une fois que la montée d’œstrogène est arrivée à son pic, il y a l’ovulation. Donc un événement qui se passe plus ou moins à la moitié du cycle. Mais on sait que la phase folliculaire peut aller de 10 à 20 jours en fonction des individus. Donc c’est très variable. La durée de la phase folliculaire est très variable !

Juliette : 10-20 jours, c’est énorme …

Amélie : Grosse différence de dix jours. Et puis une fois que l’ovulation a eu lieu, on passe dans cette deuxième phase qui s’appelle la phase lutéale. Où là, il y a la prédominance de la progestérone, une deuxième hormone toujours en parallèle avec l’œstrogène. 

Juliette : Donc la première phase c’est vraiment les œstrogènes. La deuxième phase c’est vraiment la progestérone. 

Amélie : Si on veut résumer, on veut réduire un petit peu ça, prédominance œstrogène et puis progestérone. Et puis bien sûr, tous ces processus où tous ces changements sont régis par des baisses ou des montées d’hormones. Et puis la descente des hormones, la baisse drastique d’hormones qui apparaît à la fin du cycle pour commencer un nouveau cycle, c’est un peu la phase lutéale tardive. Donc cette phase de symptômes qu’on connaît principalement. 

Juliette : Là tu parles des symptômes prémenstruels ou tu parles juste des symptômes de règles ? 

Les symptômes prémenstruels, menstruels, ou apparaissant durant l’ovulation

Amélie : Alors symptômes prémenstruels sont définis par cette baisse d’hormones qui apparaît à la fin du cycle et qui peut amener en fonction des individus différents symptômes. Et puis une fois que cette baisse d’hormones a eu lieu, il y a l’apparition des règles qui commencent un nouveau cycle. Et là, il pourrait y avoir des symptômes au niveau de la phase de règles, la phase de menstruation. 

Juliette : Les symptômes prémenstruels, on va les rencontrer une semaine avant le début des règles, c’est ça ? 

Amélie : Ça peut être aussi très variable. Ça dépend vraiment de l’expression hormonale. On dit qu’à partir de cinq jours avant le début des règles, on peut déjà sentir des symptômes, parfois même un petit peu plus.

Juliette : Les symptômes les plus contraignants ce sont les symptômes prémenstruels ou menstruels ? Est-ce qu’il y a des données par rapport à ça ? Les femmes sont plus gênées juste avant leurs règles ou pendant leurs règles ?

Amélie : Alors il n’y a pas encore suffisamment de données pour vraiment établir une généralité. Je pense que c’est très individuel. Il y a des personnes qui sont beaucoup plus gênées par cette phase prémenstruelle. Et il y a des personnes qui sont beaucoup plus gênées par la phase menstruelle. Donc c’est très individuel et c’est la complexité du sujet. 

Juliette : Et globalement, on peut avoir en fait l’apparition de douleurs pendant deux semaines ou trois semaines. 

Amélie : Et puis il y a aussi des douleurs qui peuvent apparaître durant l’ovulation. On pourrait résumer au fait que les passages où il y a des changements hormonaux, ce sont souvent des phases qui sont inflammatoires. Et les phases inflammatoires peuvent provoquer des douleurs ou des désagréments.

Juliette : Oui, c’est de la construction ou de la destruction. Et donc il y a quelque chose qui est en train de se passer.

Amélie : Exactement.

À partir de quel moment peut-on considérer que nos symptômes ne sont plus dans la normale ?

Amélie : Je pense qu’on est tous individuels par rapport à cette perception des contraintes, mais aussi par rapport au système de la douleur. On sait qu’on n’est pas égal d’un individu à l’autre par rapport au système de la douleur. Mais je pense que le facteur de l’impact sur la vie quotidienne est un facteur clé. Si les symptômes impactent notre quotidien quel qu’il soit, que ce soit quelqu’un de très sportif, un athlète ou quelqu’un de sédentaire, s’il y a un impact sur la vie quotidienne, je pense que c’est à ce moment-là qu’on peut dire que c’est au-delà de la normale. 

Juliette : Oui, c’est ça, c’est une notion de qualité de vie. Si ça impacte trop, c’est qu’il y a un souci. 

Une majorité de femmes a des douleurs

Juliette : La majorité des femmes ont-elles des douleurs ? 

Amélie : Je pense que la majorité des femmes ont des douleurs. Mais on n’en parle pas beaucoup. Le cycle menstruel est un phénomène physiologique qui existe depuis longtemps, mais qu’on commence maintenant à mieux discuter. Et à ouvrir une discussion qui est plus ouverte et puis à se rendre compte qu’on a souvent mis ça de côté. On a souvent considéré que les douleurs étaient normales, considérer que c’étaient juste des passages de sa vie où il faut serrer les dents. Et puis on a tendance plutôt à ne pas en parler parce que les règles, c’est quand même un peu tabou. 

Juliette : Il faut le cacher.

Amélie : Il faut le cacher. Je pense qu’il y a encore beaucoup de choses à déconstruire. Et c’est un peu en ce moment qu’on est en train de le faire. 

Des voies pour gérer la douleur ?

Juliette : Et comment on peut gérer, cette notion de douleur. Moi, j’ai énormément de patientes qui ont des douleurs, qui ont mal ou sont terriblement gênées. C’est vrai qu’elles n’en parlent pas. Mais quels sont les moyens de soulager, hormis l’aspect médicamenteux ? 

Amélie : Je pense que l’orientation aujourd’hui qui pourrait avoir des clés, c’est vraiment par rapport à l’hygiène de vie. Il y a beaucoup de facteurs qui peuvent vraiment influencer ce climat douloureux. Et puis la nutrition. Mais comme tout sujet d’étude dans la nutrition, c’est quelque chose de compliqué parce que c’est multi factoriel. On n’arrive pas encore à dire qu’il faudrait utiliser tel ou tel aliment pour vraiment diminuer drastiquement les douleurs.

Amélie : Mais je pense qu’il y a beaucoup de clés qu’on ne connaît pas encore dans la nutrition, dans l’hygiène de vie, dans la diminution du stress, dans l’augmentation peut être de la récupération qui pourrait avoir un impact sur les douleurs. Et l’activité physique on sait que c’est le médicament de tout et qu’il a plutôt tendance à diminuer un peu les douleurs, à avoir un aspect aussi un peu d’endorphine qui pourrait aussi impacter ce genre de douleurs. 

Des voies pour gérer la douleur : la nutrition, l’hygiène de vie, la diminution du stress, la récupération, le sport.

Juliette : Après c’est difficile sur des femmes qui ont vraiment des douleurs, qu’elles décrivent un peu comme des spasmes, d’aller leur dire de faire des activités physiques. Alors marcher, … mais même marcher, elles ne sont pas confortables parce que la posture n’est pas forcément bonne. Est-ce que toi tu as des activités qui sont plus évidentes ?   

Amélie : Je pense que la marche, c’est déjà assez contraignant. Le vélo peut être un peu plus doux. Mais on parle vraiment d’activité physique légère. Donc ça pourrait simplement être du yoga, peut-être même du ying yoga. Quelque chose de vraiment doux, mais se mettre en mouvement. Peut-être des exercices respiratoires, des choses qui sont quand même en mouvement, mais pas forcément avec des impacts. Et puis on ne parle pas d’intervalles !

Juliette : Oui, à la limite des choses qui drainent et avec une mise au calme. Je pense à quelque chose, de tout bête avec les principes de gaine qui vont toujours du bas vers le haut, mais qui vont gainer toute cette partie basse abdominale. Ça pourrait être intéressant aussi sur des douleurs, cette notion de compression. À partir du moment où tu as une zone douloureuse, si tu mets une compression qui va dans le bon sens et qui permet de stabiliser, cela peut être intéressant. Pour la marche ça serait éventuellement une bonne aide.

Amélie : Ça pourrait. Ça fait un petit moment, mais durant mon Bachelor, j’avais des amis qui avaient travaillé sur les dysménorrhées en physiothérapie. Il y avait très peu d’études, c’était un peu leur conclusion. Et je crois que la thérapie manuelle et le taping avaient peut-être un impact sur la diminution de douleur. 

Juliette : Oui, le taping pour faire une sorte de maintien, je pense que ça peut être des choses assez intéressantes pour l’activité physique. 

A quel moment du cycle la femme est-elle la plus performante ?

Juliette : Au niveau du cycle, à quel moment la femme est probablement la plus performante ou la plus forte ? 

Amélie : Je pense que la période la plus favorable est probablement la phase folliculaire, donc le début du cycle jusqu’à l’ovulation. On pense ça principalement par l’action hormonal. On sait que l’œstrogène a plutôt tendance à être anabolique, et donc plutôt tendance à être constructive. Et puis il a des propriétés neuro excitatrices, on est donc plutôt plus alerte, on a une meilleure production de force. 

Amélie : Après, il ne faut pas comprendre que dans la deuxième partie du cycle, on ne vaut rien. Et que des adaptations ne peuvent pas se créer. Mais la phase la plus propice aux adaptations serait la phase folliculaire. 

Juliette : Mais à la limite, est-ce que ça serait, en étant excessive, la deuxième semaine ? En rapport à l’évolution progressive des œstrogènes. 

Amélie : Oui, ça pourrait … Mais, c’est ça qui est très compliqué quand on veut vraiment comprendre le cycle menstruel ; c’est que déterminer l’ovulation, c’est quelque chose de difficile. On parle de cet événement comme un changement, mais si on demande à des femmes qui ont un cycle naturel de connaître le jour de l’ovulation, c’est difficile. Et on sait que la phase folliculaire peut varier de 10 à 20 jours, donc … 

Juliette : Oui, la variation au niveau des jours est trop grande pour dire : je suis sûr que pendant ces 5-7 jours là, je peux obtenir les meilleures adaptations possibles. On ne peut pas le déterminer. 

Amélie : En tout cas, c’est difficile et ça demande beaucoup d’énergie. 

Juliette : D’une certaine façon, on pourrait aussi dire que la femme est censée pouvoir être performante durant tout son cycle en s’adaptant. Et peut-être que telle performance sera meilleure à tel moment du cycle, mais une autre performance sera peut-être meilleure à un autre moment du cycle. 

Amélie : Moi ce que je pense surtout, c’est que le cycle menstruel qui crée un milieu de positif ou moins propice à des adaptations ou à une performance, est surtout important dans la récupération. Finalement, il y a peut-être des moments du cycle où il faudra plus de temps de récupération, plus d’attention à ça pour pouvoir performer à son maximum. Mais en tout temps, on est capable de performer à son maximum. 

 

En tout temps on est capable de performer à son maximum.

Juliette : Il faut toujours avoir l’équilibre entre adaptation, récupération et stimulation. 

Une phase de laxité parfois plus importante.

Juliette : Est-ce qu’il y a un moment où on est plus laxe ? Personnellement, moi je ressens vraiment une période du cycle où j’ai un genou que je ressens plus laxe. Est-ce que c’est une idée ou est-ce que c’est quelque chose qui pourrait s’expliquer d’un point de vue hormonal ? 

Amélie : Ça s’explique d’un point de vue hormonal, encore une fois par l’œstrogène qui a son pic, donc quand il y a une grande prédominance d’œstrogène, cela peut avoir des impacts sur la laxité ligamentaire. Un petit peu comme les mêmes effets qu’il y aurait pendant une grossesse, qui augmentent l’activité ligamentaire. 

Juliette : Donc on pourrait, d’un point de vue théorique, d’un point de vue pratique c’est toujours différent … mais d’un point de vue théorique, on pourrait dire que les œstrogènes pourraient favoriser l’adaptation, mais en même temps favoriser la laxité et donc un déséquilibre, un travail de stabilisation plus difficile. Il y a donc toujours ce plus et ce moins. Les œstrogènes amènent physiologiquement, quelque chose de positif, mais en même temps, être plus laxe, c’est une plus grande difficulté de contrôle, donc pour moi c’est négatif. 

Amélie : Après, c’est toujours une question de degré. Est-ce qu’on est un tout petit peu plus laxe que d’habitude, et dans ce cas probablement que cela n’a pas d’impact sur notre performance. Cela dépend aussi du sport qui est pratiqué, et de l’intensité. Je pense que ce ne sont pas des facteurs qui sont directs. C’est un climat, un milieu qui peut favoriser ou compromettre certaines choses et qu’il faut peut-être prendre en considération. Mais ce n’est jamais parce qu’il y a l’ovulation qu’on va se blesser, parce qu’on est laxe, ce ne sera jamais une conséquence aussi directe. 

Juliette : Ce qui est intéressant, c’est vraiment de se dire qu’il y a un climat hormonal, et de savoir comment il s’exprime chez soi. Et ensuite d’essayer d’adapter si nécessaire que ce soit pour l’athlète de haut niveau ou la personne lambda. En se connaissant on pourra savoir si on doit adapter son entraînement, plus s’écouter par exemple car on se sent plus laxe … C’est toujours une notion de comprendre le climat qui est propre à chaque individu. 

Apprendre à se connaître à travers son cycle menstruel pour connaître ses besoins.

Amélie : Oui, et je pense que c’est là la grosse clé, c’est d’apprendre à se connaître à travers le cycle menstruel pour connaître ses besoins. Et arriver à déterminer quels sont les facteurs qui sont liés justement à ces variations hormonales et qui nous impactent le plus. Mais cela prend du temps. C’est probablement un processus qui se fait sur toute sa vie hormonale. Et ça change aussi, entre son cycle menstruel à 18 ans ou son cycle à 37 ans, Ce ne sera probablement pas la même chose. Ce sont donc des choses qu’il faut apprendre à connaître et qu’il faut avoir un petit peu en arrière de la tête, sans en faire un goal de vie. 

Juliette : Après, la problématique c’est aussi l’hygiène de vie générale et la nutrition qui impacte sur notre corps. Donc il n’y a même pas que le cycle hormonal, … 

Amélie : Ça reste un système hormonal, donc le système endocrinien qui a des facteurs influençant et des facteurs favorisants, c’est complexe … !! 

Juliette : C’est complexe. 

Amélie : Il faut accepter que ce soit complexe.

Juliette : C’est un domaine qui nous amène à la découverte de soi pour savoir comment on fonctionne et quel impact ça a. Évidemment qu’on ne va pas découvrir ça en trois jours. Mais c’est intéressant. 

Le moment le plus efficient pour le renforcement musculaire.

Juliette : Est-ce qu’il y a un moment du cycle où le renforcement musculaire avec charge ou sans charge est le plus efficient ? 

Amélie : Probablement encore une fois cette phase folliculaire, de part le fait que l’œstrogène serait plutôt anabolique. Moi je pense que les adaptations sont possibles dans toutes les phases du cycle. Mais si on veut vraiment travailler un facteur clé de la performance, je pense qu’il est préférable de le mettre dans la première partie du cycle, où probablement les adaptations seront meilleures. Mais on peut aussi le mettre dans n’importe quel moment du cycle. Les adaptations se feront aussi. Mais si on a un objectif et qu’on a envie d’aller chercher avec ces variations hormonales, probablement que la phase folliculaire sera le plus intéressante. 

Juliette : Oui, ce serait limitatif de se dire qu’on ne travaille que durant cette première phase, sachant que le corps s’adapte à partir du moment où il est stimulé.

Le corps s’adapte à partir du moment où il est stimulé.

Amélie : Exactement. Ça il faut vraiment le garder en tête parce qu’il y a pas mal de gens qui dans les premières idées d’entraînement en fonction du cycle hormonal qui se sont dit : mais finalement on fait quoi, on s’entraîne pendant la phase folliculaire, et puis après on ne fait rien pendant dix jours ? Non, ce n’est pas ça. Si on a envie d’aller chercher la petite bête, qu’on a envie d’aller chercher en fonction d’une idée physiologique, ce sera peut-être ce terrain propice là. Mais en tout temps, on peut créer des adaptations. 

Variation du ressenti de l’effort (RPE) durant le cycle

Juliette : Est-ce que c’est vrai que durant toute la phase où on a le plus de progestérone, l’exercice peut être ressenti plus difficile ou plus dur ? 

Amélie : Les études qu’il y a sur le RPE (échelle utilisée pour ressenti de l’intensité de l’effort) à l’entraînement, elles ne sont pas très concluantes pour l’instant. Mais c’est possible. C’est possible aussi, toujours en fonction des symptômes ou bien du ressenti de cette phase. La progestérone a aussi parfois une action sur la rétention d’eau. On pourrait donc avoir une composition corporelle qui change à ce moment-là et donc du coup ressentir l’effort un peu plus difficile. Il y a aussi parfois des impacts sur l’effort respiratoire qui peuvent être ressentis. C’est toujours un ressenti, ce n’est pas encore prouvé scientifiquement mais ce sont des symptômes qui sont connus durant cette phase-là, donc ça peut aussi impacter notre ressenti à l’entraînement. 

Juliette : Si on sait que durant cette phase-là, le ressenti sera un petit peu plus dur, d’une certaine façon, on travaille une adaptation à l’effort d’un point de vue mental. Puisque lorsque cette phase va être finie, on pourra ressentir un deuxième élan. Et on pourra peut-être s’entraîner un peu plus dur. Ça ne veut pas dire qu’on ne s’était pas entraîné dur avant, mais mentalement on est en train de travailler l’endurance à l’effort. 

Amélie : Et ce facteur psychologique, il est clé. Parce que finalement, si on apprend à savoir que peut être dans la fin du cycle, on se sent plus lourde, qu’on a un peu de rétention d’eau, un peu de difficulté respiratoire… On sera aussi déjà un peu plus résiliente en se disant que c’est normal, que cela fait partie des choses que l’on connait et qui reviennent. Et que ça ira beaucoup mieux dans une semaine. Ça nous permet vraiment d’avoir des clés psychologiques. Au lieu de se dire, qu’est-ce qui se passe avec moi, il y a une semaine je me sentais super bien et super performant et maintenant rien ne va. 

Juliette : Essayer d’en tirer du positif, plutôt que de partir dans la déprime. En fin de compte, je suis lourde, ça ne marche pas, je ne comprends pas. Mais on le sait, hormonalement ça s’explique et à la limite, ça me permet de travailler avec cette notion de lourdeur. Parce que lorsque je vais pouvoir augmenter mon entraînement ou lorsque je fais des sports d’endurance et que j’arrive à certains kilomètres, …  à un certain temps, la lourdeur, on va la sentir. Donc là, à la limite, oui, l’effort n’est pas si énorme que ça, mais mentalement je le sens. Je pense que c’est aussi une façon de travailler mentalement. Ça peut être intéressant. 

Suivre son cycle

Juliette : Est-ce que tu as des tips ou des applications à conseiller pour suivre notre cycle ? Comment peut-on découvrir notre cycle même si cela se fait sur plusieurs années ?

Amélie : Oui, ça se fait sur plusieurs années. Je pense qu’il faut un minimum de trois mois pour commencer à comprendre, avec un suivi vraiment journalier. Il y a des milliers d’applications pour suivre son cycle. Elles sont souvent basées sur les symptômes prémenstruels, les symptômes menstruels et puis après il ne se passe plus grand chose. Donc il y a vraiment un focus sur les choses négatives qui peuvent apparaître.

Amélie : Je trouve qu’une application qui est pertinente, c’est une application qui permet de suivre des paramètres autant positifs que négatifs, d’aller vraiment sur tout le suivi du cycle. C’est-à-dire, comment je me sens aujourd’hui. Finalement, c’est se poser cette question tous les jours, comment je me sens aujourd’hui ? Cela peut être impacté par beaucoup de facteurs. Mais se poser la question tous les jours et établir un petit calendrier, ça peut être simplement crayon papier. 

Amélie : Dans les applications qui sont les plus développées, je pense qu’il y a Wild AI qui est une application qui est malheureusement très commerciale, mais qui est quand même assez pertinente sur ce côté. Il y a des choses positives, il y a des choses négatives. Je crois qu’il y a aussi Moody et puis FitRwoman qui sont, je pense, les trois que je conseillerais. Après, il y en a sûrement plein d’autres applications. Mais il est intéressant de noter les facteurs positifs, les facteurs négatifs, et puis de faire un questionnement quotidien sur son niveau d’énergie, sur son humeur, …

Juliette : Oui ça permet de faire un bilan. Tu as aussi ça dans certains sports professionnels, au niveau des athlètes, où ils ont décidé de leur faire un test qui quantifie tout ce qui est charge mentale. Cela permet de voir l’état d’humeur, le sommeil, et plein d’autres choses … Je pense que les hormones ça joue aussi là-dessus. 

Amélie : C’est le même processus, c’est du monitoring finalement. C’est du monitoring de différents facteurs, que ce soit psychologique, énergétique qu’on applique. 

Juliette : Chez la femme, nous on va rajouter cet aspect hormonal cyclique qu’on n’a pas forcément chez les hommes.

Déterminer le moment de l’ovulation

Amélie : Et je pense que pour le suivi du cycle, ce qui est important, c’est aussi d’arriver gentiment à déterminer cet événement de l’ovulation qui permet de déterminer dans quelle phase on se situe finalement, première phase ou deuxième phase. Et ça, il y a encore peu de moyen pour vraiment la déterminer de manière peu onéreuse et rapide. Je pense que le suivi de la température corporelle reste quelque chose qui est simple.

Juliette : C’est la température corporelle que tu vas prendre en externe ou la température corporelle que tu vas prendre en intra vaginal. 

Amélie : Intra vaginal ou oral est plus pertinent. Maintenant, il y a pas mal de choses qui sont développées pour la température distale. Il y a des bagues de température corporelle, des bracelets. Et apparemment c’est presque plus valide puisqu’on a une mesure qui est continue pendant la nuit. Souvent c’est pendant la nuit. Et puis on a une mesure qui est continue sur une durée qui est assez longue, et un environnement qui est assez stable. 

Juliette : Le suivi, est plus pertinents aussi. 

Amélie : Et moins contraignant. 

Comment réagir face aux troubles du cycle ?

Juliette : Il y a énormément de femmes qui ont des troubles du cycle. Il y a l’absence du cycle qu’on verra plus tard. Mais il y a beaucoup de femmes qui ont des troubles du cycle à n’importe quel âge. Face à ça, toi, tu réagis comment ? 

Amélie : Alors les troubles du cycle, dans un premier temps, ça peut être quelque chose de tout à fait normal. Nous ne sommes pas des horloges. Il y a des variations qui peuvent arriver, un cycle plus court, un cycle plus long. Ce sont des choses qui sont tout à fait normales. Mais à partir du moment où ça se prolonge, je pense qu’il faut se tourner vers un professionnel de la santé. Dès qu’il y a une problématique qui perdure sur plusieurs mois, il faut aller chercher les clés et les réponses. 

Juliette : Il y a beaucoup de femmes qui d’un seul coup n’ont pas eu leurs règles … Qu’on ait un décalage de deux ou trois jours, mais parfois il y a un décalage de plusieurs semaines. On est dans ces cas dans des choses qui ne paraissent pas très stables. Suivre son cycle c’est important, mais lorsqu’il est déjà perturbé, c’est un peu compliqué. Tu te dirigerais directement vers un endocrinologue, un gynécologue ou vers le médecin de famille dans un premier temps ? 

Amélie : C’est difficile de répondre à cette question, parce que je pense qu’autant un médecin de famille qu’un endocrinologue, qu’un gynécologue peut avoir des réponses qui sont intéressantes. Pour autant qu’il soit intéressé et formé à la question. Donc c’est difficile de répondre à cette question. Il faut se tourner vers quelqu’un qui est perméable et qui est ouvert à cette question. Parce qu’il y a encore pas mal de médecins qui pourraient répondre, c’est tout à fait normal. 

Juliette : C’est souvent ce qui se passe. 

Amélie : C’est souvent ce qui se passe, et ça bouge maintenant. Mais il y a encore peut-être peu de répondant par rapport à ça.

Juliette : On est d’accord qu’un cycle menstruel, on va dire dans la normalité avec des petites variations, c’est synonyme de bon fonctionnement du métabolisme ?!

Amélie : C’est signe du bon fonctionnement du métabolisme, effectivement. Surtout du côté énergétique. J’espère ne pas trop m’avancer, mais tout femme a déjà expérimenté ce phénomène de se dire je suis dans une phase de stress, j’ai des examens …Il y a des personnes chez qui ça provoque les règles, elles arrivent plus tôt, parce qu’il y a un stress et tout d’un coup il se passe quelque chose. Le système hormonal et le cycle menstruel est régi par une partie du cerveau, et donc soumit à différents stress psychologiques ou autre. Ou alors le facteur inverse que lors d’une période d’examens tout d’un coup le cycle est prolongé et les règles apparaissent à partir du moment où on a fini ces examens. Donc il y a quand même des variations qui sont liées à ça et on réagit par rapport à ça. 

Juliette : Et si on connait son cycle, cela permet de savoir qu’il y a un souci, mais de savoir pourquoi. 

Amélie : Pour ces variations de cycle, il faut essayer de prendre du recul, de s’interroger sur son état de stress durant cette période, sur son état énergétique. S’interroger sur comment on vit ces derniers mois et puis arriver à établir si oui ou non il y a un déséquilibre. 

Juliette : J’aurais tendance à dire que si on fait un rapprochement avec un élément extérieur, donc principalement le stress, c’est de se dire ok, je suis en phase de stress, je ne peux pas résoudre forcément le problème. Mais l’objectif c’est de retrouver un cycle menstruel normal. Normal n’est pas le bon terme, mais régulier, ou à peu près régulier. 

Amélie : Dont l’occurrence est relativement régulière. 

Les règles et le sport

Juliette : Au niveau du sport comment gérer ses règles, comment gérer ses syndromes prémenstruels ? Alors on a vu par rapport à l’entraînement, qu’on peut toujours discuter et puis voir si on veut travailler des choses spécifiques, etc… Mais dans le sport, est-ce que c’est souvent compliqué ? 

Amélie : Ça dépend du sport. Ce ne sera pas le même challenge si on fait un sport plutôt artistique. Ce ne sera pas le même challenge si on pratique un sport d’endurance sur plusieurs heures. Un sport, dans l’eau. Il y a beaucoup de variations en fonction du sport qu’on fait et il y a beaucoup de solutions qui sont à trouver. 

Juliette : Et beaucoup de solutions au niveau nutritionnel ? Quand on a nos règles, est-ce qu’au niveau de la perte de fer, au niveau énergie, au niveau dépense calorique … Est-ce que c’est un moment qui est difficile par rapport à l’activité physique ? 

Amélie : Au niveau nutritionnel, il y a sûrement pas mal de clés. On sait que la demande en énergie est augmentée plutôt dans la phase lutéale, donc avant les règles. C’est plutôt à ce moment là où il y aurait une variation, en tout cas un apport en énergie qui devrait être plus grand. Et puis après, pendant les règles, bien sûr qu’il y a la problématique de la perte sanguine, qui peut entraîner des pertes de fer. Et qui porte la femme plus sujette à des problèmes de fer. Je sais qu’aujourd’hui il y a pas mal de choses qui sont investiguées sur les oméga3, qui ont plutôt une tendance à être anti-inflammatoire. Et comme on l’a dit, la phase menstruelle est une phase plutôt inflammatoire, les oméga3 pourraient un petit peu diminuer ce facteur inflammatoire. Ce sont les premières choses qu’on voit apparaître. Il y a sûrement plein d’autres choses qui vont apparaître dans l’avenir.

Juliette : C’est du monitoring qu’il faut faire en fonction du sport. Si tu es très fatiguée, est-ce un problème de fer, est-ce que tu te sens un peu plus lourde ? Peut-être changer l’alimentation ? Certains aliments sont plus anti-inflammatoires, certains apportent plus d’énergie … 

Amélie : Oui, il y a ces deux facteurs je pense. Il y a le facteur inflammatoire qui est une inflammation très locale au niveau du bas du ventre, qui peut se prolonger ou se propager dans le système digestif. C’est donc tout un système qui est impacté. Arriver à diminuer ou donner des nutriments qui sont anti-inflammatoires, ou en tout cas qui n’auront pas tendance à déranger le système digestif, ça peut déjà être une clé. Maintenant il ne faut pas oublier que l’on est tous différents par rapport au système digestif. Quelque chose qui provoque une inflammation chez quelqu’un ne le provoque pas toujours chez quelqu’un d’autre. C’est quelque chose que l’on peut tester soi-même, ou en tout cas avoir un intérêt ou une attention particulière.

L’adaptation du plan d’entraînement en fonction du cycle ou du ressenti de l’athlète

Juliette : Au niveau des sports collectifs, il est assez difficile de gérer toutes les athlètes qui jouent ensemble. Au niveau individuel, est-ce que toi tu adapterais ton entraînement en fonction de ton cycle ou en fonction de ton ressenti ? Ou, finalement tu as ton plan d’entrainement et tu ne te préoccupes absolument pas de ton cycle ? Comment toi tu ferais, comment tu fais, et comment un coach sportif est censé faire ? 

Amélie : Dans un premier temps, c’est vraiment ce travail individuel, d’apprendre à se connaître. D’apprendre à connaître son cycle. Parce que s’il n’y a pas cette condition-là, on ne peut pas aller sur un entraînement qui est adapté au cycle, puisque c’est individuel. Puisque la phase folliculaire peut durer de 10 à 20 jours, et la phase lutéale de 10 à 15 jours. Donc, il y a un travail de monitoring à faire.

Juliette : Le coach, même si tu lui donnes la date de tes règles, il a besoin d’avoir tes ressentis pour savoir réellement ce qu’il doit adapter. 

Amélie : Et on doit d’abord connaître son ressenti pour après pouvoir le transmettre. 

Juliette : Oui, c’est ça. 

Amélie : Donc c’est un travail qui se fait sur le long terme. Et puis il y a différentes étapes : apprendre à se connaître et apprendre à communiquer avec le coach, apprendre à communiquer son ressenti, et arriver à le transmettre. Pour moi, le cycle menstruel, ça doit être une trame de fond. Le plan d’entraînement ne doit pas se coller sur la variation hormonale. C’est comme s’il fait beau aujourd’hui ou si c’est la grande tempête, on ne va pas forcément partir pour des heures d’entraînement à ce moment-là, ça doit être un petit peu la même chose. On va essayer peut-être de caler les entraînements un peu plus difficiles dans cette première partie du cycle, si on a un objectif ou en tout cas une phase clé. Dans toute périodisation d’entraînement, il y a des moments qui sont hauts en intensité et des moments de récupération. Donc si on arrive à créer une haute intensité sur une partie, c’est génial et ça peut aussi avoir un intérêt. 

Amélie : Et puis au-delà de ça, ça peut être aussi vu à l’inverse. On a une compétition qui va probablement tomber sur un jour où on sait qu’on se sent un petit peu moins énergique à l’entraînement. Malheureusement, il va falloir essayer de le travailler et puis essayer de contrebalancer ce sentiment. Et finir par se dire, je sais que je suis capable de performer dans cette phase où je me sens moins bien. 

Juliette : C’est la même chose qu’adapter son entraînement à la charge mentale. 

Amélie : Oui, ça a des similarités.

Juliette : Même si la charge mentale ça englobe beaucoup, beaucoup d’éléments. D’une certaine façon, tu adaptes ton entraînement à comment tu te ressens par rapport à ton cycle. Si ce dernier est régulier et que tu sais dans telle période, ou telle période comment tu te sens, ça peut permettre d’adapter l’entraînement de façon un petit peu plus spécifique. Mais est-ce que tu penses qu’on devrait des fois essayer de décaler, de faire en sorte par rapport aux compétitions ou par rapport à l’entraînement que les choses s’imbriquent ? Moi je ne pense pas … Mais pour ceux qui cherchent la performance à l’extrême…

Amélie : Je pense que c’est trop difficile. Et au-delà de ça, il y a le cycle menstruel, mais ce n’est qu’une petite partie du puzzle de performance. Il y a tous les aspects de la récupération, le climat, l’environnement, son entourage… Il y a tellement de facteurs liés à la performance. Ce n’est pas l’unique, ça ne sera jamais l’unique. Et si on a envie de l’intégrer à ce puzzle, ça peut être intéressant. Mais ce n’est pas la seule clé.

Les hormones jouent sur nos humeurs

Juliette : Les hormones jouent aussi sur l’humeur. Il y a une période où au niveau humeur, on est plus désagréable, plus agressive … Comment donner le bâton pour se faire battre lol. Si tu réalises que les hormones ont un impact sur ton humeur et que lors de la période qui est censée être plus difficile d’un point de vue performance, tu te sens plus agressive, pourquoi ne pas utiliser justement cet aspect émotionnel pour travailler ton physique ? Est-ce que tu vois ce que je veux dire ? 

Amélie : Ouais, alors là, ça part dans des choses qui sont sûrement complexes. Et il faut déjà avoir identifié que c’est une phase où on est plus agressive. Et ça, ce n’est pas facile, parce que souvent, lorsqu’on est dans un brouillard mental et qu’on range un peu son frein, on ne va pas forcément tout de suite admettre que c’est peut-être hormonal. Et on n’aura jamais la confirmation à 100 % que c’est lié à ça. Donc c’est compliqué. 

Juliette : Pour moi c’est toujours cette notion d’essayer de jouer autant sur le physique que sur le psychologique pour essayer de performer. Quand tu es fatiguée, si tu as « la gagne », si ça se trouve tu vas mieux performer.

Juliette : La conclusion, c’est vraiment de dire que le cycle menstruel, il est censé être régulier. Que s’il ne l’est pas, il faut qu’il le devienne. Qu’on peut jouer sur plein de choses autour, que ce soit la nutrition, l’hygiène de vie. Et qu’il faut s’en préoccuper pour se connaître. Si tu connais ton cycle menstruel, cela te permet aussi d’écouter ton corps. 

Le syndrome du RED-S (déficit énergétique relatif dans le sport) et irrégularité du cyc

Juliette : Est-ce que toi tu as en tête des mythes qu’on entend encore ?

Amélie : Je pense que le premier mythe à déconstruire c’est celui de se dire que si je n’ai plus mes règles, c’est que je m’entraîne suffisamment. Je pense que ça, c’est une idée reçue qui n’est pas formulée de cette manière, mais qui est un petit peu quelque part dans la tête de beaucoup d’athlètes.

Juliette : Là on va parler du RED-S. Est-ce que tu peux expliquer ce que c’est, et l’importance que ça a ? 

Amélie : Le RED ou RED-S, c’est Relative Energy Deficiency, in Sport qui peut être ajouté. Donc c’est un déficit relatif en énergie. Donc c’est un déséquilibre entre l’énergie qui est apportée et l’énergie qui est dépensée. Et dès le moment où il y a un déficit entre l’énergie qui est apportée et l’énergie qui est dépensée, qui est prolongée, ça peut avoir des multiples impacts sur notre physiologie. Un des impacts est la disparition des règles, mais c’est un des impacts. Il y a vraiment une multiple atteinte. Je ne sais pas combien il y en a, mais il y en a vraiment énormément qui peuvent survenir comme symptômes d’un déficit prolongé en énergie. Et puis c’est vraiment global. C’est l’énergie qui est apportée, mais ce n’est pas uniquement la nutrition, il y a aussi plein d’autres facteurs énergétiques, l’énergie mentale ou des choses comme ça qui sont dans cette grosse partie d’énergie apportée et l’énergie dépensée à l’entraînement ou autrement. 

Juliette : Il a été très mis en avant justement par ce principal symptôme de perte de règles. Mais en fait, il englobe beaucoup d’autres choses. C’est quelque chose de plus général. Mais globalement, on est proche du surentraînement, on se dirige vers le surentraînement ?

Amélie : Le surentraînement est un déficit en énergie. Mais ce qui est important je pense aussi est de remettre un peu en lumière le fait que ce déséquilibre ou ces variations, ces irrégularités du cycle, ce n’est pas non plus … je sais pas comment dire ça. Parce qu’il ne faut pas non plus que les gens pensent que si tu as des règles qui sont irrégulières depuis toujours, … je ne veux pas créer un climat anxiogène. 

Juliette : Pour moi, on est des êtres vivants, et on fonctionne de façon cyclique. Donc à partir du moment où ton fonctionnement cyclique il est rodé, et bien ça roule. Maintenant, ce n’est pas parce que tu ne vas pas te réveiller tous les jours à la même heure que tu dysfonctionnes vraiment énormément. Il ne faut pas être dans les extrêmes. Il y a l’aspect être cyclique, vraiment théorique, et puis il y a l’aspect pratique. C’est vrai qu’il y a des femmes qui ont leur règle régulièrement, mais de façon irrégulière. Mais ça se décale de deux ou trois jours. Ou peut-être qu’il y a un mois dans l’année où ça ne va pas jouer. Mais comme on l’a dit tout à l’heure, si tu as une énorme poussée de stress que tu viens de te faire virer de ton boulot … Au final, les choses ont tellement d’impact d’un point de vue hormonal et d’un point de vue métabolique et physiologique que ça peut s’expliquer. 

Amélie : Ouais, c’est ça. 

Juliette : Mais moi j’aurais toujours tendance à dire qu’on devrait essayer de tendre vers quelque chose de cyclique. C’est comme le principe de l’équilibre parfait n’existe pas, mais on essaye de vivre autour de cet équilibre parfait pour ne pas partir un petit peu en cacahuète. 

Amélie : Je trouve que c’est quelque chose de très anxiogène justement. Dans mon travail de master, on a essayé de déterminer l’ovulation. C’était un point ultra anxiogène parce qu’on a utilisé des tests d’ovulation bons marché et qui n’ont pas forcément très bien fonctionné. Les participantes faisaient le test à la maison, je ne sais pas exactement comment elles les ont réalisés. Est-ce qu’elles ont bien suivi le protocole ? Peu ont marché. Et ça a créé un climat anxiogène. C’est un sujet sensible et très émotionnel, donc c’est difficile. Il faut faire attention à ne pas créer trop d’anxiété.

Juliette : Dans toutes ces choses-là, tu as toujours un effet placebo et un effet nocébo dans les études. Après quand tu t’attardes sur cette notion d’ovulation, de possible grossesse, d’importance du cycle qui est censée représenter la femme, pour nous, ça a quand même toute une signification. Donc on rentre dans quelque chose d’émotionnelle

Juliette : Donc globalement, dans le sport, quand les jeunes n’ont plus leurs règles. La première réaction, la première chose qu’on doit surveiller c’est quoi ? 

Amélie : Après, ce qu’il faut savoir, c’est qu’une disparition des règles liées à un déficit en énergie ne se fait pas du jour au lendemain. C’est un processus qui apparaît gentiment. C’est d’abord, si je ne me trompe pas, une diminution de la phase lutéale. Il y a d’abord des cycles qui ont tendance à se raccourcir sur plusieurs mois, et puis progressivement, qui ont tendance tout d’un coup à s’espacer. C’est donc un processus qui arrive de manière insidieuse et relativement sur le long terme. Ce n’est pas d’un jour à l’autre. C’est quelque chose à surveiller sur une durée relativement longue. 

Amélie : La plus grosse question par rapport à la nutrition serait, est-ce que l’athlète a un apport en énergie qui est suffisamment haut ? Est-ce qu’il y a un apport en énergie avant l’entraînement et après l’entraînement, qui peut subvenir à ses besoins ? Ça, c’est vraiment la plus grosse cible. 

Juliette : Mais tu penses que ça serait surtout dirigé vers les athlètes. Si vous avez de la chance et que votre cycle est régulier, surveillez votre cycle et lors de l’apparition d’une dysfonction cela vous servira d’indicateur. Vous pourrez alors, déjà, vous poser la question au niveau de la nutrition. Et vérifier que vos apports sont corrects pour éviter de dévier vers un syndrome du RED. Ou, est-ce qu’on peut aussi avoir ça chez des personnes qui ne sont pas des athlètes mais qui font quand même un minimum d’heures de sport dans la semaine? 

Amélie : Comme le dit l’intitulé de RED, c’est Relative Energy Deficiency et puis après il y a in Sport, ça peut être appliqué à la population en général. Donc le déficit énergétique touche autant des gens qui ne sont pas sportifs d’élite que des sportifs d’élite. C’est quelque chose qui est global. Et puis ce point du cycle menstruel comme indicateur de santé, il est important, c’est quelque chose à surveiller ou en tout cas à avoir en tête comme un indicateur de santé. 

Juliette : Donc c’est intéressant, il faut vraiment chercher à découvrir notre cycle menstruel. Si on a de la chance et qu’il est régulier, il est indicateur de santé. Et si ça commence un petit peu à devenir irrégulier, il y a des questions à se poser sur le sommeil, sur la qualité de vie, sur le stress, sur la nutrition … 

Amélie :  Oui, et puis après, il y a probablement aussi d’autres pathologies qui pourraient être liées au cycle, et qui pourraient générer des dysfonctions ou des irrégularités. Je pense que c’est important de garder en tête justement que régularité ne veut pas forcément dire qu’on a un cycle qui dure toujours 30, 31 jours systématiquement. Il y a des variations qui se créent et qui sont normales. Mais c’est plutôt l’occurrence du cycle menstruel qui devrait être régulière, ou en tout cas la fréquence qui devrait être plus ou moins régulière. 

Juliette : C’est un message quelque part qu’on n’a pas encore. Puisque les règles on n’en parle pas, vous n’avez pu vos règles, ce n’est pas grave. Revenez dans trois mois et puis on verra si elles sont réapparues. Enfin moi personnellement, c’est ce que j’entends au cabinet. Vous avez hyper mal, ce n’est pas grave, c’est un cycle on verra la fois prochaine. J’ai le sentiment par rapport à ça, qu’on est au niveau médical, toujours en train de reporter pour après. Mais regardez, c’est peut-être passager… On dédramatise alors qu’on incite pas la patiente à écouter ses symptômes, à les noter pour pouvoir à la limite y faire référence et puis voir si toutes ces informations nous dirigent vers une direction ou une autre. 

Amélie : Je pense que c’est juste de ne pas alarmer s’il y a une dysfonction du cycle ou s’il y a une petite irrégularité qui peut apparaître. Mais c’est un facteur à prendre en considération. Et un indice pour dire il faudrait peut-être surveiller le global et pas seulement le cycle. Il faudrait peut-être aller chercher un petit peu plus loin, questionner peut être un peu plus loin et voir la santé globale de l’athlète ou de la personne. 

Juliette : C’est un indicateur parmi tant d’autres. On doit le prendre en considération sans le dramatiser.

Amélie : Je pense que dans le monde médical, c’est encore difficile de s’avancer sur les impacts de ces irrégularités. Parce qu’il y a encore peu de données sur le cycle menstruel, que ce soit du côté athlète-sport, ou que ce soit globalement du point de vue de santé. C’est encore un domaine qui doit mûrir, pour qu’on puisse donner des réponses claires. 

Juliette : Il y a encore plein d’études à faire, qui vont être très compliquées puisque c’est vraiment intra individuel. Pour faire des études sur ce sujet, je pense que ce n’est vraiment pas facile. 

Juliette : Après, d’un point de vue médical, je suis assez pour mettre un peu le poing sur la table en disant que le cycle menstruel, il est important. On l’a vu ces dernières années. La femme subit d’un seul coup un trouble du cycle, elle saigne dix fois plus fort qu’avant, mais on dit que ce n’est pas grave, que ça passera ! Elle n’a plus ses règles depuis 3 mois, ce n’est pas grave, ça passera, ça reviendra. Au niveau médical, de ce que je ressens par rapport aux patientes du cabinet, c’est qu’on dédramatise tout. C’est vrai qu’il ne faut pas inquiéter les patientes parce que notre corps réagit. On a le droit aussi de dysfonctionner de temps en temps. Mais en même temps, ça reste pour moi un énorme indicateur d’un fonctionnement à peu près normal, surtout quand il l’a été auparavant. Personnellement j’ai toujours un petit peu de difficulté à entendre le langage médical, rassurant certes, mais il me donne l’impression d’essayer de toujours pallier les symptômes sans prendre du recul. Il parait y avoir très peu d’interrogatoire, non culpabilisant, de la patiente, sur tout ce qui peut avoir un impact sur ce type de déclenchement, qui ne correspond pas forcément à des pathologies graves mais des prises alimentaires ou des stress ou des chocs émotionnels, … il y a beaucoup de choses qui peuvent rentrer en ligne de compte. 

Amélie : Oui, c’est toujours la même question de trouver un réseau qui est perméable à cette question, qui commence à bien émerger. Je trouve que dans la région, il y a quand même pas mal de réseaux qui se créent autour du sport féminin, qui ont une perméabilité, et j’espère que ça se développera encore mieux. 

Juliette : C’est le début. Ça ne va pas être simple, mais il faut garder une ouverture d’esprit. C’est ce qu’on demande. 

Juliette : Est-ce qu’il y a un autre message que tu aimerais faire passer ? Est-ce qu’il y a un sujet qu’on n’a pas abordé que tu aimerais aborder ou est-ce que c’est tout bon pour toi ? 

Amélie : Et je crois qu’on a déjà pas mal fait le tour de la question. En tout cas, il me semble que je n’ai rien oublié. Je mettrais vraiment encore une fois un petit peu la lumière sur ce côté du suivi du cycle, du monitoring qui peut être très intéressant pour apprendre à se connaître, pour apprendre à avoir une vision de soi avec un petit peu de recul et qui pour moi est un outil très intéressant dans sa vie en général et en tant qu’athlète.

Des livres a conseiller ?

Juliette : Est-ce que tu as des livres à recommander ? 

Amélie : Il y en a pas mal en anglais. Je crois qu’il y en a un qui s’appelle de the female factor qui est très chouette parce qu’il prend en compte toute la vie hormonale d’une femme, que ce soit de la ménarche, donc l’apparition des règles jusqu’à la ménopause. Et dont les bases scientifiques sont vraiment très intéressantes. Elles sont très fondées, elles ne sont pas basées sur un ressenti de quelqu’un, donc c’est assez fiable. Je recommanderais celui-ci. Je crois qu’il n’existe qu’en anglais pour l’instant. 

Juliette : Je pense qu’il y a encore beaucoup de publications qu’en anglais dans ce domaine. 

Amélie : Oui. Il y a pas mal de comptes Instagram qui sont intéressants. Je sais plus si c’est la même autrice, mais il y a @periododtheperiod qui aussi essaye de régulièrement faire un peu un update de ce qui se dit dans le monde scientifique. Donc pour encore une fois avoir des bases relativement solides. 

Juliette : Je pense que sur Instagram, il y a de plus en plus de comptes qui commencent à fleurir. C’est bien. Merci beaucoup. 

Amélie : Merci à toi. 

Le coaching santé

Vous pouvez regarder ce podcast sur notre chaîne youtube

Vous pouvez écouter ce podcast sur :

 

Les intervenants

Alexandre Burnier : Préparateur physique et remise en forme

Juliette Corgnet : Physiothérapeute

Transcription du podcast

Juliette : Bonjour et bienvenue sur le podcast Santé Sport de CapRol. Aujourd’hui on se retrouve avec Alexandre. Est-ce que tu peux te présenter, stp ?

Alexandre : Donc je m’appelle Alex. Je travaille, ici à Vevey en tant que coach sportif dans le centre CST+. C’est un centre de sport et thérapie. Je vous en parlerai un peu plus tout à l’heure. Je fais ce métier depuis environ sept ans.

C’est quoi un coach ?

Juliette : Peux-tu nous définir à quoi correspond un coach ?

Alexandre : C’est une question très vague, car le coaching, ça peut toucher n’importe quel domaine. Mais là, je vais parler spécifiquement du coaching sportif, voire même du coaching santé. Ça c’est ma spécialité. Et du coup, le coaching santé, je le définirais comme une personne qui donne des outils à quelqu’un qui est dans le besoin pour pouvoir atteindre ses objectifs de santé. Donc un guide en gros.

Le coaching santé, je le définirais comme une personne qui donne des outils à quelqu’un qui est dans le besoin pour pouvoir atteindre ses objectifs de santé.

Juliette : Un guide, un accompagnant.

Coaching santé et APA, quelles différences ?

Juliette : Est-ce qu’il y a une différence entre les APA et le coaching santé ou coaching sportif ? Je sais qu’on est dans un domaine assez vague et que les choses ne sont pas encore bien définies. Les gens ne connaissent pas non plus les APA, Activité Physique Adaptée. Y-a-t-il une différence ?

Alexandre : Ça se rejoint. Selon moi, il y a énormément de choses qui se rejoignent. Pareil, on en parlera tout à l’heure, mais avec des métiers comme la physiothérapie, APA, coaching, ce sont des métiers qui veulent apporter le bien physique ou mental à quelqu’un qui est dans le besoin. Un APA va plutôt suivre une personne qui est blessée d’une manière qu’on qualifiera de limitante. Alors que le coach, lui, va travailler avec quelqu’un qui n’a pas nécessairement de lésion, de blessure ou de gêne quelconque.

Juliette : Votre population cible, c’est une personne qui est en bonne santé. On s’entend sur le terme bonne santé. Ou qui veut améliorer sa santé, mais qui n’est pas dit pathologique.

Une approche santé et une approche performance

Juliette : Quel type de population draines-tu ici ?

Alexandre : Alors personnellement, je travaille principalement avec des personnes qui sont en recherche de santé. C’est Monsieur et Madame tout le monde, entre 30 et 55 ans et qui veulent améliorer leurs qualités de vie physique ou mentale. Elles sont liées, évidemment. Mais c’est principalement ces recherches là : perte de poids, prise de masse musculaire, reprise de l’activité physique. C’est mon pool de population. Et je travaille avec des collègues qui sont eux, axés un peu plus sur la performance. Là le but, c’est vraiment de rechercher la performance athlétique dans telle ou telle discipline.

Juliette : Donc chaque coach, va déterminer quelle est sa marge de travail.

Alexandre : Même si on se recoupe par rapport à nos activités. Notre demande principale, ici à Vevey, c’est la santé. C’est une prestation qui coûte. Elle est prise en charge par les assurances complémentaires parce que notre centre est reconnu Qualicert, mais c’est à hauteur de 200 à 1000 francs par année. C’est donc clairement limitant par rapport à ce que la physiothérapie, par exemple, peut être prise en charge.

Alexandre : À Crissier, dans notre deuxième centre, c’est Loan qui s’occupe principalement de tout ce qui est performance. Que ce soit des programmes d’entraînement ou alors un accompagnement de préparation physique, générale ou spécifique.

Juliette : La personne arrive et en fonction de ses besoins, vous la diriger vers telle ou telle personne. Ok, et toi tu prends monsieur et madame tout le monde, tu ne vas pas forcément vers la performance.

Alexandre : Si je ne suis pas légitime, si je ne connais pas le domaine ou si un collègue est plus spécifique dans ce domaine là, on va rediriger.

Juliette : D’où l’intérêt de travailler en équipe.

Un travail d’équipe au CST+

Alexandre : C’est en équipe, pas uniquement entre coachs, mais aussi avec les autres corps de métier qui travaillent dans ce centre.

Juliette : Ce qui est intéressant, c’est la communication entre les différents métiers. D’où l’intérêt de travailler coach et physio ensemble.

Alexandre : On a vraiment cette vision, de mettre la personne qui est en recherche de suivi, au centre. Et d’avoir nos compétences qui gravitent autour. Donc, on a principalement la physiothérapie à Vevey et à Crissier. Il y a aussi coaching sportif, massage, nutrition, puis psychologie du sport. Elle est aussi formée dans la préparation mentale pour les athlètes.

Juliette : Donc c’est assez global, axé santé et axé sport.

Préparation à la saison de ski

uliette : Toi, ton sport de prédilection, c’est quoi ?

Alexandre : À la base, le ski.

Juliette : Pour les skieurs, tu es tout bon, donc !

Alexandre : Je suis bon. Il y a aussi des collègues physiothérapeutes qui ont fait des sélections pour les JO à ski cross. Donc on est bien calés au niveau ski.

Juliette : La préparation au ski, ça a commencé ?

Alexandre : Ça a commencé, ça y est. Il faut s’y prendre en avance ! Ce sont des groupes, 1 à 2 fois par semaine, selon les demandes. Ces groupes ont pas mal de succès, car les gens prennent gentiment conscience que c’est une activité physique. Et qu’on doit s’y préparer avant, pour éviter les blessures, c’est l’objectif principal. Pouvoir prendre du plaisir lorsqu’on met les skis aux pieds. Et éviter ses premières journées avec des grosses courbatures. Ou alors simplement la peur de se faire mal et du coup avoir un peu moins de plaisir.

Pourquoi une préparation au ski ?

Juliette : Comment justifierai-tu cette nécessité d’une préparation physique avant le ski pour motiver les gens ? Beaucoup se disent non sédentaires, et pensent ne pas avoir besoin de préparation. Ils se disent que ça va aller et puis qu’ils ont skié toute leur vie et que tout va bien. Quels sont tes arguments pour leur dire, que c’est quand même super méga important plusieurs mois avant ?

Alexandre : J’ai envie de dire qu’on ne donne pas à boire à un âne qui n’a pas soif. Concrètement, si quelqu’un est persuadé qu’il est prêt physiquement et qu’il n’a pas besoin de cette préparation, je ne vais pas lui courir après et lui dire, « tu as besoin de cette préparation ». Je suis là volontiers pour aider si les gens ont des questions. Mais quelqu’un qui n’a pas envie de faire sa préparation ne va pas la faire. Ça, il faut le savoir. C’est un peu mon avis par rapport à ça.

Alexandre : Mais concrètement, quelqu’un qui est intéressé à faire sa préparation, quelqu’un qui peut être actif quand bien même, il court ou qu’il nage, ou va au fitness, et qui veut préparer sa saison de ski. L’aspect sur lequel je vais insister, c’est la spécificité du sport, surtout avec l’évolution du matériel ces dernières dizaines d’années. C’est vraiment un sport qui est très demandeur au niveau physiologique et du coup, il faut être prêt principalement pour éviter les blessures. Donc ça, c’est vraiment l’aspect que je mets en avant.

Juliette : Ce qui est certain, c’est que chaque sport a sa spécificité. Souvent, les gens vont avoir une hygiène de vie et/ou être sportif, courir un petit peu et ainsi de suite. Mais ils ne vont pas faire de renforcement spécifique par rapport à leur sport. Ils ne vont pas entretenir une musculature spécifique par rapport à leur sport. Et là ils ne comprennent pas pourquoi ils blessent. Il y a quand même des exercices spécifiques ou une orientation … aller faire du foot et que du foot … les footeux ne font pas que du foot au niveau professionnel. Donc le ski c’est la même chose.

Alexandre : Le ski c’est pareil.

Juliette : Et encore plus parce qu’il y a quand même la moitié de l’année où on n’en fait pas et en général, ils sont toute la journée dessus.

La course à pied et le ski de fond

Alexandre : On peut prendre comme exemple deux activités qui sont très similaires, la course à pied et le ski de fond. Ce sont deux activités qui se recoupent un peu. Concrètement, quelqu’un qui court régulièrement va pouvoir faire son activité de ski de fond sans trop de problème. On conseille quand même une préparation physique générale pour simplement les capacités physiques de la personne et améliorer les performances, si c’est ce qu’on cherche. Mais le ski de piste, il n’y a pas grand chose qu’on fait l’été d’une manière qu’on va dire volontaire qui ressemble à ces efforts là. C’est donc pour ça qu’on veut se préparer spécifiquement.

Combien de temps avant la saison de ski ?

Juliette : Combien de temps à l’avance ?

Alexandre : Idéalement, on se prépare, on va dire six, neuf mois à l’avance

Juliette : Six, neuf mois à l’avance !

Alexandre : Ça dépend de ce qu’on recherche de nouveau. Ce qu’on fait ici en groupe, c’est trois mois à l’avance. On commence en septembre en se disant qu’en décembre on aura les premières bonnes neiges pour pouvoir aller skier. Pour ceux qui ne vont pas chercher la neige sur les glaciers, s’il en reste … Du coup, ça permet d’avoir une adaptation physiologique, parce que c’est ce qu’on recherche avec l’entraînement. C’est vraiment cette adaptation là.

Avec l’entraînement, on cherche une adaptation physiologique.

Juliette : Oui, les trois mois, c’est le minimum pour avoir cette notion d’adaptation. Après, si on veut être performant dans le sport, c’est toute l’année.

Alexandre : Je vais vraiment faire tout du long de notre discussion la distinction entre les personnes qui recherchent le plaisir, la santé et puis les athlètes, ceux qui cherchent la performance. C’est vraiment deux publics différents.

Juliette : Deux populations avec un mental différent.

Alexandre : La manière d’aborder le suivi est vraiment très différente.

La demande récurrente des clients

Juliette : Au niveau de ta population au centre, quelle est la principale demande ? C’est toujours perdre du poids ?

Alexandre : C’est principalement perdre du poids quand même. Je dirais que c’est entre perdre du poids et simplement le bien-être. Le bien-être, ça coupe sur l’aspect physique, mental … Enfin, c’est vraiment très vaste.

Juliette : Plus des femmes, ou plus des hommes ?

Alexandre : Je dirais moitié moitié. On a vraiment un peu de tout. C’est la preuve justement que chacun en a le besoin et chacun en a envie surtout.

Une prise de conscience quant à l’importance d’une bonne forme physique et mentale

Juliette : Est-ce que tu as vu une évolution au niveau de la population ? J’entends par là, que pour moi dans la population, il y a deux catégories. Il y a une catégorie sportive qui souvent est très sportive. Et puis il y a la population sédentaire. On le voit aussi par rapport aux enfants qui sont de plus en plus sédentaires. Certains parents commencent à réaliser, en regardant leurs enfants, qu’eux-mêmes doivent se remettre en forme. Est-ce que toi tu as vu une évolution particulière ces dernières années ?

Alexandre : Je dirais que je n’ai pas assez de recul. Comme je l’ai dit, cela fait moins de dix ans que je fais cette activité. Ça change, certes, mais selon moi pas si vite que ça. La chose que j’ai pu constater, c’est plutôt la prise de conscience de la nécessité de la bonne forme physique et mentale pour pouvoir vivre tout simplement, mais vivre bien. Et j’ai l’impression que les gens prennent justement conscience de cette nécessité.

Nécessité de la bonne forme physique et mentale pour vivre bien !

Juliette : Est-ce qu’ils réalisent que la bonne forme physique entraîne la bonne forme mentale ? Moi j’irais surtout du physique vers le mental. Le mental va nous motiver pour travailler le physique. Mais j’aurais tendance à partir d’abord du physique. Simplement pour une notion de douleur. Une notion de douleur ou une notion d’handicap, ou une notion de limitation dans les mouvements. Quand tu n’arrives pas à monter le petit chêne, tu es essoufflé, moralement, c’est énervant. Donc moi je partirais vraiment du physique vers le mental.

Alexandre : C’est peut-être ton côté physiothérapeute qui te biaise un peu.

Juliette : Certainement.

Alexandre : J’ai aussi justement une population de personnes qui sont, en apparence en bonne forme mais qui veulent simplement se sentir mieux. Et ça effectivement, parfois ça peut commencer par le mental aussi. Mais je te rejoins, c’est quand même le physique en général. En tout cas, les personnes qui viennent veulent d’abord changer leur physique pour avoir un impact sur leur mental. Même s’ils communiquent des objectifs de bien-être avec un impact sur leur mental. C’est par le physique qu’ils espèrent en tout cas pouvoir atteindre ce changement.

Un changement physique ou un changement esthétique ?

Juliette : Quand ils veulent changer leur physique, c’est l’esthétique ou c’est une notion de santé ? Dans le sens ou l’esthétisme extérieur n’est pas forcément représentatif de notre forme de façon générale et de notre santé. Il y a des gens qui à l’heure actuelle, avec les réseaux sociaux et surtout chez les jeunes qui sont très dans l’esthétisme. Je pense que c’est un peu une erreur, mais…

Alexandre : Ça, c’est vraiment challengeant. Parce qu’effectivement il y a une sorte d’attente ou de pression sociale sur à quoi on devrait ressembler pour être bien, pour être sain. Alors que c’est vraiment biaisé. Principalement par les médias comme tu dis, les réseaux sociaux. Les personnes qui viennent avec cette demande de volonté de perte de poids, ont une conviction que c’est ce qu’il faut atteindre pour être bien. Ça, c’est quelque chose qui est très difficile à changer. Malgré tout, c’est quand même notre job à nous, de pouvoir leur faire prendre conscience que ce n’est pas avec un certain poids, un certain seuil de poids à atteindre que tu seras mieux.

Alexandre : C’est pas avec une certaine apparence que tu seras mieux. C’est vraiment une continuité. Et d’une manière générale, j’ai vraiment l’habitude de dire que c’est un spectre sur lequel tu vas vouloir jouer. Et c’est pas des boîtes dans lesquelles tu vas passer de l’une à l’autre. C’est vraiment très difficile d’avoir quelqu’un qui vient et qui demande, « je veux atteindre un certain poids, je veux ressembler à telle ou telle personne » et d’essayer de lui faire comprendre que ce n’est pas nécessairement que ça sur lequel on va pouvoir travailler.

Juliette : Et que ça ne marchera pas forcément. Je veux, le six pack, … anatomiquement, certains ne l’auront jamais.

Alexandre : Pour l’avoir expérimenté, que ce soit personnel ou des personnes autour de moi, ce n’est pas nécessairement en ayant un six pack qu’on est vraiment mieux dans sa peau.

Un rôle d’accompagnant nécessitant une certaine empathie

Alexandre : Après, selon moi, le rôle de toute personne qui va accompagner ce genre de personne, c’est de réussir à comprendre le pourquoi et de réussir à creuser. D’où l’aspect on va dire émotionnel du coach qui est selon moi, le rôle principal d’un coach, d’un physio, est de réussir à creuser. Pourquoi est-ce que tu as envie d’atteindre cet objectif ? Qu’est ce qui fait que tu veux changer ?

Juliette : Oui, il faut avoir une certaine empathie. Ça reste des rapports humains. Donc c’est trouver les petites choses pour faire évoluer sans cultiver des traumas, des…

Alexandre : Des frustrations, des manques.

Juliette : Je le vois sur certains patients ou même l’entourage, selon notre génétique, selon notre anatomie de base, il y a des morphologies qu’on ne va pas pouvoir changer. Je me souviens d’une patiente qui était obèse, c’était visible, c’était quantifié. On parlait justement de tout ce qui est le travail, de la sangle abdominale, au niveau du gainage, de la stabilisation du bassin. La première phrase qu’elle m’a dit : Ah mais moi je n’ai pas d’abdominaux ! Leur faire comprendre qu’ils ont des abdominaux, sinon ils pourraient pas tenir debout. C’est bizarre, mais rien que ce petit déclencheur là, ça l’a fait évoluer dans son état d’esprit. En réalisant qu’elle était une personne comme les autres, qu’elle avait une anatomie qui était déjà très forte, qu’elle ne deviendrait jamais hyper fine. Que c’était sa morphologie, mais en même temps, elle peut être très très ronde et en même temps en santé, à peu près en santé. En tout cas en pleine forme. C’est pas toujours évident de leur faire leur faire admettre ça.

Alexandre : Je pense que c’est le challenge principal qu’on rencontre vraiment. De réussir à casser ces mythes.

Comment se fait le suivi avec Alex ?

Juliette : Quand ils ont une demande de perte de poids, est-ce que tu les pèse ? Est-ce que vous avez des objectifs particuliers ? Comment quantifies-tu l’évolution ?

Alexandre : C’est une bonne question. On a effectivement. En fait, je vais peut être raconter comment on fait le suivi d’une manière progressive pour comprendre et venir sur ce point là.

Juliette : Comment fais tu ton suivi, Alex ?

Alexandre : En gros, si quelqu’un vient pour pour avoir un suivi de coaching, on va évidemment, après l’avoir guidé vers la bonne personne, procéder à un premier questionnaire en ligne pour avoir une sorte d’anamnèse rapide avant même de rencontrer la personne. Et lors du premier rendez vous, on a déjà ces informations qui vont nous guider sur la discussion de l’objectif, essayer de comprendre ce qu’il veut atteindre et puis comprendre d’où il part aussi.

Juliette : Au niveau du questionnaire, est-ce que tu peux nous dire les thématiques ?

Alexandre : ll y a tout ce qui est lié à l’activité physique, tout ce qui est lié à l’hygiène de vie, la nutrition. Les objectifs qui veulent atteindre. S’ils ont des restrictions physiques, alimentaires. S’ils ont déjà suivi un tel type de coaching. On essaie d’avoir un maximum d’informations qui peuvent impacter notre suivi.

Juliette : Le sommeil, le stress, …

Alexandre : Sommeil, stress, l’hydratation, alcool, fumer…

Juliette : C’est une jolie anamnèse qui permet d’avoir un joli départ.

Alexandre : Et puis une fois qu’on a ces informations là, on va en s’asseyant face à la personne, discuter, comprendre pourquoi il y a des changements qui veulent être faits.

Alexandre : Et puis j’en viens à ce point, où on veut évidemment savoir comment mesurer ces changements. Comment est-ce qu’on va pouvoir quantifier si oui ou non on se dirige dans la bonne direction. Et ça, il y a plusieurs manières de faire. Évidemment, c’est dépendant de l’objectif de la personne. Il y a des manières anthropométrique, que ce soit une pesée. Je n’aime pas du tout l’appeler comme ça, c’est horrible. Mais c’est une balance bio impédance multi fréquences et qui permet d’estimer… J’insiste, c’est vraiment une estimation, de la composition corporelle, masse grasse, masse musculaire. Le chiffre en tant que tel, sera très peu important. C’est l’évolution de ce chiffre qui sera déterminant.

Juliette : Vous cherchez un chiffre pour voir après par la suite.

Alexandre : Ça reste un seul indicateur. Et de nouveau c’est un indicateur. Ce n’est pas là-dessus qu’on va se baser. C’est simplement pour voir si ça corrèle aux autres changements que la personne perçoit. Par rapport à son bien être, son sommeil, son énergie, la progression en salle. Donc il y a cette mesure anthropométrique, il y a un tour de taille, tour de hanche. C’est très rare qu’on le fasse parce que c’est vraiment intrusif pour une première rencontre. Mais sinon il y a aussi des tests, des bilans en salle. Les bilans en salle, c’est pouvoir mesurer et quantifier un manque de mobilité, un manque de flexibilité sur certains mouvements et puis simplement la bonne qualité de certains autres mouvements pour certifier justement la possibilité de faire un suivi correct.

Juliette : Au final, tu leur fais faire des exercices et tu regardes s’ils sont limités ou s’ils ont une difficulté de coordination ou de contrôle du mouvement. Ou ce genre de chose.

Alexandre : Exact, mais principalement dans le but de sélectionner des exercices correctifs pour pouvoir les amener vers un mouvement correct. Et puis de pouvoir aussi être sûr d’éviter les blessures. Sélectionner les bons exercices adaptés pour eux.

Juliette : C’est déjà arrivé, je pense que vous ayez des clients qui se blessent ? Pas forcément en salle avec vous, mais à l’extérieur, parce qu’ils ont l’impression que ça va super bien et ils en font un peu trop.

Alexandre : Clairement, des entorses, des chutes. Ça c’est principalement imprévisible, mais des entorses, ça peut arriver. Indirectement, c’est clair qu’on va se remettre en question. Est-ce que j’ai fait juste ? Est-ce que j’ai fait ça dans le bon ordre ? Mais il y a certaines fois où c’est difficile d’avoir un impact aussi sur ce qu’ils font en dehors.

Combien de séances par semaine, et sur combien de temps ?

Juliette : Tu les vois combien de fois par semaine ?

Alexandre : Ça varie vraiment. Le suivi qu’on propose, c’est entre une fois toutes les deux semaines et trois fois par semaine. On essaie vraiment de recommander de faire un suivi de minimum trois mois, pour pouvoir intégrer ces changements et puis les accompagner, au moins pour pouvoir mettre en place ces changements. Et puis après c’est à la demande. On est vraiment flexible par rapport à ça, mais c’est ce qu’on conseille.

La place du coaching mental. L’aspect humain d’un coach

Juliette : Pour moi, le coaching sportif ou santé, ça inclut aussi le coaching mental, à partir du moment où on est d’humain à humain ? Mais est-ce que ça t’arrive de faire vraiment une séance où c’est vraiment du coaching mental ?

Alexandre : Ouais, c’est une séance psychothérapie presque.

Juliette : On est des accompagnants donc de toute façon on est dans le contact.

Alexandre : Alors je marche pas sur un terrain qui n’est pas le mien. Mais simplement d’avoir une oreille tendue et de pouvoir écouter ce que les gens ont à dire. C’est ce qu’ils recherchent parfois. Et comme je l’ai dit tout à l’heure, cette partie humaine et émotionnelle pour moi, est plus grande que la partie coaching, dans ce que je fais. Cette partie humaine et psychologie, elle est très grande dans le coaching, parce qu’on a besoin de pouvoir écouter la personne, et on a besoin de pouvoir être là pour pouvoir comprendre ce qui est ressenti.

Juliette : À partir du moment où elle va se sentir en sérénité ou en confiance, elle va communiquer avec toi. Et en communiquant, toi, indirectement ou inconsciemment, tu vas de toute façon changer ton programme. Quelque part, c’est le client qui te fait aussi évoluer le programme.

Alexandre : C’est une évolution constante. C’est un échange. On essaie de chercher des solutions ensemble. Concrètement, l’objectif du coach, c’est de se mettre à la place de l’autre. Et d’essayer de ressentir, ce qu’il ressent les frustrations, les difficultés. Les anticiper si possible pour pouvoir aller de la manière la plus rapide vers son objectif.

Intérêt du coaching privé ou semi-privé

Juliette : C’est quand même l’énorme différence avec les programmes où en fait il y a personne en face. Lorsque tu choisis un coach, que tu es d’humain à humain et que tu as une communication, … Je pense que tu as certainement des programmes qui sont clairs dans ta tête. On a toujours des lignes directrices. Mais tu adaptes par rapport à ce qui a été dit dans la séance. Tu ne donnes pas simplement un papier.

Alexandre : Exact. C’est cette adaptabilité là qui est vraiment différente. Il peut y avoir d’excellents programmes en ligne. Si la personne est autonome, régulière, rigoureuse, il n’y a pas de souci. Le programme pour autant qu’il soit adapté pour toi. Si tu peux faire les entraînements, il va te mener en direction de l’objectif.

Juliette : Après c’est toujours pareil, il faut avoir les compétences pour pouvoir juger. Et pas simplement se dire je prends le programme et j’y vais. Il faut avoir un peu de recul sur le programme pour essayer de soi-même adapter. Et si on se rend compte qu’on n’y arrive pas, soit par manque de connaissance, soit par manque de motivation, dans ces cas là, il faut se diriger vers le coaching privé.

Alexandre : Et le coaching privé, ça peut être seulement certaines séances qui permettent de comprendre nos besoins, de savoir avec ses tests et ses mesures, de quoi on est capable, et où est-ce qu’on veut aller. Quelle est l’évolution que je dois faire ? Il y a des tests physiques aussi qui peuvent être faits. Pour la performance, si il y a une volonté de test d’effort, une volonté de tests maximaux pour des mouvements spécifiques. Ça, c’est le genre de choses qu’on peut faire aussi. Mais de nouveau, le coach qui sera à côté pendant le programme et qui propose ce suivi là, il va pouvoir adapter.

Alexandre : Et pour le client, on va dire santé. Le principal challenge, ce sera de trouver et de comprendre ce qu’il a besoin, la forme du moment et de savoir s’adapter aussi par rapport à son stress et ses besoins aussi au niveau privé. Tout ce qui se passe autour en fait. Donc on a beau lui programmer un entraînement de A à Z pour les six prochains mois, on sait que rapidement, il aura un enfant malade, il va partir en vacances, … Donc ce n’est pas la même chose qu’un athlète.

Juliette : C’est ça qui est intéressant, ça reste pour moi, un investissement où vous donnez de l’éducation aux patients, clients. Investir dans du coaching privé, ça permet aussi de s’éduquer pour après, par la suite, soit perdurer parce qu’il y a quand même une motivation qui est donnée par le coach, soit partir sur des programmes qui sont tout faits. Mais là, le patient est là, il a ce recul pour pouvoir l’adapter.

Alexandre : C’est juste.

Juliette : C’est intéressant de commencer par du coaching privé pour ensuite éventuellement se débrouiller seul. Car ça reste un investissement financier.

Alexandre : Un investissement financier, ça c’est clair. Après, comme tu le dis très bien, c’est vraiment une trousse à outils qu’on va pouvoir donner et développer avec le client. L’objectif, il est atteint pour nous en tant que coach, si quelques mois, semaines, années après, le client, il vient vers nous, et nous dit : écoute, j’ai tout ce qu’il me faut pour pouvoir continuer tout seul. On est ravi. On est ravi de pouvoir dire qu’on lui a transmis tout ce qu’il fallait pour continuer.

Juliette : Parce que à la limite, il reviendra plus tard. Si justement il est tombé malade et que là, il a de nouveau besoin, …

Alexandre : Ou lui qui recommande à quelqu’un qui en a le besoin.

Juliette : Et puis il y a cette notion au niveau mental. Être accompagné, avoir quelqu’un qui vous surveille, qui vous force aussi un peu à faire les choses, parfois on en a besoin. Ça dépend des caractères de chacun.

Alexandre : Ça dépend des caractères. Mais on pourrait selon moi, tous bénéficier d’un coach. Alors je dis coach, mais c’est très général, ça peut être un préparateur physique si on a des objectifs de performance. On pourrait bénéficier, chacun d’entre nous d’une personne qui nous suit.

Juliette : C’est sûr.

Alexandre : Moi le premier. Je m’entraîne, je suis rigoureux. Ça fait dix ans que je m’entraîne, trois fois par semaine au moins, mais je serai le premier à en avoir le bénéfice.

Juliette : Beaucoup de coachs disent que pour être un bon coach, il faut aussi savoir se faire coacher. Et la même chose dans beaucoup de professions. Simplement parce qu’on n’a pas le recul. Si on reste enfermé dans notre bulle, on n’a que le retour de nos clients ou de nos patients. Et en général, ceux qui restent, ils nous aiment bien. Donc il faut savoir un peu sortir de cette bulle, pour voir ce qui se passe un petit peu ailleurs.

Alexandre : C’est juste.

Une demande originale d’un client !

Juliette : Est-ce que tu aurais une anecdote, le truc le plus fou qu’on-t-ait demandé ?

Alexandre : Bon, au delà des demandes, je veux ressembler à X en citant un acteur et en montrant une photo. Ça, ça peut arriver. Mais j’ai eu, une personne qui m’a demandé un coaching pour être plus en forme physiquement, parce qu’il voulait avoir de meilleures performances au lit.

Juliette : J’adore. Qu’est ce que tu as répondu ?

Alexandre : Je suis quelqu’un de très neutre.

Juliette : Après, on peut comprendre. Moi je trouve ça assez courageux de venir avec cette demande là. Je trouve ça très bien.

Alexandre : J’admire, et je suis quelqu’un qui ne juge pour ainsi dire, tant que je peux ne pas le faire, je ne le fais pas. Donc j’écoute et puis je vais dans son sens.

Juliette : Donc tu as dit on va travailler le cardio.

Alexandre : On va travailler ce que tu as besoin de travailler, dis moi là où ça pèche.

Juliette : Alors après, il y a des aspects physiques, mais il y a quand même toute la zone périnéale pour les hommes, elle se travail aussi, si jamais.

Alexandre : Oui, ça c’est pas ma spécialité. J’ai l’avantage d’avoir quelqu’un qui travaille là-dessus dans le centre.

Juliette : C’est juste un petit message pour les hommes. Oui, il y a l’aspect physique, maistout ce qui est périnéale, ce n’est pas que pour les femmes. Et c’est très important pour la vie sexuelle. Dirigez-vous vers mes collègues qui font les hommes, moi je ne fais pas de rééducation pelvipérinéologique chez les hommes.

Juliette : Je ne suis pas sûr qu’au niveau physio, si on a un patient qui arrive et qui nous fait cette demande, … je sais pas en fait. Moi j’ai décidé de ne pas faire de périnée chez les hommes. Mais ce sont des demandes tout à fait louables. Après tous les troubles sexuels quels qu’ils soient, il y a toujours des choses a faire.

Alexandre : Il y a des spécialiste pour ça. Je ne le suis pas. Après, là en l’occurrence, c’était ses capacités physiques on va dire …

Juliette : Ok, fatigué lol.

La peur de devenir trop musclé

Juliette : Qu’est-ce que tu réponds aux gens, qui ne veulent pas faire de musculation simplement par peur de devenir trop musclé ?

Alexandre : C’est un bon sujet aussi.

Juliette : C’est beaucoup, les femmes. Je ne veux pas porter de charge parce que après je vais avoir des gros bras, des grosses cuisses …

Alexandre : Je vais ressembler à Arnold, … En général la phrase type, c’est vraiment, on ne devient pas musclé par hasard. Quelqu’un qui s’entraîne pour pouvoir être pilote, il va devoir conduire et conduire souvent. Quelqu’un qui s’entraîne pour être cycliste pareil. Donc c’est pas en faisant de temps en temps 1 h de vélo qu’on va pouvoir faire le Tour de France. Donc concrètement, ce n’est pas possible de se muscler par hasard. Il y a effectivement des génétiques qui font qu’on devient musclé plus rapidement que d’autres.

On ne devient pas musclé par hasard.

Juliette : Et plus dessiné.

Alexandre : Plus dessiné, par rapport aussi à son pourcentage de masse grasse qu’on a sur le moment ou simplement par rapport à son passé sportif aussi. Mais en général ça n’arrive pas par hasard.

Juliette : Donc on peut rassurer les gens en disant, vous pouvez porter de la charge, vous n’allez pas finir trop musclé.

Alexandre : Il faut porter de la charge.

Pourquoi est-il important de porter de la charge ?

Juliette : Pourquoi faut-il porter de la charge?

Alexandre : Ça, c’est une bonne question. On a besoin réellement d’avoir un entrainement de renforcement. Je dis on, c’est vraiment la population générale, pour la bonne santé. Autant musculaire évidemment, mais tout ce qui impacte aussi l’entraînement. Tout ce qui est autour de l’entraînement. Donc, là, je parle de santé plus de manière plus générale. Ça va avoir un impact sur le sommeil, sur les hormones, pour réguler aussi le stress, la fatigue, la faim. Ça a énormément d’impact sur la bonne santé articulaire aussi, la digestion, … Ça a vraiment énormément d’impact sur la vie d’une manière générale.

Alexandre : Donc rien que le fait d’avoir un entrainement de renforcement et ne pas faire uniquement que du cardio, je dis pas que le cardio n’est pas bon, à l’inverse, c’est vraiment complémentaire, mais c’est vraiment essentiel.

Juliette : Alors c’est ça, il y a beaucoup de gens qui font des sports d’endurance, qui ne veulent pas faire de musculation, parce qu’ils ne veulent pas prendre de poids … Donc, comme on disait, on ne va pas forcément prendre de la masse du jour au lendemain.

Alexandre : Alors de un, il y a ça, et de deux, on peut éventuellement prendre un peu de masse, pour autant qu’elle soit spécifique à l’activité physique. Un coureur qui veut courir plus vite, il peut être plus performant en prenant un ou deux kilos de masse musculaire au niveau des fessiers, des mollets, des muscles qui lui permettent d’être plus performant.

Juliette : C’est vraiment cette notion de biomécanique. Les deux sont complémentaires. Et après c’est à savoir si la personne veut une spécificité particulière.

Alexandre : C’est plutôt ça, c’est l’aspect spécifique. Quel est ton objectif concrètement ? Si ton objectif c’est de courir plus vite, on va faire en sorte aussi à la salle de faire en sorte que tu cours plus vite.

Juliette : Après, pour moi, il y a aussi cette notion d’essayer de faire comprendre aux gens que le muscle doit se contracter, se relâcher, se contracter, se relâcher. Qu’il y a un système de pompage quoi. Comme notre cœur, il fonctionne, nos muscles doivent aussi fonctionner. Et la majorité des gens ont quand même des métiers sédentaires. Et même quand on est dit un peu sportif, on reste quand même un petit peu sédentaire. On a besoin d’activer toute cette pompe. Il n’y a pas que le cœur qui doit travailler. Je leur dis souvent 1 h de sport ne va pas compenser vos 8 h au bureau.

Juliette : Donc, il n’y a pas de stress sur la quantité de sport que vous allez faire. Il faut quand même charger le corps pour le stimuler. Parce qu’il est pour moi, de toute façon, chez la majorité des gens, pas assez stimulé.

Alexandre : Par rapport aux besoins ?

Juliette : Par rapport aux besoins, même sur des métiers physiques.

Alexandre : Il y a cet aspect là. Il y a de nouveau l’aspect de santé général, comme tu l’as dit d’une manière physiologique. Concrètement, on est souvent sédentaire ou pas, mais on est souvent dans la même position qu’on soit assis au travail, même si on fait un métier physique, on travaille dans une position qui est souvent la même. Du coup, le renforcement musculaire va faire en sorte de compenser ces inégalités, d’éviter des blessures sur le long terme, de pouvoir aussi prolonger son espérance de vie.

Juliette : C’est exactement ça, comme tu dis, cette notion de ces inégalités qui se mettent en place. Parce que même si on est maçon, même si on est physio, qu’on fait beaucoup de manuels, .. les coach sportif, c’est un peu différent. Mais globalement, il faut faire de l’activité pour compenser tous les déséquilibres. Parce qu’en fait, la majorité du temps, on fait les mêmes mouvements, on ne les fait pas forcément bien et même si on les fait bien, on fait toujours les mêmes mouvements. Donc l’activité physique va te permettre d’entretenir une certaine mobilité et la musculature que tu ne travailles pas forcément. C’est tout un ensemble.

Le travail avec les élastiques

Juliette : Le travail avec les élastiques. Tu commences avec les élastiques ou qu’est ce que tu fais avec les élastiques ?

Alexandre : Qu’est ce que je fais avec les élastiques ?

Juliette : Parce qu’il faut porter de la charge. Oui, mais c’est vrai que les élastiques, ça reste intéressant et surtout au départ. Toi, qu’est ce que tu en penses ?

Alexandre : Je vais peut-être déjà expliquer la différence entre un exercice avec élastique et un exercice avec charge. On va dire un Dumbbells, une barre. La différence concrète, c’est la résistance qui va être progressive selon la tension qu’on met dans l’élastique. Donc pour un tel type de mouvement, on peut trouver plus de tension dans un bout de course, dans un bout de mouvement, dans une amplitude un peu plus grande que lorsque l’amplitude est plus faible. Et ça, ça peut être intéressant justement pour pouvoir mettre plus d’accent là où le mouvement est plus fort que là où il est le plus faible. Donc d’avoir une tension qui est croissante par rapport à la capacité du muscle qui est croissante aussi. Ça, c’est la principale différence.

Alexandre : La deuxième chose que je mettrais en avant, et c’est plutôt là-dessus que moi je m’axe pour les personnes qui recherchent la santé. C’est la praticité de l’élastique. Si on veut s’entraîner à la maison, on n’a pas besoin d’avoir tout un panel de dummbell, de barres et de poids. On peut s’entraîner simplement avec trois, quatre, cinq élastiques différents. On peut faire un travail qui est correct avec ça.

Juliette : L’élastique reste quand même de la charge, donc ça reste intéressant. Après, c’est vrai qu’on peut retrouver avec l’élastique pas mal de mouvements fonctionnels qu’on retrouve dans la vie quotidienne. Ce qui ne veut pas dire que porter une barre ce n’est pas fonctionnel, c’est très fonctionnel.

Alexandre : On peut simplement faire les mêmes exercices aussi entre un élastique et une barre. Il y a vraiment beaucoup de choses qui peuvent être faites. Le muscle ne va pas faire la différence, si tu as dans la main un élastique ou un poids. Le muscle va simplement savoir quelle charge ou quelle force il doit mettre et quelle quantité de fibres il doit contracter pour faire ce mouvement. Et du coup, si tu arrives à contracter suffisamment de fibres avec ton élastique, l’entraînement va être similaire que si tu avais un poids dans la main. L’aspect de l’élastique, c’est que tu dois être peut-être un peu plus créatif pour pouvoir comprendre où est-ce que tu mets ta résistance, où est le point d’attache et dans quelle direction tu vas faire le mouvement. Alors que les exercices de poids, c’est la gravité qui fait l’effet.

Juliette : Donc comme tu dis, il faut être plus créatif. Avec le poids, c’est à la limite plus simple. Je soulève, je connais à peu près le mouvement, je contrôle le mouvement. Parfois c’est même un peu piège. Je voyais par exemple des jeunes papas qui allaient à la salle, qui avaient des gros biceps et qui me disaient ne pas réussir à tenir leur fils dans leur bras. En fait, ils n’étaient pas tellement fonctionnels, parce qu’ils répétaient toujours le même mouvement à portée de la charge, mais au quotidien, ça n’allait pas.

Alexandre : Oui, ils portaient 8 fois, 10 fois, avec des grosses charges et quand il faut porter son bébé 20 minutes pour le nourrir, ce n’est pas le même effort.

Juliette : C’est ça !

Le gainage

Juliette : C’est ce qu’on retrouve aussi par rapport au ski où il y a quand même du travail de gainage, l’aspect statique. Beaucoup de mes patients me parle de gainage. Alors ce n’est pas que je n’aime pas le gainage, j’aime le gainage dynamique. Et comme je leur explique, on arrive en saison, on espère de ski, le gainage statique, c’est important. Donc c’est des choses différentes.

Alexandre : Pour expliquer un peu les différents types de gainage qu’on a. Comme tu l’as dit, il y a le gainage dynamique mais d’abord statique. Donc le but c’est vraiment de faire en sorte que le tronc, la position du corps ne bouge pas contre une certaine charge ou une certaine résistance, que ce soit en rotation, en flexion latérale, en flexion. L’objectif, c’est de rester statique. A l’inverse, tu as justement tout l’opposé, contre une certaine résistance ou une charge, tu veux bouger. Tu veux créer ce mouvement là et le contrôler, et renforcer ces muscles là. Donc ces deux aspects sont vraiment complémentaires. De nouveau, selon la spécificité du sport.

Alexandre : Un lanceur de javelot, il va devoir étirer sa musculature avant de la contracter d’une manière très vive. Un skieur, il va devoir stabiliser son tronc. Le but, c’est de rester aussi stable que possible avec les membres inférieurs qui bougent d’une manière vive et précise. Donc effectivement, le gainage statique, il serait intéressant et surtout en déséquilibre avec des composantes externes qui viennent perturber cette posture statistique.

Juliette : C’est pour ça que c’est intéressant. Toute l’année, on devrait s’entraîner en fonction des objectifs, de l’instant. On s’entend sur la notion de temps. Je vais bientôt aller skier. Je sais que moi je n’aime pas le gainage statique. Mais je suis en train de commencer le gainage statique. Il faut s’adapter. Et avoir un accompagnant, que ce soit un physiothérapeute ou un coach ou un préparateur physique, ou un APA, ça permet aussi aux gens d’acquérir ces connaissances là. Et de savoir que toute l’année, on n’est pas obligé de faire tout le temps les mêmes exercices. Et que parfois c’est intéressant de comprendre que tels exercices sont peut-être mieux avant l’été, mieux avant l’hiver. Et de varier.

Alexandre : Comprendre pourquoi on fait tel ou tel exercice, c’est surtout ça.

Juliette : Comprendre pourquoi en fait, c’est toujours l’aspect éducationnel du patient.

Est-ce qu’un coach est vraiment nécessaire ?

Alexandre : On en revient au fait de : Est-ce qu’un coach est vraiment essentiel ? Je l’ai dit avant, tout le monde pourrait bénéficier d’un coach, certes. Mais au.delà de l’aspect motivationnel, il y a aussi la connaissance. Personnellement, en tout cas, je suis persuadé que sur Internet, l’ordinateur a beaucoup plus de connaissances que nous, des bonnes comme des fausses. Mais concrètement, on trouve toutes les informations qu’on veut sur internet. Donc si tu t’informes correctement et tu sais quoi chercher, tu vas les trouver les informations sur le net. Donc tu vas savoir quels exercices il faut faire. Après, est-ce que c’est adapté pour toi ? A toi de savoir comment juger ça.

Juliette : Je pense que le plus gros problème il est là. Parce que les informations, on peut les trouver. La première difficulté, c’est est-ce que j’ai un minimum de bagage pour pouvoir juger ces informations ? Et la deuxième difficulté, c’est est-ce que j’ai suffisamment de recul sur moi-même pour connaître mes capacités. L’exemple type par exemple l’exercice superman, il y a toujours quelqu’un au départ qui va venir te corriger. Un autre exemple, c’est le fitness avec le miroir. Je me regarde dans le miroir pour voir si mon dos est droit. Et bien, en regardant, il ne l’est plus.

Juliette : C’est intéressant d’avoir quelqu’un qui va toucher, qui va t’expliquer. Cette notion proprioceptive, elle n’est pas forcément évidente à acquérir déjà à la base. Donc si la personne elle a zéro connaissance au niveau sportif et qu’elle n’a pas l’habitude, se lancer directement, elle va avoir les infos, faire les exercices correctement, c’est encore autre chose.

Alexandre : Alors clairement là, je vais plus insister sur l’information. Quels exercices faire, pour quels objectifs, comprendre pourquoi, ça on peut le savoir. Mais effectivement, le feedback externe qu’un physio, un coach ou un préparateur physique va donner sur une personne, c’est tout ce qu’il y a en plus de quand on est seul.

Juliette : Après, il faut que ça soit des petits groupes ou que ça soit en privé.

Alexandre : Oui, si on se retrouve dans une masterclass avec 200 personnes et l’instructeur sur la scène, …

Juliette : Des fois, c’est le reproche que certains font au coach en disant : il ne m’a pas corrigé. Vous étiez combien ? On était une vingtaine. Il ne peut pas corriger tout le monde. On m’expliquait aussi que lorsqu’on se retrouve dans des grands fitness, le problème c’est que les clients restent des clients et beaucoup n’aiment pas qu’on les corrige. Donc si vous voulez vraiment que le coach ou que la personne en face ait un regard pas critique, mais qu’elle vous accompagne réellement et qu’elle vous corrige, il faut faire du privé ou du semi-privé, je pense.

Alexandre : Ou déjà demander, même dans un fitness.

Juliette : Oui, à la limite aller communiquer en disant corrige moi si besoin, il n’y a pas de problème. C’est un message intéressant à faire passer. Parce que pour avoir côtoyé certains coachs qui étaient dans les fitness, ils me disaient, j’en ai corrigé plein et après j’avais le droit à des critiques.

Alexandre : Les fitness, c’est un lieu qui est très difficile dans le sens où il y a tous les profils. Enfin tous, je n’aime pas utiliser les extrêmes, il y a énormément de profils différents et c’est vraiment difficile de savoir qu’est-ce qu’on doit dire, à qui on s’adresse. Et pareil pour les personnes qui viennent s’entraîner. Est-ce qu’on va me juger ? Est-ce qu’ils vont regarder comment je m’habille ? Il y a énormément de peur par rapport à l’environnement et je le comprends totalement. Mais pour rassurer un peu tout le monde, pour avoir longtemps côtoyer des fitness, c’est quand même un lieu où principalement les gens s’occupent d’eux-mêmes. D’autant plus maintenant avec la musique, les réseaux sociaux, les personnes qui s’entraînent sont sur leur téléphone entre leurs séries. C’est à déconseiller, mais c’est souvent ce qui se passe. Donc ils sont dans leur bulle, ils font leur entraînement et ils repartent. Alors certes, il y aura toujours des personnes qui recherchent des contacts, qui ont des regards mal placés ou des commentaires mal placés. Ça peut arriver, mais comme partout on va dire. Je pense que c’est plutôt un lieu, où il faut éviter de se dire on sera jugé, il ne faut pas avoir peur d’aller dans des endroits comme ça.

Juliette : Il faut prôner la bienveillance, et puis tout le personnel qui travaillent dans les fitness, allez les voir avec le sourire, ils sont là pour ça. Si vous arrivez avec le sourire, je pense que tout se passe bien. Si vous arrivez un peu agressif pour X ou Y raison, ce n’est pas la même chose …

Alexandre : Comme partout. Après, ce n’est pas forcément adapté pour tout le monde. On a beaucoup de demandes ici, de personnes qui veulent éviter ces endroits qui sont bondés ou ces endroits où il y a trop de bruit, trop de personnes qui crient, qui lâchent des poids. Je peux comprendre aussi, ça dépend de ce qu’on recherche. Pareil pour les CrossFit. Je trouve le concept génial, mais ce n’est pas adapté pour tout le monde.

Juliette : C’est toujours la même chose à savoir comment ça fonctionne. Certains CrossFit ou même par exemple les cours Pilates, demandent de faire des cours privés avant de pouvoir intégrer les groupes. Et en fait ça serait idéal. Et je pense que ce soit pour les box de CrossFit ou les cours Pilates, c’est l’idée de départ. Sauf que les gens se plaignaient, car c’est un investissement financier. Donc a un moment, … il y a quand même énormément de concurrence dans tous ces domaines là.

Alexandre : Il y a un aspect business aussi.

Juliette : Et parfois, je pense, qu’ils ne peuvent pas forcément toujours se permettre de forcer les gens à payer deux ou trois séances privées, parce qu’ils perdent des clients. Moi, c’est ce que je prône auprès des patients, en disant Pilates, ils vont vous demander une deux sessions privées, mais c’est vraiment la base qui va vous permettre de bien travailler et de comprendre après pourquoi elle vous corrige et comment ça se passe. Donc le petit investissement financier, il n’est pas perdu.

Alexandre : Oui, clairement.

Juliette : Après, il faut avoir le feeling avec l’intervenant. Si vous n’avez pas le feeling, vous devez changer ?

Alexandre : On revient sur le côté humain, ça c’est clair. Mais comme partout, je sais que je ne peux pas plaire à tout le monde et vice versa. Il en faut.

Juliette : Il en faut pour tout le monde.

Alexandre : Exact.

La nutrition

Juliette : Au niveau nutrition, est-ce que toi tu as des conseils en particulier ? Qu’est ce que qu’est-ce que tu observes chez tes clients ?

Alexandre : Disclaimer, moi je ne suis pas nutritionniste. Donc ce n’est pas mon domaine. J’ai certainse notions sur la nutrition de base. Mais du moment qu’il y a des questions qui viennent à moi par mes clients, je redirige directement vers notre nutritionniste. Patrick Gianola, lui il est full formé pour ça, et du coup ça me permet d’avoir toute cette crédibilité envers lui. Après, par rapport aux demandes ou par rapport au suivi, ça m’arrive de simplement conseiller. Le plus récurrent malgré tout, surtout en discutant avec Patrick, c’est déjà l’équilibrage au niveau des macro-nutriments, on va dire la base de la nutrition. Macro-nutriments, tout ce qui est protéines, lipides et glucides. Il faut avoir un équilibre qui te permette de pouvoir survivre. Certains, je ne sais pas comment ils tiennent debout. Parce qu’il faut avoir ces apports que le corps est incapable de produire. Il faut le manger et ça c’est essentiel. Après tout ce qui est justement micro nutrition, ça je ne suis pas spécialiste donc je ne vais pas en parler.

Juliette : Est-ce que tu vois beaucoup de troubles alimentaires ?

Alexandre : Ça m’est arrivé d’en voir. Pareil, je redirige directement, car je ne suis pas spécialisé pour gérer ça. En général c’est quelque chose où il faut avoir l’œil pour le déceler. Quelqu’un ne va pas venir vers toi et dire j’ai des problèmes de boulimie ou d’anorexie. Donc il faut plutôt avoir des radars qui sont capables de déceler ce genre de comportement.

Juliette : Il y a vraiment les pathologies avec les gros troubles alimentaires, mais dans notre société, on a tous un petit peu …

Alexandre : Où est la limite?

Juliette : C’est ça, où est la limite ? Alors il y a vraiment on rentre dans la pathologie, mais rien que les comportements un petit peu excessif de bonbons, de sucre, …

Alexandre : Je pense qu’on a tous vécu ça. Se retrouver un moment avec le ventre gonflé et se dire pourquoi j’ai mangé ce dernier paquet de biscuits.

Juliette : C’est quand, ça devient chronique, que ça devient problématique. La malbouffe amène à la malbouffe. Donc est-ce qu’on est déjà pas dans un trouble ? Parfois, personnellement, je me pose la question. Évidemment qu’il y a la boulimie, l’anorexie où là il n’y a pas à discuter. Ce sont des pathologies qui sont reconnues, qui sont classifiées, et qui sont problématiques. Mais on a aussi tout un contexte environnemental qui nous amène un comportement alimentaire qui est en général pas forcément bon.

Juliette : On ne doit pas trop manger parce que je ne dois pas trop grossir. Je fais un régime de trois mois, j’arrête de manger parce qu’il y a le Summer Body. C’est l’hiver, donc on enchaîne les raclettes, les fondues, … Tiens, c’est Noël, les vins chauds, l’alcool. Donc on a déjà, je trouve, d’un point de vue environnement, un comportement alimentaire qui n’est quand même toute l’année pas forcément super top quoi.

Alexandre : Ça m’amène sur deux points, ça me fait vraiment penser à deux différents sujets. Il y a cet aspect pression sociale où on va dire simplement société de consommation. Concrètement, le marketing qu’on voit pour des aliments, en général ils ne font pas de la pub pour des fruits et des légumes, c’est assez rare en tout cas. Donc là, c’est vraiment une pression qu’on peut avoir et on tombe dans une sorte d’addiction. Parce que le fait de manger ce genre d’aliments relâchent certaines hormones auxquelles on devient addict, concrètement. Comme le scroll, on est addict à cette dopamine.

Alexandre : C’est vraiment cette recherche de plaisir à l’instant court sans penser au long terme. Et du coup, ça m’amène sur ce deuxième point. C’est vraiment le long terme. Pour moi, autant en nutrition que pour l’entraînement, le programme qui serait adapté,… Régime, je le bannis ce mot, parce que c’est selon moi pas un mot qu’on devrait intégrer. Mais le programme, que ce soit alimentaire ou sportif qu’on entreprend, il sera bon pour toi si tu peux le garder toute ta vie. Après, ça va évoluer évidemment selon les saisons. Mais si tu me dis que ce programme est parfait pour toi mais que tu dois t’entraîner cinq fois par semaine, être en déficit calorique de x calories … Pareil, on ne compte pas trop les calories … Mais que tu ne peux le tenir que trois semaines parce qu’après ça tu deviens fou. Et bien, il ne sera évidemment pas adapté pour toi, même si pendant ces trois semaines tu vas progresser évidemment.

Juliette : Il y a toujours cette notion, c’est d’hygiène. Hygiène de vie, hygiène alimentaire, …

Alexandre : D’équilibre !

Juliette : Oui, l’équilibre. Après, on peut avoir des petits excès, mais savoir qu’on fait un excès et ne pas dire que c’est la normalité. Alors qu’on est quand même dans une société où c’est la normalité. C’est la période de Noël, c’est la période des fêtes, c’est la normalité.

Alexandre : L’équilibre est très difficile aussi avec l’aspect social. On a des anniversaires, on est invité à des grillades. Évidemment, j’ai entendu des histoires, mais franchement, c’est à devenir fou. Certaines personnes qui viennent avec leur Tupperware au repas de famille de Noël. Pour simplement contrôler ce qu’ils mangent. Et de voir l’impact que le corps, l’aspect visuel du corps peut avoir sur ta vie sociale, pour rien au monde j’ai envie d’être à sa place. Même si certes il a un six pack, il est beau selon lui. Je n’ai pas du tout envie d’envier cette personne moi.

Juliette : Pour moi, ça dépend de son objectif. Si c’est un objectif esthétique, je comprends que ça soit important mais je bug un peu. Par contre, quand tu es un sportif, que tu as des entraînements, … c’est le même principe, Je vais rentrer tôt parce que je dois m’entraîner le lendemain. Il y a plein de gens qui ne comprennent pas. Il faut trouver le juste milieu.

Juliette : J’ai pas mal d’amis où on a des régimes alimentaires différents. S’il arrive avec son Tupperware parce qu’il est allergique, qu’il ne support pas le lactose ou ce genre de choses. On peut le normaliser à partir du moment où tout le monde est au courant. On peut créer une notion de convivialité quand il n’y a pas de jugement et lorsque la cause elle est compréhensible. Il faut une certaine ouverture d’esprit et c’est là où c’est un peu difficile. Parce que si ce n’est que pour l’esthétique, c’est vrai que toi et moi on va peut être dire que ça nous embête un peu, mais on est déjà dans le jugement … Après, s’il n’en fait pas tout un drame et qu’il fait ça discrètement, on s’en fiche.

Alexandre : On est d’accord, il fait ce qu’il veut. Alors de nouveau, il y a l’esthétique, mais l’esthétique peut rentrer dans l’aspect performance. S’il monte sur scène et qu’il vit de son corps, qu’il vit de ses compétitions, il rentre dans l’aspect on va dire athlète. Mais si c’est de l’esthétique comme toi et moi. Je vais prendre vraiment le cliché, mais la personne qui veut sortir au Mad les samedis soirs et qu’il veut plaire aux filles. Là selon moi, il y a quand même un problème. Parce que tu as besoin d’un cercle social qui fait que tu peux manger ce que les gens ont amené sur la table.

Juliette : Dans ce cas là, il y a un problème derrière …

Alexandre : Mais de nouveau, ce n’est pas ma spécialité. Donc c’est mon ressenti, mais sans jugement.

Juliette : À partir du moment où les choses sont faites cool, qu’il n’y a pas de stress et que cela ne met pas une pression. Si la personne, elle arrive et qu’en fait elle te stresse parce qu’elle mange des carottes à côté, et que toi tu es en train de manger une fondue et que tu te dis que tu as déjà pris trois kilos. Tout est notion d’atmosphère.

Alexandre : On est d’accord.

Le sommeil

Juliette : Le sommeil est super important pour la santé de façon générale. Est-ce que toi tu as des conseils à donner sur le sommeil?

Alexandre : Oui. Après, de nouveau, je ne suis pas spécialiste du sommeil. Donc s’il y a des troubles du sommeil qui sont particuliers, évidemment il faut aller voir un spécialiste du sommeil. La base, c’est probablement des choses que tu as déjà entendu, mais c’est simplement d’avoir une heure de couché et de réveil régulière. Ton corps a besoin de ce rythme pour pouvoir mettre en place justement son rythme à lui. D’avoir une température ambiante qui est agréable, donc pas trop chaude, même plutôt fraîche. De dormir dans la nuit noire et d’éviter les gros repas juste avant de se coucher. Idéalement manger 3 h au moins avant d’aller dormir. Éviter les écrans avant d’aller dormir, 1 h avant d’aller dormir. Ça, ce sont des choses à mettre en place. Et rien que cette base là, chacun d’entre nous, on ne l’applique pas ou très peu.

Juliette : Disons que certaines choses sont difficiles à appliquer. Mais je pense que l’aspect rythmique, ça aussi c’est des choses qui sont intéressantes. Parce qu’on revient aussi sur l’hygiène, c’est qu’à partir du moment où on a un rythme, les choses roulent. C’est comme une voiture, quand la roue tourne, il n’y a pas de souci. Les choses roulent. Et à partir du moment où tu fais un petit écart, et des fois un très très grand écart, pour revenir sur la route, c’est un petit peu plus compliqué.

Les habitudes

Alexandre : Ça dévie un peu sur les habitudes, c’est vraiment mettre en place certaines habitudes. On a tous des habitudes, on ne s’en rend même plus compte quand on le fait, mais ça apporte cette capacité à faire de notre routine quelque chose qui ne nous coûte pas d’énergie. Donc c’est plutôt ça l’aspect difficile, que ce soit niveau alimentaire, sportif, hygiène de vie, sommeil, c’est de réussir à changer une habitude qu’on a en place. C’est là où on a le besoin de plus d’énergie, comme tu as dit, pour pouvoir redévier là où on est parti à la base.

Juliette : Et l’habitude n’est pas forcément quelque chose d’ennuyeux.

Alexandre : Non, pas de ce côté là. C’était plutôt l’habitude dans la manière de faire. Mais effectivement, ce n’est pas la routine on va dire.

Juliette : Moi j’ai eu la remarque. Parce que j’expliquais qu’il fallait quand même avoir une certaine routine, parce que lorsqu’on a des plannings chargés, si vous n’avez pas une routine d’un point de vue organisationnel, c’est un peu compliqué. Et on m’a dit, Oui mais c’est un peu ennuyant. Oui, mais en fait la routine permet aussi de faire plein d’autres choses. Donc si vous avez une routine ou des habitudes qui ne vous coûtent pas et qui sont à peu près cadrées, vous avez ainsi une marge de manœuvre. Alors que si à chaque fois vous êtes obligé de mettre trois jours pour récupérer d’une soirée ou de ceci cela. Je me dis qu’au niveau rendement, sur le long terme, c’est peut être moins intéressant.

Juliette : Après il est vrai que lorsqu’on est jeune, quand on a moins de 20 ans, on récupère très très vite. Qu’on le veuille ou pas, c’est vrai, mais parce que c’est physiologique.

Alexandre : Après, il y a effectivement ces deux points différents entre routine et habitude. Là je parle vraiment d’une habitude. Je prends un exemple concret, mais quand tu as appris à conduire, ça te coûtait tellement d’énergie d’analyser les panneaux, d’analyser la route, de savoir quand est-ce que tu devais embrayer, quelle vitesse tu devais mettre. Maintenant, tu arrives à être en train de manger ton sandwich et en train de guigner ton téléphone en même temps que tu conduis et que tu fais tes virages.

Juliette : Ce qui n’est pas bien.

Alexandre : Ce qui n’est pas bien.

Alexandre : Mais concrètement, ça c’est une habitude que ton corps a pris, un pattern moteur qu’il a appris et du coup ça ne te coûte plus rien de faire ça. Et là on parle de la même chose mais dans l’hygiène de vie. Donc si tu as mis en place une certaine habitude, par exemple préparer tes repas le dimanche soir pour toute la semaine, ça ne te coûtera plus d’énergie de le faire. Et ça t’apportera énormément sur le long terme. Mais si tu n’as pas l’habitude de le faire et que chaque dimanche tu commandes à manger juste pour le dimanche soir, de mettre en place cette routine là, ça va être très difficile. Ça va te coûter beaucoup d’énergie, et de volonté.

Juliette : C’est toujours la mise en place de l’habitude qui est compliquée.

Juliette : Est-ce que tu aurais des tips pour mettre en place ces petites habitudes ?

Alexandre : J’ai des types mais théoriques. J’ai des types théoriques dans le sens où c’est vraiment propre à chacun. Il faut vraiment réussir à cerner l’élément déclencheur, le trigger d’une habitude. Qu’elle soit bonne ou mauvaise. Une bonne habitude qu’on veut renforcer et une mauvaise qu’on veut changer. Et du moment qu’on a cerné cet élément déclencheur, on va déjà pouvoir comprendre la routine qu’elle enclenche. Et puis la récompense qu’il y a derrière. Tout ce qu’on fait, on fonctionne avec récompenses. Donc du moment qu’on a compris ce parcours de routine, on va pouvoir se dire, bon à chaque fois qu’il y a cet élément déclencheur, qu’est-ce que je veux avoir comme autre routine et quelle récompense je vais avoir derrière. Pour pouvoir changer petit à petit cette routine qu’on veut modifier, cette habitude qu’on veut modifier.

Alexandre : Donc c’est vraiment la compréhension, l’introspection. Et pour ça on peut le faire d’une manière assez simple. Simplement déjà en analysant toutes ces habitudes de la journée et en les mettant sur papier. Et des fois certains éléments déclencheurs remontent à quelques minutes heures avant cette routine qu’on a envie de changer. Et il faut vraiment le comprendre pour pouvoir le modifier.

Juliette : Et utiliser des intermédiaires aussi. Un exemple type je veux arrêter de fumer du jour au lendemain. Oui, mais en fait il y a tout un processus. Une fois qu’on a trouvé ces petits points là, il faut aussi mentalement se préparer et être capable de. Et donc trouver des intermédiaires, par exemple je prépare les repas le dimanche soir, une semaine sur deux. Et après, petit à petit, je vais pouvoir le faire toutes les semaines.

Alexandre : Alors je ne suis pas un pro de ceux qui veulent arrêter de fumer. Mais un autre exemple, c’est tout bête mais lorsqu’on est assis sur le canapé, on a pour l’habitude de s’asseoir et d’allumer la télé avec la télécommande qui est juste là. Rien que de déplacer sa télécommande dans une autre pièce le soir d’avant par exemple, ça va nous faire penser qu’en fait je m’étais dit que je n’allais pas regarder la télé, je ne vais pas le faire. Alors certes, si tu as envie d’aller regarder la télé, tu vas chercher ta télécommande. Mais tu peux pousser la chose plus loin. Dire je ne mets pas la télé au salon parce que je sais qu’à chaque fois que je m’assieds dans le canapé, je regarde la télé, mais je mets à la place un livre sur la table. Ils ont fait des expériences simplement par rapport à la proximité de ce qu’on a à disposition entre un bol de popcorn et un bol de fruits. Ils avaient déplacé le bol de popcorn juste un peu plus loin pour pas qu’on ne puisse l’atteindre lorsqu’on est assis dans le canapé. Ils avaient analysé combien on en mangeait. Il n’y a pas photo, juste le fait de pouvoir mettre en place la situation qui fait que tu vas changer ton habitude t’aide.

Juliette : Il faut trouver le petit truc au plus simple parce qu’on reste humain. Donc après des fois c’est par étapes pour arriver à un objectif final.

Alexandre : Et puis sur cet aspect de récompense, je pense qu’il y a vraiment la récompense immédiate, ce qu’on recherche principalement comme on l’a dit tout à l’heure, mais il y a aussi cette récompense sur le long terme, le reword qui est un peu décalé. Le but c’est de pouvoir se projeter aussi sur, qu’est-ce que je recherche plus loin ? Pas uniquement de me dire, bon ça me fait plaisir, je scrolle et j’ai cette dopamine qui fait du bien mon corps, je suis content sur le moment. Non. J’aurais probablement plus de satisfaction à passer du temps avec ma fille qui est juste assise à côté. Et dans dix ans, justement, j’aurai cette satisfaction là. Donc c’est toujours difficile entre le maintenant et le après.

Juliette : C’est comme se mettre au sport.

Alexandre : C’est exactement pareil.

Juliette : En fait, je veux réussir à courir, 10 km. Mais on peut déjà commencer par cinq minutes.

Alexandre : Simplement l’aspect du bien-être ou de l’espérance de vie. Alors certes, je ne suis personne pour dire que j’ai envie de vivre jusqu’à 140 ans, de loin pas. Mais pour dire, j’ai la capacité d’avoir un impact sur mon bien-être futur et actuel. Mais ce que je fais actuellement ne va pas dans ce sens là, mais ça me procure du plaisir maintenant.

Juliette : Après c’est cette notion de choix. Si on a suffisamment de recul, chacun va faire ses choix, mais après faut les assumer. Pour moi, c’est juste ça bien sûr. Est-ce qu’on veut vivre en santé ? Est-ce qu’on veut pouvoir courir après ses petits enfants ? Si on veut courir après ses petits enfants, il faut rester en forme, qu’on le veuille ou pas. Et si on ne veut pas tomber malade, il faut faire en sorte quotidiennement et toute l’année d’être en forme pour avoir un système immunitaire adéquat, pour par exemple l’hiver qui arrive avec la grippe, les virus, …

Coach et physio

Juliette : Est-ce que c’est chouette de partager les locaux avec des physiothérapeutes ? Coach – physio, je trouve que c’est hyper complémentaire. Comment toi tu le ressens ? Et tes collègues physiothérapeute, comment ils le ressentent ?

Alexandre : C’était nouveau pour eux. Le centre, il a été fondé en 2019 avec trois physiothérapeutes fondateurs qui ont directement fait appel à d’autres professionnels, coach, nutritionniste, massage, psychologue du sport. Et du coup, ils avaient cette volonté justement de créer cette multidisciplinarité. Dès le début, il y a eu une bonne collaboration et une bonne entente par rapport à qui fait quoi. On ne s’est jamais marcher dessus, par rapport à quel patient va où. Selon moi, c’est vraiment deux professions qui sont différentes dans le fonctionnement et dans quel client ou patient on traite. Donc il n’y a jamais eu de tensions. Et même à l’inverse, c’est plutôt un très bon échange, une très bonne collaboration. Par exemple, pour le suivi d’un patient physio qui a terminé ses bons de physiothérapie mais qui n’est pas encore 100 % capable d’aller faire Sierre – Zinal, et bien là on peut rentrer en compte. Donc c’est très complémentaire.

Juliette : Et il y a quand même un partage, un échange, pas de connaissances, mais de regard. Parce que chacun est conditionné. Comme tu le disais tout à l’heure, moi, je suis parfois biaisée parce que je suis physiothérapeute. C’est vrai que chacun est conditionné par rapport à sa profession. Et c’est intéressant d’avoir un autre regard, avec des professions qui se regroupent parce qu’en fait tout s’entremêle mais avec un regard différent.

Alexandre : Alors ça c’est sûr. Et on essaie vraiment de constamment échanger. Si on a un patient ou client qu’on suit en même temps, on va évidemment communiquer par rapport à cette personne et puis simplement rester un peu formé. Le centre organise des formations internes. Ça, ça permet vraiment de mettre en commun nos connaissances, d’apprendre quelque chose de nouveau si c’est au sujet de la physiothérapie ou vice versa. Et du coup, c’est une grande force selon moi. À mon avis, on va dans cette direction, où il y aura de plus en plus de centres qui collaborent entre différents corps de métier qui sont dans le même domaine.

Des workshops chez CST+

Juliette : D’ailleurs vous faites des workshops.

Alexandre : Ouais, les workshops, c’est vrai. On essaie d’une manière irrégulière, mais quatre ou cinq fois dans l’année de traiter un sujet et d’apporter la connaissance d’un professionnel de ce domaine, qu’il soit à l’interne ou quelqu’un qu’on fait venir. Pour pouvoir parler de ce sujet au tout public. Donc c’est gratuit et on essaie de faire venir les gens ici pour pouvoir leur apprendre et nous, apprendre à ce sujet.

Juliette : Il faut les suivre sur les réseaux sociaux : @c.s.t.plus

Alexandre : Oui, avec plaisir. Sur l’instagram @c.s.t.plus, on essaye de mettre les informations principales là dessus et on communique aussi par mail. Donc si vous avez simplement une envie, un besoin ou des questions particulières, vous pouvez sans autre aussi nous envoyer un petit mail. C’est avec plaisir.

Juliette : Autre chose?

Alexandre : Non, moi j’ai fait le tour de ce que j’avais à dire. J’espère que c’était clair.

Juliette : Merci. Bientôt.

Alexandre : À très vite.

Michaël Tauxe, ostéopathe, nous parle du trail.

Vous pouvez regarder ce podcast sur notre chaîne youtube

Vous pouvez écouter ce podcast sur :

 

Les intervenants

Michaël Tauxe : Ostéopathe

Juliette Corgnet : Physiothérapeute

Transcription du podcast

Juliette : Bonjour et bienvenue sur le podcast Santé Sport de CapRol. Aujourd’hui, on se retrouve avec Michaël Tauxe, ostéopathe à Sion. Bonjour Michaël. Est-ce que tu peux te présenter s’il te plaît ?

Michaël : Alors comme tu as dit, je m’appelle Michaël Tauxe, j’ai 35 ans. Je suis ostéopathe à Sion depuis 2015 en tant qu’indépendant. Je me suis spécialisé dans la prise en charge des coureurs, des patients coureurs, dans la prévention et la prise en charge des blessures en course à pied. Grâce à des formations que j’ai fait à la Clinique du Coureur.

Juliette : La fameuse clinique du coureur connue de tous !

Michaël : Oui, elle est maintenant bien reconnue. Je suis parti au mois de juin à Québec faire le cours expert chez Blaise Dubois. S’il nous écoute, je le salue.

Juliette : Tu as fait toutes les formations, tous les modules de la clinique du coureur ?

Michaël : Pas tous, Non. Car il y a certains modules, avec des thématiques qui jusqu’à présent m’intéressaient un peu moins. Tout ce qui est nutrition, ce n’est pas mon domaine, donc je ne l’ai pas fait. Je pourrais le faire d’un point de vue personnel, ça viendra, mais pour l’instant ce n’est pas le cas. J’ai vraiment axé sur les blessures en course à pieds.

Juliette : Pour pouvoir faire le cours expert, il faut quand même déjà avoir fait passablement de modules. Donc tu en a fait déjà une énorme partie ! Ils t’en reste quelques uns.

Son entraînement personnel en tant que traileur et ostéopathe

Juliette : Au niveau sport, tu fais du trail, c’est ça?

Michaël : Oui, exactement. Alors dans le privé, j’ai une compagne et un petit garçon de quatre ans. Et, je fais du trail. De la course en général, mais axée trail en compétition. Avec en moyenne six entraînements par semaine, pour aboutir aux résultats que j’espère avoir.

Juliette : Au niveau de ton entrainement, il est constitué de quoi ? Que de la course, ou tu inclus d’autres choses ?

Michaël : Dans les six entraînements par semaine, il y a en tout cas une fois du vélo, une fois du renforcement musculaire. Une à deux fois du renforcement, cela varie en fonction des semaines et de quand sont les courses. Mais ce n’est pas que de la course, non !

Juliette : Donc il faut un petit peu de tout. Il ne faut pas que courir pour être performant en trail.

Michaël : Exactement.

Qu’est-ce que le trail ?

Juliette : Est-ce que tu peux nous expliquer à quoi correspond le trail ?

Michaël : Alors le trail, il y a plusieurs définitions. Ce n’est pas clair. Qu’est-ce que le trail ? On parle de trail running, donc de la course en sentiers, donc de la course en nature. Pour la différencier de la course à pied sur route qui est de la course sur du bitume ou sur de la piste. C’est la différence. Quand tu vas courir dans un parc en ville, le long des bisses ici, en montagne, c’est du trail. Le trail ce n’est pas forcément de la course en montagne comme pas mal de gens le pensent.

Juliette : Ok, donc c’est plus général que juste de la course en montagne.

Michaël : Exactement. Après tu as vraiment la course de montagne spécifique, les formats en compétition course de montagne qui sont différents des courses de trail, c’est vraiment ce qui se passe en montagne pur. C’est de la montée, c’est que de la montée généralement. Puis après tu as encore d’autres catégories comme le sky running ou bien les kilomètres verticaux qui sont aussi du trail, mais encore spécifiquement, en haute altitude sur des trucs techniques. C’est assez assez vaste, et flou.

Juliette : Et encore plus dur !

Michaël : Effectivement.

Quelles capacités physiques pour du tail ?

Juliette : Est-ce qu’il y a une capacité physique qu’il faut avoir en plus pour pratiquer du trail en comparaison à la course sur route ?

Michaël : Alors là aussi, je crois qu’il n’y a pas de généralité. Généralement, il y a un peu des profils types quand même, mais il y a des trucs qui se regroupent j’ai l’impression. C’est vrai que sur route, on a souvent des gens qui sont assez légers, assez sveltes. Alors qu’en trail, à priori, pour encaisser les montées, les descentes, il faut un peu de masse musculaire. Maintenant, je pense que ça dépend aussi les distances qu’il y a en trail.

Juliette : S’il y a beaucoup d’endurance ou pas ?!

Michaël : Si tu allonge les distances … Disons que sur les courses rapides, c’est vrai que cette masse musculaire te coûte de l’énergie aussi en terme de rapidité donc c’est plus compliqué. On a des traileurs qui sont très bons en montagne, en montée, sur des courtes distances. Ils ont des profils type marathoniens. On voit les Kenyans sur les courses qu’ils y avaient par là, Thyon-Dixence, Sierre-Zinal, qui ont un profil type marathonien et qui performent sur des courses comme Sierre-Zinal.

Michaël : Après, si tu prends de l’ultra distance, c’est vrai que là tu as plutôt des gens qui ont des bonnes cuisses, des bons mollets pour vraiment tolérer cet effort là, qui est plus long, qui est plus géré, qui est un peu moins rapide quand même.

Juliette : Ok. Quelque part c’est pour pouvoir encaisser toute la pression exercée. Il y a toujours un débat entre la musculature protège, mais en même temps la musculature coûte, parce qu’elle coûte en poids, elle est plus lourde et elle consomme aussi plus d’énergie. Donc il faut trouver le juste milieu. Après chacun fait en fonction de sa morphologie, je pense. Si tu es plus apte à faire tel ou tel type d’activité.

Michaël : Par exemple, tu as un exemple typique. Enfin tu as plusieurs exemples, mais quelqu’un comme Mathieu Blanchard, qui a quand même des bonnes cuisses, qui est performant sur des ultra distances, il a quand même fait 2 h 22 au marathon de Paris. Donc ça court quand même assez vite. Donc ils sont capables de le faire. Et puis comme je disais, à l’inverse des marathoniens qui explosent des records sur des courses en montagne qui restent assez performants, et eux, ils n’ont pas forcément de la grosse musculature. Donc il y a quand même un peu aussi un côté peut être génétique.

Juliette : La génétique et la capacité de récupération certainement. Et moi je mettrais énormément d’importance sur le mental. Au final s’ils veulent, ils peuvent. Matthieu Blanchard, s’il voulait faire son marathon, il était parti pour faire son marathon.

Michaël : C’est vrai que le mental fait énormément.

Juliette : C’est vraiment tout un ensemble !

Débuter la course à pied en version trail ou sur route ?

Juliette : Pour un débutant qui n’a jamais fait de course à pied. Toi tu conseillerais d’aller courir version trail soft ou sur route?

Michaël : Bon, un débutant,… J’y réfléchis souvent. Où il veut aller en fait, c’est surtout ça d’après moi.

juliette : Son objectif.

Michaël : Son objectif en fait. Parce que si c’est l’idée de faire un peu de course en nature, dehors, pour moi, il peut commencer directement sur du terrain type trail. Pour autant qu’il y ait une notion de progressivité vraiment assez importante, qui est sur route ou sur chemin, de ne pas de ne pas y aller trop rapidement et trop fort. Donc il pourrait commencer comme ça. Il enchaîne, il progresse gentiment, il écoute son corps et selon moi, ça doit bien fonctionner.

Michaël : Après, si tu veux entrer dans le côté, je veux m’améliorer, j’ai tout à coup un chrono sur une course parce qu’il y a un challenge familial ou autre. Je pense qu’il y a intérêt à faire de la route d’abord. Pour le côté développement de ta foulée, ta biomécanique de course. Pour travailler la vitesse. Tu fais un peu ta vitesse, tu augmentes ta VO2, tu travailles ta foulée par de l’école de course par exemple, tu fais des fractionnés, … Puis ensuite tu passes sur du sentier où là tu intègre un peu plus de volume et du dénivelé. Du dénivelé qui peut venir un peu au bout. Mais quand tu as fait cette base avant, ça peut être intéressant dans l’aspect, je veux commencer à performer.

Juliette : Peut-être aussi à sentir aussi, ce que cela provoque sur ton corps au niveau fatigabilité. C’est peut être plus facile de faire ça sur un sol plat, où tu n’as pas à gérer le sol.

Michaël : C’est peut-être plus gérable.

Juliette : Toi tu travailles un peu sur piste ou pas du tout.

Michaël : Personnellement, oui. Je fais généralement une fois par semaine la vitesse sur piste, dans les sorties de course. Donc finalement je fais du trail, une fois du vélo 1 à 2 fois du renforcement, une fois de la piste, il n’y a plus énormément de côté trail. Il ne reste pas beaucoup de séances.

Juliette : Tu travailles pour le trail !

Le travail de vitesse

Michaël : Travailler la vitesse, dans l’aspect performance. Même en trail si tu fais du dénivelé, comme on le disait avant, il faut de la musculature pour encaisser ça. Mais si tu travailles la vitesse pour les formats que je fais, … j’ai oublié de préciser que jusqu’à présent je fais des maximum de 50 kilomètres. Donc, ce côté vitesse, si tu veux faire ta meilleure performance, elle est importante. Il faut la bosser. C’est moins le cas sur de l’ultra distance je pense où tu as d’autres approches qui te permettent aussi d’aboutir à un sacré résultat.

Juliette : Donc la vitesse il faudrait vraiment la travailler sur du plat et travailler en intervalles.

Michaël : Pour moi c’est comme ça que cela se fait le plus facilement, plat piste ou plat route, effectivement.

Juliette : Ce que les coureurs du dimanche comme moi ont beaucoup de difficulté à faire, parce que c’est pas fun.

Michaël : Il faut être motivé. Il faut faire ça sous forme de challenge.

Juliette : Après il faut aimer. Mais c’est bien parce que comme tu le montres au niveau du programme, ce n’est pas : j’aime faire du trail, je ne fais pas que du trail ! Je protège en faisant du renforcement musculaire, je travaille la technicité vraiment à la limite sur piste. Tu travailles la mobilité aussi à certains moments, quand tu sens que ton corps est un peu raide. Tu fais vraiment tout l’ensemble.

Michaël : Exactement.

Juliette : C’est comme dans tout les sports. C’est ce que je rappelle souvent, les gens vont faire un sport et en fait ils sont dans ce sport là. Mais ils oublient qu’il faut préparer le corps à ce sport. Et ils ne font pas de renforcement, de mobilité et ils finissent par se blesser.

 

Il faut préparer son corps à son sport !

Les blessures les plus fréquentes en course à pied concernent le membre inférieur.

Juliette : Au niveau de tes patients ou de ton entourage, quelle est la blessure la plus fréquente que tu rencontres en course à pied ?

Michaël : Ça concerne vraiment les membres inférieurs, ce qui est logique.

Juliette : Il y a très peu de dos ?

Michaël : Il y en a un petit peu, mais en course à pied, ce n’est pas ce qui ressort. Quand les patients disent, je fais de la course, je me suis blessé, j’ai une douleur liée à ma pratique, pour moi, jusqu’à présent, ce n’est pas énormément de dos. Contrairement à la patientèle, parce que je ne fais pas qu’en course à pied, j’ai tous types de patients, c’est clair que les maux de dos dans la société actuelle, il y en a énormément. En course à pied, c’est pas tant le cas, c’est vraiment les pathologies plutôt genou. J’ai énormément de genou en fait, que ce soit syndrome de la bandelette ou le syndrome rotulien ou des tendinopathies …

Pourquoi plus d’atteinte du genou que de la cheville ?

Juliette : Comment tu l’expliques que ce soit plus le genou que la cheville? Est-ce que toi tu as une idée du pourquoi ?

Michaël : Je sais pas. Non, je ne sais pas. Probablement, parce qu’on n’est pas certain, mais probablement lié à la biomécanique de course des gens. Peut-être leur façon de courir, peut-être que le matériel rentre en ligne de compte aussi, qui va favoriser des mouvements de grande amplitude et des grands pas. La cadence assez basse, qui chargerait plus les articulations genou, bassin. Mais ça charge aussi le bassin. Et c’est vrai qu’il y a plus de genou parce que l’anatomie complexe du genou avec des ménisque, des ligaments croisés, …

Juliette : Des fois on n’est pas forcément très stable au niveau du genou. Mais je me dis que les gens se préoccupent beaucoup de l’entorse de cheville. Donc peut-être aussi que si tout bêtement, les gens se préoccupent tellement de l’entorse de cheville qu’ils font plus attention à leurs appuis au niveau du pied. Mais quand la force remonte, ils n’ont pas le schéma neuromusculaire de dire il faut que je stabilise mon genou. Tu vois ce que je veux dire ?

Michaël : C’est vrai que la cheville, elle fait peur, liée à l’entorse. C’est clair, quand tu cours sur sentier, c’est le premier truc. Et effectivement, ils ont probablement peur de ça car c’est hyper connu.

Juliette : Ils font peut-être plus attention.

Michaël : Plus de focus.

Le syndrome de l’essai glace

Juliette : La pathologie nommée le syndrome de l’essuie glace est très connue. Est-ce que tu peux l’expliquer ?

Michaël : Le syndrome de l’essuie glace ! Donc, il y a une bandelette sur l’extérieur de la cuisse qui est tendue par un muscle, le tenseur du facial lata (TFL). Jusqu’à présent, on a appelé ça syndrome de l’essuie glace parce qu’on pensait que c’était dû à des frottements tel un essuie glace.

Michaël : Il semblerait que ce ne soit pas le cas. Je crois que c’est assez débattu encore jusqu’à présent. Mais il semblerait que ça soit plus un phénomène de trop de tension et trop de compression au niveau de la bourse qui gère le plan de glissement. Qu’il y ait trop de compression sur ça et que cela crée une irritation et une inflammation de cette zone. Donc, c’est une problématique, qu’on appelle de répétition. C’est une problématique qui est hyper fréquente chez les coureurs route, qui vont tout à coup faire plus, plus de volume, plus d’intensité, trop vite, trop fort on va dire. Et du coup, ils irritent cette zone, parce qu’il y a ce mouvement répétitif. Ça se voit aussi en descente sur les trails, des gens qui commencent à faire beaucoup de descentes, qui ne sont pas adaptés encore ou qui ne travaillent pas en renforcement à côté pour pallier un peu ça. Ils peuvent vite développer cette problématique. Contrairement au syndrome fémoro-patellaire, ou au syndrome rotulien qui est plus un problème de charge. Là on en a un peu moins sur route j’ai l’impression. Il y en aura toujours, mais c’est plus le côté j’ai fait trop d’intensité, j’ai été trop rapide, que ce soit en montée, en descente ou sur plat.

Le syndrome de l’essuie glace est un problème de répétition. Contrairement au syndrome fémoro-patellaire ou syndrome rotulien qui est un problèmes de charges.

Juliette : Il y a toujours cette notion de progression, où le corps doit s’adapter à l’effort qu’on lui demande. Il faut qu’il y ait un certain effort pour avoir une adaptation. S’il n’y a pas suffisamment d’effort, il n’y a pas d’adaptation. D’où l’intérêt des fois de faire des entraînements sur piste pour travailler la vitesse, etc. Mais il faut quand même que ce soit progressif, il faut s’écouter.

Michaël : Il y a cette phrase le corps s’adapte dans la mesure où le stress appliqué n’est pas plus forte que ses capacités d’adaptation. Ça, c’est la clinique du coureur, ils la disent. Et c’est vrai !

« Le corps s’adapte dans la mesure où le stress appliqué n’est pas plus grand que sa capacité d’adaptation ». La clinique du coureur

Juliette : Par contre sur une pathologie type essuie glace, qu’est-ce qu’on doit faire dans un premier temps ou quel symptôme doit-on surveiller ? Par exemple quand tu as une douleur sur la face externe du genou, que tu as couru, que tu sais que tu n’as pas été super progressif, que tu as un petit peu abusé. Est-ce que tu dois directement m’inquiéter ? Est-ce que tu dois t’arrêter ? Qu’est-ce que tu préconiserai ? Alors après c’est toujours pareil, on n’a pas le patient en face. Là on parle de généralités, on essaye d’amener des réflexions. Selon le patient, les choses à faire sont souvent différentes. Mais de façon générale, comment tu décrirai la chose?

Il est important d’écouter sa douleur

Michaël : Bon, moi j’accorde beaucoup d’importance à cette notion de douleur, que ce soit là ou ailleurs. Pour moi, dès qu’il y a une douleur, il faut la prendre vite au sérieux. Parce que le corps nous indique qu’il y a eu quelque chose qu’il ne tolère pas. Que ce soit un syndrome de l’essuie glace, on commence à avoir mal, c’est ok. J’ai mal, pourquoi ? Déjà essayer de comprendre un peu ? Est-ce que j’ai fait quelque chose de différent ? Est-ce que j’ai changé quelque chose ? Est-ce qu’il y a eu une modification qui me permet déjà de comprendre ? Si c’est le cas, tant mieux. Parce qu’ainsi on met le doigt assez vite dessus.

Michaël : C’est peut être un repos, très rapide le repos, jusqu’à ce que la douleur se calme. Et puis reprendre progressivement, sans répéter les mêmes erreurs, forcément. Après, si on n’a rien changé, ça arrive aussi. A priori, les patients disent qu’ils n’ont rien changé et qu’ils ont mal. Il faut prendre encore un peu plus de recul et de voir dans leur situation. Il y a probablement un changement, que ce soit même au job, dans leur vie privée, etc… et qui s’accumule avec la charge qu’on a avec le sport en question. Et ça il faut la prendre en compte.

Michaël : Maintenant c’est vrai que lorsqu’il y a une douleur qui est là et qui peine un peu à passer ou qui revient, même si on a fait un jour de pause, deux jours de pause ou quelques jours, je pense que d’aller vite consulter un professionnel de la santé qui saura aiguiller sur ce que c’est et comment la prendre en charge. Parce que dans ces pathologies là, je parlais de répétition ou de surcharge. On ne va pas forcément préconiser la même chose pour aller vite mieux. Moi je ne suis pas partisan du fait de stopper, de ne plus rien faire, repos six semaines. Dans le monde médical, on entend souvent le nombre six. Il est assez marrant six semaines, six mois…

C’est quoi cette histoire de 4-6 semaines ?

Michaël : Et pourquoi, en fait il y a une douleur, il faut faire six semaines de pause ?Avec la course, ne plus rien faire. Ça, je ne suis pas forcément pour, parce qu’il y a une désadaptation qui est énorme. Après ça va mieux, c’est clair qu’on ne fait plus rien, donc ça va mieux. Mais le patient, il recourt et puis il recourt un petit peu moins que ce qu’il faisait avant par exemple. Mais très vite, ça revient en fait.

Juliette : Parce qu’il s’est totalement adapté et qu’il devrait courir beaucoup, beaucoup, beaucoup moins. Mais on a la même chose en physio. On le voit assez fréquemment sur des pathologies plus ou moins graves. Au final, ils immobilisent les gens, 4 à 6 semaines, et vous allez voir le physio au bout de six semaines. En fait moi je me retrouve parfois, quand les patients me connaissent, ils m’appellent et selon la pathologie, je leur dis vous venez à J1. Il y a plein de choses qu’on ne va pas faire. Parce qu’au niveau médical, personnellement, je pense qu’ils ont, ils ont mis en place des protocoles de sécurité. Ils font une généralité sur les gens et par sécurité ils immobilisent ou ils mettent une attelle pendant 4 à 6 semaines sans explication autre parce qu’ils n’ont pas le temps.

Juliette : Donc ce n’est pas pour les dédouaner mais en fait ils se sécurisent. Alors que quelque part, c’est vrai que si vous pouvez avoir accès à un professionnel de santé à J1 J2, vous êtes blessé, le professionnel va pouvoir avoir un regard plus rééducationnel. Et dire l’attelle oui, mais vous pouvez l’enlever pour faire cet exercice par exemple. Après vous remettez l’attelle. Le médecin il n’a pas le temps et quelque part il se dit que le patient va mal faire l’exercice.

Juliette : Souvent c’est un peu le problème. Et nous on se retrouve, avec des gens qui sont complètement enraidis. Où ensuite on va perdre du temps à récupérer des amplitudes articulaires. Et ça c’est un peu problématique. Mais je ne suis pas sûr qu’on ait une solution idéale d’un point de vue prise en charge médicale. Parce qu’ils sont obligés de suivre des protocoles. Et il y a tellement de différences entre les sportifs athlètes, des sportifs de base et les gens sédentaires, que c’est compliqué.

Michaël : D’où le fait que ce soit ostéo, physio ou coach, qu’ils aient ces notions là c’est important. D’échanger, discuter, d’écouter et après d’éduquer. C’est vraiment de l’éducation.

Juliette : On a un rôle d’éducation. Et puis après les gens, comme tu l’as dit tout à l’heure, quand ils se blessent, quand il y a une douleur, ce que je trouve intéressant, c’est de ne pas se dire j’ai mal, je me suis blessé. C’est de dire, tiens, qu’est-ce qui a changé ? Et ce n’est pas le premier réflexe. Nous, c’est notre premier réflexe parce qu’on est thérapeute. Mais pour les gens au quotidien, ce n’est pas leur premier réflexe. C’est directement de se dire mon Dieu, je me suis blessé, il faut que j’aille voir le médecin. Oui, c’est bien d’aller voir le médecin, mais déjà si vous arrvez vers un thérapeute en lui expliquant un petit peu votre propre analyse et ressentis, le diagnostic est déjà plus facile. Et après par la suite, c’est de discuter avec coach, ostéo, physio ou autre.

Juliette : Et pour moi c’est le patient qui doit faire qui doit faire ses choix. Le médecin il a dit quatre semaines d’attelle. Si on discute et qu’au bout de deux semaines on considère ou que moi par exemple, je considère qu’il peut l’enlever, c’est au choix du patient de l’enlever ou pas. Après le médecin, il a donné ses indications, moi j’ai donné mon ressenti et le dernier décideur, ça devrait, pour moi, être tout le temps le patient. Mais c’est vrai que pour ça il faut que tout le monde lui apporte l’éducation qu’on peut lui donner, avec les regards différents.

Deux exemples de blessures durant le cours d’experts au Québec

Michaël : On a eu un exemple à Québec, enfin même deux dans la cohorte où on était. On était quinze à suivre le cours expert, il y a eu le trail là-bas de la clinique du coureur durant cette période. On l’a un peu tous fait, sur plusieurs distances et on a eu deux cas de fracture parmi les quinze. Il faut savoir que là-bas ce n’est que des racines, c’est du trail, c’est en forêt et tu ne mets pas souvent le pied sur de la terre. C’est que de la racine, c’est hyper technique. Peut-être qu’on n’est pas habitué, mais on a eu un cas de fracture de la base du cinquième métatarsien et une fracture de la fibula.

Fracture du 5ème métatarsien

Michaël : Et là du coup, c’était intéressant parce qu’on était quinze jours ensemble. C’était tout au début en plus. On a fait des cas cliniques avec eux. Le cas de la fracture au niveau méta, il y a quand même une radio qui a été faite pour voir où c’était. Sachant que ça peut être dans ce cas là une fracture de stress, et que c’est une zone à moins bon pronostic. Il a été immobilisé.

Juliette : Il était en décharge ?

Michaël : Il était avec une botte de décharge. Durant ces quinze jours, vu qu’on avait beaucoup d’activités en course à pied, alors c’est clair que lui ne pouvait plus courir. Mais il a tout compensé en vélo. Il a fait du vélo avec sa botte de décharge, etc. L’idée c’était que dès qu’il avait moins la douleur, c’était d’enlever. Après il est retourné chez lui, et on a eu des feedbacks. Il n’a pas attendu ce délai de six semaines. On a eu des échanges avec un ortho québécois là-bas qui disait que 6 c’était le chiffre miracle en médecine. Étant physiothérapeute, il était peut-être un peu plus protecteur de par son rôle, mais que c’était valable de faire aussi en fonction de la douleur. Et c’est vrai qu’il a assez vite enlevé sa décharge, il a assez vite rechargé le pied et maintenant ça se passe bien, alors qu’il n’a pas suivi ce protocole qu’il suivrait ici.

Suspicion de fracture de la fibula

Michaël : L’autre cas de la fibula, là il n’y a rien qui a été fait. En gros, c’était écouter les symptômes. C’est un très très bon coureur d’ailleurs.

Juliette : C’était une fracture ou c’était une fissure ?

Michaël : Alors ce n’est pas déplacé. On n’a pas eu de radio. Mais effectivement, il y a une suspicion de fracture assez notable.

Juliette : Ils n’ont pas fait de radios ?

Michaël : Non, Ils n’ont pas fait de radios. Lui, il pouvait marcher. Alors il marchait, il boitait un peu, il avait un peu mal mais c’était gérable. Il a fait pas mal de vélo et puis maintenant il est reparti comme avant. C’était au mois de juin, donc ça date un petit peu. Mais j’ai souvenir qu’assez rapidement après il nous a fait des vidéos photos de lui. Il habite sur l’île de la Réunion, il a fait des vidéos photos de lui en train de recourir etc… Alors qu’il n’a rien suivi en terme de protocole médical.

Juliette : À écouter sa douleur.

Michaël : Il a écouté sa douleur. Voilà, c’est peut-être une prise de risque parce que s’il avait mal écouté …, lui il est dans le domaine donc il connaît bien. C’est vrai que c’est un patient assez facile, mais ça aurait pu être plus risqué si effectivement il gambadait, qu’il avait toujours mal, que ça consolide mal…

Juliette : C’est ça un peu la difficulté et c’est pour ça que c’est le patient pour moi qui doit qui doit faire le choix. Mais là tu es face à des physio qui connaissent bien leur corps, qui connaissent les pathologies, qui ont un recul avec des patients. Donc le fait d’avoir eu des patients, d’avoir eu les ressentis des patients, ça fait quand même une expérience. Ils ne l’ont pas vécu, mais ça reste une expérience intéressante. Alors que face à des patients X, qui n’ont pas forcément de schéma corporel, c’est plus difficile. Ou quand tu prends à l’inverse des sportifs qui parfois n’ont pas de schéma corporel non plus et qui sont dans la souffrance de dire je pousse, je pousse, je n’ai pas mal, j’y vais encore. Et qui même aime se faire mal, pas par plaisir, mais parce que lorsqu’on veut évoluer dans le sport, il faut quand même un peu de souffrance. C’est toujours dur de leur dire écoute la douleur.

Difficile de dire à certains sportifs de se fiers à leur douleur

Juliette : C’est dur de dire écoute la douleur face à certains sportifs. Moi j’ai des difficultés parce qu’on est face à une population qui n’a jamais mal.

Michaël : Ils n’ont jamais pas mal.

Juliette : Oui, c’est ça.

Michaël : C’est clair que dans le cas des sportifs élite même pro, il y a une charge telle que des douleurs, il y en a, c’est sûr. Maintenant, il faut voir à quel point c’est une douleur, ou une gêne. Dans un monde idéal, il faudrait l’écouter. Maintenant, si tu réduis un petit peu un moment et que tu trouves des activités de transfert de charges, etc… pourquoi pas. Mais c’est vrai que s’il faut plus de temps, c’est compliqué. Ils ne vont pas le faire, ils vont rester là dedans et pour eux c’est normal d’avoir mal.

Juliette : C’est pour ça qu’il faut aussi des fois pouvoir les diriger. Ça reste du coaching. Accompagner le patient, que ce soit à distance ou pas. De poser des questions : tu te sens comment là ? Est-ce que tu as des douleurs ? Comment sont tes performances. Rien que l’absence d’évolution dans les performances, ou une régression, ça nous donne des informations. Puis trouver des activités de transfert. Qui sont moins en charge sur le membre problématique.

Michaël : Ça c’est sûr. Mais même pour un patient en course à pieds, qui court pour le plaisir 1 à 2 fois par semaine, et qui se fait mal, lui dire de stopper, c’est compliqué. Parce qu’il avait plein de bonne volonté de commencer. On le stoppe, ça ne va pas. Et pour la cicatrisation, pour la récupération, pour tout, pour son corps en général, ce n’est pas bon de faire un repos strict. On revient sur ce truc arrêter trop longtemps c’est pas bon. Donc très rapidement, faire des activités de transfert de charges qui permettent quand même de bouger, ça c’est important, ça permet aussi de mieux cicatriser. Et puis dès que possible, reprendre l’activité en question progressivement.

Juliette : À un niveau moindre de là où on en était. Des fois, il oublie aussi.

« Pour la cicatrisation, pour son corps en général, ce n’est pas bon un repos strict ». Michaël Tauxe

Importance de la quantification du stress mécanique

Michaël : Il y a cette cette schématisation à la clinique du coureur, la quantification du stress mécanique dans ses prises en charge. Fondamentalement, c’est ce que pas mal de gens font instinctivement. Là, il y a un mot, il fallait trouver un peu un titre mais c’est exactement ça. C’est de la mise en charge progressive pour stimuler suffisamment afin de générer de l’adaptation, mais sans dépasser ce que les structures peuvent tolérer pour ne pas continuer à les irriter. C’est un jeu entre en faire assez pour se renforcer, mais pas trop pour ne pas irriter.

Que faire en cas de douleur de genou lorsqu’on débute en course à pied ?

Juliette : Après, c’est difficile. J’ai l’exemple d’une amie qui commence à faire un peu de course à pied et elle me dit qu’elle a mal au genou. Elle revient courir et je lui demande si elle a toujours mal. Elle me dit : oui, mais tu m’as dit que ce n’était pas bien d’arrêter. On est parfois un peu dans l’entre deux. Parfois tu te retrouves face à des gens qui ne sont pas des coureurs, qui ont la volonté de se mettre à la course à pied pour X ou Y raison et qui sont super motivés, mais qui n’ont pas forcément la masse musculaire adéquate aussi pour supporter. Donc des fois tu as envie de leur dire, fais moins de course à pied et fait plus de squat, de renforcement, etc… Mais c’est compliqué parce qu’à ce moment là tu es déjà en train de leur mettre un programme qui au niveau planning ou autre, ils n’avaient prévu pas prévu.

Michaël : Un plan, qui peut faire peur.

Juliette : C’est compliqué quand tu dis la course à pied a quand même énormément de bienfaits, donc c’est bien courez, courez. Il ne faut pas que je la limite trop, il faut que je la stimule. Mais en même temps, moi j’aimerais bien qu’elle fasse un peu plus de squats. C’est un peu compliqué.

Juliette : Toi, face à un semi sédentaire ou quelqu’un qui au niveau des membres inférieurs ne fait pas d’activité qui muscle, et qui te dit la course à pied me fait mal aux genoux. Qu’est-ce que tu réponds?

Michaël : Ça ne devrait pas.

Juliette : Au début s’ils ne sont pas en forme, c’est soit les genoux, soit je suis en train d’étouffer parce que mon cardio ne suit pas.

Michaël : Avec la douleur, de nouveau, c’est de voir en fait le sédentaire qui a des bonnes résolutions de début d’année qui se met à courir… Ça dépend aussi du passé des gens, les antécédents et ce qu’ils ont pu faire auparavant. Mais s’il a de bonnes volontés, qu’il n’a plus fait de sport depuis quelques années, qu’il se remet à la course, mais qu’il n’est pas fort musculairement, et qu’il se fait mal au genou. C’est peut être qu’il a été trop fort. Des fois on ne se rend pas compte, mais 20 minutes de course à pied le long du Rhône, ici, il y en a des impacts. Et ces structures, si les tissus ne sont pas adaptés à ça, et bien ça va vite crier, ça va vite faire mal.

Juliette : C’est ça qui est difficile. Quand tu es un groupe d’amis et que tu essayes de faire de la course sociale, les gens suivent et c’est difficile de leur dire, non, aujourd’hui tu ne viens pas avec moi parce que c’est trop pour toi.

Michaël : On est vite entraîné par le groupe, et par les réseaux sociaux, c’est clair que ça stimule. Ça fait aller trop vite, trop fort je pense. Maintenant c’est clair que ce sédentaire, s’il a mal après une course de 20 minutes, il doit en faire moins au début. Et là ça implique quelque chose que beaucoup de gens ne veulent pas. C’est-à-dire qu’ils se disent que le temps de mettre les chaussures si ils doivent aller courir cinq minutes, et bien non. Alors que oui, en fait, en théorie. Si ils chargent progressivement, ça peut aller assez vite. Mais il y a des gens pour qui moins que 20 minutes, ça n’en vaut pas la peine. Et c’est dommage ! À ce moment là, pourquoi pas essayer de discuter et de travailler avec un côté renforcement musculaire. Qui dans tous les cas serait intéressant. Et dire vous allez courir cinq minutes, vous faites un peu de renforcement,… ça se discute de le faire pendant. S’il veut courir 20 minutes, du coup là, il fait une pause, il a mal au genou, il fait peut être pas mal de renforcement pour renforcer ce genou. Puis il essaie de reprendre 20 minutes, pourquoi pas.

Juliette : Ou calmer selon les impacts, en faisant de l’intervalle gentil.

Attention en cas de changement de chaussure

Juliette : On a la même chose dès que tu vas changer les chaussures. Si tu changes pour des chaussures un peu plus minimalistes, il faudrait y aller progressivement. Personnellement j’ai changé de chaussures et j’avais dit, ce que je n’ai pas fait, je vais sortir dix minutes avec des chaussures minimalistes, je vais revenir et puis je vais reprendre avec mes anciennes chaussures pour faire le reste.

Michaël : Ça, c’est ce que tu t’es dit.

Juliette : C’est ce que je m’étais dit. Et c’est vrai que c’est difficile à suivre au niveau progression. Je l’ai peut faire. En contrepartie, avec les chaussures minimalistes, je n’ai pas couru autant. J’ai couru beaucoup moins dans la semaine et j’ai couru sur un temps beaucoup plus petit. Simplement parce que je sentais que je chargeais beaucoup mes jambes et mes mollets. Je n’avais pas envie de forcer parce que je connais le risque de blessure.

Juliette : Parfois, certaines personnes se permettent de ne pas suivre la progression. Mais dans ces cas là, faut vraiment compenser par l’écoute, par du repos, par de la mobilité derrière. Ce qui ne veut pas dire que durant le premier mois, à chaque fois je me disais : tu fais des bêtises, tu fais des bêtises. Mais par chance je ne me suis pas blessée. Mais il y a toujours cette notion de progression dès que tu changes une activité ou du matériel d’ailleurs.

Michaël : Exactement. Pour les chaussures, c’est clair que c’est le côté transition. Quelqu’un qui est intéressé par changer de gamme de chaussures, minimaliste, le maximaliste ou je sais pas comment on l’appelle exactement, il y a l’entre deux aussi. D’un coup ils veulent changer, souvent ils ne savent pas dans quelle catégorie ils se situent. La plus part du temps ils ont de grosses chaussures. Sur le marché, on en trouve beaucoup, en tout cas dans les commerces ici il y a beaucoup de grosses chaussures. Donc c’est clair que là, le changement de chaussures ça passe normalement facilement.

Michaël : Maintenant, des gens qui veulent passer plus sur du minimaliste, il y a la nécessité d’une transition. On parle d’un mois de transition pour chaque tranche de 10% de différence à l’indice minimaliste (la clinique du coureur). Donc en fonction du genre de chaussures, tu en as vite pour quatre, cinq mois, voire plus. Et du coup il faut être sacrément motivé.

Juliette : Quand tu changes de chaussures pour des chaussures identiques mais neuves, les premières courses, j’aurais vraiment tendance à dire qu’il ne faut pas faire comme s’il ne s’était rien passé. La chaussure est neuve, elle n’est donc pas aussi souple. La semelle elle n’est pas faite. Même si c’est la même marque, j’aurais tendance à dire, vous faites la moitié de ce que vous faites d’habitude la première semaine pour voir si les choses s’adaptent de façon naturelle ou pas.

Michaël : Même le même modèle, de la même marque, effectivement une usée ou pas usée, elles n’auront pas forcément exactement les mêmes contraintes. Tu as des variations liées à l’usure de la semelle, etc. Puis effectivement du coup, on ne peut pas repartir sur un volume de 60 km par semaine avec des nouvelles chaussures juste comme ça, c’est clair.

Les bâtons en trail

Juliette : D’ailleurs, j’avais une question sur le matériel, les bâtons en trail. Est-ce que tu peux m’expliquer à quoi ça sert, comment ça marche, comment on les utilise ?

Michaël : Les bâtons en trail, c’est débattu. Il n’y a rien de clair là dessus, mais rien. Beaucoup de trailers sont contre parce qu’ils trouvent que ce n’est pas dans la nature de la course d’avoir ce matériel. Et ils font sans par principe. Après je trouve que ça a quand même une utilité particulièrement en montée, sur des montées raides. Tu viens quand même soulager tes membres inférieurs par la poussée des bras. Donc il y a plusieurs techniques, en double planter dès que c’est vraiment assez en pente ou en alterné. Tu viens quand même soulager indéniablement ta musculature. Tu peux le compenser par pousser avec les mains. On le voit beaucoup, mais ça demande quand même plus d’énergie.

Michaël : D’autres voient l’utilité en descente. Moins souvent quand même, mais il y en a quelques uns qui voient l’utilité en descente par rapport à l’équilibre. C’est probablement des gens qui ont peur de se casser la figure. Bien que ça comporte un risque. Tu coinces le bâton dans un caillou, ça te fait pivoter… Ou des gens qui sont partisans de planter en descente les bâtons et puis de faire des « vols ». Moi, je ne suis pas persuadé. Je pense que l’impact est énorme en descente. T’as intérêt à plutôt gérer, à freiner, à faire des petits pas et puis laisser aller dès que c’est plus roulant.

Michaël : L’utilité pour moi, c’est en montée. Alors personnellement je connais pas mal de gens qui quel que soit le trail qu’ils font, ont les bâtons que ce soit 12 km, 20 km, 100 km etc… Moi j’ai un peu ma limite. Généralement au delà de 30 km, plus que 1800 de dénivelé, ça commence à bien chauffer chez moi en tout cas. Et là je prends les bâtons, parce que c’est une aide. Après, ça dépend aussi du profit de la course. Mais en règle générale, c’est comme ça. Moins que 30 km, j’arrive à faire sans par exemple.

Michaël : Et le désavantage des bâtons, c’est que c’est un peu du poids en plus. Alors on s’entend, ils sont légers maintenant les bâtons, mais ça reste quand même quelque chose à prendre. Ça fait gling gling gling derrière quand tu cours, c’est assez pénible. Pour moi, le plus gros désavantage, c’est que durant les courses, tu te questionnes un petit peu, je sors ou je ne sors pas les bâtons ? Est ce que la pente elle est suffisamment longue pour les sortir ? D’où le fait de connaître le profil. Si tu es constamment en train de les prendre, les ranger, les prendre, ça coûte pas mal d’énergie. Ça c’est le désavantage. Mais c’est une décision personnelle.

Juliette : Sur un syndrome de l’essuie glace, ça pourrait être une aide pour la reprise par exemple ? Ou au final, s’il reprend et qu’il y a des bons dénivelés qui nécessitent des bâtons, c’est qu’il ne doit plus avoir de douleurs ?

Michaël : Moi je pense que c’est plutôt sur cet axe là. Car de toute façon, la reprise, il la fait progressivement. Il a plutôt intérêt de le faire sans aide pour aboutir à augmenter progressivement sans sa douleur jusqu’à un point. Le jour où il prend les bâtons, qu’il ait un essuie glace ou pas, il va avec les bâtons et il aura de toute façon pas mal. Tandis que de reprendre peut être avec des bâtons en post blessure comme ça et que tu ne vas pas forcément les utiliser par la suite, il y a peut-être un risqueque la stimulation soit un peu différente et puis que ça refasse mal.

Juliette : Oui ce n’est pas forcément rentable.

Michaël : Moi je ne m’aventurerais pas avec ça, mais peut être.

Le renforcement musculaire pour le trail

Juliette : Au niveau renforcement musculaire, est-ce tu renforces spécifiquement certains muscles pour le trail ou tu fais du général ?

Michaël : Alors moi j’axe beaucoup, et je conseille aux gens d’axer sur les membres inférieurs. C’est assez vaste, on est d’accord. Je trouve surtout que c’est au niveau cuisse mollet que ça se joue. Et un grand oublié dans le renforcement c’est le pied. Très très peu de gens font du gainage du pied alors que c’est lui qui est en ligne de front, aux premiers contacts.

Juliette : Ce que tu appel le gaignage du pied, c’est des positions de semi entorse, de contre appui sur le pied ?

Michaël : Pas forcément, non. Vraiment, travailler la musculature intrinsèque du pied par des exercices. Tu peux prends un linge, que tu tires gentiment. Tu peux mettre un papiers sous tes orteils et tu écrases la feuille avec tous tes orteils sauf le premier que tu essayes de soulever… Écarter tous les doigts de pied. Et c’est assez intéressant de voir que très peu de gens sont capables de coordonner tous le éléments du pied, d’écarter les doigts, de serrer… de faire ce genre d’exercices. Il n’y en a pas beaucoup qui sont capables de le faire. Nos pieds à l’heure actuelle sont hyper rigides, et désadaptés de par les chaussures qu’on a au quotidien.

Juliette : Sur certains patients, tu as dû le voir aussi. Lorsqu’on explique ces exercices, tout le monde panique car ils n’y arrivent pas. Et petit à petit, ils sentent que le mouvement apparait. Alors ce n’est jamais un truc extraordinaire, mais de sentir qu’il y a des choses vivantes dans leurs pieds et qu’ils arrivent à les bouger, c’est assez fun.

Michaël : Mais le pied, c’est un peu le tabou. Parce que même si tu fais du gainage du pied, contrairement aux cuisses, aux mollets ou bien au gainage de la sangle abdominale, le bénéfice du gainage, l’aide que ça te procure elle n’est pas aussi grande, je trouve. Si tu fais un peu des cuisses tu es plus puissant et plus fort.

Juliette : Elle est moins visible.

Michaël : Les pieds on n’en prend pas beaucoup soin. C’est dans des chaussettes, dans des chaussures. Les ongles, c’est détestable en course à pied. C’est vraiment un oublié en terme de soins et de renforcement.

 

Le pied est un oublié en terme de soins et de renforcement.

Juliette : Toi , est-ce que tu vas chez la chez la pédicure-podologue ?

Michaël : Non

Juliette : Dans le passé j’ai rencontré un formateur à la clinique du coureur qui disait que depuis qu’il s’était accordé un budget pédicure ça avait changé sa vie. Simplement parce que les cors qui sont dus à la course à pied, les ongles, etc… Le nettoyage du pied de façon générale, l’assouplissement du pied, lui, il voyait que c’était bénéfique, moins de crispation dans le pied, donc moins de crispation qui remontent. Lui, il a vraiment vu un changement. Comme tu dis, je pense qu’on ne s’en occupe pas assez. Alors qu’il est vrai que si tu fais tes squats, rapidement tu vas voir la différence, tu vas sentir que tu montes plus vite, tu vas sentir que tu fatigues moins vite. Mais si tu fais tes exercices de pieds, tu ne vas pas forcément sentir grand chose. Mais en contrepartie, au niveau prévention des blessures intrinsèques aux pieds, de surcharge, fracture de fatigue au niveau des méta ou autres, ce n’est pas négligeable je pense.

Michaël : C’est clair. Et même de manière générale, le pied, c’est quand même le premier contact au sol. Donc s’il est faible, tu as beau être tout fort des mollets, des cuisses, des abdos et de tout, cette faiblesse, elle aura un impact global sur le corps. Elle sera compenser par le reste peut être, mais elle aura un impact quand même.

Pied creux, pied plat, que penser ?

Juliette : Entre un pied creux et un pied plat, quel est le meilleur pied pour toi ? C’est question piège. J’adore cette question.

Michaël : Je reste d’avis, mais je n’ai pas une grande expérience avec ça, que ce n’est pas un problème. Ni l’un ni l’autre n’est bon ou mauvais.

Juliette : On fait avec ce qu’on a.

Michaël : C’est un peu ça. Et de nouveau, le corps s’est adapté avec un pied plat, s’est adapté avec un pied creux. Donc en général ce n’est pas un problème. Maintenant, il y a peut être des cas particuliers qui nécessitent une correction ou une attention particulière, mais je pense que ce n’est pas un grand problème.

Juliette : Après c’est le même principe quand tu as déjà une petite scoliose. Alors on ne parle des cas chez les enfants, mais chez les adultes, ça sert à rien de sur corriger. Il faut aussi voir comment on est fait et voir si c’est une faiblesse ou pas.

Juliette : Après j’avais vu un chirurgien orthopédiste justement, qui nous avait posé cette question, donc face à des physio ou tout le monde s’est dit c’est le pied plat mais on sait que ce n’est pas le pied plat. Mais dans notre tête, inconsciemment, culturellement, on nous avait toujours dit ça. Et il nous dit, en fait le meilleur pied c’est le pied plat pour lui. Pourquoi ? Parce que c’est un pied qui absorbe mieux alors que le pied creux est plus rigide. En même temps, à la limite, on peut dire que pour courir, c’est le meilleur pied puisqu’il qui va permettre de transmettre la force plus facilement. Donc il y en a un qui absorbe mieux, mais l’autre qui transmet mieux la force. Donc c’est quoi le mieux ? En fait, il y en a pas un des deux.

Michaël : Après ça fait typiquement partie des trucs où c’est beaucoup des mythes ou des ancrages qu’on a depuis très très très longtemps. Les choses ont pas mal évolué, mais certaines choses sont restées ancrées comme ça. Et puis on reste là dessus.

Juliette : Le principe il ne faut pas bouger parce qu’on a mal, par exemple.

Michaël : Ce qu’on entend souvent aussi dans ces mythes : j’ai mal au genou. J’ai de l’arthrose donc je ne peux pas courir, ça je l’entends encore énormément. Ou je suis en surpoids, je ne peux pas faire de course à pied sur route.

Juliette : J’ai mal aux genoux, donc il ne faut pas courir, il n’y a pas de logique.

Michaël : C’est clair, ça fait partie des mythes. Donc le pied creux plat, pied plat, je pense qu’on a pas mal de mythes là dessus.

Ne pas attendre avant de consulter

Juliette : Après il faut garder cette notion, comme dirait aussi la clinique du coureur, la quantification du stress mécanique, y aller progressivement. Au final, notre corps s’adapte. Donc on fait avec le corps qu’on a, on regarde l’objectif qu’on veut et puis après on est censé y aller progressivement. Maintenant, si on n’est pas capable de le faire seul, il faut se faire accompagner. Et puis quand il y a blessure, comme tu disais par rapport à la douleur, c’est pourquoi j’ai mal, et aller consulter, ne pas attendre.

Juliette : Lorsqu’on a une inflammation au genou, ne pas attendre trois mois pour consulter car ça ne passe pas. Alors qu’entre temps on a continué son entraînement en serrant les dents. Ce n’est pas intéressant non plus.

Michaël : Et ça, malheureusement, c’est ce qu’on voit tout le temps. J’ai peu de patients qui me disent que c’est depuis la semaine passée et qui sont très alertes. Alors il y en a qui font attention, et ça va probablement passer, mais ils ne le font peut être pas assez attention. D’autres qui arrêtent complètement, ce qui n’est pas très bon. Et puis ils recommencent deux semaines après et ça revient. Mais c’est vrai que j’ai très peu de patients qui sont très réactifs. Souvent c’est des gens qui disent que ça fait deux mois, trois mois, voire plus, une année, deux ans qu’ils ont une douleur. Et là le problème c’est qu’effectivement, il faut comprendre qu’il y a des compensations qui s’installent. Il y a de l’irritation qui s’est chronicité. Et face à ça j’explique que ce n’est pas parce que tout à coup ils viennent voir un professionnel que ça ira tout de suite mieux. Quand ça fait quatre, cinq mois, une année ou deux qu’il y a une douleur, ce n’est pas en une ou deux séances, ou en deux semaines que ça va passer. Et là, je pense quand même que si on le prend à la base le problème, donc rapidement, oui, ça peut passer vite. Ça peut passer beaucoup plus vite, que si on a laisser la situation s’installer pendant plusieurs mois.

Juliette : Comme tu dis, il y a de compensation qui se sont mis au niveau des tissus aussi. Parce que les gens vont penser aux compensation par rapport à la hanche par exemple, mais rien qu’au niveau des tissus il y a des compensations qui s’installent. On peut aussi parler des changements au niveau du schéma corporel, au niveau des appuis, la prise de conscience, des choses s’installent dans la chronicité, et pour les enlever, ce n’est pas un thérapeute qui va réussir à les faire disparaître en claquant des doigts.

Michaël : Au niveau neurologique aussi, inconscient. Cet échange neural qui avec ces douleurs sera modifié.

Juliette : Y a tout un ensemble. Plus on prend tôt, mieux c’est. Après, il y a un problème dans le système de santé. Car ce n’est pas forcément évident d’avoir accès au médecin tout de suite. Donc il y a aussi cet élément qui retarde la prise en charge et le diagnostic. Je dis souvent ne traînez pas trop, mais je comprends qu’on ne consulte pas tout de suite.

Juliette : Et ensuite c’est l’expérience. Si vous vous êtes blessé une fois. Oui, parfois vous allez devoir aller payer de notre poche un thérapeute ou autre chose. Mais l’objectif c’est d’apprendre. D’apprendre de cet événement et de ne pas se reblesser par la suite. Parfois, il faut passer par des cliniques privées ou autre chose. C’est dommage, mais le système de soins fera, de plus en plus, que ça sera compliqué. Donc soit on aura les patients tard, soit on aura les patients tôt. On verra comment les choses évolueront. Maintenant, il y a énormément d’infos sur le site de la clinique du coureur, par exemple. On a accès à notre époque a beaucoup d’informations.

Michaël : En libre accès.

Les informations en libre accès, et les consultations à distance

Juliette : Alors on dit souvent aux patients de ne pas aller regarder sur Google. Là, on parle quand même de problématiques souvent mécaniques. Donc oui, sur Google, il faut que ça fasse le buzz. Donc la première chose qui va apparaître, c’est un truc catastrophique. En général ce n’est donc pas ça que vous avez Mais ça peut être intéressant d’aller s’instruire sur tous les réseaux sociaux pour voir un petit peu ce que je dois faire ou ne pas faire.

Michaël : Certains canaux effectivement spécialisés que ce soit sur la clinique du coureur, que ce soit chez Volodalen ou d’autres organisations. Je pense qu’il y a des canaux de confiance et qu’on peut aller voir. Le seul risque, c’est que face à une douleur de genou qui est mal différenciée, il ne faudrait pas prendre de raccourci. Il y a quand même des tests cliniques qui permettent de s’assurer que du diagnostic. Et comme je disais tout au début, on ne fait pas la même prise en charge en termes de coupure de volume, coupure d’intensité pour continuer à maintenir l’entraînement, ce n’est pas la même chose en fonction de certaines pathologies.

Juliette : C’est toujours le problème avec les réseaux. Les réseaux vont pouvoir nous éduquer. Mais toute thérapie, c’est du cas par cas. Donc c’est une face à face entre le patient et le thérapeute. Et il n’y a rien qui remplacera votre thérapeute en face et et vous qui lui communiquer vos ressentis. Et c’est pour ça que de toute façon il faudra à un moment ou à un autre consulter. Mais c’est vrai qu’il faut se préparer dans l’avenir à avoir justement des petits repères de référence parce qu’il y aura certainement de l’attente au niveau médical.

Michaël : Moi je fais un truc jusqu’à présent, à voir si je maintiendrai longtemps. C’est que je reste très disponible, que ce soit sur les réseaux ou bien par téléphone. Alors là aussi, je n’ai pas le patient en face. Tout ce qui est tests cliniques qui permettent d’orienter, vers telle ou telle pathologie, ils ne se font pas. Mais déjà on a un peu le côté coaching. Je ne suis pas coach donc je ne fais pas de plan d’entraînement. Mais je viens coacher dans la blessure, ça c’est plus mon truc forcément. Et par téléphone, on peut déjà aider. Je suis assez joignable justement à faire ça les choses comme ça. J’ai mal là depuis deux jours, qu’est ce que je fais ? On peut déjà pas mal orienter. Ce n’est pas tout de suite, viens au cabinet, on va voir ça. Parce que souvent, dans ces pathologies de course à pied en ostéopathie, je ne fais pas énormément de choses.

Juliette : Il n’y a pas forcément beaucoup de manipulation au départ.

Michaël : Il n’y a pas de manipulation. Dans certains cas, oui, ça ne va pas être mal de rééquilibrer. C’est clair qu’il y a des tensions donc ça ne va pas faire de mal. Mais le 80 % du job, ça va être cette quantification du stress mécanique. Et qui peut être mise en place déjà comme ça, par téléphone, sans forcément de diagnostic précis. C’est à dire ok tu réduis, … , essaye de faire comme ça ces deux ou trois prochains jours et puis on refait le point en fin de semaine. Et si ça ne change pas, il faut peut être venir comme ça, on est sûr de ce que c’est. Et puis là on prend en charge de manière encore plus ciblée. Mais le côté ok, j’ai réduit, j’ai fait un peu, ça va passer, réaugmente un peu progressivement sur une ou deux semaines. Très vite, les gens atteignent de nouveau leur potentiel d’avant. Et en fait, la petite alerte, elle est assez vite passée quoi.

Juliette : Oui et puis ça leur permet de se concentrer sur eux et de voir si par la suite il y a des choses à changer dans leur entraînement. Mais je pense que nous ostéopathes, physiothérapeutes, les coachs ils le font déjà, on sera amené à faire des consultations à distance, pour essayer de compenser la difficulté de consultation avec les médecins. Et c’est vrai que parfois juste sur la direction a donner, comme tu le dis, par téléphone, on arrive déjà a faire des choses.

Michaël : C’est pas idéal parce qu’il n’y a pas la personne en face. On peut pas toucher, c’est clair. Mais très rapidement ça peut donner une ligne de conduite à très court terme, qui peut être assez vite changer dans un sens ou dans l’autre.

Juliette : C’est toujours un peu compliqué. On verra comment les choses évoluent parce qu’on veut tout, mais en même temps, comme tu le dis, ce n’est pas idéal. En même temps, on ne peut pas toujours voir les patients. En même temps on va se poser la question sur les erreurs diagnostic … C’est compliqué, mais je pense que oui, à distance, on arrive de toute façon à faire des choses. C’est pour ça que lorsque vous êtes suivi par un coach, il faut en parler et lui même, il peut déjà commencer à diriger un petit peu. Maintenant, ça dépend des connaissances de chacun.

Michaël : Si il y a une douleur, c’est quelque chose à prendre en compte. Donc s’il y a un coach, il est censé le prendre en compte dans leur planification. Si un coach n’arrive pas à réadapter ce qui a été fait lors de l’apparition d’une douleur, je pense qu’il manque quelque chose. Mais beaucoup y arrivent, et revoient le plan, il est reconstruit à partir de là. Alors c’est assez assez optimal.

Juliette : Quand tu es accompagné dans ton sport, c’est souvent plus facile parce que tu as directement quelqu’un vers qui te tourner. Il y a cet aspect manque de progression, il y a aussi l’aspect de la charge mentale dû au stress de la vie. J’appellerais ça aussi la charge au niveau nutrition. Une nutrition qui n’est pas bonne ou au final tu récupères pas bien. Ça aussi c’est à prendre en considération.

Michaël : Oui, on parle souvent de charges d’entraînement. C’est cette courbe qu’on a en fonction de la charge qu’on met. Mais elle est à prendre en compte dans son contexte global de vie. C’est sûr que la fatigue, le job, le stress, la nutrition, enfin tout finalement charge le corps et en même temps on manque de récupération. Donc c’est clair que la récupération est un point clé aussi dans la prévention des blessures. On va accumuler des contraintes et puis à un moment donné ça peut casser.

Juliette : Après c’est toujours le même message, c’est qu’au final chaque individu est différent. Donc un programme doit être adapté à l’individu. La douleur, la prise en charge d’une douleur doit être aussi adaptée à l’individu. Il n’y aura jamais un message type. Globalement, le message il s’adapte à la personne qui est en face. Après il faut regarder la globalité, penser à la progression et y aller doucement, et s’écouter. Et puis aller interroger les professionnels de la santé ou les professionnels du sport pour pouvoir évoluer et progresser en toute sécurité.

La musculature du dos en trail

Juliette : L’importance du dos. Est-ce que pour toi la musculature du dos est importante ? J’ai vraiment le sentiment qu’on ne travaille pas assez le buste de façon générale, mais aussi les muscles du dos. On travaille toujours les abdos, etc …, mais les muscles du dos, … rien que pour la descente. C’est un apriori de ma part ?

Michaël : Non, les problèmes de lombalgies en course à pied, c’est des problèmes d’amplitude. Donc effectivement, c’est pas mal la descente, où on fait des foulées différentes, on laisse plus aller, etc… Avec un travail musculaire qui est différent aussi. Donc on a tout intérêt à avoir un dos qui est bien solide. Moi j’ai un peu cette notion en course à pied, en trail, cette notion de bas du corps. Pour moi le dos il est important au niveau lombaire en course à pied. Le gainage est important dans tous les sports, une sangle abdominale tonique pour tenir le bassin et le dos justement, c’est important. Mais ce n’est pas qu’une notion de grands droits, ce n’est pas que les abdos, ce serait de faire aussi les lombaires, les paravertébraux. Après, ce qui est plus haut du dos, ce serait de façon bien de le renforcer, ça ne ferait pas de mal. Mais je le trouve un peu moins important. Peut-être que des préparateurs physiques ont un autre avis.

Juliette : Il est peut-être plus important pour la vitesse ?

Michaël : Peut-être, ça je ne sais pas exactement. C’est moins mon domaine. Mais le côté lombaire, c’est certain. C’est certain qu’il faut le travailler. Si tu as des douleurs de dos après, pendant un effort c’est hyper handicapant de toute manière.

Les courbatures

Juliette : Je ne parle pas d’un trail longue distance ou d’un entraînement vraiment intensif, mais si tu fais un entraînement de charge moyenne, et que tu as des petites douleurs, des petites courbatures, elles devraient durer combien de temps, d’après toi ?

Michaël : Je ne sais pas le temps qu’elles peuvent durer. De nouveau c’est discutable. Mais pour moi, des courbatures, c’est normal. Il y a eu un effort, qui était peut être un peu plus fort que ce que le corps pouvait tolérer. Mais on n’est pas dans la blessure. Si on écoute ça, que ça passe assez vite, on peut très vite repartir. Et c’est qu’il y a eu au moins de l’adaptation. Quelqu’un qui fait quelque chose en sport, puis il y a rien. Alors soit c’est qu’il a fait le truc dans lequel il était très bien adapté, soit ce n’était pas assez fort pour générer de l’adaptation.

Michaël : Donc le fait d’avoir des courbatures, moi je suis assez content quand j’en ai. Parce que l’effort que j’ai fait la veille ou deux jours avant était suffisant pour au moins générer des modifications. Mais je sais que ça va passer. Là je reviens du trail de la Vallée de Joux, j’ai encore de bonnes tensions dans les cuisses. Mais potentiellement demain elles seront encore moins importantes. On est déjà à trois jours donc les tensions sont très bonnes. J’ai eu d’autres problèmes durant la course. Mais en fin de semaine, je pourrai reprendre mon plan d’entrainement sans problème.

Juliette : Il faut savoir s’écouter pour pouvoir redémarrer gentiment. Comme tu dis, si tu as des courbatures, c’est que tu as engendré une charge suffisante pour créer des adaptations. Mais on peut faire aussi une activité physique comme entretien. Si vous n’avez pas de douleurs, ça ne veut pas forcément dire que le sport que vous avez fait vous a servi à rien. Pas du tout.

Michaël : Non, non. C’est que c’est de l’entretien. On est peut être dans le côté je suis adapté, pleinement adapté à ce que je fais et j’entretiens ça. Je maintiens un peu sur cette charge là.

Juliette : Si je veux de l’adaptation, oui, il est normal. Mais si au final je cherche à faire mon activité sportive pour le plaisir, pour m’entretenir et pour bouger, je ne dois pas forcément avoir des courbatures.

Michaël : Et pour générer de l’adaptation, il n’y a pas spécialement besoin de courbatures non plus. On peut très bien faire un entraînement très spécifique en montée, ne pas avoir de courbatures le lendemain, c’est pas pour autant que ça n’a pas travailler. Mais cette notion de courbatures, elle indique juste que l’effort était peut-être un tout petit peu plus que ce que le corps pouvait tolérer. Donc il réagit comme ça. Mais ce n’est pas mauvais pour moi.

Juliette : À la limite, c’est l’indication de où se trouve votre charge. Là j’ai une bonne courbatures, je sens qu’elle va mettre quelques jours, je ne vais peut-être pas encore grimper l’intensité parce que là, peut être que je me dirigerais vers la blessure.

Michaël : Effectivement c’est une indication.

Juliette : Tu as déjà eu durant une course un énorme spasme musculaire qui t’a obligé de t’arrêter ? Comment on réagit à ce moment là ? Parce que je présume qu’on a envie de finir sa course. C’est difficile de savoir si on est en train de se faire une déchirure, un claquage ou si c’est simplement un spasme. Comment toi, tu as réagi ? As-tu des conseils par rapport à ça ?

Michaël : Je parle des crampes. C’est un vaste sujet, les crampes, très peu connu. Très peu traité, parce que de mon point de vue, pendant la course, tu n’as pas grand chose à faire. Au trail de la Vallée de Joux, j’ai eu des grosses crampes, parce que j’ai dû courir un peu plus vite pour rattraper le temps. Les crampes sont venues donc des deux côtés progressivement. À différencier de la déchirure qui peut arriver comme un coup de couteau, un coup de poignard généralement sur quelque chose d’intense. Donc tu accélères, tu as le coup de poignard, ça c’est clair qu’il y a un problème. Ça ne passe pas et ça te fait mal. Tu t’arrêtes, tu ne peux plus, à mon avis, à un moment donné, il faut stopper.

Juliette : On distingue bien la différence entre les deux.

Michaël : Une crampe, tu sens que ça commence à arriver. Qu’est-ce qu’il y a à faire pendant ? Soit tu serres les dents et que tu essayes de jongler avec ça. Généralement, d’expérience, elles ne passent pas trop. Mais tu peux moduler ça. Donc tu varies l’allure, tu fais de la marche, de temps en temps tu reprends et ou bien tu dis sur une allure où ça n’apparaît pas.

Michaël : Soit, sinon tu t’arrêtes. Tu essayes un peu d’étirement, du massage, c’est assez discuté scientifiquement sur l’intérêt réel. Mais ça va faire du bien, c’est clair. Quand tu t’arrêtes, lorsque tu repars peut-être que pendant quelques minutes, tu n’auras plus de crampes mais probablement qu’elles vont revenir. À l’heure actuelle, les crampes, on ne met plus le point sur le déficit en électrolytes ou sur la déshydratation. Si tu n’est pas bien hydraté, ça ne va probablement pas aider. Mais il y a plein de gens déshydratés qui n’ont pas de crampes.

Michaël : C’est plus une fatigue musculaire. Ce que je vois parmi les trailers, les coureurs, c’est qu’on part trop fort par exemple. En début de course, on a de l’énergie, et on grille nos cartouches. La fatigabilité musculaire est importante et c’est là que ça crampe. C’est cet arc réflexe qui ne module plus la contraction – relâchement.

Michaël : À l’heure actuelle tous ces produits miracles, jus de cornichon, poudre de magnésium qu’on prend durant une course, de bouillons… il n’y a rien de avéré en fait là dedans.Ça aide des gens.

Juliette : C’est pour ça que tu axes le renforcement musculaire, quand tu parlais des mollets, etc… pour vraiment qu’ils soient habitués à la charge.

Michaël : C’est clair que si tu n’es pas renforcé, si tu n’as pas travaillé ça, c’est compliqué. Et puis même en étant renforcé, si tu pars plus fort que ce que tu devrais faire sur telle ou telle course, c’est un risque qui peut arriver. Mais voilà, du coup, moi je serre les dents et puis je finis comme je peux. Tu perds du temps, c’est dommage parce qu’on cherche à gagner du temps au début, on a l’énergie, l’adrénaline, etc… Et au final, on en perd beaucoup plus après, parce qu’on a ce phénomène là.

Juliette : C’est pour ça que tu dois calculer comment tu veux faire ta course. Si tu donnes l’énergie au départ, quelle forme physique tu as, comment tu penses que ton corps va tenir selon les kilomètres que tu dois faire ?

Michaël : Si ça arrive, selon moi, il n’y a pas grand chose à faire, entre ces deux cas, serrer les dents, finir d’une manière ou d’une autre ou s’arrêter. Par contre, analyser pourquoi pour empêcher que ça arrive. Donc s’en tenir à son plan de course, pas partir trop vite et être reposer. Si tu es dans un état hyper fatigué avant une course, c’est clair qu’il y a un impact là-dessus. Être adapté aussi, une notion de climat qui peut jouer un rôle. Si tu habites dans des pays qui sont super humide, et que tu vas faire le marathon des Sables ou l’inverse. Il y a peut-être des choses physiologiques à prendre en compte.

Michaël : On parlait du renforcement, effectivement dans la notion de crampe, le renforcement est un élément important. Mais une part importante c’est l’assouplissement, que je ne fais pas beaucoup, et que peu de gens font. Mais c’est vrai que sur la notion de crampe, de travailler sur les étirements, ça peut aider à prévenir.

Les rouleaux d’auto massage et l’électrostimulation

Juliette : Est-ce que tu utilises les rouleaux d’auto massage ?

Michaël : Moi je l’utilise et je le conseille beaucoup. Il y a une douleur, il y a une fatigue musculaire, il y a une petite tension parce que c’était un effort important, travaillez le rouleau, c’est vraiment un bon outil, je trouve.

Juliette : C’est facile.

Michaël : C’est facile et ça peut faire mal sur le moment, mais on voit assez vite un relâchement. Ça ne prend pas énormément de temps. Et puis c’est assez efficace.

Juliette : C’est plus facile que de faire une session de mobilité ou de stretching.

Michaël : Ouais, c’est clair, ça parle plus aux gens.

Juliette : Par contre ça ne compense pas. Il faut faire un petit peu de stretching, un petit peu de mobilité.

Michaël : Oui ça ne compense pas. Ce qui ressort souvent aussi, c’est le complexe ou les appareils d’électro stimulation. Pour la récupération et le renforcement musculaire. Pour la récupération, je l’utilise assez souvent. Je trouve que ça ne fait pas de mal après une sortie. Par contre ça prend un peu de temps, de poser la machine. Après bon moi j’ai l’appareil avec les fils, donc du coup une fois que t’es posé, …

Juliette : Oui mais une fois que tu es posé, tu es zen. Ils ont démontré que tous ces appareils, ce n’était pas Evidence-Based Medicine. Par contre si ça amenait la personne dans une atmosphère positive de récupération, au final, ça favorisait la récupération. La même chose avec le massage de récupération. J’ai l’exemple d’un sportif professionnel (football) qui ne supportait pas de se faire masser. Sauf qu’après chaque match toute l’équipe se faisait masser. C’était un moment ou il se crispait, par conséquent le massage allait à l’inverse de l’objectif initial qui était de favoriser la récupération.

Juliette : Si tu utilises quelque chose qui t’amène dans une atmosphère cool, relaxe, de mise au repos, je pense que ça favorise la récupération. Ça sera une aide.

Michaël : Ce n’est pas le plus efficace, mais c’est au moins une aide qui est toujours bonne à prendre.

Juliette : Il n’y a rien de magique. Soit ça te correspond ou pas. Moi le Compex pour la récupération, ça va plus m’énerver qu’autre chose. Ça dépend de chacun.

Juliette : Le rouleau, il a quand même un petit côté mécanique. Mais c’est le même principe que pour le massage. Allez vous faire masser pour récupérer ? Ce n’est pas forcément démontré. C’est toute l’atmosphère autour. Car bizarrement, vous allez mieux manger, vous allez mieux vous hydrater, ainsi de suite. Donc si ça amène du bien être, c’est le bien être qui va permettre une meilleure récupération, je pense.

Michaël : Le rouleau c’est le côté le côté actif ou les gens, alors ça dépend à quel niveau… Mais que ce soit celui qui court une deux fois par semaine, il n’a pas forcément envie de faire du rouleau trois ou quatre fois dans la semaine. Et puis l’athlète élite qui s’entraîne deux fois par jour, il faut encore lui caser du rouleau actif en plus … , il n’en n’a pas spécialement envie. C’est pour ça que ça dépend pour qui. Moi j’aime bien ce côté rouleau. C’est un bon atout, une bonne arme pour des douleurs, des tensions. Le Complex, ou le TENS ça peut marcher aussi, ça a un côté plus passif où tu peux faire autre chose en même temps. Pour autant qu’il t’aide, il ne fera pas de mal à priori. Le rouleau ou les appareils électriques peuvent peut-être faire du mal, mais on le sent tout de suite à mon avis. Donc effectivement, si on sent que ce qu’on est en train de faire, est en train de péjorer la problématique, il faut stopper, ça c’est clair. Mais si c’est fait de manière tranquille et qu’on voit qu’il faut y aller, c’est assez intéressant.

L’électrostimulation

Juliette : Mais c’est vrai, comme tu dis, si c’est sur des gens qui manquent vraiment de temps, mettre des patchs, le programme de récupération et faire autre chose en même temps ça peut être intéressant. Si tu apprécies le côté un peu vibratoire.

Michaël : Il faut aimer. Ma compagne, elle déteste. En renforcement, par contre, c’est vrai que ça peut être intéressant, ces électrostimulations, mais en complément d’un renforcement actif. Ou en même temps, je ne sais pas, je n’ai jamais testé en même temps . Je ne sais pas vraiment l’intérêt qu’il y a. Mais pour moi ça me parle, ça parait assez logique. Mais c’est vrai qu’il y a pas mal de gens qui comptent sur ces appareils là pour ne pas faire de renfort.

Juliette : Le problème c’est que ça fait de la gonflette, mais niveau neuromusculaire, … Personnellement, je l’utilise de moins en moins à part en post opératoire, simplement pour essayer de maintenir un petit peu de la masse. Sinon, la fonte, elle est énorme, donc on récupère quand même beaucoup plus vite. En réveil musculaire c’est intéressant. Peut-être que j’y reviendrais, mais je l’utilise moins chez les sportifs une fois qu’ils arrivent à un certain niveau en même temps que les exercices.

Juliette : Parce que j’ai vraiment pas le sentiment qu’il y ait vraiment une plus value. Et en contrepartie je trouve que ça perturbe la personne d’avoir cette électricité et cette stimulation neuro musculaire par la machine. Parce que c’est quand même un peu douloureux. Moi, ce que je cherche, c’est le contrôle. Maintenant on manque de temps aussi. Si la personne je la voyais quatre fois par semaine, peut être que je lui ferais une fois dans la semaine.

Juliette : Mais actuellement je le fais de moins en moins en actif, en réhabilitation parce que je vois pas de plus value et que je me dis que je perds du temps par rapport à ce contrôle neuromusculaire, ce contrôle vraiment actif du patient. Mais ce regard est très personnel.

Juliette : Mais peut être que j’y reviendrai. Et puis, c’est du cas par cas. Si on a un patient où ça le motive et il a l’impression que ça l’aide, pourquoi ne pas le faire quoi. Je ne pense pas que ça lui fasse de mal en tout cas.

Juliette : Est ce que tu aurais autre chose à rajouter?

Michaël : Non, je ne crois pas comme ça.

Juliette : Je te remercie de ton temps.

Michaël : Merci à toi.

Juliette : Et puis si on veut te trouver, il y a les réseaux sociaux, il y a ton cabinet qui a Sion. Sinon on va te suivre dans tes courses, et on va te souhaiter bon courage et bon entrainement.

Michaël : Merci à toi. Ciao !

Et si on développait la boxe thaï en Suisse romande ?

Vous pouvez regarder ce podcast sur notre chaîne youtube

Vous pouvez écouter ce podcast sur :

 

Les intervenants

Jérôme Pittet : Coach et fondateur de No Limit Squad

Juliette Corgnet : Physiothérapeute

Les titres de Jérôme :
  • Ancien combattant pro MMA
  • 1er Open combat grappling
  • Champion Swiss fighting league
  • 1er Open grappling submission only
  • Vice champion suisse shoot

Transcription du Podcast

Juliette : Bonjour et bienvenue sur le podcast Santé Sport de CapRol. Aujourd’hui, on est avec Jérôme Pittet à Montreux. Bonjour, Jérôme. Peux-tu te présenter stp? 

Jérôme : Je m’appelle Jérôme Pittet, j’ai 37 ans. Cela fait trois ans que j’ai ouvert No Limit Squad ici à Montreux. En parallèle, je travaille comme électricien. 

Que signifie No Limit Squad ?

Juliette : Peux-tu nous expliquer le logo ? Comment tu l’as trouvé, est-ce qu’il signifie quelque chose de particulier ? 

Jérôme : Le logo, c’est toute une histoire, comme un peu tout le début de No Limit Squad. Ça s’est fait avec ma copine, avec les moyens du bord. On voulait quelque chose qui mettait en avant tout ce qui était MMA. Donc à la base c’était la cage de MMA avec No Limit Squad en Word, et on s’est lancé comme ça. Le logo a été assez simple à trouver et au fur et à mesure on a paufiné.

Juliette : Vous avez trouvé le nom après ou au début ? 

Jérôme : Un petit peu en même temps, je voulais me diversifier par rapport à tout ce qui est fight, boxing, pour changer un petit peu. Et ne pas me restreindre dans une discipline. Au début de la salle, il y avait du MMA, du grappling, de la boxe thaï. Ce n’était donc pas seulement de la boxe Thaï ou de la boxe. On voulait ouvrir au maximum. 

Juliette : D’où le No Limit au départ ?

Jérôme : D’où le No Limit, on n’a pas de limite, on peut se dépasser. Et le squad, c’est l’équipe. Vu que je suis assez militaire sur les côtés, … , c’est quelque chose de carré. 

Juliette : Donc ça te représente. Tu as vraiment trouvé ton identité dans cette salle.

Jérôme : Le but c’était vraiment comme sur toute la salle, quelque chose d’assez simple et épuré. Du noir, et du blanc. Pas trop de fioritures. 

Juliette : On voit que c’est assez joli.

Jérôme : Je ne suis pas trop fan des couleurs flashy de base. 

Le parcours sportif de Jérôme

Juliette : Est ce que tu peux nous raconter un petit peu ton parcours au niveau sportif? 

Jérôme : J’ai commencé les arts martiaux assez tard. À 18 ans, quand la majorité m’a permis de faire ce que je voulais. Comme j’étais un peu bagarreur quand j’étais jeune, mes parents ne voulaient pas que je fasse d’arts martiaux. Ils avaient peur que cela empire.

Juliette : Ils avaient peur que ça accentue, alors que souvent on dit que c’est l’inverse ?! 

Jérôme : C’est vrai qu’ils ne connaissaient pas les arts martiaux. Donc ils avaient un petit peu peur de ça. J’ai donc commencé à 18 ans dans un petit club de Kick-boxing à La Tour-De-Peilz. J’ai fait 2-3 ans là-bas. Et puis j’ai voulu partir en Thaïlande parce que mon truc c’était vraiment la boxe thaï. À mes 20 ans, je suis parti trois mois en Thaïlande, pour voir comment ça se passait. C’était intéressant. C’était rude. Et ça c’est plus ou moins bien passé.

Juliette : C’était combien d’entraînement, c’était toute la journée ?

Jérôme : C’était un peu plus de 4h d’entraînement par jour. Le matin, on allait courir à 5h30, pour 10 km. Après, on faisait 1h de sac, de la musculation et des fois un petit peu de Pao. C’est-à-dire, frapper dans le Pad. L’après-midi, on repartait à 15h faire 10 km. Ensuite on faisait des rounds de sparring, donc des combats d’entraînement, 5 rounds de 3min. Après du sac et à la fin du clinch, c’est du corps à corps avec des coups de genoux. 

Juliette : Tous les jours ?

Jérôme : Tous les jours, sauf le dimanche. Le dimanche, c’était repos. 

Juliette : Tu as eu des blessures ? 

Jérôme : Rien de grave. 

Juliette : Des bleus ?! 

Jérôme : Des bleus, des petites ouvertures, des chaos. Le seul endroit où je me suis fait mettre KO, c’était en entraînement en Thaïlande. C’était intense. 

Juliette : Et tu es resté trois mois, quand tu es rentré, qu’est-ce que t’as fait ? Tu t’es dit: « tiens j’ai atteint un certain niveau » …

Jérôme : Quand je suis rentré, je voulais au début vivre de ça. Je suis un petit peu un rêveur. Je me disais que c’était génial, et que j’allais vivre de la boxe thaï. Et puis quand j’ai vu qu’avec un combat on gagnait, à l’époque, pour un étranger 50 francs, sans compter qu’une partie va au club. C’est vrai que j’avais fini mon apprentissage quand je suis parti, avec quand même un salaire un peu plus correct. Et se faire casser la gueule tous les jours pour 50 francs par toutes les deux semaines … Ça m’a remis les idées en place. En plus, j’avais l’armée quand je rentrais. Donc je me suis dit : on va faire ça, et puis on verra après. 

Juliette : On fait le cursus « normal » et puis on verra. Mais tu as continué la boxe. 

Jérôme : Après l’armée, oui j’ai continué la boxe. J’ai eu quelque fois des petites blessures, mais j’ai toujours continué jusqu’à ce que je parte dans le MMA.

Juliette : Donc après tu as fait du MMA.

Jérôme : Dans le club où j’étais il n’y avait pas vraiment de compétiteurs ou de façon de pousser. Il fallait aller sur Genève. Ce n’était donc pas toujours facile à concilier avec le travail. Mon beau-frère à l’époque, avait ouvert avec un autre entraîneur un club de MMA. Je n’étais pas spécialement fan de cette discipline. Pour moi à l’époque, c’était des gens qui se faisaient des câlins au sol. Mais je me suis dit que j’allais essayer. Et au final, j’ai bien accroché ! C’était surtout un club de compétiteurs, donc c’était ce que je recherchais. Après j’ai allié les deux, boxe thaï et MMA. J’ai surtout combattu en MMA, mais j’ai encore fait quelques combats en thaï et en kickboxing.

Origine de la boxe thaï

Juliette : Est ce que tu peux nous expliquer d’où vient la boxe thaï, son origine ? 

Jérôme : Le Royaume du Siam. Je crois que c’est au XVᵉ siècle, que ça a été pris par l’armée thaï pour former les militaires. Vraiment dans le but militaire. Et au fur et à mesure, c’est devenu un sport vu que tout le monde le pratiquait. Puis ça s’est codifié. Ça a même été interdit dans les années 20 parce que c’était trop violent. Ce n’était pas sans règles, mais un petit peu. Il n’y avait pas de limite de temps, pas de catégorie poids, rien du tout. Ça a été interdit. Puis c’est revenu, je crois, 15 ou 20 ans plus tard, avec des règles plus ou moins actuelles : un ring, des catégories, etc… 

Juliette : Comment tu expliques que la boxe thaï, soit « à la mode » ou aussi « connue ». Tout au moins en tant que nom, parce que les gens ne connaissent pas forcément les spécificités. 

Jérôme : Certainement parce que c’est un sport « impressionnant ». Ça fait beaucoup le show. Maintenant, il y a aussi la MMA qui a pris un petit peu d’ampleur. Mais c’était un peu le premier sport vraiment très dur. Avant, il y avait le karaté qui au début des années 70-80, était à la mode. Le karaté kyokushin, que tout le monde voulait faire, c’était le sport le plus violent. Par la suite, la boxe thaïlandaise s’est fait connaître, et c’est devenu le sport numéro un que tout le monde voulait faire, un peu par effet de mode. C’est vrai que c’est un sport qui a aussi beaucoup de bonnes valeurs : la discipline, le respect, … Il n’y a pas juste que le côté combat, il y a aussi tout ce qu’il y a à côté. 

Juliette : Tout ce que ça véhicule derrière.

Les différentes boxes

Juliette : Quelle est la différence entre les différentes boxes, boxe anglaise, boxe française, boxe thaï ?

Jérôme : Boxe thaï, Muay thaï, c’est l’art des huit membres. Donc c’est les coudes, les poings, les genoux, pieds. Plus tout ce qui est corps à corps, clinch. Donc c’est amené au sol, mais ce n’est pas de la lutte. On peut frapper, balayer, et quand on est au sol on se relève et on recommence.

Juliette : On ne peut frapper que lorsqu’on est debout. 

Jérôme : La boxe anglaise, c’est seulement avec les poings. La boxe française, c’est avec les poings et les pieds. 

Juliette : Il y a un mouvement qui est différent, entre les différentes boxes, ou une dynamique différente ? 

Jérôme : Clairement, vu que chaque sport a sa spécificité. En boxe anglaise, on a que les mains, on ne va pas se tenir de la même façon. Même chose, même si le kickboxing et la boxe thaï ont de grosses similitudes, rien que le fait de pouvoir agripper les jambes, ça change beaucoup la dynamique. 

Juliette : Visuellement on est pas dans la même chose.

Jérôme : C’est vrai que pour les non-initiés c’est la même chose, ils voient des gens qui se tapent dessus, c’est pareil. Mais il y a énormément de règles différentes et du coup ça change beaucoup le style. 

Les règles de la boxe thaï

Juliette : Quelles sont les règles de la boxe thaï?  C’est peut être compliqué à expliquer sans pouvoir prendre un exemple visuel.

Jérôme : En gros, on a le droit de frapper sur toutes les parties du corps. A part ce qui est, l’arrière du crâne, le dos, les parties génitales ou la gorge, etc… On a le droit de frapper avec les coudes, les mains, de faire des projections … c’est assez libre dans la pratique. Après c’est comme tout, il a des règles, si quelqu’un est compté au sol, il y a des points, …, mais ça reste assez libre sur la façon de boxer.

Juliette : Il y a beaucoup de KO ? 

Jérôme : Plus on va dans les professionnels, plus a de KO. La taille du rembourrage du gant c’est du 10. Et là ça frappe quand même fort. Les jambes et les coudes, il n’y a pas de protections. Donc ça ouvre vite le risque de blessures. 

Juliette : Les coudes et les jambes, il n’y a pas de protection du tout ?! Les protections, ce n’est qu’à l’entraînement.

Jérôme : En professionnel il n’y a pas. En amateur, il y en a. En Thaïlande, Les combats amateurs, ce n’est pas ce qu’il y a de plus connu, sachant qu’ils commencent dès l’âge de huit ans les combats, même des fois plus jeune. 

Juliette : Mais là-bas, quand ils s’entraînent, ils s’entraînent avec des protections ?

Jérôme : Oui ils s’entraînent avec des protections. En Thaïlande, ils combattent une fois par mois ou même des fois un petit peu moins, le but ce n’est pas de se blesser en dehors. Le sport est déjà tellement violent. Souvent ils sont plus intelligents que nous, ils s’entraînent de façon plus légère. Ils tapent fort dans les paos, dans les sacs. Mais en sparring ils sont plus softs, plus techniques. Ici, des fois, c’est compliqué de faire comprendre aux élèves que cela ne sert à rien de se taper comme des sauvages à l’entraînement. 

Juliette : C’est peut-être une notion de quantité. Peut-être que là bas, ils ont tellement plus de quantité qu’ils ont moins besoin de se défouler ?! 

Jérôme : Clairement. Les Thaïlandais qui combattent, à mon âge, ils ont 300 combats. Ici, si quelqu’un a déjà 100 combats, c’est énorme. C’est plutôt entre 40-50. 

L’âge de tes élèves

Juliette : Au niveau de tes élèves, quelle est la moyenne d’âge ?

Jérôme : Je pense que si on fait la moyenne c’est environ 25 ans. Chez moi les cours adultes commencent à partir de 14 ans. Le plus âgés à 50 ans. 

Juliette : On peut commencer à tout âge ? 

Jérôme : Oui. Moi je commence avec les enfants à partir de 7 ans. Après, c’était un choix. Parce que je trouve qu’à 7 ans, c’est là où ça commence à devenir intéressant. En dessous, pour moi, je trouvais ça plus compliqué. Mais à des endroits ils commencent à 4 ans. NLS a deux groupes, 7 à 10 ans et 10 à 14 ans et après, ils peuvent intégrer les adultes. 

Les petits et la boxe thaï

Juliette : Est ce que ça canalise les enfants ? Par rapport aux appréhension des parents par exemple.

Jérôme : Maintenant, j’ai l’impression que c’est l’inverse. Les parent les envoient à la boxe parce qu’ils en ont marre qu’ils soient trop turbulents à la maison. Ils veulent les cadrer. Mais cela dépend de l’enfant. Avec certains on ne peut pas faire grand chose, ce n’est pas de notre ressort. Pour les petits, ça reste beaucoup du jeu, de la connaissance de son corps, de la coordination, ce genre de choses. Mais y a aussi les notions de respect, de discipline. Et les parents sont contents qu’il y ait cette partie là. 

Juliette : Qu’ils se défoulent et en même temps tu vas les cadrer. Parce qu’à chaque fois qu’il y en a un qui est au sol, on s’arrête, … 

Jérôme : Oui et le fait qu’ils aient des tâches bien précises, ça permet de cadrer les choses. Je suis assez stricte, même avec les enfants. Et ça se passe bien. Mercredi, c’était la rentrée scolaire, j’avais 18 enfants de 7 à 10 ans. C’était sport, mais ça a été.

Juliette : Garçons, filles ?

Jérôme : Majoritairement, c’est des garçons. Après ça dépend. Mais c’est vrai que les garçons aiment un peu plus la bagarre.

Juliette : A cet âge là, les filles, c’est peut être un peu plus rare.

La mixité du sport

Juliette : Dans la boxe thaï de façon générale, en Thaïlande, il y avait beaucoup de femmes qui pratiquaient ce sport ?  

Jérôme : Oui. Du moment qu’on est chez les adultes. Au clubs, il n’y a pas la parité. Mais on a certainement 65% d’hommes et à 35% de femmes. Peut être des fois un peu plus. Ça s’est beaucoup démocratisé.

Juliette : Culturellement, ou ça a toujours été mixte ?

Jérôme : Dans tous les sports de combat, ça reste un milieu assez masculin. Mais ça change au fur et à mesure. Et puis c’est bien, ça apport du sang neuf. Moi, je suis content quand j’ai des filles. Si j’ai des compétitrices, c’est bien parce que vu qu’elles sont aussi moins nombreuses, si elles crochent, … Et puis souvent les filles sont un peu plus déterminées que les garçons. Quand elles veulent quelque chose, elles y vont, les garçons c’est plus en dents de scie. 

Organisation de camps d’entraînement en Thaïlande

Juliette : Tu as organisé pour la première fois, cette année 2023, un camp d’entraînement en Thaïlande. Pourquoi et comment ça s’est passé ? 

Jérôme : Depuis mon premier voyage, j’ai toujours voulu faire partager cela aux gens. Maintenant que j’ai mon club, c’était le moment de se lancer. La première fois en Thaïlande, … C’était assez compliqué, parce que le propriétaire du club n’avait pas la pédagogie que j’espérais. Je me faisais insulter tout le temps. Déjà que c’était dur physiquement, psychologiquement, c’était assez éprouvant. C’est le côté qui ne m’a pas plu. 

Juliette :Tu te faisais insulter parce que tu étais l’étranger qui arrivait ?

Jérôme : C’était la personne qui n’était pas très intelligente. Et moi j’étais tout jeune. Pas pour eux car ils commencent bien avant. Vu que je travaillais et que je n’avais que deux ans de pratique; Je donnais beaucoup mais voilà, je ramassais beaucoup surtout.

Juliette : Comment as-tu trouvé le club ? 

Jérôme : A l’époque j’avais aussi trouvé avec internet. Il y a 15 ans en arrière, ce n’était pas la même chose qu’aujourd’hui. On n’avait pas les réseaux sociaux, les retours et tout ça. Donc je suis un peu parti comme ça.

Juliette : Grand rêveur, je veux partir, je regarde et j’y vais.

Savoir encaisser la douleur

Jérôme : Oui, c’est ça. J’avais vu un film à l’époque, Chok Dee. C’est un film avec un combattant français qui était justement parti en Thaïlande. Je me suis dit : merveilleux, je veux être la même chose. Mais c’est ce que je dis aux jeunes, quand ils voient certains films, et qui viennent en me disant : je veux être champion du monde. Je leur dis : oui c’est bien mais à travers l’écran on ne sent pas la douleur. Il y a d’autres choses derrière, allez-ci tranquille.

Juliette : Oui, parce que la douleur il faut quand même pouvoir l’encaisser. Il y a quand même un aspect terriblement mental !

Jérôme : Oui, c’est ça. Le physique ça se travaille. C’est dur mais c’est plutôt le côté psychologique qui est difficile. Surtout quand on s’attend à quelque chose et qu’on se ramasse une grosse claque.

Juliette : Et qu’on se dit le départ ce n’est pas bientôt.

Un camp sur l’île de Puket

Jérôme : Oui c’est ça. Donc, je voulais éviter ce retour de bâton pour les gens. On a regardé plusieurs endroits. J’avais fait mes derniers camps d’entraînement sur Phuket. Vu que les gens prennent des vacances pour ça, il fallait quand même que ce ne soit pas juste de l’entraînement au milieu de la jungle pendant deux semaines intensives. Je ne suis pas sûr que ça aurait eu énormément de succès. Du coup, l’île de Phuket, c’est facile, il y a un peu de tout. On est allé du côté de Chalong, ça reste très touristique, mais il y a moins le mauvais côté de la Thaïlande, les bars, etc… Et puis, j’ai testé un club là-bas l’année passée, en repérage. J’ai vraiment eu un super feeling avec les coachs. Un club pure thaï. Pas un gros centre, avec toutes les disciplines. Ce n’était que de la boxe thaï, des coachs thaï, et la façon de thaï de faire.

Juliette : La volonté de partager.

Jérôme : Oui vraiment un super feeling. Quand j’y suis allée l’année passée, ils avaient l’anniversaire du club. Ils nous ont invités alors qu’on ne les avait vu qu’une fois. J’ai pu faire bénir mon mongkon. C’est comme une amulette qu’on met autour de la tête pour les combats en boxe thaï. Il y avait un moine qui venait, c’était une chouette expérience. On leur a donc demandé si on pouvait organiser un camp avec eux. Ils étaient contents, parce que ça reste aussi de business.

Juliette : Oui, je pense bien.

Jérôme : Donc, on a organisé ça, on est parti avec quatorze élèves. Franchement, c’était cool ! Une première fois où on découvre les joies des voyages organisés. Mais pour tout le monde, ça a été vraiment une chouette expérience avec des grands retours. Même, je pense, au-delà de mes attentes. Les gens m’ont dit : je me rappellerai toute ma vie, c’était génial … Pour moi, c’est normal d’aller m’entraîner en Thaïlande, c’est un truc que je faisais régulièrement. C’était vraiment cool !

Juliette: Il y a aussi cette notion de culture. L’atmosphère est différente. S’entraîner à Montreux et s’entraîner en Thaïlande, je pense que ce n’est pas tout à fait pareil.

Jérôme: Non, clairement. Rien que la chaleur, ça change pas mal. Surtout sur la façon de donner un cours, ce n’est vraiment pas la même chose. C’est pour ça que je voulais qu’ils découvrent.

Juliette : Ils parlaient anglais ?

Jérome : Ils parlent tous anglais. C’est l’anglais que moi, je connais. L’anglais thaï, c’est un mot, je, le verbe et puis ça s’arrête. Moi, je les comprends très bien. Les gens qui parlent parfaitement l’anglais ont parfois de la peine.

Juliette : Mais il n’y a pas eu tellement de soucis, parce qu’à partir moment où on est dans une certaine dynamique, on arrive à communiquer, à partager. Parfois, il n’y a pas besoin de parler.

Jérôme : Oui et puis c’est assez simple. En plus ils sont très ouverts.

La nutrition

Juliette : Au niveau de la nourriture, ça a été ?

Jérôme : Oui, je pense que ça dépend aussi de la fragilité des estomacs. Il y en a quand même eu quelques uns qui ont passé un ou deux jours aux toilettes. Mais ils n’ont pas mal mangé. La nourriture thaï reste très saine.

Juliette : A la limite elle est même plus saine que chez nous !

Jérôme : Vu la chaleur, le nombre d’entraînement par jour, les gens n’ont pas forcément envie de manger gras ou autre. C’est des shakes de fruits. Le matin, des omelettes, du riz, des nouilles de riz, …

Juliette : Est-ce que tes élèves ont eu l’impression de manger plus sainement?

Jérôme : Ils étaient tous heureux de la nourriture, surtout des shakes de fruits. C’est le premier truc qui leur manque. La nourriture thaï est trop bonne ! C’est ma nourriture préférée.

Juliette : Est-ce que tu fais partie de ces sportifs qui considèrent que la nutrition a un impact sur ton sport ?

Jérôme : Oui, énorme ! Moi, je suis un gros mangeur et j’adore la malbouffe. Ça a toujours été difficile à gérer pendant les préparations pour les combats, la perte de poids. Donc, c’est vrai que maintenant que je ne combat plus j’essaye de faire attention, mais c’est pas évident.

Juliette : Pas toujours évident de trouver le juste milieu entre plaisir et santé.

Jérôme : Quand on n’a pas d’objectif de poids à tenir, c’est un peu plus difficile.

Les catégories

Juliette : Il y a des catégories de poids, mais est-ce que les combats sont mixtes ?

Jérôme : Pour les enfants, les tout petits, vu qu’il n’y a pas vraiment de différence de force, ça peut être mixte. Dès l’âge de 14 ans voir même un peu en dessous, c’est vraiment séparé. Même au même poids, les hommes ont quand même plus de force, donc ça serait un peu dangereux, donc c’est toujours séparé.

Juliette : Quand vous vous entraînez, par contre, vous mélangez tout le monde, ou chacun reste dans sa catégorie ?

Jérôme : À des endroits, certains ont des cours seulement pour les femmes. Moi ici tous les cours sont mixtes. Ça permet à tout le monde d’apprendre, à vivre ensemble, à s’entraîner ensemble, à se dépasser. Pour moi, il n’y a pas de différence homme, femme.

Juliette : On apprend à s’adapter au partenaire.

Jérôme : C’est ça. Vu que c’est à partir de 14 ans, jusqu’à pas d’âge, ça change aussi pas mal. Un(e) jeune de 14 ans n’a pas la même force qu’une personne de 30 ans. Chacun s’adapte à la personne la moins avancé ou la moins forte. Comme ça tout le monde progresse et puis ça fait du bien à tout le monde.

Juliette : L’objectif c’est toujours pareil, c’est d’essayer de progresser et pas forcément de se défouler.

Jérôme : C’est ça, c’est vraiment important que tout le monde puisse avancer. Et puis, grâce à ça, tout le monde évolue, tout le monde devenir meilleur, et c’est parfait.

Le renforcement musculaire

Juliette : Comme tu l’as dit, quand tu faisais tes entraînements en Thaïlande, il y avait de la course à pied. Je ne vais pas prôner la course à pied. Tout le monde sait que j’aime beaucoup la course à pied. Par contre, le renforcement musculaire. Est-ce que toi, tu l’inculques à tes élèves ?

Jérôme : Oui, c’est pour ça que lorsque j’ai ouvert le club, j’ai fait deux parties. Une partie pour tout ce qui est arts martiaux, très axé sur la technique. Il y a toujours un petit peu de pompes, des abos, un petit peu de choses, mais c’est principalement de la technique. Et, une partie pour tout ce qui est cross training, préparation physique, renforcement. Parce qu’on ne peut pas être, un combattant ou même faire un art martial sans faire de conditionnement physique. Et pour les compétiteurs, c’est indispensable.

On ne peut pas être un combattant ou même faire un art martial sans faire de conditionnement physique.

Juliette : Les gens ont tendance à l’oublier.

Jérôme : C’est clair que, pour eux, ils viennent faire du sport, donc c’est inclus dedans. Bien sûr qu’on travaille, qu’on va gagner en masse musculaire, mais ce n’est pas spécifique.

Juliette : Comme je dis souvent, il faut pouvoir encaisser. Le problème, pour moi, des sports de combat de façon générale, c’est que la technique évidemment que c’est hyper important, mais les gens y vont pour se défouler, travailler la technique, mais oublient de travailler le physique. Après, ils se blessent, et vont dire: mais pourtant j’ai un bon physique. Oui tu as un physique de combattant, mais il faut entraîner sa musculature pour pouvoir encaisser les coups.

Jérôme : C’est sûr, c’est indispensable. Pour les gens qui viennent juste faire du sport comme ça, je ne peux pas les obliger à faire du renforcement, et du conditionnement physique. Mais pour les combattants, ils n’ont pas le choix. C’est tous les jours, c’est obligatoire et puis, de toute façon, ils le sentent bien.

Les combattants du club

Juliette : Il y a beaucoup de combattants, par rapport à tes clients à l’heure actuelle ?

Jérôme : Non, ça reste quand même la plus petite partie. Actuellement, qui combattent, j’en ai trois ou quatre. Le club est aussi assez jeune, c’est vrai que ça prend du temps. On va faire la troisième année, avec Covid. On va dire, deux années pleines.

Juliette : Le club est très très jeune.

Jérôme : Mais ça va, je suis content. J’ai eu un champion Suisse en box thaï. Les deux qui ont fait tout le championnat Suisse en kickboxing, sont tous les deux premiers de leur catégorie. Pour l’instant je suis content.

Juliette : Les résultats sont plutôt pas mal. Après, tu vas avoir l’émulision de ces champions qui sont dans le club, et qui vont partager avec les autres.

Jérôme : Ce qui est toujours difficile, c’est de ne pas perdre ces combattants, qu’ils n’aient pas envie d’arrêter ou autre. Après, c’est le jeu. Mais c’est vrai qu’on passe énormément de temps. Pour les combattants, j’ai quasiment une heure chaque soir spécifique avec eux. Plus le reste du temps qu’on prend pour eux, pour les combats. C’est un gros investissement sur les combattants, donc ça fait toujours mal au coeur quand on les voit partir. Mais c’est le jeux.

Juliette : Après, des fois, c’est la vie aussi.

Jérôme : C’est toujours bien d’avoir des combattants. Rien que pour le club, les gens savent qu’il y a la possibilité de combattre, et qu’il y a des résultats.

Juliette : Quand un combattant extérieur passe devant le club, peut-il rentrer et venir s’entraîner ?

Jérôme : Oui, on a eu le cas avec un ancien combattant de l’UFC, qui était de passage à Montreux. L’UFC, c’est une grosse organisation de MMa. Il était sur Montreux, avec son manager, et il a demandé s’il pouvait venir s’entraîner. Ils sont passés, on a fait quelques petits rounds de sparring légers. Et puis c’était génial. Ils ont partagé un petit peu. Les élèvent étaient super impressionnés de voir quelqu’un, et ils étaient très gentils.

Juliette : C’est le principe du partage des sports de combat. Ce n’est pas que combattre.

Jérôme : Non, clairement. Après, des fois, on doit aussi mettre des limites. Quand les gens nous disent : on veut venir juste pour faire des combats d’entraînement. Si je ne connais pas la personne, .. je veux aussi protéger mes membres. On ne sait jamais, on ne connaît pas les gens. Le but, ce n’est pas de faire venir n’importe qui pour qu’ils se fassent taper dessus. Moi, ce n’est pas ma pédagogie. Les gens qui veulent se taper dessus, et bien ils s’entraînent dur. Et après, quand ils sont prêts, on va faire des combats.

Les blessures

Juliette : Il y a beaucoup de blessures ?

Jérôme : Non, … il y en a quelques unes, mais ça reste assez rare. Après, c’est des petits bobos, des bleus. C’est arrivé un nez cassé une fois à l’entraînement. Beaucoup plus à l’époque en MMA. Moi, je me suis luxé une épaule. Les gens se retournent un peu, le genou ce genre de chose, car il y a des clés. Mais en boxe thaï, c’est assez rare. C’est plutôt du choc.

Juliette : Surtout si vous avez des protections et que vous dosez l’impact, il n’y a pas de raison.

Jérôme : Ça arrive toujours. J’ai eu un élève une fois que c’est pris un KO à l’entraînement, c’est le coup de pied qui passe au moment où, … ça arrive. C’est un sport de contact, mais en 3 ans, sur les centaines de sparring qu’on a fait, …

Juliette : Il n’y a pas eu grand chose

Jérôme : Non, franchement

Le sparring chez les enfants

Juliette : chez les petits, comment ça se passe?

Jérôme : Pour les sparring ?

Juliette : Oui.

Jérôme : Alors avec les tout petits, déjà ils ne sont pas tout le temps réguliers, c’est donc assez difficile de les préparer pour ça. Il y a quand même l’aspect sécurité qui rentre en compte. Si je les ramène avec des cocards aux parents, je ne suis pas sûr qu’à 8 ans les parents apprécient. Donc chez les petits ça reste vraiment ludique sur la technique. Chez les plus grands, ce n’est jamais obligatoire. Certains n’ont pas envie parce qu’ils viennent juste se défouler, taper dans le sac, faire un peu de technique. D’autres ont envie. De toute façon, il y a toujours les protections, le casque, et c’est toujours dosé. Je suis toujours là pour éviter l’accident. Le but, ça reste la technique. D’autant plus qu’à cet âge entre 10 et et 14, il y a des différences assez flagrantes au niveau du poids, et de la force.

Le travail de la technique

Juliette : Quand vous travaillez la technique, vous la travaillez à deux ou au sac?

Jérôme : Ça dépend du nombre d’élèves, et de l’avancement des élèves. Si je vois qu’ils sont vraiment tous débutants, je vais les mettre tous au sac pour que ce soit un peu plus facile. J’essaye toujours un peu de varier. Au début, un petit échauffement, un peu de technique, après un peu de sac, se défouler aussi à la fin, parce qu’il faut qu’ils s’amusent aussi, et que je les ramène aux parents tranquilles.

Juliette: Les enfants, ça dure combien de temps?

Jérôme: C’est une heure.

Juliette: Ok et les adultes ?

Jérôme: C’est aussi des cours d’une heure. Sauf que les adultes ont jusqu’à trois cours à la suite s’ils veulent faire tous les cours. En règle générale, à part le lundi ou le vendredi, où j’ai des cours un peu plus tôt, je commence à 18h30, puis le dernier cours 20h30. Et s’ils veulent les enchaîner, ils les enchaînent.

Les activités du club

Juliette : Actuellement, dans le club, il y a la boxe thaï, le cross training, …

Jérôme : Et la boxe anglaise.

Juliette : Dans l’avenir il y aura d’autres choses où, pour l’instant on en reste là.

Jérôme : Vu qu’avant j’avais d’autres disciplines et que j’ai un petit peu réorganiser le club. Pour l’instant je reste sur les disciplines que moi je donne.

Juliette : Ton centre particulier, c’est la boxe thaï, et puis, autour, il y a des choses satellites qui se mettront en place ou non.

Jérôme : Mon premier amour, c’est la boxe thaï. Il y a un à deux cours par jour. La boxe anglaise s’est aussi rajoutée. Même si ce n’est pas le même sport, c’est important aussi de travailler spécifiquement.

Boxe thaï et boxe anglaise

Juliette : J’ai l’impression que les deux boxes se regroupent, sauf dans le rythme. Est-ce que la boxe thaï ne serait pas plus rapide ? C’est probablement un préjugé.

Jérôme : Non, la boxe pieds points, sans les saisis, c’est un rythme très rapide, car justement il n’y a pas les saisis. La boxe thaï, surtout à l’époque c’était en 5 rounds, maintenant ça a diminué en trois, ça s’est assez occidentalisée ; mais vu qu’il y a les saisis, c’est un rythme plus tranquille. Après, ça monte au à mesure, mais la boxe anglaise, c’est un rythme particulier.

Juliette : Et ce serait la boxe anglaise qui serait plus rapide.

Jérôme : Oui. Et puis c’est très technique vu qu’il n’y a pas beaucoup de coups.

Un camp d’entraînement en Thaïlande tous les ans

Juliette : Les camps en Thaïlande, tu aimerais organiser ça tous les ans ?

Jérôme : Vu que l’année passée, ça s’est super bien passé. On a relancé les inscriptions pour cette année. Il faut qu’on ait un minimum d’inscrit pour que ça vaille la peine de partir. Qu’on puisse essayer de négocier un peu les prix. Les prix des billets d’avion augmentent, mais ça on ne peut pas trop négocier. Donc si on est 5 cela n’en vaut pas la peine. Personnellement, si je peux partir toutes les années en Thaïlande, je suis heureux.

Juliette : Ça peut être pas mal ! Y-a-t-il une limite d’âge ?

Jérôme : 18 ans. Parce qu’on part à l’autre bout du monde pour boxer. Il y a les transports. Souvent les gens louent des scooters … On ne veut pas prendre le risque de prendre des mineurs.

Juliette : Oui, ne pas avoir des mineurs sous votre responsabilité dans un pays étranger, c’est compréhensible !

Jérôme : Déjà qu’avec les majeurs, on n’est pas toujours sûr. On met bien les choses au clair avant de partir, on fait le speech. Ils savent que ce ne sont pas des vacances, c’est un camp entraînement. C’est chouette, il fait beau, il y a la plage, mais c’est 4h par jour.

Juliette : C’est le matin ou l’après-midi ?

Jérôme : Les deux. Chaque club a ses horaires. Mais là, c’est 8h-10h et 16h-18h. Ça va, ça laisse un peu de temps l’après midi pour faire des activités, et le soir pour aller manger tranquillement, et sortir un peu.

Juliette : Ça crée un rythme. Ils n’y vont pas pour forcément pour visiter. Ils y vont pour découvrir la culture et s’entraîner.

Jérôme : Clairement ! Moi qui connais un peu ce rythme, j’avais l’habitude. Je vais m’entraîner, après l’entraînement je prends mes affaires, je vais manger, et puis je pars, je vais tourner, je vais visiter. Certains ont eu un peu ce choc. Le premier jour, c’est une chose, mais après, ah oui, on a l’entraînement puis après on a de nouveau l’entraînement puis après, c’est encore et encore … Du coup, beaucoup ont fait aussi un peu hôtel-piscine-dormir.

Juliette : On n’a pas forcément l’habitude de s’entraîner le matin, d’avoir un énorme laps de temps et ensuite de revenir.

Jérôme : Non, c’est vraiment un rythme bien spécifique.

Juliette : Les thaïlandais s’entraînent comme ça de toute façon ?

Jérôme : Il y a beaucoup d’européens, d’occidentaux, qui vont en Thaïlande pour s’entraîner. C’est très réputé, et il y a plein de clubs. Eux, ils font la même chose, entraînement le matin et l’après midi. Et ils ont des sessions spécifiques pour les combattants. La course est aussi obligatoire pour eux. Pour les gens comme nous, … moi je leur ai imposé une petite course le matin pour qu’ils comprennent quand même. Mais je ne leur ai pas fait faire les 10km matin, 10km après-midi, sinon ça aura été compliqué.

Juliette : Tes élèves pouvaient se mélanger aux locaux ?

Jérôme : Ce que j’ai aimé dans ce club, c’est qu’on est tous ensemble. En gros, tous les entraînements se passent un peu de la même façon. On commence avec 20 min de corde à sauter, ensuite une quinzaine de minutes de stretching. Ensuite du shadow, c’est-à-dire de la boxe dans le vide. Et après, c’est séparé en trois zones : des personnes au sac, qui font 3 rounds de 3 min au sac. Du sparring, obligatoire pour tout le monde. Mais vu que c’est super-léger, il n’y a pas de problème. J’ai beaucoup d’élèves qui n’avaient jamais vraiment fait de sparring, qui étaient un petit peu stressés. Au premier, ils n’étaient pas très chauds. Mais au final ça c’est très bien passé. Ils ont boxé contre des pros. Une, je crois, était numéro une aux États-Unis, à la WBA. Elle boxe dans le plus gros stadium de Thaïlande. Et d’autres très bons boxeurs.Ils travaillent tranquille avec les autres, ils s’adaptent aux autres. Et puis après, du pao, trois rang. Et ça tourne.

Juliette : Ils se mettent dans le mood.

Jérôme : On a bien été intégré.

Juliette : Ils sont revenus vachement plus motivés, ou plus investis peut-être ?

Jérôme : Oui pour certains. Après, il y a eu la période de vacances d’été donc c’est vite parti. Mais oui, au retour, ils disaient que c’est trop facile, qu’il fallait mettre le chauffage. Que 5min de corde, ce n’est n’était pas assez, il faut qu’on fasse plus. Ils était contents.

Projets futurs du club : des galas en Suisse romande

Juliette : Un petit camp, tous les ans, pour rebooster un peu tout le monde, ça peut être pas mal. Il y a des projets futurs par rapport au club ?

Jérôme : Alors les camps en Thaïlande c’est quelque chose que j’aimerais bien continuer.

Juliette : Donc inscrivez-vous !

Jérôme : Par contre, ce n’est que pour les membres du club.

Juliette : Inscrivez-vous au club et ensuite au camp.

Jérôme : J’aime bien avoir un suivi.

Juliette : Oui, savoir qui tu amènes.

Jérôme : Oui et puis il faut que les gens puisent tenir un minimum le rythme. Pour le club, j’aimerais bien organiser des combats. À l’époque il y avait des combats au casino de Montreux, et ça ne s’est plus vraiment fait. Commencer à organiser de jolis galas en Suisse romande, c’est quelque chose qui me plairait. J’attends un peu que mes combattants aient un petit peu plus de bouteille pour pouvoir les mettre dedans.

Juliette : Pour qu’ils gagnent, c’est ça ?

Jérôme : Non pas forcément pour qu’ils gagnent. Pour l’instant ils sont tous en amateur et le but de faire un gala, c’est quand même de faire le show, donc il faudrait qu’ils n’aient pas forcément besoin d’un casque, des protège-tibia ou autre, pour faire un bel événement. Actuellement tous les combats sont la plupart du temps en Suisse allemande. Même si ce n’est pas le bout du monde, ça demande du temps. Et les gens, les proches ne se déplacent pas forcément.

Juliette : Comment cela se fait-il que ce soit principalement en Suisse allemande ?

Jérôme : Comme tout, en Suisse romande, on est en retard par rapport à la Suisse allemande. Et la plupart des fédérations sont basées en Suisse allemande. Ils sont chez eux. C’est pour ça que j’aimerais bien faire quelque chose ici. Et puis ça permettrait aux boxers de chez nous, d’avoir leurs proches qui viennent les voir. C’est important de pouvoir boxer devant ses amis et sa famille.

Juliette : Oui, et puis, Montreux, …

Jérôme : Je pense qu’il y a beaucoup de potentiel.

Juliette : Il y a beaucoup de choses qui se passent à Montreux. Montreux commence à être connu pour plein d’évènements.

Jérôme : Surtout que c’est une ville sportive. Ça, c’est un peu le projet futur. Là, je commence gentiment a m’implanter à Montreux. Après, il faudra aller voir les autorités pour essayer de discuter de projets. Mais oui, ça, c’est vraiment, un des plus gros projets que j’ai envie de faire.

Et pourquoi ne pas venir essayer la boxe thaï ?

Juliette : Est-ce qu’il y a un message que t’aimerais faire passer par rapport, soit au club, soit par rapport à la boxe thaï ?

Jérome : Dans quel sens ?

Juliette : Par rapport aux parents par exemple ? Le fait que ça peut être intéressant d’amener les enfants. Ou le fait que les gens ont souvent peur des sports de combat. Comme tu la dis, ce n’est pas si violent que ça.

Jérôme : Il faut que les gens sautent le pas. On a toujours des cours d’essais offerts. Les gens viennent, ils essayent. Si ça leur plait on discute. Et puis si ça ne leur plait pas, ça ne peut pas plaire à tout le monde. Mais vraiment il ne faut pas avoir peur. Oui, c’est un art Martial, c’est un sport de combat, mais on ne vient pas pour se taper. Après, tout dépend du club. Moi, ce que je veux amener, c’est le respect, la discipline, et l’amour du sport. Et après chacun a ses objectifs.

Juliette : Si on vient tester, tu ne vas pas nous faire faire un sparring ?!

Jérôme : Non, non. Même ceux qui sont inscrits, certains sont pleins de bonne volonté, mais ils n’ont pas encore les bases techniques. Mais moi, le but, ce n’est pas qu’ils finissent blessés, et dégoûtés ou autre. Chaque chose s’apprend au fur et à mesure. Si ils ont envie de faire des petits combats d’entraînement, il faut être un minimum discipliné, et ne pas s’entraîner une fois toutes les deux semaines.

A quel âge peut-on combattre ?

Juliette : Les combats, quand ils atteignent un certain niveau, ils peuvent commencer à quel âge, chez-toi, par exemple ?

Jérôme : Moi, je commencerai à partir de 14 ans. En dessous, on peut. Même plus jeune, il y a le light contact, ce genre de choses. Je préfère les entraîner vraiment bien, et puis après, qu’ils découvrent vraiment ce que c’est. Pour les plus jeunes, il y a un plastron, et ce genre de choses. Ils sont beaucoup plus protégés. Faire du light, ce n’est pas forcément ce qui me plaît. Et vu que je suis tout seul à m’occuper des combattants, et qu’à côté je travaille, j’ai n’est pas forcément le temps de me déplacer pour tout. Le but, c’est un peu de les regrouper. Et là, j’ai de la chance. Il y a une organisation où ils font la boxe anglaise, la boxe thaï et du K1. Ainsi je peux prendre tous mes combattants, et vu que ce sont des amateurs, cela fait déjà une bonne expérience.

Juliette: Et puis ça leur permet d’acquérir une certaine discipline, pour dire à 14 ans si tu es assez discipliné tu pourras …

Jérôme: Actuellement, sur la totalité des jeunes que j’ai avant 14 ans, il y en a peut être un qui est vraiment motivé. Sinon les autres, je pense qu’ils auraient tous envie d’être boxeur, mais ils viennent une fois de temps en temps. Chacun ses objectifs. Je pense que c’est beaucoup les parents qui poussent un peu leurs enfants. Aujourd’hui il y a beaucoup cet aspect sécuritaire. Les parents ont peur que leurs enfants se fassent agresser. Ils veulent qu’ils apprennent à se défendre. Je leur explique bien que ce n’est pas de la self défense, je ne leur apprend pas à se battre. Ils savent que j’ai une charte lors de l’inscription qui est quand même assez costaud. J’indique bien il y a le respect, que je ne veux pas qu’ils aillent se battre. On a le droit de se défendre, mais ils savent que si j’entends qu’ils vont se battre, qu’ils vont taper sur des gens, je les mets loin et puis c’est fini.

Juliette: Ce que tu veux dégager, c’est aussi de dire qu’on apprend à combattre, mais ce n’est pas du combat gratuit à l’extérieur de l’établissement.

Jérôme: Si les gens veulent se battre, je peux comprendre. Moi, j’étais le premier à vouloir faire ça. On s’entraîne dur et on va se battre avec quelqu’un qui sait se battre, qui sait se défendre, avec des règles.

Juliette: On vient dans la salle…

Jérôme: Et puis, on s’entraîne dur. Et advienne que pourra, ils seront combattants ou pas.

Juliette: Et, au fur et à mesure. Après, c’est vraiment cette notion, toujours la même chose, de partage. Comme tu le disais aussi, la coordination, le respect, la gestion dans l’espace. Savoir combattre, mais de façon intelligente. Ça reste des vraies valeurs !

Jérôme: Oui, clairement, et puis, c’est important aujourd’hui, qu’il y ait encore ces valeurs. Malheureusement, il y a beaucoup de choses qui se perdent. Moi, c’est quelque chose qui me tient à cœur. Il y a plein de bonnes choses à prendre là-dedans. Personnellement, ça m’a fait énormément évoluer dans ma vie privée, le fait de faire des arts martiaux.

Comment es-tu venu aux arts martiaux ?

Juliette: Comment es-tu venu aux arts martiaux ? Le hasard ?

Jérôme: J’ai essayé plein de choses, étant petit. Mes parents ont essayé de me mettre au karaté. J’ai fait un entraînement, j’ai fait une compétition. Mais ce n’était pas ça que je voulais faire. Sans manquer de respect à la discipline. Ça ne me convenait pas. Je voulais vraiment faire, à l’époque je ne connaissais pas la boxe thaï, mais la boxe anglaise. C’est un sport violent. En plein dans l’air Mike Tyson, donc ce n’est pas la meilleure source d’inspiration pour les parents. J’ai essayé l’escrime, … enfin vraiment tout. J’ai fait du foot, à défaut de trouver quelque chose qui me plaisait. Mais je me battais plus sur le terrain que jouer, c’était pas terrible.

Juliette: Comme quoi, quand on a un garçon, ou une fille d’ailleurs, un petit peu bagarreur, je pense que ça reste intéressant de les mettre au sport de combat pour canaliser cette énergie. Et, chez les ados, cette agressivité qui je pense est naturelle et parfois un peu saine.

Jérôme: C’est une bonne chose. Oui, je pense, que ça fait du bien de se libérer, de frapper. Que ce soit pour les enfants, ou pour les adultes. À la fin d’une mauvaise journée on vient, on se libère, on tape, on se défoule, et puis on peut enfin se libérer.

Juliette: Évacuer l’énergie autrement que sur l’entourage.

Jérôme: Exactement, ou dans de mauvaises addictions. Le sport, c’est une bonne addiction. Ça fait aussi mal partout et c’est fatiguant, mais ça apporte plein de bonnes choses.

Juliette: La douleur au sport !

Jérôme: Vraiment ça !

Juliette: J’ai mal, je me suis bien entraîné hier.

Jérôme: Exact. Je pense qu’il en faut pour toutes et tous. Les gens reviennent un petit peu au sport. Je pense que c’est aussi beaucoup mis en avant avec la société. Il faut faire du sport, c’est bien pour le corps. J’ai l’impression que ces 5-10 dernières années, c’est plus mis en avant.

Juliette: Disons qu’on est devenu tellement sédentaire qu’on a compris aussi que si on veut être en santé il faut bouger.

Jérôme: Le sport de compétition, ce n’est pas la meilleure des choses pour être en bonne forme. Clairement, je pense que ça ne m’a pas trop réussi. Parce je n’ai pas appliqué les choses correctement. Mais faire du sport régulièrement, c’est bien !

Juliette: Et puis, dans un club, on peut aussi faire de la compétition et devenir un vrai combattant, sans aller dans les extrêmes. On peut aussi le faire avec plaisir, sans chercher des podiums.

Le combat une expérience exceptionnelle

Jérôme: Clairement, oui. J’ai des élèves qui veulent faire juste un combat, une fois. J’en ai un qui voulait combattre. Il a fait son combat, ça s’est bien passé, il a gagné. Et puis il m’a dit, pour l’instant je n’ai pas envie de refaire, j’ai mon apprentissage. Il ne faut pas forcer les gens a le faire. Ceux qui veulent, il y a un combat par mois, donc ça demande un rythme assez soutenu. Puis les autres, s’il veut le faire une fois dans leur vie, c’est bien. Au début, j’encourageais énormément parce que je trouve que c’est une chose exceptionnelle. C’est une expérience assez unique que de monter dans un ring, une cage ou autre, et de faire un combat.

Juliette: Est-ce que tu organises parfois ce genre de choses entre tes élèves ou, pour l’instant ils sont encore trop novices ?

Jérôme: D’entraînement, on fait. Après, je ne vais pas faire de vrais combats entre mes élèves, parce que ce ne serait pas très cool de vouloir qu’ils se mettent KO entre eux. Ce serait un peu contre productif. Mais des sparring ça on en fait tous les vendredis. Pour les plus avancés, je fais plusieurs fois par semaine. Mais ce n’est pas de la très haute intensité. Le but, ce n’est pas de se taper dessus tous les jours.

Juliette: Oui, il découvre quand même cette sensation.

Jérôme: Oui, clairement. Le but, c’est comme pour tous les sports ou le foot, faire l’entraînement c’est une chose, faire le match c’est bien. Là, c’est des petits matchs, de la mise en pratique. Ça reste bon enfant. Je leur demande toujours de ne pas mettre plus de 60-70% de la force. Vitesse ou autre ils peuvent y aller, mais le but c’est de progresser et d’apprendre.

Juliette: Je pense que c’est dur de gérer sa force, c’est un apprentissage !

Jérôme: Clairement oui, ça, c’est sûr. Le plus difficile, c’est quand je mets un avancé avec un débutant. J’ai plutôt peur pour l’avancé. Car le débutant ne va pas savoir comment gérer, il va mettre des coups un peu bizarre, et il risque de blesser l’autre. Après il faut juste prendre le temps, être patient, et expliquer.

Juliette : Ça permet de découvrir la force qu’on peut avoir et réussir a la gérer et la canaliser, c’est bien !

Jérome : C’est pour ça que je n’autorise pas a faire tout de suite des sparring. À part ceux qui ont déjà de l’expérience. Pour les gens qui commencent, il n’y a pas de temps minimum, mais il faut un minimum d’acquis, et de gestion de ses émotions. Car on va se prendre des coups. Ce n’est pas impossible de ne pas en prendre, mais il faut déjà être bon. Et si je prends un coup , je dois avoir assez de self contrôle, de lucidité pour ne pas vriller et faire n’importe quoi. C’est pour cela que chaque premier sparring doit être fait avec moi. Comme ça je gère. Je touche une ou deux fois, juste pour voir le comportement. Si la personne vrille, on se rend compte que c’est trop tôt.

Juliette : C’est vrai que je n’avais pas pensé à ça. Le fait de recevoir un coup, ton système d’auto-défense peut se déclencher, tu peux t’énerver, et y aller à fond. Et donc ne plus être dans le sport, mais être dans l’agression.

Jérôme : Oui, c’est ça. Pour moi ça n’a aucun sens d’être là dedans. Car on n’est pas dans la rue, on ne combat pas pour notre vie, donc ça doit rester sportif. Même si les gens veulent faire de la compétition. Une personne qui ne gère plus ses émotions ne peut pas gérer un combat. C’est important, même avant la technique, de se gérer. C’est complexe.

Juliette : Ça dégage passablement de valeurs.

Jérôme : Oui clairement. Les gens voient qu’on se tape dessus mais derrière il y a plein de belles valeurs pour arriver à se taper dessus.

Juliette : Merci beaucoup. Bonne suite. On va rester connecté, car il va se passer plein de choses, et à bientôt.

C’est quoi une bonne chaussure pour courir?

Vous pouvez regarder ce podcast sur notre chaîne youtube

Vous pouvez écouter ce podcast sur :

 

Les intervenants

  • Ruben Sandiano : propriétaire du magasin Running Conseils
  • Juliette Corgnet : Physiothérapeute

Transcription du Podcast

Juliette: Bonjour et bienvenue sur le podcast Santé Sport de CapRol. Aujourd’hui, nous allons parler de chaussures de course à pied avec Ruben. Bonjour Ruben.

Ruben: Bonjour.

Juliette: Peux-tu te présenter pour ceux qui ne te connaissent pas, s’il te plaît?

Ruben: Alors je m’appelle Ruben Sandiano, je suis Argentin d’origine. Un sportif très polyvalent, un gros amateur de rugby et de judo. Et puis la course à pied, parce que je ne sais pas marcher.

Juliette: Tu ne sais que courir ! Tu as un magasin à la Tour-de-Peilz qui a une atmosphère un peu particulière. Est-ce que tu peux nous expliquer l’atmosphère que tu essayes de dégager dans ce magasin?

Ruben: Wow! Alors ce magasin, c’est un magasin spécialisé en course à pied, walking, marche, trail, mais aussi pour Madame et Monsieur tout le monde qui a besoin de bonnes chaussures. Mon but, c’est de rendre heureux la personne. Donc moi, je ne veux pas vendre la chaussure. C’est la personne qui va acheter ce que je vais lui conseiller.

La biomécanique de la course à pied

Juliette: On va déjà commencer par une chose simple, c’est la biomécanique de course. Est- ce que tu arrives à nous expliquer brièvement la biomécanique de course?

Ruben: Wow!

Juliette: Oui, c’est vaste !

Ruben: Oh, c’est très large. On devrait passer vraiment longtemps.

Juliette: On ne va pas faire un cours de biomécanique. Mais à peu près, comment ça se passe ?

Ruben: Donc le corps il se divise en trois parties. Déjà, on doit être aligné pour essayer d’avoir un impact léger. Comment je pourrais expliquer… Le pas et l’impact doivent être légers et souples.

Juliette: OK, un impact souple et léger pour qu’il y ait une bonne absorption des chocs.

Ruben: Ça veut dire que l’impulsion des chocs, on va le faire avec nos articulations. Ça veut dire que si je fais un grand pas, je vais engendrer plutôt un impact sur le calcanéum, le talon. Donc ce n’est pas harmonieux. La biomécanique s’est très vaste en course à pied.

Juliette: Vous regardez tout le corps ?!

Ruben: Il faut regarder tout le corps. La posture, la pathologie, l’historique de la personne… C’est très très complexe. On peut faire des analyses très complètes. Au magasin on fait des analyses de 45min, 1h pour pouvoir conseiller la bonne chaussure à la personne.

Juliette: C’est ce que vous faites au magasin, ce qui n’est pas forcément fait dans les autres magasins. Tu fais une analyse sur un tapis de course ?

Analyse globale du client

Ruben: Alors, Non. J’ai ma philosophie et mes connaissances, je vais t’expliquer en deux mots comment ça se déroule. Quand la personne passe la porte d’entrée, je suis déjà en train de la scanner. Sa posture, ses épaules, ses longueurs de mains, … je regarde si il appui plus sur une jambe ou sur une autre.

Ruben: Et puis on passe quelques questions : où il court, combien de fois il court, si il y a des blessures, des antécédents, les sports qu’il a pratiqués, si il port des semelles orthopédiques, si il souffre des mollets, si il souffre du tendon d’Achille… Toutes ces questions, je les mets dans un petit tiroir.

Ruben: La personne, je la mets pieds nus, je la fais marcher sur une ligne d’environ 15m aller-retour. Ensuite, je lui fais faire deux ou trois exercices posturaux, en pliant les genoux avec une jambe levée, ect… Là l’analyse me donne déjà 20 à 30 %. Je vois déjà la posture de la personne. C’est très complexe, c’est très très complexe. On voit le gens qui partent en varus ou en valgus. Il y a des personnes qui ont les genoux en X, … c’est très très difficile. Ensuite je les mets les pieds au podoscope, ça c’est pour voir si ils ont un un pied en arche ect … pour comprendre mieux l’analyse. Ensuite je le fais courir sur un tapis. Le tapis pour moi donne 20 %, très peu de références. Je le film et ensuite on va à l’extérieur, et je le fais courir avec une paire de chaussures. Laquelle, je ne pense pas qu’elle ira, pour voir la stabilité.

  • Scanner le client : posture, physionomie, attitude, …
  • Questionnement du client : types de courses, antécédents sportifs et médicaux, attentes du clients, …
  • Analyse de marche et exercices posturaux
  • Analyse au podoscope
  • Analyse sur tapis de course
  • analyse de la course avec chaussure

Juliette: OK, donc une chaussure à la limite qui n’est pas adaptée pour voir s’il est totalement instable. Et ensuite cela te permettre d’évoluer dans la qualité de la chaussure ou vers la chaussure qui correspond au client.

Ruben: Vers la chaussure qui correspond au client. On va parler de ce dont on a parlé avant. Quelle éducation on a donné à notre corps? Est-ce que j’ai l’habitude de courir avec des chaussures souples, des chaussures rigides ? Est-ce que j’ai toujours couru avec un support plantaire, des chaussures rigides, avec des drops hauts ? … C’est très, très vaste, donc c’est une grande analyse. A la fin de la journée c’est fatigant.

Juliette: En fait, tu vas prendre le client. Tu essayes de récupérer un certain nombre d’informations assez globales. Et puis, petit à petit, tu vas aller vers la meilleure chaussure qui lui correspond.

Ruben: Je veux aller dans la meilleure chaussure qui va lui correspondre et que lui il va avoir. Parce qu’il ne faut pas oublier qu’il y a des milliers des pieds différents. Il y a les valgus, des quintus, il y a des haglund et il y a des maladies de Morton. Wow, c’est énorme, mais c’est une passion.

Le drop, c’est quoi ?

Juliette: On entend souvent parler du drop et les gens ne savent pas forcément à quoi ça correspond. Qu’est ce qu’un drop?

Ruben: Alors un drop, c’est simple, c’est la différence qu’on va avoir entre l’appui des métatarses et l’appui du calcanéum. Donc cette différence qu’il y a entre l’avant et l’arrière, on appelle le drop. Donc si derrière il y a 10mm et devant il y en a 5mm, on a un drop de 5.

Juliette: Et pour toi, il faut avoir un drop de combien ? Quel est le drop idéal pour courir ?

Ruben: On revient à la même chose qu’avant, quelle éducation on a donné à notre pied. Un coureur talons va chercher l’amorti. Tant qu’il ne se blesse pas, de mon point de vue, il peut continuer à courir avec les talons. Après, il faut voir. Moi, personnellement, je conseille des drop faibles. Parce qu’on se dirige vers une posture et une mécanique plus naturelles.

Ruben: Quand on est debout droit, notre pied avec la cheville et la jambe on est à 90°. Donc, quand on va courir, on va arriver à une attaque de 90°. Si le coureur arrive avec les talons et donc un autre degré ce n’est pas l’idéal.

Ruben: Mais le drop, c’est très personnel, parce que si je marche toujours avec des chaussures de chantier avec un drop de 14-16mm, je ne peux pas passer du jour au lendemain à un drop faible. Si une femme va travailler avec des talons toute la journée, ses mollets vont remonter, ils vont être assez haut, avec un tendon d’Achille qui va raccourcir. Donc il faut vraiment faire attention à ces drop et ce n’est pas donné à tout le monde.

Doit-on courir avec un amorti ?

Juliette: Au niveau de l’amorti, toi tu préconise d’avoir pas mal amorti ou non ?

Ruben: Alors s’est toujours la même chose. Comment je vais courir ? Est-ce que j’ai besoin d’un amorti ou pas ? Il y a des gens qui sont en surpoids et ils courent pieds nus. Il y a des gens qui sont en surpoids et qui ont des chaussures très plates et sans amorti. C’est nous qui faisons l’amorti avec nos articulations. Après, il faut s’interroger sur la distance que l’on veut faire. A un moment donné notre corps va être fatigué, et il aura besoin d’un petit amorti. Mais là on est déjà dans l’extrême.

Juliette: Oui, il y a vraiment une notion d’adaptation, au final. 

Ruben: C’est important.

Juliette: On ne passe pas de beaucoup d’amorti à plus du tout d’amorti, on risque de se blesser.

Ruben: Non, non. Les drops de 4-6-8mm, sont des chaussures qui ont beaucoup amorti. Il y a une mémoire à appliquer au corps progressivement. Il faut y aller très très progressivement. Donc pour passer d’un drop de 12 à un drop de 0 par exemple, pour moi, c’est six mois à une année de travail, sans se blesser.

6 mois à 1 année pour passer d’un drop 12 à un drop 0, sans se blesser !

Juliette: A quand même.

Ruben: Il ne faut pas négliger que courir, c’est désagréable. Commencer à courir, ce n’est pas évident. C’est ingrat. Et puis déjà que si on est un coureur confirmé, commencer à zéro, il faut avoir la tête. De toute façon la majorité des coureurs ils ont la tête, autrement, on n’arrive pas à courir qu’avec les jambes.

Quelle chaussure pour un débutant ?

Juliette: Sur quelqu’un qui n’a jamais couru, qui est un débutant mais qui n’a vraiment jamais couru. Tu leur conseillerais de commencer avec quel type de chaussures ? Parce que dans cas, il n’a pas été conditionné à un type de course.

Ruben: Alors pour moi, c’est simple, on va questionner la personne et on va voir un peu les antécédents qu’elle a. Je suis à 90% convaincu qu’il faut la mettre avec un drop faible et des chaussures souples et larges. Donc presque des natural running.

L’importance de la largeur de la chaussure

Juliette: Justement sur cette notion de largeur de chaussures. Moi, j’ai des chaussures de running qui sont assez larges, d’autres sont beaucoup plus fines. Quelle est la différence et quel est l’intérêt d’avoir des chaussures plus larges ?

Ruben: C’est la maîtrise du pied, donc il y a tout qui va travailler, dès le cinquième à le premier il va travailler. Tout le pied va travailler. Il ne faut pas négliger que notre pied a une mécanique incroyable. C’est la maîtrise du pied, parce qu’on ne va plus courir avec les talons, on va courir avec le mi pied. Donc on gestionne le sol. C’est là que je dis des fois, c’est assez rigolo, si je veux faire des pas chassés aujourd’hui, je ne vais pas appuyer avec les talons, je vais appuier à plat. Donc quand je vais courir, je vais avoir la maîtrise au sol quand je suis à plat.

Juliette: Donc cela va être favorisé par des chaussures qui ont un avant du pied plus large. 

Ruben: Exactement, un box assez large où le pied va travailler.

Juliette: Un pied qui paraît moins maintenu par des chaussures serrées.

Ruben: Mais c’est une question d’habitude. Souvent les personnes disent, je ne suis pas soutenu. Mais c’est une question d’habitude. Ce qu’il ne faut pas négliger c’est qu’on va travailler en mocassins, nos pieds ils sont en pointe, … Il y a certaines chaussures je ne sais pas comment ils font, c’est du 43 mais ils ont une petite pointe de 48. Voilà, Il y a beaucoup d’espace libre.

Le poids et l’usure de la chaussure

Juliette: Le poids des chaussures a beaucoup évolué, elles sont beaucoup plus légères qu’avant. Par contre, est-ce qu’elles sont plus fragiles ? Et puis, dans l’activité du running, en tant que compétition, quel est l’intérêt d’avoir des chaussures légères ?

Ruben: Alors la chaussure légère, il y a un calcul scientifique qui se fait. Moins de poids va avoir la chaussure, plus performant on va être. Si aujourd’hui je mets deux litres de lait sur mon dos, à la longue, je vais les sentir. Donc la chaussure légère, elle va être plus performante. Aujourd’hui, il y a beaucoup de matériaux qui se font, mais on rentre malheureusement dans un système de consommation. Donc les chaussures sont plus légères, mais elles s’usent plus vite. Mais si on revient à ce qu’on a dit avant : lorsqu’on court en natural running, c’est nous qui faisons l’amorti, c’est nous qui faisons avec une grande partie de notre corps l’amorti; donc la chaussure dans ce cas là va durer beaucoup plus longtemps, que si on courait avec les talons ou si on courait avec cet amorti de la chaussure.

Juliette: Tu as une dynamisme quelque part qui t’amène plus de souplesse et moins de frottement.

Ruben: On va muscler le pied. On va habituer le pied à être plus musclé, à être plus fort. On aura moins besoin de cet amorti, donc c’est assez simple. Je dirais que comme ma philosophie c’est d’être proche du sol, plus les personnes vont être proche du sol, plus elles vont utiliser les chaussures, plus elles vont user les chaussures et moins elles vont acheter de chaussures si on veut. J’ai un client qui est venu avec une marque de chaussures minimalistes avec un zéro drop. La chaussure avait 2500km. Certaines personnes à 600km changent déjà leurs chaussures parce qu’ils n’ont plus l’amorti.

Juliette: 2500km, il y avait des trous dans la chaussure ?

Ruben: Oui, oui! On rigolait parce que lorsqu’il marchait sur un mégot, il le sentait, c’est assez rigolo.

Quelle chaussure pour les enfants ?

Juliette: Au niveau des enfants, qui font de la course à pied, tu leur donne quoi comme chaussures ?

Ruben: Alors malheureusement là …, j’ai trouvé déjà une marque avec une chaussure avec des drops de 4 et souples. Les enfants, il faut les mettre proche du sol, il faut muscler leurs pieds. Malheureusement, à l’âge de 10-12 ans, ils vont vouloir avoir certaines marques de chaussures avec ci avec ça, parce que c’est la consommation.

Juliette: Avec plein d’ornements autour qui pèsent très très lourds.

Ruben: Voilà, c’est ça. Et la chaussure elle coûte CHF 100 pour un enfant qui va se coucher,et puis le lendemain, il va grandir de pieds, et puis à la poubelle. 

Running conseils et la prévention des blessures en course à pied

Juliette: J’ai vu que le magasin organise aussi des conférences.

Ruben: Oui. J’aime beaucoup organiser des conférences et faire des formations pour transmettre la prévention des blessures. C’est la première question où je n’ai peut être pas été assez complet dans ma réponse. Quand j’ai ouvert mon magasin, c’est un magasin spécialisé, c’est un magasin pas comme les autres. Je suis aussi, je pense, pas comme les autres. Je vais travailler sur la prévention des blessures. Pourquoi ? Parce que dans ma jeunesse, il n’y avait pas ce qu’il y a aujourd’hui. On était poussé pour faire des sports. On était poussé pour faire des performances, mais il n’y avait pas cette prévention des blessures. Et puis, malheureusement, je n’ai jamais commencé et fini un championnat de rugby qu’en étant blessé. Parce que je me blessais à l’entraînement, parce que je tirais, je tirais, je ne m’écoutais pas. Alors tout ce que j’ai acquis comme expérience des blessures, maintenant, j’essaie de le transmettre aux gens pour qu’ils ne se blessent pas. C’est pour cela que dans mon magasin, on travaille sur la prévention de blessures, c’est le numéro 1.

Ruben: J’ai une petite histoire qui est arrivé hier. J’ai vendu une paire de chaussures à une personne. Comme on dit la mécanique, c’est très compliquée, très difficile. Cette personne vient chez moi avec des douleurs. Elle est partie avec une paire de chaussures. Pour chaque client on a un dossier avec ses coordonnées et tout ce qu’il a ect… Et puis j’ai réfléchi pendant le week-end, et je lui ai écrit un email en lui disant qu’il doit revenir avec les chaussures et ses anciennes chaussures, pour le reanalyser. Et puis effectivement, je m’étais trompé.

Juliette: OK.

Ruben: Ça arrive de se tromper, on n’ai pas parfait.

Juliette: On est tous humains. Après, ce qui est intéressant, c’est cet intérêt de vouloir trouver la chaussure qui correspond au client pour pouvoir l’accompagner dans son sport sans qu’il ne se blesse.

Ruben: Sans qu’il ne se blesse.

Juliette: Donc oui, on ne trouve pas forcément ça dans tous les magasins.

Ruben: Non, non. Et puis il ne faut pas négliger qu’aujourd’hui, c’est dur à dire, mais il y a 30 à 40 % des coureurs (qui courent déjà) qui se blessent. Chez les nouveaux coureurs, il y a entre 50 et 70 % qui se blessent. Chez mes nouveaux clients, 70% ce sont des gens qui viennent avec des douleurs et des blessures. Donc ils me mettent une grosse pression.

Juliette: Oui, donc tu as un rôle qui est hyper important sur l’accompagnement et l’écoute. C’est plus que vendre des chaussures ?

Ruben: Oui, c’est ça. Moi je dis toujours je ne vends pas des chaussures, je veux les conseiller et je vais les proposer. Ça m’arrive des fois que des clients partent sans chaussures. C’est une discussion assez délicate, les semelles orthopédique. Parfois je dis au client d’aller faire une semelle orthopédique, un support plantaire parce qu’on n’a pas d’autre choix.

Juliette: On n’arrive pas à faire autre.

Ruben: Parce que oui, c’est très particulier. Il faut voir pourquoi je vais courir, combien de temps je vais courir, si je veux faire simplement un petit footing, si j’ai la volonté de travailler ma mécanique et puis ne pas mettre de support plantaire. Il y a une grosse question a se poser par rapport à la personne qui va venir chercher des chaussures.

Juliette: L’analyse du client et en même temps ses objectifs personnels.

Juliette: Mais toi, tu a une formation par rapport au pied ?

Ruben: Alors j’ai fait cinq ans comme technicien orthopédiste sans CFC. Et puis j’ai travaillé dans un centre comme technicien orthopédiste où on traitait 70-80% de sportifs.

Juliette: Au niveau expérience orthopédie, ça va. Lol

Ruben: Je me sens à l’aise. Je voudrais être plus complet par rapport à ça. C’est pour ça que je continu de me former. Je continu à chercher des formations pour me poser des questions. 

Juliette: Oui, compléter le regard et évoluer aussi avec la science.

Ruben: Oui la science elle évolue … une question aujourd’hui c’est les chaussures carbone Wow!

La chaussure carbone

Juliette: On fait le débat sur les chaussures carbone?

Ruben: C’est sûr que c’est un grand débat. Moi, je ne suis pas pour à 100 %. Si on va chercher la performance, on va la trouver avec les chaussures carbone. Pour moi, c’est du matériel Doping. Ça ne convient pas à tout le monde, loin de là. J’ai beaucoup, mais beaucoup de clients qui courent avec des carbones, et qui se blessent. Avec le carbone, si on part on valgus, en pronation, c’est mort. On ne peut pas, vraiment on ne peut pas.

Juliette: La réception sur le pied est meilleure avec le carbone ? Ma première réflexion à moi, ce serait de me dire qu’à la limite, pour le pied, c’est plus difficile. Mais, je n’en sais rien.

Ruben: Je n’ai pas assez de connaissances scientifiques, peut-être pour aller très très loin avec ça.

Juliette: Bon, c’est de la nouvelle technologie. C’est assez récent quand même, le carbone.

Ruben: Alors c’est une économie d’énergie. Et une économies d’oxygène. Parce qu’une fois qu’on va prendre une certaine vitesse, la chaussure va nous amener presque tout seul. Par contre, parce qu’on est haut, les personnes hyperlaxes risquent de se tordrent les chevilles. Les personnes sensibles de la traversée métatarsienne risquent aussi d’avoir mal parce que c’est dur. Les personnes qui ont des quintus, des hallux valgus, ils vont être sensibles. C’est très, très particulier, …

Juliette: C’est un peu affaire à suivre, le carbone.

Ruben: Oui, par contre j’ai testé une chaussure en carbone. Moi, je ne peux pas courir mais j’en ai testé une.

Juliette: À l’heure actuelle, tu ne peux pas courir …

Ruben: Et je n’y vais pas pour courir… Une chaussure que j’aime bien. C’est une marque de natural running, qui a un box assez large devant et un drop 0. Donc n’étant qu’un drop 0, la chaussure n’est pas si haute. Et donc le pied travaille déjà mieux. Et puis ils ont créé des lamelles pour chaque phalanges en carbone. Donc le pied travaille beaucoup mieux qu’une plaque rigide.

Juliette: Mais après il faut vraiment que l’appui au niveau des doigts corresponde … si ce n’est pas du sur-mesure …

Ruben: C’est pour ça que le carbone aujourd’hui, je ne sais pas où on va, ça doit être très personnalisé. Et puis le carbone, c’est comme une voiture de course, on l’utilise le jour J. Mais on doit s’adapter un petit peu avant.

Juliette: Oui, il y a toujours une adaptation au niveau matériel.

Running conseils organisateur d’évènements et de conférences

Juliette: Il y a une prochaine conférence de prévue par Running conseils ?

Ruben: Alors, je suis en train de chercher. J’ai déjà deux personnes en vue. Ainsi qu’une journée test que je suis en train de préparer. Ces deux ans ça nous a amené un peu de recul sur beaucoup de choses. Et puis maintenant, je veux mettre mon énergie pour 2023. 2022 je pense que je vais organiser encore une conférence, un débat-conférence. Et puis 2023 je vais organiser ma journée test avec environ 40 stands, avec des chaussures, médecins du sport, physiothérapeutes, ostéopathes, ect…

Juliette: On peut trouver toutes ces informations sur le site

Ruben: Qui est en construction.

Juliette: Oui, mais qui sera bientôt fini.

Ruben: Autrement sur les réseaux sociaux, c’est encore plus facile. Sur Instagram et Facebook, c’est là où je suis assez dynamique.

Juliette: On mettra tous les liens.

L’école de course

Juliette: Et puis vous avez aussi une école de course ?!

Ruben: On a une école de course, où on est environ 50 inscrits. Chaque mardi, on est entre 20 et 25 personnes. Cette écoles de course a été créé avec mon ami Rudy Rodriguez qui fait de l’ultra trail et moi-même. Et puis on est entouré par ma team de running conseils. Des personnes qui ont des connaissances en jeunesse et sport, les soins, ect … Notre école de course, on l’appelle l’école de course, malgré qu’il y a des gens qui courent très rapides, ils font 34 minutes les 10km, et il y a des personnes qui font 1h10 les 10km. Nous, on travaille tous les mardis quelque chose de différent. Aujourd’hui, on va travailler par l’exemple abdos fessiers, du renforcement, échauffement et on va finir pour une course relais. Mais on va mélanger tous les gens. Autrement, on sépare en deux ou en trois groupes.

Juliette: OK, c’est intéressant parce que, c’est communautaire, ça permet d’apprendre pas mal de notions pour les coureurs non expérimentés. Il y a la motivation et l’esprit de groupe.

Ruben: Et puis le groupe est très sain parce qu’on n’est pas dans une philosophie, aujourd’hui je suis mieux que toi. On est tous pareils, on est tous dans le même panier.

Juliette: Excellent! Est ce qu’il y a des choses que tu voulais rajouter sur la chaussure de running … ou moi j’ai une question supplémentaire …

Chaussure de trail

Juliette: Alors en un, quelle est la différence entre les chaussures de running sur du plat et du bitume et les chaussures de trail ?

Ruben: OK, donc la chaussure de trail, c’est simple, il doit avoir un grip pour être en sécurité. Souvent les personnes veulent avoir des chaussures polyvalentes. Ça n’existe pas. Comme un pneu de voiture, ça n’existe pas, un pneu hiver-été. Donc si on veut être en sécurité en montagne, il faut avoir un grip. Et puis, si on veut courir avec une chaussure avec un grip sur le goudron, on va l’user trop vite. Et puis ce n’est pas agréable, ce n’est pas dynamique.

Juliette: Limite, ça ralentit un peu.

Ruben: Ce n’est pas l’idéal.

Quelle chaussure pour la randonnée en montagne

Juliette: Qu’est ce que tu penses: J’ai des patients qui me disent souvent, « rassurez vous, quand je vais en montagne, je prends des grosses chaussures de montagne montantes ». Personnellement, à chaque fois, je rigole. Mais qu’est-ce que tu considères, si on doit juste faire des randonnées en montagne sans parler d’alpinisme ni de running, y aller avec des simples baskettes ? Qu’est ce que tu en penses ?

Ruben: Je pense qu’il faut travailler la mécanique de notre corps, la proprioception. Si on a des chaussures qui sont montantes, on va endormir un petit peu notre musculature de la cheville et toutes les fascia latas. Je conseille fortement des chaussures basses. Malgré, le fait qu’il y a aussi aujourd’hui la nouvelle technologie. C’est fini ces chaussures hautes rigides, Les chaussures hautes, elles sont aussi souples. Après il faut voir la personne. Donc il faut personnaliser. Une personne âgée, une personne hyperlaxe … Et puis si on fait de la haute montagne, oui, on met des chaussures hautes. Mais autrement, il faut travailler la mécanique, il faut avoir des bons crampons et basta.

Juliette: Chaussures au plus simple pour travailler notre corps, et le stimulé. C’est le même principe que les ceintures lombaires. Si je porte une ceinture lombaire, arriver à un moment, ma musculature du dos et/ou du ventre ne va plus travailler. Il faut stimuler notre corps.

Ruben: Il faut stimuler le corps, c’est ça.

La durée de vie de la chaussure de running

Juliette: Autre chose sur le running ou ou la chaussure de running ?

Ruben: Alors, simplement sur la chaussure de course à pied et sur l’usure de la chaussure, c’est très très important. Encore une fois, on revient sur la question, comment je vais courir, quelle éducation j’ai donné à mon pied, sur quel terrain je vais courir, ect … Mais la chaussure, elle a une durée de vie et ça, il ne faut pas le négliger. L’usure de la chaussure de course à pied peut avoir beaucoup de facteurs.

Ruben: L’EVA, c’est le matériau qui porte la majorité des chaussures. Cette mousse, elle va avoir une durée de vie de 2 ans. Après deux ans, l’impact va être beaucoup plus sec, plus direct.

Ruben: Ensuite il y a les kilométrages de la chaussure. Ensuite comment je vais courir. Ensuite, comment je vais utiliser ma chaussure. Si avec ma chaussure, je cours quatre fois par semaine et que je fait des fractionnés toujours avec la même chaussure, cela ne va pas le faire. Il faut laisser reposer la chaussure. C’est comme un canapé. Si je suis assis toujours à la même place, il prendre la forme de mon corps. Dans la chaussure, elle va être écrasée. À ne pas négliger qu’on multiplie fois deux, fois trois le poids à plat. Et puis on va écraser la chaussure, si on court toujours avec la même chaussure. Donc il faut la laisser respirer un peu. Et pour ça, il faut alterner les chaussures.

Ruben: Par rapport à la chaussure, je dis toujours à mes clients ne restez pas toujours avec la même marque et le même modèle. Mes clients le savent très bien. Ils viennent chez moi, et ils se laissent guider. Et puis je les fais tester.

Juliette: Parce qu’au final, ils s’habituent trop ?

Ruben: On s’habitue trop. Et puis les marques ne vont pas nous poser la question si on était bien, parce qu’on a utilisé le modèle 22 23 24 ? Non. Donc aujourd’hui, les marques leader qu’on avait avant, c’est fini. Il faut être polyvalent dans les marques. Et puis il y a des marques inconnues qui sont sur le marché, qui peuvent être très très, très bien.

Juliette: OK.

Ruben: Maintenant, certaines marques, on paye la marque, et le prix!

Juliette: Oui.

Juliette: Merci beaucoup Ruben. C’était très intéressant. Pour ceux qui sont intéressé, il y a le groupe de course. Les réseaux sociaux pour les conférences. Et puis moi je vous dis à bientôt.

Ruben: À bientôt. Merci.

L’apnée, un sport déclencheur de bien-être.

Vous pouvez regarder ce podcast sur notre chaîne youtube

Vous pouvez écouter ce podcast sur :

 

Les intervenants

– Phil Simha : Fondateur de l’école d’apnée et de plongée Scubashop, Professeur de yoga et intervenant en clinique

– Juliette Corgnet : Physiothérapeute

Transcription du Podcast

Juliette: Bonjour et bienvenue sur le podcast santé sport de CapRol. Aujourd’hui, nous allons parler de l’apnée avec Phil. Bonjour Phil.

Phil: Bonjour Juliette.

Juliette: Peux-tu te présenter s’il te plaît?

Phil: Alors oui, je suis d’origine grecque, mais j’ai eu la chance de grandir de l’autre côté du Léman, du côté de Genève. J’ai grandi dans une famille extrêmement cosmopolite, avec une vision du monde que j’ai commencé à explorer très tôt. Notamment au travers d’aventures verticales. J’ai passé pas mal de temps au Népal avec une attraction pour les hautes montagnes. J’ai commencé à y découvrir le côté méditation de la vie. J’ai appris assez rapidement que la respiration peut jouer un rôle déterminant. Autant dans des choses qui vont vers le paisible total, que dans des choses qui semblent un peu plus extrêmes.

Phil: Ensuite, mon parcours est passé par, la plongée sous marine à titre professionnel, dans l’enseignement, comme photographe sous marin également. J’ai passé à peu près une bonne dizaine d’années à voyager intensément comme photographe sous marin. Par la suite, un peu fatigué de cette vie, certes privilégiée, mais néanmoins fatigante, et avec le sentiment que l’économie de la photographie était quelque chose qui était en train de gentiment s’écrouler ; Il y a quelques années, j’ai créé mon école à Villeneuve, au sein d’un établissement qui s’appelle le Scuba Shop. C’est un très gros magasin spécialisé plongée, apnée, natation, … l’école de plongée et d’apnée du Scuba Shop. Ce qui m’intéressait, c’était la démarche du développement de l’apnée, ce qui était quelque chose que personne dans la région ne faisait, avec une offre qui s’adresse au grand public.

Les clubs en Suisse

Juliette: A l’heure actuelle, il y a très peu de clubs d’apnée en Suisse ?

Phil: Il y en a un à Genève qui est assez important. Il y en a à Lausanne, il y a nous à Villeneuve. Et puis il y a un peu d’activité en Valais, Neuchâtel, mais dans des structures un peu plus confidentielles. Je pense que la différence que nous avons fait, c’est un peu comparable à ce qui s’est passé avec les salles d’escalade, c’est-à-dire que pendant longtemps, les salles d’escalade étaient fabriquées par des grimpeurs pour des grimpeurs. C’était un peu ce qui existait aussi dans les clubs d’apnée. Puis, petit à petit, il y a des gens qui ont dit, ayons plutôt une vision tout public, même les enfants … De la même manière qu’on a vu les salles d’escalade évoluer vers un public plus général et pas que pour des gens qui étaient déjà bons. Et bien l’apnée, au travers des stages d’initiation, des stages plus avancés dans le lac – nous on a pratiquement chaque année des champions du monde, des athlètes de très haut niveau qui viennent proposer des stages chez nous – devient aussi une activité beaucoup plus grand public. Ainsi les gens commencent à percevoir que, au delà du côté sportif, au delà du côté de dépassement de soi, c’est en fait une activité qui induit un bien-être extraordinaire. Et que peu de sports, peut être, peuvent amener en complément du côté sport lui même, ce côté style de vie, qui peut aussi avoir un impact extrêmement positif sur le bien-être et la santé des gens.

Juliette: Et qui t’amène une hygiène de vie de façon un peu innée, contrairement à d’autres sports. Où lorsque tu veux être performant, tu améliores ton hygiène de vie pour pouvoir être performant ?!

Phil: Oui, oui.

Définition de l’apnée

Juliette: Est ce que tu pourrais nous définir l’apnée?

Phil: Alors par définition, ça vient du grec « apnoos », qui veut dire ne pas respirer. Par définition, l’apnée consiste à, dans notre cas volontairement à interrompre notre respiration, on n’est pas dans l’apnée du sommeil. En sachant que nous sommes de tout le règne animal, terrestre ou marin, les seuls animaux qui avons la capacité de contrôler notre respiration, voire de décider de l’interrompre temporairement. Le dauphin, par exemple, n’a pas la capacité de décision par rapport à cela. À partir du moment où son évent, le trou qui lui sert à respirer, est immergé, le dauphin suspend naturellement sa respiration. Mais il n’a pas une conscience du fait qu’il se met en apnée. Et nous sommes le seul animal qui a cette capacité de ralentir son rythme respiratoire, voire même de le suspendre complètement pendant des temps qui peuvent varier en fonction et du talent et du niveau de pratique

Temps maximale en apnée

Juliette: Au maximum, on peut rester combien de temps en apnée?

Phil: Alors, le record du monde en apnée statique est aujourd’hui à 11,35 min sur une ventilation normale et avec une préparation où on aurait respiré que de l’oxygène pur avant une apnée statique. C’est-à-dire des apnée où on s’allonge en surface, on ne fait rien. On est déjà arrivé à 29 minutes.

Juliette: C’est pas mal.

Phil: Ça fait beaucoup!

La plus grande distance horizontale parcourue en apnée

Juliette: Et en distance horizontale, quelle est la plus grande distance parcourue?

Phil: C’est une bonne question. Pendant longtemps, dans ce qu’on appelle l’apnée dynamique, donc les longueurs sous l’eau en piscine. L’approche consistait à essayer d’aller relativement vite, donc en étant beaucoup plus dans le côté acide lactique que dans le côté besoin de respirer en pensant que plus on allait vite, plus on allait faire une grande distance. Puis cette approche a été un peu chamboulée justement par la personne qui avait fait le record du monde d’apnée en statique. Elle s’est dit: « mais si je peux faire 11,35 min quand je ne fais rien. Si j’effectuai une apnée dynamique, où j’irai le plus lentement possible avec le moins de consommation possible. Peut être que j’arrive à faire des distances plus importantes ». Et là, il était parti sur une apnée qui a duré quasiment 4 min, mais dans laquelle son taux de mouvement était tellement réduit qu’au final, sur la durée, il a battu ce qui était le record du monde à l’époque. Aujourd’hui, la plus grande distance en apnée dynamique parcourue à l’aide d’une monopalmes, qui est l’engin de propulsion le plus efficace dans notre activité est de 316 m.

Phil: Chez les femmes, on n’est plus très loin. On est à 296 m, si j’ai bon souvenir chez les filles. Et sans palmes, donc avec uniquement une brasse sous marine, on est dans les 260 m chez les messieurs et autour des 240 m chez les filles. Je n’ai pas les chiffres exacts en tête. Je croire qu’on est une des disciplines sportives où les records sont souvent bouleversés. Pratiquement à chaque championnat du monde, il y a des nouveaux records qui s’établissent.

Profondeur et apnée

Juliette: Et en profondeur, on arrive à descendre à combien de mètres?

Phil: Alors, dans les disciplines classiques, comme de nouveau par exemple la descente avec une monopalme on est à 130 m de profondeur. Sans palmes on est à 101 m de profondeur. Et puis on voit qu’avec deux palmes, donc bipalmes, ça se rapproche gentiment puisqu’on est à 120 m depuis une quinzaine de jours. C’est notre ami Arnaud Jerald, un apnéiste français, qui est en train de faire une montée fulgurante, qui est descendu à 120 m.

Phil: Ce qui est extrêmement intéressant. C’est que les filles sont en train de rattraper les garçons, mais d’une manière vraiment impressionnante Puisque la femme la plus profonde du monde Alenka Artnik , qui était chez nous l’année passée pour un stage, est à l’heure actuelle à 122 m, officiellement. Elle en a déjà fait 124 m en entraînement. Donc on voit que l’écart de 30 m entre hommes et femmes qu’on avait, il y a encore quelque temps, est en train de se grignoter petit à petit.

L’apnée, un sport mixte

Juliette: Comment expliques tu qu’il y ait un écart entre l’homme et la femme ?

Phil: Il y a automatiquement une partie qui va être liée à la capacité inspiratoire et à la capacité pulmonaire totale. La cage thoracique d’un homme et la cage thoracique d’une femme ne sont pas exactement les mêmes. Les volumes disponibles à l’intérieur du corps, particulièrement au niveau du bas du tronc, sont plus importants chez les messieurs que chez les femmes. Parce que les femmes ont des organes que nous les messieurs n’avont pas besoin. Et puis le diaphragme n’a pas exactement la même élasticité ou le même positionnement chez la femme que chez l’homme. C’est vraisemblablement ces différences là, et la capacité pulmonaire un peu plus importante chez les messieurs qui explique en partie la différence.

Phil: Mais d’un autre côté, de plus en plus, on comprend à quel point c’est une activité passe par le mental. Et c’est probablement là que les femmes prennent de plus en plus confiance en elles et comprennent qu’elles sont tout aussi capables. Et que, contrairement aux stéréotypes ancrés, on est peut-être vraiment dans une discipline où l’écart n’est pas si important que ça.

Juliette: Il y avait peut être moins de femmes aussi ?

Phil: Alors, contrairement à d’autres sports où, contrairement à la plongée bouteille qui a un côté plus masculin peut être, l’apnée est beaucoup plus mixtes. Dans nos statistiques, par exemple, on est sans problème à 50 % de participantes. C’est donc une activité qui est beaucoup plus mixte en ce sens là.

Morphologie et performance

Juliette: Au final, la morphologie de l’individu rentre en compte dans la performance sportive?!

Phil: Théoriquement oui. Si on prend un Alexey Molchanov, l’homme le plus profond du monde, il va avoir une capacité pulmonaire qui arrive à un total de dix litres ou davantage. Ce qui veut dire plus du double de la moyenne d’un homme adulte déjà entraîné. Et en comparaison, vous avez une petite Italienne, Alenka Artnik, qui a aussi fait plusieurs records du monde, qui semble ne pas avoir de cage thoracique du tout et qui pourtant descend à 118 m de profondeur. Donc elle est à 12 m de là où va Alexey. Alexey a des cuisses similaires à celles d’Alberto Tomba à l’époque. C’est à dire deux ou trois fois le diamètre de ma cuisse. Et Alenka, elle est montée sur des cures dents. Et puis là, on est dans des disciplines où il y a un gros investissement physique aussi, au sens lactique. Donc l’effort musculaire fourni est extrêmement important.

Phil: Par contre, la plongée la plus profonde de tous les temps, qui a été réalisée par Herbert Nitsch, qui est incontestablement le plus grand apnéiste de tous les temps. Le seul à avoir eu des records dans toutes les disciplines, indifféremment de profondeur ou piscine dynamique ou piscine statique, il a été à 250 m de profondeur.

300 m une profondeur limite

Phil: Physiologiquement, Herbert a toujours revendiqué que l’homme pouvait aller à 300 m de profondeur. Mais là, en terme d’effort, on n’est pas dans la même catégorie parce que c’est une descente qui est assistée par une gueuse et une remontée qui est assistée par, dans le Grand bleu on voyait des systèmes de ballon. Dans les dernières tentatives que Herbert a fait, il avait mis au point des systèmes de treuils ultra rapides pour assurer sa remontée. Donc, physiologiquement, on sait que 250 m et davantage sont possibles au niveau des possibilités du corps humain.

Juliette: Mais quand tu descends aussi bas, quand tu remonte, tu remonte avec des stops ?

Phil: Alors déjà il n’y a pas de généralités parce que Herbert a été le seul à faire cela . Depuis le milieu des années 2000, il n’y avait plus que lui qui faisait ça. Avec le dernier record du monde en 2012. J’avais le privilège d’être son photographe et son bloggeur à l’époque, donc j’ai vécu ça vraiment de l’intérieur. Herbert, lui, avait une gestion de sa plongée dans laquelle la gueuse commençait à ralentir à 40 m de la surface, pour s’arrêter à 20 m sous la surface. Là, il faisait encore un pallier de décompression, mais toujours en apnée. Avant de finir sa remontée à la brasse. Et une fois qu’il avait validé le protocole, la petite séquence qui doit être réalisée devant un juge en surface pour valider le record, il redescendait faire un peu de paliers à l’oxygène pur. Parce que sur ce type de plongée à des profondeurs extrêmes, avec des remontées extrêmement rapides, on peut se trouver confronté à des pathologies un tout petit peu similaires à l’accident de décompression.

Les réactions physiologiques durant l’apnée

  • Bradycardie
  • Vasoconstriction périphérique
  • Hyper-activation de la rate
  • Erection pulmonaire

Juliette: Est-ce que tu t’y arriverais simplement, je sais que ce n’est pas forcément simple à expliquer, ce qui se passe au niveau physiologique, lorsqu’on se met en apnée?

Phil: Alors oui. C’est quelque chose qui est assez amusant parce que parfois, les médecins généralistes sont prêts à donner sans réflexion autres un certificat médical pour de la plongée bouteille parce qu’ils disent: « Tu n’es pas cardiaque, tu n’as pas de problème pneumologique, tu n’as pas de problème d’asthme … Donc tu peux faire de la plongée en bouteille ». Et lorsqu’on évoque la plongée en apnée, ouh là là! Mais alors là, c’est autre chose. Et en fait, ce qui est étonnant, c’est que nous n’avons jamais été conçu pour respirer sous l’eau alors que l’apnée est inscrite dans notre patrimoine génétique. On partage avec les mammifères marins une physiologie dans laquelle le fait de suspendre notre respiration amène le cerveau à enclencher des mécanismes d’urgence.

Phil: La première chose qu’il va faire, c’est la bradycardie. Donc on ralentit le rythme cardiaque parce que ça va ralentir la diffusion du sang à travers l’organisme, donc cela va ralentir la consommation de l’oxygène.

Phil: Dans un deuxième temps, il va enclencher une vasoconstriction périphérique « Blood shift » en anglais, un transfert sanguin. C’est-à-dire qu’il va identifier toutes les parties du corps qui n’ont pas besoin du sang et de l’oxygène. Les extrémités en particulier. Et il va rapatrier ce sang en direction des organes nobles.

Phil: Dans un troisième temps, il va y avoir une hyper-activation de la rate qui contribue à la production des globules rouges, de l’hémoglobine et donc au transport de l’oxygène à travers le flux sanguin. Ce produit également, ce qu’on appelle une érection pulmonaire. C’est à dire qu’en fait, avec l’apnée, on va créer une surpression sanguine qui fait que les alvéoles pulmonaires vont aussi se dilater. Ce qui va améliorer le transfert et l’échange gazeux qui se réalise dans l’organisme.

Phil: Et cela se produit déjà à sec. Quand on va dans l’eau des micro-récepteurs qui sont sur le visage, transmettre l’information au cerveau : Attention, non seulement on ne respire pas, mais en plus, même si on voulait respirer là tout de suite, on ne pourrait pas parce qu’on est immergé. C’est ce qu’on appelle le réflexe du mammifère marin ou réflexe d’immersion. Et là, tous les phénomènes physiologiques dont on vient de parler vont encore être intensifiés par le fait que le cerveau est conscient du fait qu’il n’a pas accès à l’air libre.

Les contre-indications à l’apnée

Juliette: Y-a-t-il des contre-indications à l’apnée ?

Phil: Pas réellement, parce qu’en fait, au travers du travail respiratoire qu’on fait pour l’apnée, il n’y a aucun organe, cerveau comprit qui ne sont pas bénéficiaires du travail qu’on réalise. C’est-à-dire que même sur des pathologies d’asthme, même sur des pathologies post Covid, comme je traite beaucoup aujourd’hui, il n’y a aucune contre-indication. Il n’y a rien qui dit « non, l’apnée serait mauvaise pour vous ».

Juliette: Après, j’aurais tendance à dire que le travail de l’apnée est de toute façon adaptatif. Souvent le commun des mortels voit l’apnée comme : « Je bloque tout et je reste le plus longtemps possible ». Alors que c’est beaucoup plus complexe que ça. Comme tu l’as dit, il y a le statique, il y a le dynamique, il y a la profondeur. Donc on adapte, si on ne peut pas subir la pression et bien on reste en statique. On se rend compte si quelque-chose ne va pas, si on doit faire des adaptations …

Phil: On le voit au travers des disciplines, que ce soit dans les compétitions mais aussi dans la pratique de vous et moi. On voit très bien qu’il y a des gens qui vont avoir un plus grand talent pour l’apnée statique. Ce sont des gens chez qui ce côté méditatif, ce côté mode avion du cerveau va s’enclencher plus rapidement. Puis, par exemple, des gens qui viennent de la nage ou qui viennent du triathlon, qui viennent de la pratique de la haute montagne, qui sont très habitués à un effort musculaire, mais en situation hypoxique et lactique; eux ils vont davantage se retrouver dans le côté dynamique. Le côté où il y a un mouvement, il y a une technique, il y a une concentration sur ce que fait le corps. Qui fait que là, je suis plus à l’aise que dans cette immobilité.

Phil: Et puis la profondeur, c’est ce qui amène le plus de contraintes, notamment par la problématique de l’équilibrage. La pression augmentant, on doit équilibrer le poids de l’eau qui va exercer une pression sur les oreilles. On doit le compenser avec des techniques d’équilibrage qui, en gros, consistent à envoyer de l’air par l’intermédiaire des trompes d’Eustache dans l’oreille interne pour rééquilibrer la membrane du tympan. Il y a des gens chez qui ces problématiques là les limites en profondeur. Et il y a même des gens qui parfois, après 4 ou 5 m, ça ne passe pas. Il n’y arrive pas. Mais, ça aussi, ça peut se travailler parce qu’il y a aussi des exercices spécifiques qui vont permettre un élargissement, voire un relâchement des trompes d’Eustache. Et qui, avec le temps, font que même ceux qui avaient des blocages là-dessus vont pouvoir y arriver.

Débuter par un encadrement et ne jamais pratiquer seul

Juliette: Tout ce travail doit se faire de façon encadrée! En fait, il faut être encadré pour pouvoir connaître les exercices, y aller progressivement et ne pas se retrouver dans une situation délicate.

Phil: Alors déjà, on a une règle de base dans l’apnée et de toute façon, c’est notre mantra, c’est qu’on ne pratique jamais l’apnée seul dans l’eau. C’est vraiment la règle de base. On a vu des gens qui étaient plus que des athlètes de pointe, on a vu des gens qui détenaient des records du monde, mourir parce qu’ils étaient seuls dans l’eau, ce qui n’a pas énormément de sens. Donc déjà, on est toujours au minimum deux.

La pratique de l’apnée se réalise minimum à deux !

Phil: Après, c’est un peu, je dirais, comme énormément d’activités aujourd’hui, on peut avoir le sentiment que Ah mais j’ai vu une vidéo sur YouTube et ils font ça, et puis ils font ça, … Je pense que c’est une école qui peut être intéressante une fois qu’on a acquis les bases de l’activité. Mais au début, c’est indispensable à mon sens de passer par un encadrement, de poser les bases de la bonne manière. Aussi parce que cela va contribuer à la motivation. Parce que si on part sans quelqu’un qui nous aide à maîtriser les bases, on risque de rapidement heurter des murs et cela va nuire à la motivation. Alors qu’avec le bon encadrement, on se rend compte dès une initiation que l’on peut avoir des capacités largement supérieures à ce qu’on pensait. Et, ainsi avec l’encadrement, progresser, se développer.

Phil: Il y a un autre côté aussi dans le rapport à l’encadrement. Ce matin, par exemple, j’étais à l’entraînement, à la piscine. On est un groupe d’une douzaine de personnes, il y a donc aussi un côté communautaire, le rapport humain. C’est vrai qu’en apnée, un peu comme en escalade par exemple, au moment où je suis dans mon exercice, je suis foncièrement individualiste. Mais je ne peux réaliser mon exercice que parce que je sais qu’il y a quelqu’un qui assure ma sécurité, et qui veille sur moi. Donc moi, j’aime bien dire que l’apnée, c’est probablement le sport individuel le plus collectif au monde. Il y a donc dans l’apnée, tout le côté humain et rapport humain. Et comme très vite, ça va s’associer à un style de vie, on se retrouve dans une communauté de gens avec qui on a des affinités et cela permet aussi de déconner, de faire la fête, d’être bien.

L’apnée, le sport individuel le plus collectif au monde.

Juliette: Et de partager !

Juliette: Moi, ce que j’aime bien aussi, c’est toujours de dire OK, YouTube, c’est intéressant, ça doit donner des idées. Mais comme tu le dis, il faut qu’il y ait un encadrement à la base pour aussi se connaître, se découvrir. Et savoir sentir au niveau de la sécurité: où est-ce que je peux aller, où est-ce que je ne peux pas aller. Et ça, je ne pense pas qu’on puisse le découvrir si on n’a pas été encadré, et ce pour n’importe quel sport au départ. Apprendre a ressentir les choses, a ressentir le sport, et comment les choses doivent se passer. Donc il y a l’aspect communauté et l’aspect sécuritaire.

Phil: Oui, après YouTube, c’était quelque part le premier grand acteur de l’Internet où tout le monde peut avoir accès gratuitement, qui est devenu par extension les réseaux sociaux. Sur YouTube comme sur les réseaux sociaux, il y a des choses très très bien. Et puis on a pu le voir ces dernières années, qu’est-ce qu’on nous disait au mois de février? C’est que tous les experts du Covid qui sont au chômage, vont devenir des experts de la guerre en Ukraine. Donc voilà, il y a aussi ce côté là. Effectivement je pense qu’il est plus intéressant de rejoindre des groupes de discussion qui ont un peu pris la place de ce qu’étaient les forums sur Internet à un certain moment. Mais dans ces groupes, on voit aussi toujours qu’il y a des voix dominantes. Alors il y a des voix dominantes, crédibles parce qu’elles ont quelque chose à leur actif. Et puis il y a juste les voix dominantes qui sont les mêmes que sur les terrasses de bistrots. C’est juste ceux qui parlent plus fort que les autres.

Phil: Donc oui, l’accompagnement est d’autant plus essentiel que, typiquement, sur un stage d’initiation, je ne vais pas avoir plus de six participants alors que la demande est plus importante. Mais je limite à six, parce que cela va me permettre d’accorder à chacun une attention individuelle. J’enseigne aussi le yoga et ça rejoint un peu à la même chose. Tu peux avoir une salle avec quinze personnes qui suivent un cours, mais ma proposition, elle, n’est pas formulée d’une manière unique et chaque posture qu’on va réaliser, comme chaque exercice que l’on va réaliser, va être adaptée en conséquence à la personne. Et dans un groupe d’apnée, on peut avoir des gens qui recherchent davantage la performance. On va les pousser davantage. Et on peut avoir des gens qui sont beaucoup plus là pour le côté bien-être. On peut formuler la même proposition, mais de manière différente, pour répondre à différentes envies.

Juliette: En fait, tout le monde peut faire de l’apnée. A-t-on besoin d’une capacité particulière?

Phil: Absolument aucune.

Les enfants et la pratique de l’apnée

Juliette: Il y a des précautions particulières par contre, pour les enfants ou pas du tout?

Phil: Alors la particularité avec les enfants, médicalement, ce à quoi on va être attentifs déjà, c’est qu’il n’y ait pas d’asthme infantile. Souvent, il y a des formes d’asthme qui se résorbent à l’adolescence. Auquel cas on y sera attentif. Et peut être qu’on intègrera la notion de l’asthme au moment où on réfléchit à la proposition qu’on va formuler.

Phil: L’autre côté chez les enfants … On a une fille, Kim, dans notre groupe qui a douze ans. Alors c’est vrai que physiquement, elle en paraît bien davantage. Mais c’est la première fois que je vois une enfant de douze ans qui demande à faire de l’apnée statique. Et c’est vrai que d’habitude, on va éviter le mélange adultes enfants. Parce que l’enfant va davantage se réaliser dans quelque chose qui est ludique, où il y aura beaucoup plus de mouvements.

Phil: Il y a aussi ce qu’on appelle le « mermaiding », « mermaid » la sirène avec les petits collants en queue de poisson. Ça, ça rencontre aussi un grand succès aujourd’hui. C’est une autre manière d’aller vers l’apnée, mais qui peut correspondre beaucoup mieux justement au besoin de jeux des enfants. Alors que notre public d’adultes, il a ce côté, recherche de la pratique méditative ou recherche de l’effort. Mais un enfant, à mon sens, ne devrait pas forcément être poussé dans cette recherche là. L’avantage peut-être, c’est que si on pousse un enfant dans une activité qui se déroule dans l’eau, au moins il n’y aura pas d’impact sur le corps, comme il peut y en avoir dans d’autres sports dans lesquels on pousse les enfants.

La syncope en apnée

Juliette: Quand tu fais de l’apnée, et que tu restes un petit peu trop longtemps. On peut observer parfois des malaises. Comment on les explique? Est-ce que c’est grave? Qu’est-ce qu’on doit faire à ce moment là?

Phil: Alors il y a tout un chemin qui va se produire dans une apnée. Si on prend un peu l’apnée statique comme référence, parce-que c’est quand même la discipline dans laquelle on apprend à maîtriser le phénomène. Donc, on a d’abord une phase qui est dite de bien-être. Habituellement, l’être humain respire une quinzaine de fois par minute, voire une vingtaine de fois par minute, ce qui veut dire toutes les 3 à 4 secondes. A partir du moment où on interrompt notre respiration 20 ou 30 secondes, on n’est pas du tout dans la performance. Mais le Cerveau s’interroge. 30 secondes, tout le monde les fait facilement. Mais on est déjà dans une envie de respirer, c’est-à-dire que le cerveau se dit ?

Juliette: Mais qu’est-ce qui se passe?

Phil: Et puis, au fur et à mesure qu’on reste dans l’apnée, on va consommer l’oxygène qui est présent dans notre organisme. On ne renouvelle pas le stock d’oxygène. On génère du CO2, du dioxyde de carbone. Et en fait, le dioxyde de carbone va être pour notre cerveau l’indicateur d’un problème. C’est-à-dire que ce n’est pas la défaillance en oxygène qui va amener le besoin de respirer, c’est la saturation en dioxyde de carbone qui va amener ce besoin.

Ce n’est pas la défaillance en oxygène qui amène le besoin de respirer, mais la saturation en CO2.

Phil: Un parallèle avec la jauge à essence de la voiture. Le voyant s’allume, on n’est pas en panne. Si on accélère, on a moins de kilomètres à disposition. Si on lève le pied, on a plus de kilomètres à disposition. Donc chez nous, quand on reste un certain temps, les taux de dioxyde de carbone augmentent pendant que les taux d’oxygène diminuent. Et cela fait résonner cette alarme dans le cerveau. Là, on va rentrer petit à petit dans une phase qu’on va appeler la phase de lutte. On est dans le fuir ou combattre. Le cerveau va alors envoyer des messages neurologiques, et il va commencer à tirer sur les intercostaux. Il va chercher à nous faire soulever le diaphragme pour expulser ce CO2 qui le perturbe.

Phil: Dans la phase de lutte, on va être confronté à des contractions. Donc vraiment le diaphragme et on bloque tout, y compris la glotte. On est en laryngospasme, donc la glotte est aussi bloquée. On ne laisse rien sortir. Et si on arrive à poursuivre et poursuivre et poursuivre, eh bien, au bout d’un certain temps, puisqu’on a ignoré l’alarme qui s’allumait et qu’on a continué à rouler, à rouler, à rouler, à rouler. Tout d’un coup, on va rentrer en perte de contrôle moteur. Donc le cerveau dit « bon Bah là, moi je déconnecte tout ce qui ne sert à rien ». Le corps va petit à petit, peut-être avoir deux ou trois spasmes … Et derrière on arrive sur la syncope. Donc perte de connaissance hypoxique, défaillance d’oxygène. Il n’y a plus que le cerveau et le cœur qui continuent à tourner. Tout le reste s’arrête. Et c’est une des raisons qui fait qu’il ne faut jamais faire de l’apnée tout seul dans l’eau. Si on est accompagné à ce moment là, la syncope est sans danger. Si on n’est pas accompagné à ce moment là, ça peut très vite devenir une noyade.

Juliette: Comment l’accompagnant doit-il réagir?

Phil: Il faut simplement ramener la personne dans une position. Donc si on était en apnée statique, c’est un geste très simple qui consiste simplement à retourner la personne. Retirer le masque ou le pince nez. Donner des petites gifles, souffler en direction des voies respiratoires. Dire à la personne respire, respire. Et en général, au contact de l’air libre, le réflexe respiratoire se rétablit. Dans une syncope très marquée, on fera peut-être juste une insufflation pour relancer la mécanique respiratoire et ça repart sans souci.

Juliette: OK.

Phil: Par contre, la personne qui aura syncopée sera incapable de vous dire ce qui s’est passé. A partir du moment où le cerveau va partir en direction de la perte de contrôle moteur ou de la syncope, déjà à ce moment là, il arrête les disques durs et on n’a pas mémoire du moment où on passe à la syncope. Et c’est là où, par rapport à des pertes de connaissance que l’on peut avoir suite à une chute de tension, sur la fin d’un hyper-effort comme un marathon, la syncope en apnée ne prévient pas. Il n’y a pas un moment où on peut dire « Ah, je vais syncoper. Bon bah, je vais remonter d’abord ». Parce que cela ne prévient pas du tout.

Juliette: D’où l’importance d’être plusieurs. Quel est le temps de récupération après une syncope? La personne qui fait une syncope, peut-elle refaire de l’apnée le lendemain?

Phil: En général, on interdit 24 h. On se dit simplement bon gré mal gré, ce n’est pas grave, ça n’a pas de conséquences. Mais il y a eu un choc physiologique quand même pour que le cerveau dise « attend là moi j’arrête tout ». C’est comme, lorsqu’on a tiré la prise de l’ordinateur. Il faut laisser rebooster un petit peu. Donc là, on dit 24 h, tu ne refais pas d’apnée et après ça, ça va.

Juliette: Il faut prendre conscience de l’importance de la progression dans l’évolution du sport. Ne pas se dire « je force, je force, je force »…

Phil: Il faut apprendre à se connaître. Pendant une partie de ma vie, je pratiquais la haute ou la très haute montagne. J’ai pu aller à 7000 m sans souci. Et puis une autre fois, à 4005 m , on cale et on n’arrive plus à mettre un pied devant l’autre. Parce qu’on est dans une relation tellement intime avec notre corps, dans des activités comme ça, que tout va influencer: l’état de fatigue, l’état de bien-être mental. L’alimentation joue un rôle énorme dans notre pratique également. On peut être capable de 6 min de statique un jour. Et puis la semaine d’après, à 4.30 min, tout devient incroyablement compliqué.

L’alimentation avant la pratique

Juliette: On évite de manger avant d’aller faire de l’apnée?

Phil: Oui.

Juliette: Combien de temps avant?

Phil: Par exemple, si on a un entrainement comme nous, les entraînements à 8h30 le matin, on va dire: ou pas de repas du tout, surtout de l’hydratation, ou alors typiquement un fruit. Comme une banane, parce que ça ne prend pas beaucoup de place. Ça ne va pas avoir un poids dans l’estomac, qui va compliquer la digestion. Étant donné que la digestion est un très gros consommateur d’énergie. Et que nous, on a besoin d’être vraiment bien dans toute la zone ventre – diaphragme. On a besoin de pouvoir être complètement relâché. Ou certaines barres énergétiques. Pas celles qui sont pleines de sucre et de graisses. Il y en a qui sont très saines ou des fois « do it yourself » avec des dattes, des amandes ou des choses comme ça, si on sent qu’on a vraiment besoin de l’apport calorique. Mais en général, si on a fait un repas correct le soir d’avant, on pourrait même se passer de nourriture toute la journée, ne manger qu’à la fin de la journée. L’hydratation serait importante, notamment pour le côté lactique et pour éviter les crampes.

Les pertes caloriques et hydriques

Juliette: Y-a-t-il des pertes caloriques ou des pertes hydriques importantes durant l’activité?

Phil: Alors il y a les deux. Les pertes caloriques, déjà, parce qu’on porte des combinaisons en général, dès qu’on est dans une eau dont la température n’est pas d’au moins 32-34 degrés. On sait qu’il y a une différence entre la température centrale du corps et le fait qu’on est complètement immergé. On est entouré d’un cocon qui est d’une température différente de la nôtre. La combinaison va nous protéger en partie du froid. Mais c’est quand même une des activités dans laquelle on va avoir une consommation calorique très importante, alors que l’effort, lui, ne semble pas si important que ça.

Phil: Et puis, c’est pour ça qu’on dit aussi de faire attention au niveau de l’hydratation. Boire trois litres d’eau avant d’aller dans l’eau, ça ne sert à rien. On a un réflexe naturel qui s’appelle la diurèse d’immersion. Là aussi, c’est le choc thermique au niveau des organes internes qui fait que si on a bu trois litres avant, on va beaucoup uriner. Il est plus important de se réhydrater ensuite. C’est là que le corps en a le plus besoin. Et éventuellement moi des « bypasse » que j’ai trouvé, c’est de consommer un demi litre avant l’entraînement. Avec un mélange de type de boisson isotonique. Mais au lieu de le prendre en iso, je vais le prendre en hypotonique, c’est-à-dire que je vais ne mettre que la moitié du dosage recommandé. Là c’est aussi pour le côté sucres, acides aminés, pour maintenir les selles et éviter justement de trop uriner ou de trop perdre aussi sur les sels minéraux, et ces choses là.

Les 4 phases respiratoires

Juliette: Vous faites beaucoup de travail respiratoire. Il y a différentes techniques, je présume.

Phil: C’est le cœur de ce qu’on fait.

Juliette: Alors on ne va pas faire un cours sur toute la respiration, ça va être trop long. Mais est-ce que tu peux expliquer les différents types globalement de respiration?

Phil: Il y a quatre phases de la respiration pour l’apnée. Il y a une première phase qui est une phase qui vise à aller vers le lâcher prise, le relâchement, le ralentissement du rythme cardiaque. Cette respiration là, elle va se situer dans la partie basse des poumons. On va parler d’une respiration ventrale ou abdominale à mettre entre guillemets parce qu’on respire dans les poumons. On ne respire pas dans le ventre, donc c’est quand même une respiration forcément pulmonaire. Des fois, on utilise le terme respiration diaphragmatique, mais par défaut, la respiration est diaphragmatique. Donc de nouveau… Moi je dis respiration basse simplement. L’idée c’est de dire que si j’ai une main qui se place sur le haut de la poitrine et une main avec le pouce au niveau du nombril, tout simplement, pendant cette ventilation, la main supérieure ne bougera pas et uniquement … (voir vidéo). Et de fait, en restant sous la zone des basses côtes, on évite de créer une stimulation cardiaque. Comme cela se fait systématiquement dans la respiration thoracique normale chez les adultes en position verticale. Du coup, le rythme cardiaque va pouvoir ralentir, se stabiliser, ralentir, se stabiliser… Et comme le cœur est le moteur de l’organisme, si on ralentit le rythme cardiaque, automatiquement, on ralentit tout le métabolisme. On va ainsi vers ce côté calme, méditatif, lâcher prise. Concentration des pensées sur la respiration qui devient déjà une activité de type méditatif.

Juliette: Donc le but principal sur cette respiration là, ce n’est pas de vider l’air, c’est de baisser ton rythme cardiaque et de faire une mise au calme.

Phil: En ayant toujours des expirations prolongées pour favoriser l’expulsion du CO2. Et puis différentes méthodes sont préconisées. Moi, au début, j’essaye toujours de dire, « au début fait le plus simple ». Après, quand tu apprendras à connaître, tu peux voir d’autres manières de faire.

Phil: Avant l’apnée, on va prendre une inspiration finale qui, elle, va chercher à emplir toute la cage thoracique. Donc, si on reprend le même principe des deux mains posées comme cela (voir vidéo). On vide complètement. Et en partant du ventre on inspire. Donc l’inspiration finale, c’est la phase deux.

Juliette: Donc tu es en train de gonfler au départ du ventre pour regonfler vers tout le thorax. OK.

Phil: Il y a vraiment une prise de conscience qui se pratique par le travail d’autres techniques de respiration aussi. Du fait que le volume pulmonaire est beaucoup plus important que ce qu’on soupçonne. Un adulte comme moi, si je n’avais pas l’entraînement que j’ai, j’aurais une capacité pulmonaire de quatre litres en moyenne. Le volume courant… (Bruit des vagues sur le lac en fond sonore)

Juliette: La nature nous parle.

Phil: C’est l’ambiance. Le volume courant, c’est ça. C’est un petit mouvement de 0,2 à 0,3 litre. La capacité pulmonaire totale, si elle est de 4 litres, ça ne sert à rien pour une apnée de jouer… Et c’est là où justement, parfois sur YouTube par exemple, les gens y voient des trucs comme la technique de la carpe. Technique qui est utilisée à très haut niveau. Qui consiste, après avoir fait le plein de la cage thoracique, à faire encore des succions avec la bouche pour encore comprimer, comprimer, comprimer. Herbert dont je vous parlais tout à l’heure, il rajoutait quatre litres en carpant avant une apnée. Mais si on observe le langage corporel, ça ressemble à ça (voir vidéo).

Phil: Et là, le commun des mortels ne peut pas être détendu. C’est impossible. Si on crée une surpression comme ça dans un organisme qui n’est pas entraîné, à peine va-t-on bloquer la respiration, qu’on aura envie de tout laisser sortir. On va donc viser chez les débutants, mais même chez les pratiquants réguliers, 60-65 % de la capacité pulmonaire totale, on peut ainsi être relâché. Et déjà là, on arrive à des performances qui sont surprenantes par rapport à ce que les gens pensent pouvoir faire.

Phil: Donc on a le relâchement, l’inspiration finale, la phase de non respiration et ensuite on a une respiration de récupération à la sortie de l’apnée. Donc, on commence par l’expiration pour éliminer le CO2 et ensuite on va faire trois respirations ou l’inspiration comme l’expiration vont être actifs (voir vidéo). Et après on peut dire « I am ok », tout va bien. Et si on a un oxymètre au bout du doigt, on se rend compte qu’on a pu descendre à une saturation en oxygène de 50-60 %, peut-être pendant une longue apnée statique. Et avec cette respiration de récupération, en trois mouvements respiratoires, on est revenu à 100 %.

La pratique de l’apnée en complément de son sport

Juliette: Qu’est ce que tu penses de la pratique de l’apnée chez les sportifs de plus ou moins haut niveau, mais dans d’autres sports, pour améliorer leur sport? Là, moi, je le vois plus sur cette notion de gain en niveau des capacités physiologiques, et peut-être des capacités mentales aussi.

Phil: Oui, il y a énormément d’aspects qui vont jouer. Enormément d’apnéistes vont se tourner vers des activités comme le yoga. Donc ça veut dire qu’on va travailler sur la souplesse. On va travailler sur une meilleure qualité de fibres musculaires et une meilleure oxygénation des fibres musculaires. On va apprendre à notre corps à mieux exploiter l’oxygène à la disposition. On va augmenter la capacité thoracique parce que finalement, on parle de cage thoracique. Donc vraiment, nos poumons y sont enfermés, protégés aussi, mais enfermés dans cette cage thoracique. En augmentant la capacité thoracique, on augmente la capacité respiratoire totale. Ça, c’est quelque chose qui peut être bénéfique dans de nombreux autres sports.

Phil: Ensuite, on rajoute le travail mental. C’est-à-dire, tout en nous dit « je ne peux plus » et pourtant je peux encore. Donc ce côté de dépassement de soi et d’interactions avec un cerveau qui nous dit « T’es cuit, tu ne peux plus, arrête ». Et le mental qui va nous dire « cerveau, je sais que tu fais ton job, je sais que tu veux mon bien, je sais que tu es mon ami, mais on sait tous les deux qu’on n’est pas encore complètement au bout. Donc on va continuer encore un petit peu ». Il peut y avoir une interaction entre plusieurs sports comme l’apnée et d’autres sports où on pousse très loin dans l’effort. Je cite très souvent le marathon, le triathlon, la très haute montagne, parce que c’est peut-être là, où on va le plus retrouver ce côté effort hypoxique et dépassement de soi.

Phil: Le mental va jouer un rôle dans tous les sports. Mais quelqu’un qui fait une course, qui est basée sur la vitesse, comme la natation ou le 100 m, il est dans un effort explosif. Son mental, il est déterminant avant le départ. Pendant la course, le mental n’existe plus. Alors que des activités dans lesquelles on est, nous. Le rapport entre le corps et l’esprit, il est déterminant pour poursuivre l’effort. Parce qu’on est dans quelque chose qui va plus vers l’endurance. Même si en apnée, on n’est pas sur les 2 h d’un marathon, on est bien d’accord. Mais on se rapproche beaucoup plus du sport d’endurance. On se rapproche beaucoup plus du conflit de l’alpiniste qui doit faire cinq pas, s’arrêter pour respirer 5 min. Dire « Mon Dieu, je n’en peux plus, je vais redescendre ». Et même sans s’en rendre compte, il est tellement mentalement habitué à cela, qu’il refait les cinq pas suivants et que tout d’un coup il est au sommet.

Les exercices spécifiques aux apnéistes

Juliette: Dans le cadre des apnéistes « purs », est-ce que vous faites des exercices à sec spécifiques? Certainement des exercices respiratoires, ça c’est clair. Mais au niveau physique, le yoga pour la souplesse, … Mais est-ce que vous faites du renforcement musculaire? Est-ce que vous avez un entraînement spécifique pour améliorer vos capacités?

Phil: On a vu petit à petit qu’il y a un peu de deux catégories. Il y a effectivement des gens qui s’entraînent, par exemple avec Alexey Molchanov, vice champion du monde et recordman du monde en profondeur, lui a un bagage qui est la natation. Tout petit, il nageait. Sa mère était nageuse d’élite. Sa mère a été la plus grande apnéiste féminine de tous les temps. Il a pris la relève. Donc lui, c’est piscine, piscine, piscine, piscine et énormément d’entraînement en piscine. D’autant plus qu’en vivant à Moscou, il n’y a pas une mer chaude à côté de la maison.

Phil: Dans d’autres écoles, par exemple, si on prend l’école du sud de la France avec des références comme Guillaume Néry, Morgan Bourc’his, des gens qu’on voit régulièrement aussi dans les médias. Eux se tournent énormément vers CrossFit. Mais essentiellement avec un travail en poids de corps. Parce qu’on ne veut pas augmenter la masse musculaire pour l’apnée. Beaucoup de travail sur le cardio avec le trail, le vélo, la course à pied. En terme de travail musculaire, on va beaucoup travailler sur la qualité des fibres, mais on ne recherche absolument pas la masse. C’est-à-dire qu’on est un peu comme des grimpeurs. On va chercher le meilleur rapport poids-puissance, mais sans augmentation de la masse musculaire. Puisque le muscle est le premier consommateur d’oxygène. Et comme on va déprimer le corps d’oxygène, on ne va pas rajouter des consommateurs.

Juliette: Les apnéistes professionnels ont une grosse surveillance de leur poids?

Phil: On porte des combinaisons tellement moulantes que je crois qu’on se rend vite compte. Si la combinaison est plus dure à mettre, c’est un signe. Oui, on surveille tout. On surveille un peu comme dans tous les sports arrivés à un très haut niveau. Il y a aussi un côté être accompagné par les bonnes personnes, qui peut jouer un rôle très important. Beaucoup vont avoir des préparateurs physiques, des contrôles réguliers, peut-être un accompagnement physio, ostéo. On n’a pas tout à fait les mêmes terminologies en France et en Suisse. En France, beaucoup de gens disent j’ai un kiné. Et en fait le kiné, c’est chez nous, le physio. Alors que chez nous, un kinésiologue, c’est quelqu’un qui travaille sur quelque chose de complètement différent. Ça n’a rien à voir avec la gestion, l’entretien du corps.

Phil: Donc oui, on va trouver la présence de ces gens là dans notre sport aussi. Et en plus des préparateurs physiques, pour certains athlètes, le déclic va se faire avec la rencontre avec un préparateur mental, qui va savoir appuyer sur les bons boutons.

La nutrition

Juliette: Et au niveau de la nutrition. L’apnée est quand même proche de la nature, de la concentration sur soi, de la méditation. Donc cela amène forcément à l’aspect nutritionnel. Ou peut être pas?

Phil: Mais si, si ..

Juliette: Qu’est-ce que je mange? Est-ce que c’est sain? Comment je digère?

Phil: Il y a tout ce côté là. Je suis avec mon ami Nik Linder, qui est un multiple recordman du monde, on est auteur de plusieurs ouvrages sur l’apnée. Je suis un mauvais commerçant. J’aurais dû le pitcher avec la couverture. Là, je n’ai pas pensé.

Juliette: On mettera les liens.

Phil: Et le chapitre cinq du livre qu’on a fait, qui s’appelle l’apnée, commence par cet aspect là, la nutrition. C’est déterminant parce que dans certaines classes de la société, les gens disent « tu es ce que tu conduis ». Nous, on va plutôt penser « on est ce qu’on mange ». Dans le lien avec la nature, mais aussi pour la qualité nutritive, énormément d’apnéistes se tournent vers l’alimentation végétarienne. On élimine énormément la viande. Par conscience écologique parfois, mais je dirais presque la plupart du temps, par conscience physiologique. On prend conscience qu’au niveau cardio-vasculaire, la viande n’amène rien du tout. On réalise que malgré ce qu’on essaye de nous inculquer encore maintenant, quand on vote pour le bien être animal ou des choses comme cela, que la protéine animale est indispensable à l’homme. Je dis toujours, mais l’animal que tu manges, lui, c’est nourri d’herbes. Donc ta protéine animale, c’est une protéine végétale qui a été recyclée. Et qui t’est resservie sous une autre forme. Mais, on a dans les lentilles, les pois, les haricots des concentrations de protéines qui sont largement supérieures à celles que l’on va trouver dans la viande. Donc beaucoup de gens s’éloignent aussi de la viande.

Phil: On va chercher dans l’alimentation tout ce qui va favoriser le transit intestinal. Parce que c’est vraiment important pour nous d’avoir un bon transit, de pouvoir aller à selle très régulièrement, de ne pas être encombré au niveau des viscères et des organes internes. On va beaucoup travailler sur la qualité des sels minéraux et des acides aminés. Evitez aussi certains produits comme le lactose, qui ont un impact sur les muqueuses, par exemple au niveau de toute la sphère ORL. Donc qui peuvent être source de problèmes au niveau de l’équilibrage pour les gens qui font de la profondeur. Et en général, s’orienter vers une hygiène de vie qui soit saine à tous les sens.

L’apnée un déclencheur du bien-être

Phil: C’est là où l’apnée peut être un déclencheur très intéressant. Je vois autour de moi énormément de gens qui avaient un certain style de vie et qui, au travers de l’apnée et de leur découverte de cette activité, du bien-être qu’elle procure, rentrent dans cette quête du bien-être.

Phil: Et réalisent que le bien-être passe aussi par l’alimentation, par la qualité du sommeil, par le repos mental, donc la déconnexion aussi. D’ailleurs, dans notre groupe, c’est notre slogan, on dit « l’apnée, ce n’est pas un sport, c’est un style de vie et ça rend les gens heureux ».

L’apnée, ce n’est pas un sport, c’est un style de vie et ça rend les gens heureux.

Juliette: Ça amène le bien-être!

Phil: C’est une source de bien-être étonnante. D’autant plus que typiquement, quand on est dans l’apnée statique, on peut passer par ce que j’appelle une forme de masochisme mental, le fuir ou combattre. Et on décide, et bien non, je vais combattre. Et ce qui est très difficile à décrire, c’est qu’on en ressort avec un bien-être incroyable. On avait l’année passée la RTS qui est venue faire un sujet pendant un stage d’initiation au bout du lac à Villeneuve. Ils ont interviewé des gens qui faisaient ça pour la première fois. Il y avait une participante, je trouvais qu’elle exprimait cela vraiment justement, elle disait « Mais je pensais que j’allais être dans le dur, dans la lutte, dans le combat. Et en fait non. Finalement, c’est hyper apaisant ». Et c’est vrai que ça peut être surprenant dans ce sens là. C’est ce côté, non être, lâcher prise, qui distingue peut-être l’apnée de tout autre activité. Moi, je dis toujours en rigolant, qu’on est les seuls sportifs qui peuvent s’entraîner allongés sur un tapis et rester crédible.

Juliette: Ça donne envie d’essayer!

Phil: Eh bien, il faut essayer!

L’initiation

Juliette: L’initiation, en général, elle se fait en piscine ou elle se fait au lac?

Phil: En piscine. Pour poser les bases. Si on n’avait pas de piscine, on pourrait être ici dans un mètre d’eau et on pourrait tout aussi bien le faire. Pour autant qu’on ait une combinaison et qu’on ne soit pas confronté au froid ou au choc thermique, qui peut induire une crispation. Donc on aura plus de mal à aller vers le relâchement.

Phil: On va toujours commencer en général par l’apnée statique, même si ce n’est pas la discipline dans laquelle on se réalise par la suite. Parce que c’est par ce biais là, qu’on va faire le lien entre intellectuellement: je sais ce qui va se passer dans mon corps, et maintenant, je le vis, et il y a ça qui est en train de se passer dans mon corps, je sais pourquoi ça se produit, je choisis d’accepter ces phénomènes. J’insiste toujours énormément dans les initiations, Je dis toujours sans vous faire violence vous allez rester 1.5min, 2 min en apnée. Si vous avez envie d’aller plus loin dans la violence, vous allez rester 3 min, 4 min. J’ai des gens sur une initiation qui dépassent les 4 min, mais sans s’en rendre compte. Ce sont ceux qui vont un peu plus dans le côté combattre. Mais déjà 1.5 min, on est dans l’extraordinaire.

Juliette: C’est la plus grande introspection, en fait!

Phil: Exactement! L’apnée statique, elle a cette valeur que c’est là qu’on fait le lien entre l’intellect, le corps et qu’on éduque le cerveau à accepter une chose sur laquelle il n’a habituellement pas besoin de réfléchir. Puisque dans la respiration on est dans le système sympathique. C’est quelque chose qui est naturel, induit et spontané. Et auquel on ne réfléchit pas. Par le biais du parasympathique, justement, on peut prendre contrôle, ralentir, contrôler, suspendre. C’est là qu’on rentre dans une activité où on ouvre un autre univers de découverte de soi-même.

Juliette: C’est quand même globable, parce que tu as: l’introspection, la mise en place d’un bien-être qui est censé grandir, et puis la maîtrise de soi, et de ton corps. C’est magique!

Une valorisation de soi-même

Phil: Oui, et il y a un autre côté qui est hyper important: c’est une valorisation. C’est une valorisation parce-que si notre ordinaire, c’est 15-20 respirations par minute. Je vois beaucoup de gens avec qui je travaille, hors apnée, spécifiquement des patients en clinique, c’est de 20 à 25 respirations par minute. C’est terrifiant! On ne bénéficie pas de l’apport en oxygène, on ne bénéficie pas de la production de CO2 qui va cumuler tout plein d’autres toxines, même les cellules grasses de l’organisme, et les expulser avec la respiration. On ne bénéficie pas des massages cardiaques, du massage des organes, de tout ce qu’on peut faire avec la respiration.

Phil: C’est une valorisation parce que si tu as pu faire 2 min d’apnée en ayant le sentiment que tu as retenu ta respiration pendant 30 s, que tu n’es pas entré dans une zone de souffrance extrême. Tu as réalisé quelque chose qui est hors de l’ordinaire. Donc on est du domaine de l’extraordinaire. Et on vit dans une société où, que ce soit dans le travail, dans le familial, beaucoup de gens, manque un peu de reconnaissance, de valorisation. Donc oui, il y a aussi un côté valorisation de soi-même, estime de soi, confiance en soi, qui peut être boosté par ce biais là.

Juliette: Valorisation de soi-même par soi-même en plus !

Wim Hof

Juliette: Pour finir, as-tu entendu parler de The Iceman?

Phil: Oui, Wim Hof. Oui, bien sûr.

Juliette: Qu’est-ce que tu penses de cette notion de thérapie par le froid? Il a fait pas mal de records en apnée, immergé dans de l’eau très très froide. As-tu un avis particulier sur ce sujet? On dévie un peu parce qu’on aborde la thérapie par le froid. Mais il utilise beaucoup la respiration et l’apnée.

Phil: On va faire de l’apnée sous glace aussi une fois par année ou des choses comme ça. Beaucoup d’apnéistes, déjà auparavant, pratiquaient le bain en eau froide, ou vont plonger toute l’année en milieu naturel. On a vu que pendant les phases Covid, avec les fermetures des piscines, il y a beaucoup plus de gens qui se sont intéressés à la baignade en eau froide.

Phil: Maintenant, là où on se rejoint, c’est dans l’utilisation de la respiration vers un objectif spécifique. J’ai vu des gens préparer l’Everest, par exemple, en utilisant Wim Hof. Aussi bien pour faire de l’acclimatation thermique que pour le travail sur la respiration, l’apnée, l’augmentation des concentrations d’oxygène dans l’organisme, la maîtrise cardiaque. Mais j’ai aussi vu des gens utiliser le yoga et la méditation dans cet objectif là.

Phil: Ce qu’il y a d’extrêmement différent, c’est que la méthode Wim Hof, ce type d’approche là, se base sur l’hyperventilation. Et pour nous, l’hyperventilation va complètement à l’encontre de ce qu’on fait. Parce qu’elle va induire une accélération du rythme cardiaque. Elle fausse les indicateurs du CO2. Elle active tout le système sanguin et musculaire. Donc elle va davantage utiliser d’oxygène à l’intérieur du corps. Et en ce sens là, même si pendant un temps, on a pu utiliser, je parle des années 70 peut-être encore, à l’époque des fameux duels entre Mayol et Maiorca… Maiorca, c’était vraiment ce côté (voir vidéo) hyperventilation. Vous avez cette scène mythique du Grand Bleu, où le Japonais se ventile de cette façon, et finit par syncopé en surface.

Phil: C’est vrai que lorsque Mayol est arrivé, il a amené, le zen, la méditation. Tout ce qu’on appelle « pranayama », maîtrise de l’énergie vitale. Les techniques respiratoires qui viennent de la science yogi qui est ayurvédique. Et il a clairement montré que c’est cette voie là qui est la bonne pour l’apnée qu’on pratique, nous.

Phil: Le dénominateur commun, c’est de dire que dans les deux cas, on va modifier notre respiration naturelle ou inconsciente avec un objectif spécifique. Par contre, les techniques appliquées ne sont pas du tout les mêmes.

Juliette: Elles sont limite contradictoires?!.

Phil: Elles sont opposées.

Juliette: Donc une personne ne peut pas pratiquer les deux? Ou peut pratiquer les deux, mais à distances l’une de l’autre?!

Phil: On peut tout à fait pratiquer les deux.

Juliette: Mais il faut avoir conscience que c’est opposé.

Phil: Voilà, mais ce sont deux travaux différents. Rien n’empêche un marathonien de faire du sprint. Donc c’est compatible. Le travail hyperventilatoire qui est pratiqué dans la méthode Wim Hof, à long terme, avec une pratique régulière, aura aussi des impacts comme l’assouplissement de la cage thoracique, la conscience des volumes pulmonaires. Puisqu’on est très conscient des volumes antérieurs les plus visibles. Mais on ne se rend pas compte que le volume postérieur est encore plus important. Beaucoup de gens disaient: « mais pourquoi on met les patients Covid à plat ventre pour les aider à respirer? ». Parce qu’en fait, la masse pulmonaire qui peut respirer sans pression de poids du corps est plus importante dans le dos. Donc ça va être plus confortable. Tout ça va aider aussi à une prise de conscience. Mais par contre, l’hyperventilation n’est pas l’amie de l’apnéiste, non.

Juliette: OK. Est-ce qu’il y a des choses que tu voulais rajouter sur l’apnée? J’ai l’impression qu’on a fait le tour.

Phil: On a déjà dit beaucoup de choses.

Juliette: Je pense aussi qu’on a dit beaucoup de choses, rien de plus?

Le message final

Phil: J’ai toujours la volonté, le besoin de rajouter le message final. On peut essayer tout seul. On peut s’entraîner un sec. Il y a même des applis pour les téléphones pour s’entraîner à sec et ainsi de suite. Mais voilà, n’envisagez jamais l’apnée tout seul dans l’eau. Il y a des gens de très, très haut niveau qui y ont laissé leur peau. Et pourquoi rendre morbide une activité qui en fait quelque part, est une célébration de soi, de notre corps, de ce que notre esprit est capable de faire, de ce qu’on est capable de faire dans l’association Corps et esprit? C’est une ode au lâcher prise. Pour moi l’apnée, c’est une forme de poésie du corps humain. Et je crois qu’effectivement, c’est tellement tout public que toute personne dont l’intérêt est titillé par le discours devrait venir essayer. Même ceux qui ne continuent pas dans l’apnée elle même. En général, ça va les amener au yoga ou à la méditation, ou à des prises de conscience de choses dont ils n’avaient pas conscience auparavant.

Juliette: Simplement à la recherche du bien-être.

Phil: Oui.

Juliette: Moi je dirais allez essayer! Merci.

Phil: Avec grand plaisir. Merci à toi.

Juliette: À bientôt

La réadaptation cardiaque – Episode 2

Vous pouvez regarder ce podcast sur notre chaîne youtube

Vous pouvez écouter ce podcast sur :

Les intervenant

  • Marisa Azevedo : Physiothérapeute à l’HRC.
  • Juliette Corgnet : Physiothérapeute

Transcription du Podcast

Juliette: Bonjour et bienvenue sur le podcast Santé Sport de CapRol. Aujourd’hui, nous allons reparler de la réadaptation cardiaque, épisode 2 avec Marisa Azevedo. Bonjour Marisa !

Marisa: Salut Juliette !

Juliette: Peux-tu brièvement te représenter pour ceux qui n’ont pas vu l’épisode 1 ?

Marisa: Je suis physiothérapeute, je travaille à la HRC (Hôpital Riviera Chabalais) à Rennaz. Et je suis une des référentes en réadaptation cardiaque. J’ai fais le CAS à l’HUG.

La fonction du coeur

Juliette: Peux-tu nous expliquer à quoi sert le cœur, quelle est sa fonction ?

Marisa: Le cœur, c’est la pompe de notre organisme, qui va jouer un rôle très très important dans la circulation sanguine. Il va permettre au sang de venir oxygéner tous nos organes. Et ça, pendant toute notre vie. D’où l’importance de bien le travailler.

Juliette: C’est le principe du moteur.

Marisa: Exactement.

L’anatomie du coeur

Juliette: Peux-tu nous parler, nous expliquer un petit peu l’anatomie du cœur ?

Marisa: Le cœur c’est un gros muscle à l’arrière du sternum, qui bat constamment, involontairement. Il est enveloppé dans un sac à deux enveloppes qui permet les mouvements normaux du cœur.

Marisa: Ensuite, après cette paroi, on a le myocarde. C’est la partie principale du muscle, ce qui fait les contractions. Et, plus à l’intérieur, on a ce qu’on appelle l’endocarde, les parois internes de notre cœur.

Juliette: Donc, il a différentes couches. Et puis, apparemment, il a aussi différentes cavités. Est-ce que tu peux nous expliquer les différentes cavités du cœur?

Marisa: Donc on a ces trois couches. Et puis le cœur, il a deux parties, même si c’est un gros muscle. Il a deux cavités le ventricule droit et le ventricule gauche. Et deux oreillettes aussi de chaque côté, avant l’entrée de ces cavités les ventricules. On a aussi les grosses artères qui permettent que le sang passe vers les poumons et tout l’organisme.

Une pompe qui permet la circulation du sang

Juliette: Le coeur a donc quatre cavités, quatre chambres cardiaques. L’ensemble est une pompe qui va permettre la circulation du sang. Est-ce que tu peux nous expliquer à quoi ça correspond, comment tout cela fonctionne ?

Marisa: Oui, les quatre chambres cardiaques … Donc tu te réfères aux oreillettes qui sont au niveau supérieur de notre cœur et les ventricules un peu plus inférieurement.

Marisa: Le côté droit de ce cœur va recevoir notre sang qui n’est pas riche en oxygène, désoxygéné. Sang qui va entrer par les veines cave dans l’oreillette droite.

Marisa: Une fois le sang désoxygéné dans l’oreillette droite, cette oreillette va se contracter. Permettant ainsi le passage du sang dans le ventricule droit.

Marisa: Le sang va par la suite sortir du ventricule droit pour aller vers le poumons.

Marisa: Il pourra alors bien s’oxygéner et revenir des poumons vers le cœur gauche.

Marisa: Le sang oxygéné partira du coeur gauche pour aller dans tout l’organisme enrichir nos tissus en oxygène, et ainisi avoir un bon fonctionnement.

Juliette: OK, donc le coeur permet vraiment l’oxygénation des tissus. C’est un peu un système de recyclage. Le sang arrive désoxygéné dans le cœur et revient oxygéné dans le cœur pour repartir dans la circulation générale. Pour pouvoir nous nourrir.

Marisa: C’est tout un travail de coordination. Tu as tout un tas de structures dans ce cœur, des oreillettes, des valves qui se ferment, qui s’ouvrent … En se fermant, elles empêchent le reflux dans le mauvais sens. D’autres s’ouvrent pour que cela passe dans le bon sens, c’est incroyable.

Juliette: Donc on peut avoir quand même passablement de dysfonctions cardiaques qui peuvent entrainer des soucis assez importants.

Marisa: Oui exact.

La réadaptation cardiaque muscle le coeur ?

Juliette: On dit souvent que la réadaptation cardiaque c’est muscler le cœur. Mais en réalité, la réadaptation cardiaque correspond à quoi ? Vous muscler quoi ? Quelles sont vos caractéristiques ? Comment travaillez-vous ?

Marisa: En réadaptation cardiaque, on travaille le cœur … Une fois qu’on sollicite le cœur, on est en train de travailler tout notre système cardio vasculaire. Il n’y a pas que le cœur, il y a tout le restant des muscles, la circulation … Tout est travaillé. Mais une fois qu’on le sollicite, on le rend plus performant. On le voit par exemple, chez les grands sportifs. Ils ont une fréquence cardiaque au repos plus basse. Justement parce que leur cœur est en bonne santé. Il a donc besoin de battre moins vite pour apporter la même oxygénation dans tout l’organisme.

Juliette: Il est plus efficace, plus performant. Donc il a moins besoin de battre rapidement.

Juliette: Quelqu’un qui n’est pas entraîné, lorsqu’il va commencer à courir un peu son rythme cardiaque va grimper directement.

Marisa: Le but, c’est vraiment d’essayer de l’entraîner pour qu’il travaille moins à chaque effort. On l’observe à la fin du traitement, la fréquence cardiaque au repos est diminuée par rapport au début. Et à l’effort, pour un même effort le ressenti en début et en fin de traitement sera différent. Les patients vont nous dire que c’est plus facile ; et là on pourra aller de l’avant, faire un peu plus.

Juliette: L’entraînement du cœur, lui permettra d’être plus performant, plus efficace. Mais si la musculature est aussi plus efficace, l’environnement est alors favorable. C’est toujours un ensemble.

Marisa: C’est tout un travail. C’est pour ça qu’on fait du renforcement global. On travaille avec les APA chez nous. Leur rôle, c’est de faire du renforcement surtout. Mais il y a aussi le côté endurance. On le fait sur des vélos, sur des tapis. On ne fait pas un travail de force mais surtout un travail de mouvement sur le long terme.

Travail en endurance ou en force

Juliette: Justement, est-ce que c’est plus intéressant de travailler la force ou l’endurance ? Est-ce qu’en fait il y a un élément particulier qui prédomine l’un par rapport à l’autre ?

Marisa: L’un va avec l’autre. Si on n’a pas de force, on n’aura pas d’endurance. Et si on n’a pas d’endurance, on ne pourra pas vraiment être efficace quand on travaille la force. Donc les deux sont importants.

Juliette: Toujours la notion de globalité. Au final, il faut toujours travailler un petit peu de tout.

Marisa: Oui, on ne peut pas avoir l’un sans l’autre.

La fréquence cardiaque maximale

Juliette: Au niveau de la fréquence cardiaque, souvent, on parle de fréquence cardiaque maximale. Peux-tu nous expliquer cette notion?

Marisa: La fréquence cardiaque maximale en théorie, et cela s’utilise de moins en moins, pour une personne en bonne santé en fait un calcul qui est FCmax = 220 – l’âge. Ce calcul théorique s’utilise de moins en moins. La fréquence cardiaque maximale est individuelle pour chaque personne. On va l’atteindre quand on atteint l’effort maximal que l’on arrive à faire. A partir de là, on peut faire des entraînements et rester un peu en dessous de cette valeur là.

Juliette: Comme tu le disais tout à l’heure, chacun a sa propre fréquence cardiaque. Et en plus d’un point de vue individuel, la fréquence cardiaque va varier en fonction de la capacité physique, et de l’entraînement. La fréquence cardiaque n’est pas la même chez une personne entraînée et une personne sédentaire.

Marisa: Exactement, c’est ce que j’allais dire. Avec le même âge et le même poids entre une personne sportive et une personne sédentaire, la fréquence cardiaque maximale ne peut pas être la même. Et pour les gens qui ont des problèmes cardiaques, dans ce cas, c’est le cardiologue qui fait un test d’effort ou autre pour trouver sa fréquence cardiaque maximale. Lors de l’entraînement, le cardiologue va nous donner les consignes de jusqu’où on peut aller avec le patient. C’est vraiment au cas par cas. Chaque personne est différente. Et puis il faut qu’on se base sur des valeurs individuelles. On ne peut pas avoir un chiffre global.

Approche physiothérapeutique chez les patients sédentaires

Juliette: Dans le cadre d’un patient sédentaire, peux-tu nous expliquer ce que tu fais comme exercices ? Tu commences par quoi ? Quelle est ton approche?

Marisa: Ça dépend. Comme je dis toujours, chaque personne est une personne. Si je vois un patient sédentaire, obèse, qui arrive à peine à marcher, parce qu’il ne sort jamais de son fauteuil, et regarde la tv toute la journée. Je vais lui proposer peut être de débuter l’entraînement sur un cyclo ergomètre assis. Et commencer par travailler doucement les jambes et progresser dans ce sens là. Par la suite faire des exercices avec des passes de ballon assis aussi. Puis progresser, pour la marche, augmenter le périmètre de marche. Compter le nombre de pauses qu’il doit faire pour un même périmètre, et essayer de diminuer ces pauses au fur et à mesure et progresser dans ce sens là.

Marisa: Il y a d’autres sédentaires qui bougent, qui font un peu de marche la journée. Et dans ce cas, je vais l’aborder autrement. On peut essayer de faire du tapis, mettre une pente plus élevée. Travailler en endurance peut être dans un premier temps. Faire du renforcement avec des TheraBand. Tu connais les élastiques où on peut avoir plusieurs résistances. Et progresser aussi dans ce sens là.

Approche physiothérapeutique les patients sportifs

Juliette: Dans le cadre d’un sportif, quelle serait la différence ? Je présume que tu ne ferais pas la même chose ?

Marisa: Ah non, pas du tout. Les sportifs souvent, on a deux cas principaux. Soit le grand sportif qui a peur parce que cela lui est arrivé quand il était en train de faire son entraînement. Il a donc peur que cela lui arrive à nouveau. Il va avoir beaucoup d’appréhension. Dans ce cas là, on va essayer d’utiliser ses activités à lui, de faire un entraînement dans son champ de confort, d’activités qui lui sont habituelles. Et lui faire comprendre ses limites. C’est-à-dire qu’on a déjà les consignes du cardiologue, par exemple la fréquence cardiaque. On va expliquer au patient qu’il a atteint chez le cardiologue une valeure X au niveau de sa fréquence cardiaque et donc que le cardiologue nous dit qu’on peut aller jusque là. On va s’entraîner, et faire quelques séances comme ça. On demande au patient de nous donner son ressenti. Et au fur et à mesure de l’entraînement, cela va être de plus en plus facile et on progressera comme ça. On va donc lui faire connaitre ses limites et progresser dans ce sens, avancer dans ce sens.

Juliette: Et lui donner confiance en lui aussi.

Marisa: Lui donner confiance aussi. Et on a le deuxième cas, qui ne comprend pas ce qui lui est arrivé et n’accepte pas. Et donc veut continuer à avoir sa vie sportive normale. Et donc là, on lui explique sa mise en danger. Il faut lui faire comprendre encore une fois où sont ses limites. Il faut qu’il les regarde pour ne pas que son cœur souffre et pour ne pas qu’il ait une récidive. On va faire à peu près le même entraînement que dans le premier cas mais avec une approche différente. Donc le premier cas la patient a peur, le deuxième cas n’a pas peur parce qu’il n’accepte pas la situation. Mais dans ce dernier cas, il faut que le patient comprenne jusqu’où il peut aller. Là, on va utiliser la fréquence cardiaque maximale qui nous a été donnée par le cardiologue, ainsi que ces ressentis. Et évoluer dans ce sens là.

Juliette: C’est toujours un accompagnement individuel par rapport aux patients et par rapport au vécu du patient.

Le bienfait ressenti de la réadaptation cardiaque

Juliette: Comment vous voyez, objectiver le bienfait de cette réadaptation cardiaque en fin de traitement?

Marisa: Comme je te l’ai dis, pour un même effort fait en début de traitement, le ressenti ne va pas être le même. Le patient sera beaucoup plus à l’aise parce que cet effort va être beaucoup plus facile. Et il verra qu’il arrive à faire beaucoup plus d’effort, en ayant moins de difficultés. Par rapport par exemple à l’essoufflement, à sa force musculaire. Par rapport à son endurance, parce qu’il arrive à faire, par exemple le vélo plus longtemps. C’est cela qu’on voit en fin de traitement. Ils sont contents.

Juliette: Majoritairement, ils le ressentent tous ? Les patients ont souvent tendance un peu à oublier l’état dans lequel ils arrivent.

Marisa: Ça arrive souvent. Mais on a un tableau, où on note à chaque fois plusieurs paramètres. Dont l’échelle de Borg, qui correspond à leur ressenti pour un effort déterminé. On note leur fréquence cardiaque à chaque fois et on leur montre le tableau à la fin du traitement. Souvent ils nous disent: « Ah ouais, quand même, au début, ce n’était pas génial ». Et puis je leur dis:  » vous voyez, maintenant, vous arrivez à faire ça. Et votre cœur, il souffre moins parce qu’il a même baisser sa fréquence cardiaque pour un effort plus élevé.

Juliette: Vous leur montrez, leur expliquez, de façon chiffrée leur évolution. ils objectivent ainsi qu’il y a eu du changement.

Marisa: Mais il y en a d’autres qui le voient. Ils nous disent : « Ah ouais, maintenant, j’arrive à mieux respirer, j’arrive à aller en montagne sans trop m’essouffler ». Donc ils reprennent une vie normale, quasiment comme avant. Mais en connaissant leurs limites. Et ils font plus attention maintenant à leurs symptômes. Parce que notre corps a une mémoire aussi. Donc ils vont reconnaître s’il y a quelque chose qui ne va pas. Ça, c’est aussi important.

Juliette: Leur apprendre à être à l’écoute d’eux-même.

Marisa: C’est ça, oui.

L’entraînement physique ne suffit pas

Juliette: Est ce que tu aurais d’autres notions qui te paraissent importantes à communiquer par rapport à cette pompe, à ce coeur ?

Marisa: Bon, il n’y a pas que l’entraînement physique. Ça, c’est une partie très, très très importante qu’il ne faut pas oublier. Mais il faut en prendre soin. Il faut avoir une alimentation saine aussi. Il faut diminuer le stress. Il faut savoir se détendre parce que ça, c’est hyper important aussi. Donc, je le dis à chaque fois. Et voilà, si on fait tout ça …

Juliette: Nous, les physiothérapeutes, on travaille au niveau physique, même si on travaille aussi plein d’autres choses en accompagnant le patient. Mais c’est vrai qu’à côté, la nutrition, l’hygiène de vie, le fait d’être bien dans son corps et dans sa tête. Comme tu le dis, diminuer le stress, la charge mentale, c’est quand même très important pour notre santé de façon générale.

Marisa: Et ça, on le connaît. Les gens qui ne sont pas bien moralement et qui sont tout le temps en stress, ont souvent des petits soucis cardiaques.

Juliette: Donc au final, la grande conclusion c’est toujours la même chose bouger plus et essayer d’être heureux.

Marisa: Oui, oui.

Juliette: Merci Marisa.


Juliette: Merci et à bientôt sur le podcast Santé Sport de CapRol.

Le judo, bien plus qu’un sport

Vous pouvez regarder ce podcast sur notre chaîne youtube

Vous pouvez écouter ce podcast sur :

 

Les intervenant

Transcription du Podcast

Juliette: Bonjour et bienvenue sur le blog santé sport de CapRol. Aujourd’hui, nous allons parler du judo avec Florent Bron. Bonjour Florent, peux-tu te présenter stp ?

Florent: Oui, alors je m’appelle Florent Bron. Je suis professeur de judo diplômé, troisième dan de judo, je prépare mon quatrième dan. Je suis expert jeunesse et sport. Et je suis président et directeur technique du club de judo Budokwai Pully.

Le judo, un art martial.

Juliette: Le judo, c’est un sport, certes, mais c’est aussi un art martial. Est ce que tu peux nous expliquer à quoi correspondent les arts martiaux?

Florent: Tout à fait. Donc, le judo à la base, vient du jujitsu, qui lui même provient des samouraïs. C’est donc un art martial ancestral. Les samouraïs, lorsqu’ils tombaient de leurs chevaux, ont dû trouver des techniques pour se battre, pour continuer à se défendre. Ils ont développé des techniques de combat, qui étaient destinées à pouvoir vaincre leurs adversaires. Et puis, au fur et à mesure, au Japon, puisque le judo vient du Japon, il y a eu une transmission de ces arts martiaux dans différentes écoles. D’abord au jujitsu. Par la suite, Maître Jigoro Kano, le fondateur du judo, a créé le judo. Le judo à la base art martial, est devenu ce qu’on appelle un Shin Budo. Ce qui veut dire « la voie des arts martiaux modernes ». C’est aussi, à l’heure actuelle, un sport de combat qui est présent aux Jeux olympiques, notamment.

Shin Budo : La voie des arts martiaux modernes.

Le judo chez les enfants.

Juliette: A partir de quel âge, peut-on peut commencer le judo?

Florent: Alors cela dépend des écoles. Nous à Pully, on commence à partir de 6 ans. En général autour de 6-7 ans on pourrait commencer le judo. Parfois, certaines écoles, certains clubs commencent un peu plus tôt sous forme de baby judo. Dans ce cas là, on va plutôt travailler la coordination, la motricité, ainsi que la sociabilisation des enfants.

Juliette: Donc, l’intérêt chez les enfants de leur faire faire ce type d’activité, c’est aussi la sociabilisation, la coordination et la notion du corps dans l’espace.

Florent: Voilà exactement. Il s’agit d’apprendre à attraper l’autre. Il y a du contact physique et il faut se mouvoir dans un espace. Il faut aussi travailler la coordination. Le judo est un art martial, un sport de combat très complet. On y travaille avec les jambes, et le haut du corps. On travaille toutes sortes de compétences physiques.

Juliette: Donc, il ne faut pas voir le judo comme un sport de combat chez l’enfant, mais comme un sport de façon générale.

Une pratique possible jusqu’à un certain âge.

Florent: Dans le judo il y a plein d’aspects possibles. C’est pour cela qu’on peut le pratiquer très jeune, mais aussi jusqu’à jusqu’à très tard. Puisqu’on peut faire du judo pour le plaisir, ou du judo orienté compétition. On peut aussi faire les katas, ce sont les formes pures du judo et c’est vraiment très codifié. Et ça, on peut le faire jusqu’à jusqu’à n’importe quel âge. Il faut savoir qu’au judo, il y a tout plein de formes d’entraînement différentes qu’on peut faire sans se blesser. On peut faire un judo plus souple, orienté sur la pratique sportive, sans chercher à vaincre son adversaire ou à blesser l’autre.

Un sport de contrôle de son partenaire.

Juliette: L’objectif, ce n’est pas forcément de blesser, mais c’est de mettre au sol ?

Florent: C’est orienté sur le contrôle. Donc on ne va jamais blesser l’autre. On est vraiment dans la maîtrise, le contrôle du partenaire. On va le retenir, notamment quand on projette, pour en prendre soin et éviter qu’il ne se blesse. Et ainsi pouvoir continuer à pratiquer avec cette personne le plus longtemps possible.

Apprendre a tomber.

Juliette: La peur pour les parents, c’est souvent la chute au sol. Est ce qu’il y a des accidents chez les enfants ? Comment pratiquez-vous ? Au rugby, par exemple, ils ne font pas de mêlées ou ce genre de chose. Au judo, qu’en est-il dans le cas des enfants ?

Florent: Une des premières choses qu’on leur apprend, c’est à tomber, à faire la chute pour justement éviter les accidents. On met la priorité sur le fait de bien rentrer la tête. Pour éviter que la tête ne reçoive le choc. Ensuite, on va frapper le sol avec les mains. C’est ce qu’on appelle le brise chute, pour répartir l’onde de choc dans tout le corps, et éviter de se faire mal. Cela sert vraiment dans la vie de tous les jours. Si on tombe et qu’on a les bons réflexes, on va éviter de poser le bras et de se blesser au poignet, au coude, à l’épaule. Et on va toujours bien rentrer la tête. C’est un réflexe qu’on a pour éviter justement les traumatismes crâniens.

Ukemi : brise-chute contrôlé, permettant de tomber sans se faire mal. Ces techniques sont utilisées par tous les arts martiaux japonais, principalement par le judo et l’aïkido.

Florent: Souvent, des adultes nous rapportent que grâce au judo, ils ont évité, lors d’accidents, d’une chute en vélo, chute en scooter, de se faire mal parce qu’ils ont eu le réflexe de rouler, d’utiliser le sol comme un support pour amortir la chute. Et cela leur a permis justement d’éviter des gros accidents.

Florent: Il faut savoir que le judo se pratique dans un dojo et sur des tatamis. Les tatamis, à l’origine, étaient faits avec de la paille. C’était assez dur. Maintenant, ils sont faits avec de la mousse qui amortie le choc. Ce qui permet que la chute soit moins douloureuse, puisque le sol absorbe aussi une partie de la projection.

Tatami : Tapis de sol que l’on retrouve dans les locaux où se pratiquent les sports de combat.

Le dojo.

Juliette: Et le dojo, ça a une signification particulière ?

Florent: Alors Dojo, c’est le lieu où on recherche la voix. Le dojo ce n’est pas spécifique au judo, c’est pour tous les budokas, donc les pratiquants des arts martiaux, de sports de combat. C’est un lieu à la base religieux, spirituel, de méditation et de recherche de soi. Dans le judo, il a notamment le portrait du fondateur dans tous les dojos où on pratique le judo. On va faire un salut quand on monte sur les tatamis et à l’issue de l’entraînement, ou quand on doit sortir pour aller aux toilettes ou pour chercher quelque chose. On salue toujours en quittant le tatami.

Dojo : salle où l’on pratique les arts martiaux.

Budoka : guerrier au sens noble du terme, combattant expert en arts martiaux, ou plus modestement un pratiquant de Budō.

Juliette: On salue l’instructeur ou le fondateur ?

Florent: On salue le fondateur, le portrait du fondateur de Jigoro Kano.

Le respect une valeur importante du judo.

Juliette: Est-ce que tu arriverais à nous déterminer les valeurs qui sont transmises aux enfants par le judo, de façon en générale ?

Florent: Il y en a plusieurs. Celle qu’on apprend vraiment dès le plus jeune âge, c’est le respect, et le respect de ses partenaires. Puisque, comme je l’ai dit tout à l’heure, il faut prendre soin des personnes avec qui on travaille. Je l’explique aux élèves en disant que c’est comme avec un jouet. Si on le lance n’importe où, qu’on n’en prend pas soin, il va se casser. Je leur explique que si on ne prend pas soin de son partenaire, il ne voudra plus travailler avec nous. Donc, il faut vraiment le retenir, en prendre soin, essayer de travailler pour que chacun ait du plaisir et puisse améliorer sa pratique du judo.

Le judo un moyen de se dépenser.

Juliette: Est ce que tu as des retours des enfants ou des parents sur les bienfaits comportementaux du judo ? La gestion des crises ou de l’énergie des enfants par exemple ?

Florent: Oui, alors, c’est vrai que le judo, c’est aussi un moyen cathartique de pouvoir se défouler. Dans le judo, il y a toute la partie où on doit se concentrer pour apprendre les techniques, pour essayer de maîtriser tout ce que le judo peut apporter. Mais il y a aussi ce qu’on appelle les randoris, c’est une forme d’entraînement où on va travailler le combat. Cela permet vraiment de se dépenser. Mais dans un cadre formel, sous la surveillance d’un moniteur, cela permet d’éviter les accidents, mais qu’en même temps, on puisse vraiment se défouler, se dépenser et puis évacuer un peu toutes les tensions du quotidien.

Randori : pratique que l’on retrouve dans divers arts martiaux. Il s’agit d’un combat d’entraînement lors duquel plusieurs personne s’affrontent.

L’importance du salut au judo.

Florent: Ce qui est aussi important de savoir, c’est que le salut au judo, au départ et à la fin de l’entrainement, c’est une forme de méditation où on va laisser tous les problèmes de la vie courante. On les laisse en dehors. C’est vraiment une phase de préparation mentale où on va se concentrer sur le judo, sur ce qu’on pratique. Une fois qu’on a terminé l’entraînement, on fait un retour au calme. Une fois qu’on a fini le salut de fin et qu’on a salué en quittant le tatami, on reprend sa routine quotidienne.

Juliette: C’est une chose qu’il est plus facile d’inculquer lorsque les élèves sont petits. C’est certainement plus facile d’inculquer cette philosophie lorsque l’on commence petit ?!

Le judo a un code universel.

Florent: On peut commencer à n’importe quel âge, mais c’est vrai que ce sont des règles sur lesquelles on insiste. Et dans le judo contrairement à d’autres arts martiaux, on a un code qui est universel. Notamment les saluts, les valeurs du judo, les principes du judo. Qu’on soit en Suisse, au Japon, en France, en Afrique, en Australie, dans tous les dojos du monde, où on pratique le judo, ce sont les mêmes valeurs, les mêmes codes qui régissent le judo. Et cela permet que chacun puisse se retrouver, même si on déménage, même si on arrête le judo, même si on commence le judo plus tard. On a ces valeurs, qui sont communes aux judokas et judokates.

Les compétitions

Juliette: Et les compétitions elles commencent à quel âge ?

Florent: Il y a différents types de tournois, mais il y a des tournois qu’on peut faire très jeunes. Les tournois type pédagogique où on retrouvera des arbitres amateurs qui expliquent les règles. Il y a d’autres tournois un peu plus formels avec des arbitres officiels, et là on rentre vraiment dans le vif de la compétition. Cela dépend de l’âge et de ce qu’on recherche. En Suisse, il y a des tournois locaux pour découvrir le judo en compétition, le shiai. Et puis ensuite, on peut aller sur les tournois cantonaux, et les tournois nationaux.

Shiai : compétition de judo.

Les compétences physiques du judo.

Juliette: Par contre, dans le cas des adultes, lorsque vous pratiquez le judo, faites-vous aussi du renforcement musculaire ou faites-vous seulement des techniques de judo ? Comment cela se passe-t-il au niveau du sport et du fait d’acquérir plus d’endurance, de force ou d’autres caractéristiques ?

Florent: Cela dépend de l’entraîneur, du club et de la philosophie du club ou de l’école qui enseigne le judo. Nous à Pully on fait aussi en dehors des entraînements judo du renforcement musculaire. Des fois, au début de l’entraînement ou à la fin de l’entraînement. On fait aussi des exercices d’assouplissement. Puisqu’il faut savoir que le judo veut dire voie de la souplesse. Dans le cadre de l’entraînement au judo, dans les types d’entraînements qu’on fait, il y a aussi toutes les compétences physiques, la force, l’endurance, la vitesse, l’explosivité qui sont travaillées. Donc c’est vraiment implicite à la pratique du judo.

Juliette: D’une certaine façon, tout cela est mis en place en fonction de l’instructeur.

Florent: Voilà exactement, en fonction du but que le moniteur cherche à atteindre, du groupe d’élèves avec qui il travaille, et des objectifs qu’il a avec son groupe.

La tenue du judo.

Juliette: Est ce que tu peux nous expliquer la tenue ? Vous avez une tenue particulière ?

Florent: Oui, l’habit de judo s’appelle le judogi. C’est une veste et un pantalon. Traditionnellement, il est blanc. En compétition pour distinguer les deux judokas, un des judokas porte le judogi blanc et l’autre le judogi bleu, à un certain niveau. Et dans certains pays à l’heure actuelle, il y a même encore d’autres couleurs qui sont acceptées.

Jodogi : Vêtement de judo.

Juliette: Que pour la compétition ?

Florent: Pour la compétition, mais certains l’utilisent aussi à l’entraînement. Mais l’habit traditionnel est blanc. La veste de judo se ferme toujours avec le côté gauche qui vient sur le côté droit. Cela provient aussi de la tradition des samouraïs, puisque l’arme, le couteau, était mis du côté gauche. Si on voulait le sortir pour dégainer, il fallait qu’on puisse le prendre facilement.

Juliette: Maintenant, dans le judo, il y a plus du tout d’armes ?

Florent: Alors dans les katas, qu’on travaille toujours. On perpétue la tradition du judo ancestral.

Le kata.

Juliette: Est ce que tu peux définir ce qu’est un kata ?

Florent: Alors kata, ça veut dire forme si on traduit littéralement. Il y a différents types de katas. C’est l’origine du judo et d’autres arts martiaux, notamment le jujitsu. Et aussi des formes primitives de self-défense. C’est la source de ces pratiques. C’est très codifié et quand on travaille le kata, il y a vraiment un règlement, le nombre de pas, la vitesse …

Juliette: C’est un enchaînement de mouvements ?

Florent: Voilà, exactement. C’est vraiment des techniques. Notamment au judo, le premier kata qu’on apprend généralement, c’est le Nage-no-kata. Donc les formes de projection. Et puis, il y a plusieurs séries. Chaque fois, on doit se rhabiller à un moment précis. On doit faire un nombre de pas qui est aussi défini. Les attaques, l’angle, le placement des mains, la projection. Tout est codifié.

Kata : suite codée de mouvements, que l’on retrouve dans les arts martiaux japonais, constituant un exercice d’entraînement à la pureté du geste.

Nage-no-kata : Kata de projection de judo.

Juliette: Mais c’est pratiqué tout seul, ou c’est pratiqué à plusieurs ? Tu es face à un adversaire ou c’est juste un enchaînement de mouvements que tu fais tout seul ?

Florent: Alors c’est un partenaire, ce n’est pas un adversaire parce que normalement le kata se travaille à deux. Il y en a un qu’on appelle torii. C’est celui qui va exécuter les techniques. Uke c’est celui qui va subir les techniques. Généralement, uke c’est celui qui va venir agresser, qui va venir attaquer l’autre. Et torii, va lui répondre en se défendant et en utilisant les arts martiaux. C’est pratiqué à l’entraînement. Cela se pratique aussi pour les passages de ceinture. Notamment au judo pour la ceinture noire et lorsqu’on veut graduer, aller plus loin dans les dans, dans les niveaux d’expertise. Tous ces katas permettent que dans le monde entier, on ait tous une forme de référence. Lorsqu’on a des questions, qu’on se posent des questions, on va chercher dans le kata, dans les mouvements, les détails, puisque c’est là-bas qu’on trouvera vraiment les réponses.

Torii : littéralement cela signifie prendre, choisir. Rôle du partenaire qui exécute les techniques, qui fait l’action.

Uke : littéralement cela signifie recevoir, subir. Rôle du partenaire qui subit l’exercice.

Dan : terme utilisé pour différencier les niveaux d’expertise.

Juliette: Ce sont les mêmes mouvements dans le monde entier ?!

Florent: Voilà exactement. Il y a même des championnats de kata. Il y a des judokates, et des judokas qui s’entraînent pour essayer d’atteindre la perfection, la justesse dans toutes ces techniques.

Le Kodokan

Juliette: Y-a-t il eu une évolution, une modernisation dans ces mouvements ?

Florent: Le judo, comme l’a inventé maître Jigoro Kano a évolué. Son école qui existe toujours, le Kodokan à Tokyo est la première école qu’il a fondée. Elle a vraiment évolué. Maintenant, c’est une école très grande et c’est le lieu de pèlerinage pour les judokates et judokas. Là-bas, il y a un comité. Il y a des gens qui continuent à rechercher, à travailler le judo. Ce sont eux qui décident parfois de changer des détails ou d’adapter. C’est eux, c’est le Kodokan qui a le dernier mot et qui est vraiment l’organe décideur.

Juliette: Il n’y a qu’eux qui ont le droit d’amener une modification ?

Florent: Tout à fait !

Le judo se pratique à n’importe quel âge.

Juliette: Comme tu l’as dit, le judo peut se pratiquer à n’importe quel âge. Mais est-ce que vous avez des personnes d’un certain âge, qui commencent très tard ?

Florent: Le judo évolue vraiment. On peut commencer le judo pour le plaisir, pour être avec les copains. Il y a toutes sortes de raisons pour lesquelles on peut commencer le judo. Ensuite, il y en a certains qui s’adressent à la compétition. Une fois qu’on a plus envie de faire de la compétition, qu’on ne se sent plus à l’aise avec la compétition, on peut continuer le judo. On peut chercher à atteindre des objectifs dans d’autres domaines, par exemple évoluer au niveau de sa technique. Partir sur le kata, … Il y a vraiment plein de possibilités pour continuer à se nourrir du judo.

Juliette: Et puis cela entretien de toute façon !

Florent: Voilà exactement. On peut aussi faire du judo parce que c’est un art martial, et un sport de combat qui permet de rester en forme et de développer des aptitudes physiques.

Le partenaire.

Juliette: Faut-il toujours qu’on ait un partenaire qui soit à peu près du même poids et du même âge ?

Florent: Non, cela dépend vraiment de la pratique du judo. Pour certaines techniques, il est qu’en même conseillé de travailler avec des gens de son poids. Surtout quand on commence à apprendre une technique et qu’on n’a pas toujours les positions juste pour éviter de se blesser. Mais pour certaines techniques, on peut vraiment les faire avec n’importe qui. Ce qui est très intéressant avec le judo, c’est qu’on peut mixer les âges. Des jeunes peuvent travailler avec des personnes d’un certain âge. On retrouve toujours cette notion de respect. On va adapter la force. Lorsqu’on projette, on retient toujours l’autre. Le respect qui chapeaute le judo permet à n’importe qui de pratiquer le judo ensemble. Et de toujours y trouver son compte, sans forcément qu’il y ait cette notion de compétition ou risquer plus la blessure.

Juliette: À l’entraînement, cela permet de s’adapter à l’autre, d’être obligé de s’adapter à l’autre.

Florent: Voilà exactement. Ce que je dis beaucoup à mes élèves, c’est que cela fait partie aussi des qualités d’un judoka, de réussir à adapter. Si on pratique avec quelqu’un qui commence le judo, il faut plutôt lui expliquer, le retenir, lui montrer de se laisser faire. D’accepter aussi qu’il nous projette. Ce qu’on appelle le senpai, c’est l’élève avancé. Le kohai, c’est l’élève débutant. Il existe un rapport hiérarchique entre eux. Où l’élève avancé va pouvoir donner des conseils, va pouvoir corriger l’élève qui est moins gradé. Ainsi on continue la tradition du jita kyôei, qui est le principe de prospérité mutuelle. Où à deux, on va s’élever, on va s’entraider. Et puis, on va pouvoir apprendre le judo.

Juliette: Il y a du partage et de l’humilité.

Florent: Voilà exactement.

 

Senpai : L’élève avancé.

Kohai : Le jeune élève, l’élève débutant.

Jita kyôei : définition selon le Kodokan.

Le judo Suisse.

Juliette: Quelle est la place du judo suisse au niveau international ?

Florent: Alors, on a un nouveau comité depuis depuis quelques années avec le président, qui est un ancien médaillé olympique, qui a fait plusieurs résultats, médailles, aux Championnats du monde, et aux championnats d’Europe. Il a pour objectif de redynamiser la fédération, et d’acquérir à nouveau plus de membres. Tout le travail fait en amont était un travail de renforcement de la fédération. Et puis, avec ce nouveau comité, il y a vraiment l’envie de dynamiser, de donner une visibilité encore plus accrue à la Fédération suisse de judo et jujitsu.

Juliette: On va peut être voir une ouverture du nouveaux dojos dans l’avenir ?

Florent: Oui, alors, il y a toujours des nouvelles écoles qui ouvrent. Sur le canton de Vaud, la plupart des écoles, associations sont affiliées à l’Association vaudoise de judo et jujitsu. Dans un deuxième temps, ces écoles sont aussi affiliées à la Fédération suisse de judo et jujitsu. Effectivement, actuellement, il y a pas mal de promotion pour attirer plus de monde dans ces écoles, dans ces dojos. Je le vois à Pully, il y a une tendance à ce qu’il y ait de plus en plus de demande.

Juliette: Y-a-t-il des échanges entre la Suisse allemande, le Tessin et la Romandie ? Au niveau des stages, par exemple, faites-vous des camps d’été ou des choses comme ça ?

Florent: Oui, il y a des centres de performance et le centre national d’entraînement qui permettent le regroupement de tous les meilleurs judokas de Suisse, qui s’entraînent et se préparent à des compétitions. Mais il y a aussi pas mal d’échanges entre les différents clubs. En tant que judokas, budokas, on a pour habitude de dire qu’on est tous amis. l’Amitié, c’est une des valeurs vraiment importante du judo. Généralement, la porte d’un dojo est toujours ouverte à un judoka. Dans cette philosophie, on voit des gens qui partent pour faire des stages en Suisse allemande, et qui prennent leur judogi. Ils vont frapper à un dojo, et vont s’entraîner.

Juliette: Il y a toujours cette notion de partage même si on ne fait pas partie du même dojo.

Florent: Il y a une certaine rivalité en compétition. Mais en semaine, lors des entraînements, il y a toujours la possibilité d’aller s’entraîner à droite et à gauche et de créer des liens d’amitié.

Les blessures au judo.

Juliette: Au niveau blessures, vous avez des blessures spécifiques au judo ?

Florent: Le judo, comme je l’ai expliqué, est un sport complet. Il y a donc des blessures comme dans tous les sports. Surtout lorsqu’on fait du sport de performance, du sport à haut niveau, il est vrai qu’on s’expose plus facilement à des blessures. Mais comme on apprend à tomber, que généralement lorsqu’on fait de la compétition, on tombe sur des judokas qui ont pratiqué le judo, donc qui savent comment faire tomber, il y a moins de blessures, je pense que dans d’autres sports. Je pense notamment au football. Mais on n’est pas à l’abri d’une blessure.

Juliette: Le principe, c’est de mettre au sol et d’immobiliser. Mais il n’y a pas de notion, comme tu le dis, de blessure. On n’est pas là pour le faire tomber le plus fort possible, pour le mettre K.O. On est juste là pour le maîtriser.

Florent: Exactement. Un mouvement parfait c’est un mouvement contrôlé. Donc, si au milieu d’une projection, on lâche son partenaire, qu’on n’a plus de contrôle, aucun point ne sera donné. Pour marquer le point, on doit montrer qu’on maîtrise ce que l’on fait et que le partenaire est vraiment contrôlé sur le dos.

Florent: Il y a deux parties au judo, la partie debout, tachi waza. Où on va projeter l’autre, travailler sur le kumi kata. On va prendre le judogi, essayer de bien poser ses mains, travailler pour amener l’autre sur le dos ou l’amener au sol. Ensuite, le judo peut partir sur le travail au sol, qu’on appelle le ne waza. On va essayer d’immobiliser l’autre. A partir d’un certain âge, on peut rajouter les étranglement et les clés de bras. Dans ce cas, lorsque l’adversaire subit un étranglement ou une clé bras, il va taper par terre deux fois, ce qui veut dire qu’il abandonne. A ce moment précis, le combat est terminé.

 

Tachi waza : techniques en position debout.

Kumi kata : la saisie du partenaire.

Ne waza : ensemble du travail au sol.

Juliette: Donc, les points sont donnés par rapport à la technique et la façon avec laquelle elle est réalisée ?

Florent: Il faut faire tomber l’autre sur le dos. Donc s’il tombe à plat ventre, il n’y a pas de point. S’il tombe sur le côté, on peut marquer waza ari, cela veut dire grand avantage. Si il tombe sur le dos et qu’il est bien contrôlé avec la bonne vitesse. Dans ce cas, on marque ippon, et on a gagné le combat. Donc cela peut aller très vite. Moi, j’ai souvenir de m’être déplacé très très tôt au Tessin, et d’avoir fait des heures de route. On fait le salut, et le premier combat peut durer trois secondes. Et la journée est finie. Par conséquent, le judo est un sport où on doit aussi mentalement être fort. Parce qu’on s’entraîne, on s’entraîne, on s’entraîne. Et lorsqu’on fait de la compétition, on se retrouve face à quelqu’un qui s’est aussi beaucoup entraîné. L’issue est que l’un des deux va gagner, et l’autre va perdre. Il y a donc aussi un aspect de travail mental, accepter la défaite. Il faut pouvoir repartir en se disant que cela n’a pas été inutile. Savoir réfléchir pourquoi on a perdu, et à l’entraînement, essayer de travailler pour revenir plus fort.

Juliette: Cela se fait en un round, en un tour ? Y-a-t-il plusieurs tours pour gagner des points ?

Florent: Tout dépend du système de compétition. Dans les tournois nationaux, généralement, il faut que celui qui nous a battu au premier tour atteigne un certain niveau. Par exemple les quarts ou les demi finales pour que l’on puisse être repêché. Et faire des combats pour espérer obtenir une médaille de bronze. Mais cela dépend vraiment du système, du nombre de participants. Parfois, il y a aussi des pool de combats, où il y a 5-6 adversaires. On les rencontre tous et à la fin il y a un classement.

Juliette: Quand tu rencontres un adversaire, tu arrives sur le tatami, tu combats. Il y en a un qui perd et c’est fini. Cela peut durer 3 secondes, mais combien de temps cela peut-il durer au maximum ?

Florent: Parfois sur les tournois, plutôt amicaux, on accepte aussi, hikiwake, c’est-à-dite match nul. Du coup, les deux ramènent un point dans leur équipe, si c’est un match par équipe. Mais généralement, maintenant, si il y a égalité on continue. On fait ce qu’on appelle le golden score. C’est-à-dire que même si le temps est passé, on rajoute du temps. Parfois, le temps peut être infini. Donc le combat continue jusqu’à ce que l’un des deux perde.

Juliette: En moyenne le temps correspond à quoi ?

Florent: Tout dépend de la classe d’âge. Chez les jeunes, c’est entre 2 et 3 minutes. Chez les élites, c’est 4 minutes le combat. Il faut savoir que 4 minutes, ça paraît court, mais en fait, c’est très, très intense. C’est l’intensité d’un sprint. Quand l’arbitre donne le départ dia jime, on va chercher à poser les mains, et à se déplacer. L’intensité est très, très élevée. Quand l’arbitre dit mate, on doit se relever. Parfois, on doit se rhabiller. Ce sont des temps de récupération très courts. On observe souvent chez les judokas qu’au bout des 4 minutes, c’est vraiment le physique qui va être déterminant surtout quand on part sur du golden score.

Les contre-indications au judo.

Juliette: Y-a-t-il des contre-indications à la pratique du judo ?

Florent: Alors non, parce que généralement, on peut vraiment adapter le judo. Le judo a été pensé par Maître Jigoro Kano pour que ce soit bénéfique à la société. Donc tout un chacun peut pratiquer le judo. C’est vraiment l’entraîneur qui va pouvoir réguler l’entraînement, donner des consignes spécifiques, adaptées. Même si on est blessé, on peut pratiquer le judo. On peut par exemple éviter les projections ou faire simplement le travail de placement. Si on est blessé sur un côté droit, on peut travailler les mouvements à gauche. On peut faire du travail au sol. On peut faire de la technique. On peut même travailler une forme d’entraînement qui s’appelle le tandoku-renshu, où on va travailler avec un partenaire imaginaire et simplement essayer de faire les placements, les positions. Le judo, on peut vraiment le travailler de beaucoup de façons. Et l’idée, c’est que si on a une contre-indication ou quelque chose auquel il faut qu’on fasse attention, on va adapter l’entraînement pour que tout le monde puisse pratiquer.

Juliette: C’est donc plutôt un sport qui est complet, qui est dans le partage, dans le contrôle, dans l’écoute de son adversaire, et dans l’écoute de soi.

Florent: Exactement.

Venir essayer le judo.

Juliette: Est ce qu’il y a d’autres choses que tu voulais rajouter par rapport au judo? Est-ce que tu aurais un message en particulier?

Florent: Je pense que c’est bien de venir essayer le judo pour s’en faire une idée.

Juliette: On peut venir dans tous les dojos, on appelle avant …

Florent: Exactement. Si on va sur le site de l’Association vaudoise de judo. Il y a le listing de toutes les écoles, tous les clubs du canton de Vaud. Il y a les numéros de téléphone. C’est bien d’appeler ou d’envoyer un email, et venir essayer. Le judo est ouvert à tous. De plus en plus, on voit que le judo est aussi accessible aux filles et aux femmes. C’est vrai que pendant un temps, certaines personnes avaient l’idée que les sports de combat et les arts martiaux, c’était plus pour les garçons et les hommes.

Juliette: C’est un peu fini se temps là …

Florent: Oui, c’est complètement fini. On voit que c’est vraiment révolu.

Un sport autant féminin que masculin.

Juliette: Il y a du judo chez les femmes depuis très longtemps, non ?

Florent: Depuis très longtemps. Et on voit qu’elles sont vraiment très fortes. Le judo féminin est aussi très intéressant.

Juliette: Dans les dojos, on mixte les partenaires ?

Florent: Alors à l’entraînement, on mixe. Parce que certains clubs n’ont n’a pas encore assez de filles et de femmes. Nous par exemple à Pully on essaie de trouver des moyens de les faire venir sur le tatami. Et puis, il y a certains clubs, par exemple le club à Yverdon, qui ont tellement de femmes qu’ils ont réussi à faire des cours que pour les femmes. Donc, c’est vrai que c’est chouette aussi d’avoir la mixité, d’avoir garçons et filles qui s’entraînent ensemble. Ça crée des jolis liens d’amitié aussi.

Juliette: Et puis, devoir s’adapter

Judo et handicape.

Florent: Exactement. Et pour les compétitions pour les tout petits, parfois c’est mixte. A partir d’un certain âge on sépare filles et garçons. Mais on voit, comme je l’ai expliqué, que n’importe qui peut pratiquer le judo. Il existe les Special Olympics, les Jeux olympiques pour les personnes en situation de handicap. Où les personnes, même avec un handicap, peuvent pratiquer le judo. On observe qu’il y a de plus en plus d’écoles qui créent des cours avec des personnes qui ont un handicap ou qui les intègrent dans des cours. Ainsi chacun trouve de quoi se satisfaire.

Juliette: Le judo s’adapte à tout individu et est là pour faire grandir tout individu.

Florent: Exactement.

Juliette: Et la société par la suite.

Florent: Maître Jigoro Kano disait qu’un bon judoka, c’est une bonne personne pour la société. Il y a cette idée … Le judo, ça veut dire voie de la souplesse, mais ce n’est pas que la souplesse du corps, c’est aussi la souplesse d’esprit et une ouverture sur les autres, sur l’entraide. Les deux principes fondateurs du judo : Jita Kyoei, prospérité mutuelle, comme je l’ai défini tout à l’heure. Et puis il y a aussi Seiryoku, qui est la meilleure utilisation de l’énergie. Où on va justement essayer de réfléchir pour éviter de se faire mal, éviter d’aller en confrontation directe avec quelqu’un. On veut utiliser sa vitesse, sa force. Il y a vraiment tout un état d’esprit philosophique derrière la recherche du judo.

Juliette: Que tu réutilise après dans ta vie courante …

Florent: Exactement.

Juliette: C’est intéressant. Autre chose ?

Florent: Non, je pense que j’ai assez parlé.

Juliette: Merci Florent

Lutter contre la sédentarité

Vous pouvez regarder ce podcast sur notre chaîne youtube

Vous pouvez écouter ce podcast sur :

 

Les intervenants

  • Juliette Corgnet : Physiothérapeute
  • Gabriel Duchemin : APA – Thérapeute du sport

Transcription du Podcast

Juliette: Bonjour et bienvenue sur le blog Santé Sport de CapRol. Aujourd’hui, nous allons parler de sédentarité, de mobilité, de motivation avec Gabriel Duchemin. Salut Gabriel. Peux-tu te présenter stp ?

Gabriel: Alors je m’appelle Gabriel Duchemin, je suis thérapeute du sport et je travaille à l’hôpital Riviera Chablais, situé à Rennaz, à plein temps avec l’équipe de physiothérapie.

Lavaux Performance

Juliette: Nous faisons cet interview chez toi au sein de Lavaux. On peut y voir un super spot derrière nous, pour faire de l’activité physique en extérieur. Apparemment tu as ouvert cet endroit il y a peu de temps ?!

Gabriel: Oui, c’est un petit projet que j’ai appelé Lavaux Performance. On a eu une année pour aménager notre jardin familiale. Je viens d’une famille de vignerons. On a aménagé le terrain pour pouvoir faire de l’activité physique en plein air.

Juliette: L’activité physique pour lutter contre la sédentarité par rapport à ce qui se passe à l’heure actuelle et à l’époque actuelle, j’aurais tendance à dire ?!

Gabriel: Absolument, c’est d’une part lié à la sédentarité, on va en parler. Et d’autre part, un projet amené suite à une réflexion, qui est le produit des circonstances actuelles, liées essentiellement aux virus. Circonstances qui ont amené beaucoup de gens a prendre plaisir d’aller se dépenser à l’extérieur pendant le confinement. Ils ont redécouvert un petit peu la nature. Ils ont découvert de magnifiques lieux comme celui dans lequel on se trouve et ont pris plaisir à se dépenser en extérieur. Du coup, on s’est dit qu’on pouvait certainement proposer quelque chose : du plein air pour des gens qui ont peut être, liée à ces circonstances, une crainte d’aller s’essouffler dans les espaces cloîtrés, en intérieur. On a voulu proposer quelque chose pour répondre à ce besoin.

Juliette: Pour rappel, on est en novembre 2021 et, on parle du fameux virus, le coronavirus. Donc là, on a tout ce qu’il faut pour travailler en extérieur et travailler pour être en bonne santé. Est-ce que tu pourrais me définir avec tes propres mots à quoi correspond la sédentarité ?

La sédentarité, c’est quoi ?

Gabriel: La sédentarité, je l’opposerais par définition, simplement à l’activité physique. Quand on bouge, quand on utilise nos muscles, quand on est en mouvement, c’est de l’activité. Par opposition, la sédentarité, c’est lorsqu’on est inactif. Par définition, lorsqu’on ne dépense pas, ou peu d’énergie. J’avais vu passer une définition qui disait que la sédentarité correspondait à une dépense de moins de 1,5 METS. Les fameux équivalents métaboliques. C’est un rapport de l’activité qu’on fait, sur la dépense qu’utilise le corps pour simplement se maintenir au repos pour fonctionner (le métabolisme de base). En somme, la sédentarité est une diminution ou une forte diminution des dépenses énergétiques. Être inactif, tout ce qui est assis, lecture, lorsqu’on est couché …

MET : Metabolic Equivalent of Task. On définit le MET comme le rapport de l’activité sur la demande du métabolisme de base.

Juliette: On peut aussi relier la sédentarité, à la majorité des personnes qui ont des métiers assis ?!

Gabriel: Absolument.

Juliette: Avec la crise du coronavirus, il y a eu beaucoup de home office. Les gens, en plus d’avoir un métier assis, ne marchaient plus pour aller au travail. Ils ne sortaient plus de chez eux. Cela a donc augmenté la sédentarité. Comme tu l’as expliqué, cela a entraîner une diminution de l’activité de façon générale.

Juliette: De plus la position assise est une position statique. Je dis souvent aux patients que le problème, ce n’est pas forcément le home office ou le poste de travail, même si on peut l’aménager. Mais c’est la position statique qui nous pose soucis. Le fait de ne pas bouger, de ne pas changer de position, … le corps est censé être en mouvement.

Gabriel: C’est surtout ça. On est conçu pour ça. Je pense, comme tu le dis, que le corps est conçu pour bouger. Il n’y a pas forcément de posture mauvaise dans l’absolu. C’est plutôt le maintien d’une position quelle qu’elle soit durant des temps prolongés qui va vraiment être néfaste. Et conduire à des risques pour la santé. C’est sur cela que l’on travaille à l’hôpital avec le service de physiothérapie. Lorsque des personnes sont hospitalisées, viennent à l’hôpital pour une raison X, fatalement elles risquent un problème Y à cause de l’inactivité qui est induite par l’hospitalisation, et les temps prolongés passé à être inactif au lit, en chambre. Donc on essaie de casser ces périodes prolongées d’inactivité. Pour éviter que les patients qui viennent à l’hôpital, repartent avec un autre problème.

Précédemment sur le blog santé sport de CapRol, Gabriel Duchemin nous avait expliqué son initiative au sein de l’HRC pour faire bouger les patients en chambre durant la crise du Covid : Article.

Juliette: C’est aussi ça le souci, la sédentarité engendre un certain nombre de pathologies. Même s’il y avait déjà des pathologies qui ont engendré la sédentarité, la sédentarité engendre d’autres pathologies.

La sédentarité, responsable de diverses pathologies

Juliette: Est-ce tu aurais des exemples de problématiques, de pathologies dues à la sédentarité ou qui pourraient être causées par la sédentarité ?

Gabriel: A titre personnel je placerais vraiment la sédentarité comme une cause de pathologies. C’est quelque chose qui est au centre, c’est un problème véritablement de santé public, qui peut engendrer des pathologies. Tout ce qui est cardio-vasculaire, diabète, obésité, hypertension artérielle, … Tout ce qui va correspondre à un syndrome métabolique. Je pense que toutes ces maladies, on peut les appeler des maladies dites de société. Quand on remonte dans le temps, si on a une perspective évolutive, ce sont des maladies qu’on trouvait infiniment moins. Même si les gens, à ce jour, vivent plus longtemps grâce aux fabuleux progrès de la médecine, on passe aussi un plus grand nombre d’années en mauvaise santé. C’est un gros problème.

Juliette: Parce que d’une certaine façon, on bouge beaucoup moins et que la nourriture, est certainement beaucoup moins saine, et beaucoup plus en profusion qu’à une autre époque. L’accès à la nourriture dans nos pays européaniser ou dits développés, est partout. On mange beaucoup trop et on bouge beaucoup moins !

Gabriel: Je pense aussi que c’est ça qui conduit à toutes ces maladies dites de société. Ce n’est que mon avis, mais pour moi c’est aussi lié un petit peu à notre bagage, ce pourquoi on est fait, on est conçu, donc nos gènes et puis ce qu’on fait réellement dans l’environnement. C’est-à-dire que si on reprend un peu cette perspective évolutive, nos ancêtres bougeaient infiniment plus que nous, ce n’est pas comparable. Toi comme moi, on est sédentaires comparé à eux. Quand bien même on est actifs. L’être humain dans l’histoire de la planète, on est une espèce assez jeune. On a donc encore un petit peu ce bagage génétique de nos ancêtres qui se dépensaient infiniment plus. Au final, quand on regarde sur l’échelle du temps, cela fait globalement depuis deux générations, depuis la guerre mondiale, que nous en faisons de moins en moins. Depuis la révolution de la technologie, des transports, de l’industrialisation, … ces évolutions nous ont amèné à tout avoir à portée de main. Et donc à en faire de moins en moins. Ne serait-ce que pour les déplacements. Et cela peut conduire fatalement à toutes ces problématiques et ces maladies que je qualifie de maladies de société : obésité, diabète, explosion des maladies cardio-vasculaires et j’en passe. Tout ce qui va être aussi psycho-social … On voit que toutes ces problématiques sont accentuées avec les circonstances actuelles.

Juliette: Je rajouterais à cela toutes les pathologies rhumatismales, tout ce qui va être petite douleur inflammatoire du genou, de l’épaule, … tout ce qui est troubles musculo-squelettiques. Puisqu’au final, à partir du moment où vous êtes sédentaire, vous ne faites pas marcher votre organisme, vous ne faites pas marcher tout le système. Je ne dirais pas que le système se rouille, mais c’est un peu le principe. Lorsque vous avez des pathologies lourdes, graves la médecine va pouvoir vous traiter. Mais vous avez aussi ce qu’on pourrait qualifier de blessures, mais des blessures relativement handicapantes, dûes simplement au fait d’être sédentaire.

Gabriel: Par rapport à cette image de rouille, cela me parle beaucoup. Je dis justement aux patients pour les sortir du lit, que le corps est un peu comme de l’eau. Il y a souvent des carafes d’eau sur les tables basses. Je la secoue un petit peu et je leur explique que si cela reste en mouvement, l’eau va rester assez claire, assez limpide. Par contre, si ça ne bouge pas pendant un temps prolongé, il va y avoir des algues, ça va croupir, ça ne va pas sentir bon. Moralité si vous voulez ne pas puer bougez vous.

Juliette: Ça leur donne envie de boire à l’hôpital, sympa (lol).

Des astuces pour bouger plus

Juliette: Est-ce que tu aurais des petites astuces pour essayer de lutter contre la sédentarité ou pour amener notre entourage à bouger plus sans forcément qu’il s’en rendre compte ?

Sportif mais sédentaire

Gabriel: Il y a beaucoup de points. Je ne saurais pas par où commencer. Par contre, je voulais vraiment souligner, qu’on peut pratiquer une activité physique, typiquement être abonné à une salle de sport, faire une heure de sport par jour, mais être considéré comme sédentaire. C’est hyper important de le comprendre. Il y a des personnes qui sont par exemple étudiantes, ou qui travaillent au bureau (beaucoup assis), et qui font une heure de sport le soir. Ces personnes là, on va les considérer comme sédentaires. Parce que, ce n’est pas l’heure de sport qui va être déterminante pour le bon fonctionnement de l’organisme. Dans la mesure où la majorité du temps ils sont en position statique. Le sport c’est super positif, c’est excellent ! Mais là, ça ne va pas dans le bon sens si, les 23 heures restantes, on a un mauvais sommeil, on est stressé, on est inactif, on mange peu sainement, …

Juliette: Cela ne va pas forcément compenser. C’est aussi le principe des gens qui vont faire une heure de fitness toutes les deux semaines. C’est toujours la même chose, on retrouve la même chose dans la performance. Si on veut être performant, il faut avoir une certaine régularité. Si on veut être en bonne santé, il faut avoir aussi une certaine régularité. Maintenant, il faut être honnête, je pense que toi et moi, on fait des excès. Je ne dis pas que ce sont des excès calculés, mais il faut que la majorité du temps, on ait une certaine logique et une certaine hygiène de vie. Qu’on est un comportement qui s’oriente plus dans la prévention que dans le plaisir et la sédentarité de façon générale.

La motivation

Gabriel: C’est ça, c’est de la discipline aussi quelque part. Les gens oppose souvent, la discipline et la motivation. Ils disent qu’ils ont de la peine à trouver la motivation. Cela n’engage que moi, ce n’est que mon avis, mais je trouve qu’à un moment donné, la rigueur et la discipline doivent primer sur l’aspect motivation. L’air du temps est d’être motivé. C’est important d’être motivé, mais la motivation ça fluctue. La rigueur, c’est un choix, on le fait, ou on ne fait pas. L’aspect motivation fluctue d’une personne à l’autre, et en fonction des circonstances. Je ne pense pas qu’il faille voir la motivation comme quelque chose qui nous pousse à faire et à entreprendre. Par exemple, de faire de l’exercice ou de s’activer. Mais plutôt comme un bonus. C’est à dire qu’on a notre discipline, notre organisation de base; et les jours où on est motivé, on le voit comme un bonus qui nous pousse a faire à un étage de plus, a faire quelques répétitions en plus, 100 mètres de plus …

Juliette: J’aurais tendance à dire qu’en hiver, la motivation, comme tu le dis, c’est le plus. C’est le jour où, là, on a envie. Alors que le reste du temps on n’a pas forcément envie. Je dis à certains patients un truc tout bête. Surtout quand ils ne sont pas bien parce que qu’ils sont malades ou qu’ils ont des douleurs. C’est simplement de sortir de chez eux. De marcher autour du pâté de maison ou autour de l’immeuble, 10 minutes. Ce n’est rien. Je leur explique, que le fait de prendre l’air, d’être en extérieur, de ne pas toujours être enfermé dans des bureaux ou à la maison, de ne pas forcément réfléchir, de ne pas avoir d’objectif, est un élément positif. On vit dans une société où on doit toujours avoir un objectif, où l’on a toujours quelque chose à faire. J’explique aux patients qu’en sortant 5-10 min, c’est du temps qu’ils s’accordent à eux-même, où ils sont en « off ». Et je pense que cela crée certainement un peu de libération d’endorphine, du bien être ou une sorte de remise à jour.

L’activité physique, un médicament !

Juliette: Il ne faut pas oublier que l’activité physique, c’est le premier moyen pour lutter contre la dépression. Si vous êtes déprimé, faites de l’activité physique. Au début, pas forcément beaucoup. Parce que vous ne savez pas comment faire, parce que vous n’avez pas envie. Et en fait, petit à petit, cette activité physique va vous faire du bien. Vous en aurez besoin. Et c’est là qu’on retrouve cette notion de rigueur qui se met en place sans forcément s’en rendre compte. Parce que c’est le bien être qui va primer. Evidemment, il y a des rechutes, c’est normal. Mais lorsqu’on a analysé et compris tout ça, on peut aussi se dire, à certains moments : je ne suis pas bien, je m’accorde une semaine au fond du lit parce que ça ne va pas et je décide d’être sédentaire pendant une semaine. Mais la semaine prochaine, je reprend a bouger car je sais que ça me fait du bien, que ça fait du bien à ma santé, mais aussi à mon moral. Quand on y pense, c’est quand même plus sympathique d’être heureux et joyeux, de profiter de la vie que de ruminer toute la journée.

Gabriel: On est d’accord. Après, il faut encore en avoir conscience. Au niveau des mœurs, notamment dans le domaine médical, cela évolue. Avant,on était vraiment focus sur l’aspect médicamenteux. Le marché pharmaceutique est immense, c’est colossal. On n’a pas idée de ce que cela représente en terme de chiffres. J’avais l’impression, qu’au niveau du discours médical, ce dernier correspondait à : il faut absolument que vous preniez vos pilules, et une liste pas possible de médicaments; et ça ne serait pas mal si vous bougiez un peu plus. L’activité physique était perçue un peu comme un bonus.

Gabriel: A ce jour, je trouve que le discours a bien changé. Maintenant on propose des programmes, on sort les gens rapidement du lit lorsqu’ils sont hospitalisés ou qu’il y a des problématiques aiguës ou chroniques de la santé. C’est formidable. J’ai encore eu une cliente qui est venue ce matin faire une séance. Elle disait justement que pour un problème de sciatalgie, elle est allée consulter sa doctoresse. Cette dernière l’a mise en 70%, et lui a dit « Je fais le choix de vous mettre 70%. Mais par contre, les jours où vous êtes libre, c’est obligatoire, vous allez sortir dehors, vous allez marcher ». Elle lui a dit de se procurer une de ces montres qui compte les pas. Et l’a informé qu’il fallait faire 10.000 pas par jour. On rentre dans les recommandations, et c’est bien. C’est bien de voir l’activité physique comme comme un médicament. Quand on voit tous les effets positifs que cela a. Ne serait ce que sur tous les aspects bio-psycho-sociaux, sur le corps, sur la santé mentale, sur l’estime de soi, sur les interactions avec les autres et tout ce qui est purement physiologique. C’est fantastique qu’aujourd’hui, l’activité physique soit perçue comme un médicament. Et je te mets au défi de trouver un médicament qui regroupe tous les effets bénéfiques que procure l’activité physique, et qui n’a pas d’effets secondaires. Alors, c’est sûr qu’il existe le surentraînement par exemple, mais ça ne concerne pas la majeure partie des personnes. Mais c’est chouette de constater une évolution des mœurs, et une prise de conscience.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de faire au moins 10 000 pas par jour pour lutter contre les effets de la sédentarité et maintenir une bonne santé.

Juliette: C’est vrai, je trouve aussi qu’il y a eu un changement au niveau médical. Maintenant l’activité physique passe en premier plan. Ils se sont certainement rendu compte, je suis un peu méchante, mais qu’on a tellement « bourré » les gens de médicaments qu’il y avait un certain nombre d’interactions médicamenteuses. On a alors chercher a donner moins de médicaments. On a fini par réaliser en fin de compte, que le fait de bouger était déjà une bonne chose pour les patients. Bouger draine le corps, ce qui draine les substances administrées. C’est certainement une bonne chose d’un point de vu médical, mais il faut aussi drainer un petit peu le tout.

Gabriel: Pour rebondir sur ce que tu dis, il faut voir l’activité physique, en tout cas comme un médicament. Si une personne prend un médicament pour une raison X, et que ce médicament marche, elle le prend régulièrement. Et dès qu’elle ne le prend plus, il ne fait plus effet. L’activité physique c’est pareil, ça doit être régulier. Il est vrai, que lorsqu’on parle d’activité physique, cela peut faire peur aux gens. Ils se disent souvent : c’est du sport, il faut s’équiper. Mais ce n’est pas nécessaire. On peut le faire en habit comme ça.

Juliette: Rien que de marcher …

Gabriel: Aller marcher, c’est fantastique.

Juliette: Certains parlaient du CrossFit et expliquaient que certains exercices de CrossFit étaient basés sur la vie quotidienne. Et c’est vrai que l’on fait des squats pour aller chercher des assiettes en bas du placard, par exemple, ou pour vider le lave vaisselle. Faites des squats ! Pourquoi vous ne maîtrisez pas votre corps ? Vous êtes en train de descendre pour chercher votre assiette sans gainage du tronc. Lorsqu’on leur explique cela, les gens réalisent qu’au quotidien, quand ils montent les marches, ils sont en train de faire du step d’une certaine façon.

L’activité physique en premier plan pour une bonne santé

Juliette: Par rapport à ce que je voulais dire, c’est qu’il est vrai que les médecins maintenant ont compris que l’activité physique était primordiale et le voient au premier plan. La deuxième étape serait que les patients le voient aussi en premier plan aussi. Je pense que dans notre société, on n’en est pas encore là. Et c’est ça aussi notre rôle.

Gabriel: Là, on entre dans l’aspect prévention. Il est vrai qu’à ce jour, on agit souvent lorsque le problème de santé est déjà là, donc fatalement trop tard, trop tardivement. Entrer dans les aspects de la prévention de la santé en s’y mettant avant, en agissant avant, ça serait la prochaine étape.

Juliette: Lorsqu’on se retrouve face à des patients ou des clients, qui ont eu des douleurs ou qui ont mal quelque part, … on doit les instruire sur le pourquoi du comment. Si la personne comprendre pourquoi elle en est arrivé là, au final, dans l’avenir, elle va lutter pour que cela n’arrive pas de nouveau. Elle va alors changer sa façon de voir. L’activité physique, ce n’est pas faire du sport et être fit. En fait, l’activité physique, c’est pour pouvoir mieux vieillir, bien vieillir. Et pouvoir profiter de tout ce qui nous entoure plus facilement.

L’activité physique pour bien vieillir

Gabriel: J’aime bien le terme « bien vieillir ». J’avais un débat là dessus, justement. C’est marrant que tu dise ce terme parce que je vais prochainement participer à un séminaire sur cet aspect de bien vieillir, de vieillir sainement. La question du titre de ce séminaires s’est posé. Au début, le titre était « antiaging ». En discutant je disais que le terme « antiaging » faisait penser à un truc négatif. On a eu un débat là dessus. Je disais que les gens n’appréciaient pas de vieillir. Mais dans l’absolu, la meilleure chose qui puisse arriver, c’est de prendre de l’âge. On ne veut pas y passer à 30 ans. Donc autant mettre toutes les chances de son côté, s’activer et bouger.

Gabriel: Pour rebondir sur ce que tu dis par rapport aux autres activités de la vie quotidienne : les tâches, les squats en allant chercher les assiettes, les escaliers et autres. C’est ça, surtout qui va être déterminant dans les dépenses d’énergie au quotidien. Pour revenir sur ce qu’on disait avant, ce n’est pas l’heure de sport qui va être déterminante, c’est aussi ce qu’on fait le reste du temps. On appelle ça les NEAT (Non-exercise activity thermogenesis). Cela correspond à toutes les dépenses qui sont faites dans des activités qui ne sont pas prévues en tant que sport.

Juliette: L’exemple des sacs de courses. Il y a façon et façon de porter les sacs de courses. On le voit sur les problèmes d’épaule. Quand j’explique aux gens qui ont des soucis d’épaules, qu’à chaque fois qu’ils portent leur sac de courses en se crispant, ils accentuent l’inflammation, et l’installation des tensions. Je leur demande de prendre le sac juste devant eux près du corps avec les deux bras, et leur explique que plus le sac est lourd, plus ils doivent gainer. Il y a toujours un petit blocage au début, car il faut changer les habitudes. Il faut changer la façon de faire. C’est là aussi où, quand on va faire du travail actif avec eux, ni vu ni connu, on amène certains exercices. Et puis ensuite, on fait le rapprochement. Vous avez vu, vous êtes en train de porter 10 kg, et ça va… La prochaine fois avec votre sac de courses de 10 kg, vous penserez à moi. C’est comme ça qu’on inculque des notions qui peuvent se mettre en place.

Gabriel: C’est vrai que voir une progression c’est très encourageant pour les personnes. Voir une progression, participer avec autrui, ça peut aussi être intéressant pour des personnes qui ont un peu du mal à s’y mettre. Peut être avec un proche ou en groupe, ou trouver quelque chose qui nous convienne. Cette notion de plaisir est quand même intéressant. Avant, on parlait de l’aspect discipline, qui selon moi prime sur la motivation. Et de voir la motivation comme un bonus. Mais il faut aussi qu’on s’y retrouve dans tout ça. Il faut donc expérimenter, tester des trucs et s’y retrouver.

Juliette: Si on n’a pas la discipline, on peut toujours trouver soit des voisins pour aller marcher, soit des groupes de marche. Avec le covid, cela nous a quand même apporté pas mal de choses vis à vis de cela, des groupes où les gens se regroupent pour faire des activités ensemble. Je trouve qu’il y a toujours moyen.

Juliette: J’ai l’exemple d’une patiente. Elle n’aime pas faire les courses, et elle habite au cinquième étage. Je lui dis de ne pas faire ses courses en une fois. De toute façon elle va au travail tous les jours. Au lieu de revenir avec ses 15 sacs, avec lesquels elle va galérer pour monter ses cinq étages, je lui ai dit de le faire deux fois. Au lieu d’aller à la boulangerie, puis ensuite chez un boucher, … si vous avez le temps, allez à la boulangerie, revenez et ensuite, l’après midi, repartez chez le boucher pour essayer d’accumuler des petites choses au quotidien. Il n’y a pas toujours besoin de faire six heures de sport. Même si je le rappelle : on perd notre masse musculaire avec l’âge. Le renforcement musculaire, personne ne va le remplacer.

Juliette: De plus, cette lutte contre la sédentarité est synonyme de mobilité. On voit bien que lorsque l’on n’est pas bien, qu’on est un peu malade, on perd cette notion de mobilité. Je dis souvent une patient : Vous savez ce sont vos muscles qui font votre mobilité, il faut les activer. Quand on se tient mal ou lorsqu’on va chercher l’assiette au fin fond de l’armoire … et qu’il n’y a aucune tenue au niveau du tronc, qu’il n’y a aucun gainage nulle part; Au final, qu’est ce qui travaille? C’est plus de l’agression que du travail musculaire. Sauf que ce sont les muscles qui vous font bouger. Donc plus on va les bouger, mieux ça va être.

Gabriel: Il y a en effet un peu dose – réponse, comme on dit.

Les bonnes résolutions

Juliette: On est au mois de novembre, mais bientôt arrive le mois de janvier avec sa phase de nouvelles résolutions. Comment tu vois cette période de nouvelles résolutions, quel est ton avis sur ce sujet ?

Gabriel: La fameuse période des bonnes résolutions. On sait que cela marche une semaine. Et puis, après les gens abandonnent. Je dirais que c’est chouette d’avoir des bonnes résolutions et tout, encore faut-il s’y tenir.

Juliette: C’est bien de se challenger de temps en temps.

Gabriel: C’est très bien. Pour que concrètement, cela se passe bien, il serait important de procéder par étape. Et de revoir un petit peu les exigences, d’être un peu plus raisonnables, c’est important. Par exemple, quelqu’un qui se dirait du jour au lendemain, dès le 1er janvier, j’y vais. Je fais une heure de footing par jour. C’est illusoire, ça ne va pas durer …

Juliette: Tu sais que tu fais peur à certains … tu leur parles d’une heure de footing par jour …

Gabriel: On va développer. Plutôt que de se dire ça, … Par exemple, si je prend mon cas. Moi, il serait bien que je fasse un peu plus de méditation. Je vais me dire, dès demain, je m’y mets, je fais mon heure de méditation. Mais pour faire une heure de méditation ou de sport, il faut être dans une certaine disposition physique, mentale. De plus, il y a les circonstances de la vie de tous les jours. Le quotidien qui fait, qu’une heure ça peut ne pas être évident. Ce n’est pas simple à appréhender, la vie va à 100 km/h dans le quotidien des personnes. Se dire, la prochaine heure il va falloir que je fasse ça … mais il peut se passer beaucoup de choses. Il peut y avoir le voisin qui vient déranger, la famille, quelqu’un qui sonne, le téléphone qui sonne,le chien, le chat… un imprévu, que sais je ? Donc, en une heure, il peut se passer beaucoup de choses. Je pense qu’il est intéressant pour ceux qui souhaitent se mettre à faire une activité, d’être raisonnable, réaliste. Commencer par dix minutes. Si, par exemple, je souhaite faire 1h de méditation, je vais me mettre à faire 10 min. C’est assez simple, je trouve à appréhender. Je me dis OK, là, ce sont mes 10 min de méditation que je fais un jour sur deux. A ce moment là, je vais couper le téléphone, je vais fermée à clé, et je vais me mettre dans de bonnes dispositions. Dix min, c’est quoi ? Donc, je le fait. Je ne fais pas une minute de plus, je ne fais pas une minute de moins. Et si cela me convient bien, j’essaye de pérenniser la chose. Dans un second temps, peut être que je passe à un quart d’heure. Puis à vingt min. Peut être que 20 min, c’est trop. Dans ce cas là je reviens à un quart d’heure. J’essaye d’installer ça dans le temps.

Juliette: Oui, d’y aller progressivement, et de voir que les choses s’intègrent dans le temps. Sans se dégoûter. C’est un peu le problème quand on va trop vite.

Construire une routine, une habitude

Gabriel: Construire une routine, une habitude. C’est ça aujourd’hui le problème. Tu parles d’aller trop vite, mais c’est que tout va très vite. Et puis, on veut tout, tout de suite. On veut le résultat, on veut le programme miracle, mais les bonnes choses prennent du temps.

Juliette: C’est le programme des six semaines …

Gabriel: Le fameux programme des six semaines. Et puis, on a tellement de chance, c’est ça que je voulais dire tout à l’heure. En Suisse, c’est fabuleux, on a tous les reliefs, on a tous les types de paysages, on a toutes les saisons, tous les climats. Il suffit d’être équipé un petit peu basiquement, de bonnes chaussures, un maillot de bain, éventuellement un vélo. Et on peut tout faire tout, et toute l’année.

Juliette: L’avantage qu’on a ici, c’est que où que vous habitiez, vous avez la nature à proximité. Il n’y a pas forcément besoin de faire une heure d’embouteillage, pour se retrouver dans la première forêt. Il y a quand même des choses qui sont proches. Comme tu le disais, il y a cette notion de quantité de temps. Il faut être réaliste et commencer petit, sachant que le planning n’a que 24 heures. Il y a aussi une notion de quantité de charge. Quand tu parlais d’aller courir une heure par jour tous les jours, certains ont eu peur je pense. Selon votre niveau sportif, rien que d’aller marcher, c’est déjà une première étape. Si vous voulez courir une heure tous les jours parce que vous avez cette quantité en tête, et que vous n’avez jamais couru. Je vous déconseille de commencer aussi vite. Vous devriez déjà commencer à marcher. Et, ensuite faire un petit peu plus de marche rapide. Puis intégrer la course à pied progressivement.

Gabriel: Absolument. Il faut bouger en somme. Ne faites pas rien, faites quelque chose. Et puis, ce n’est pas pour rien qu’il y a ces fameuses recommandations de la demi heure par jour. Les gens prennent un médicament pour aller mieux, dès qu’ils arrêtent de le prendre cela n’a plus d’effet. L’activité physique, c’est pareil, comme on disait avant, il faut le voir comme un médicament.

Gabriel: Les gens disent souvent qu’ils n’ont pas le temps, … Ils invoquent le temps, mais aussi le coût. Ils disent que pratiquer une activité physique ça coûte cher, qu’il faut s’équiper, avoir un abonnement, … Mais en terme de temps et en terme de coût, je trouve qu’il faut voir les choses sur le long terme. Une mauvaise santé induite par l’inactivité, de la sédentarité et une mauvaise hygiène de vie va coûter beaucoup plus de temps et d’argent sur le long terme. Être en mauvaise santé, ça coûte extrêmement cher. Et si on met dans la balance la demi heure de marche un petit peu vigoureuse par jour, en se parkant à 10 min de son travail et en faisant le reste à pied, versus les hospitalisations, les traitements, les visites chez le médecin … les coûts et le temps que cela va prendre, c’est faramineux.

Gabriel: Il ne s’agit pas forcément de parler de sport, cela peut faire un peu peur, mais simplement de s’activer un petit peu. Je vous invite vraiment a réfléchir à votre emploi du temps, à votre quotidien, à vos habitudes. Activité par activité, et vous dire OK, à tel moment de la journée, je fais ça, comment est ce que je peux sans perdre de temps, y placer un petit peu de mouvement ? Par exemple, si je me rends en transports à mon travail, cela me coûte quoi de m’arrêter un-deux arrêts de métro avant, et de faire le reste à pied ? Idem pour le retour. Si j’ai beaucoup de téléphones à faire, qu’est ce que cela me coûte de faire ces appels en position debout, en marchant ? Je vous invite vraiment à avoir une réelle réflexion sur votre emploi du temps, à vous poser la question : A quel moment est ce que je peux caler un peu de mouvement ?

« Ceux qui estiment ne pas avoir de temps pour l’exercice physique, devront tôt ou tard, trouver du temps pour la maladie ». Edward Stanley

Juliette: Réfléchir aux petites choses qu’on peut changer. Ne plus prendre les escalators ni l’ascenseur, mais les escaliers par exemple.

Gabriel: Tout à fait. Il y avait eu d’ailleurs une étude, je crois que c’était aux HUG, dans laquelle ils avaient pris un groupe de collaborateurs auquel ils avaient donné une sorte de badge, de puce, qui les empéchait de prendre l’ascenseur. Ils étaient donc contraints de prendre les escaliers. Ils ont observé des bénéfices. Dans cette étude, il s’agissait en l’occurrence de mesurer tout ce qui était composition corporelle. Sur quelques mois, ça a porté ses fruits. C’est vrai qu’on voit souvent les choses dans l’immédiat, on se dit que 10 min ce n’est rien, et que ça ne va pas avoir d’effet. Mais sur une semaine, simplement 10 min de marche, on voit les résultats. On va plutôt parler de la demi heure, car ce sont les critères … J’avais 10 min en tête parce que c’est ce qu’on peut comptabiliser dans un temps d’activité. Si on fait 10 min d’activité, de mouvement sans interruption, c’est ce qu’on peut comptabiliser.

Il est recommandé de faire 30 min d’activité physique quotidienne d’intensité moyenne. Swissheart.ch

Répartir l’activité physique dans le temps

Gabriel: Quantifier le mouvement est plus intéressant. On revient sur l’exemple de quelqu’un qui fait une heure de fitness par jour, mais qui le reste du temps est assi. Cette personne va être considérée comme sédentaire dans la mesure où, on ne peut pas être inactif cinq jours sur sept et le week end, faire trois heures d’activité physique le samedi et trois heures le dimanche. Ce n’est pas comme ça que ça fonctionne. Pour prendre un exemple d’une activité de la vie quotidienne. Se brosser les dents, ce n’est pas parce que vous ne vous brossez pas les dents du lundi au vendredi, puis que vous passez une heure à vous brosser les dents le samedi et dimanche, que cela va porter ses fruits. C’est intéressant la répartition. et c’est souvent mieux. Par exemple si on a deux heures où l’on veut faire du sport de façon un peu intensif, il sera préférable de le répartir. De faire sur quatre jours, 30 min chaque jour. Plutôt que de ne rien faire pendant trois jours, et puis le quatrième jour faire deux heures d’un coup.

Juliette: Il faut toujours mieux faire de l’activité de façon quotidienne. Quand on rentre dans le sport, là, on rentre dans le système d’entraînement. C’est un autre débat. Mais de toute façon, il vaut mieux avoir de l’activité un petit peu tous les jours, ça, c’est sûr.

Les enfants et l’activité physique

Juliette: Un autre point qui peut être intéressant, ce sont les enfants. En tant qu’adulte, d’une certaine façon, on leur sert d’exemple. Cela peut être une motivation pour bouger, pour marcher. Si nos enfants nous voient être actifs, ils vont déjà être plus actifs. Il y a aussi la notion de comportement. Quand on les amène à l’école, les arrêter juste devant, les jeter de la voiture, ce n’est pas forcément leur apprendre à être actifs et à bouger. Et comme tu nous l’a dit tout au long de cet entretien, l’activité physique et on ne parle pas de sport, l’activité physique est importante pour être en bonne santé, de façon générale. Pour être bien dans sa vie, dans sa tête, dans son corps. Il faut donc peut être inculquer cela à nos enfants.

Juliette: Je ferais le parallèle avec les trottinettes. Je n’ai absolument rien contre les trottinettes, mais j’ai eu beaucoup de patientes qui me demandaient ce que je pensais des trottinettes chez les tout petits. Je répondais alors, que je n’avais rien contre les trottinettes, à partir du moment où on considérait que c’était un moment, que c’était une activité à part entière. Le problème, c’est qu’on est tous pareils. Les enfants sont petits. En tant qu’adulte, on marche beaucoup plus vite. C’est plus simple pour nous, en tant qu’adulte, d’avoir des enfants qui nous suivent au bord du lac en trottinette qu’à pied. J’avoue que c’est beaucoup plus confortable. Par contre, je pense que ce n’est pas forcément idyllique pour les enfants. Pour la simple et bonne raison qu’ils sont tout le temps en trottinette. La trottinette, ça va très vite. Ils ne prennent donc pas l’habitude d’observer les choses calmement. Ils n’ont pas la frustration d’être le petit qui essaye de suivre les adultes. Tout va trop vite, la notion d’attendre, le fait d’être patient, le fait de prendre le temps. On ne leur apprend pas à prendre le temps. En même temps, la trottinette, peut être une activité physique, mais quand elle est vue comme mode de transport, ce n’est plus le cas. De plus on voit de plus en plus, même les petits, avec des trottinettes électriques.

Juliette: Quand les patientes me posaient la question, je leur cassai un petit peu le truc. Pourtant, je suis très sport de glisse, trottinette, skate, … je trouve ça génial. Mais, vu comment c’est utilisé, c’est discutable. Il est parfois intéressant de prendre du recul et de réfléchir en tant qu’adulte, en quoi l’utilisation de la trottinette nous arrange, nous plaît. La plupart du temps, en tant que parent, ce qui va nous plaire dans la trottinette, c’est qu’il n’y a pas besoin d’attendre l’enfant. Est ce que c’est quelque chose de positif ? Même dans le rapport à ces enfants ? Là, il y a peut être moyen de se remettre en question.

Gabriel: C’est vrai que je ne me suis jamais posé la question, sur cet aspect de trottinette. Je ne suis pas spécialiste de la question chez les enfants, mais il est vrai qu’il y a des étapes dans la vie, de construction, de développement de l’organisme, du système nerveux qui se font par étapes. Les fondations se construisent à certains âges. C’est important que l’enfant soit stimulé, qu’il soit actif, qu’il bouge, qu’il court, qu’il saute, qu’il marche et qu’il fasse des expériences. C’est important qu’il soit stimulé par l’environnement, d’un point de vue sensoriel et avec le mouvement.

Juliette: Le problème avec la trottinette, c’est qu’elle va te stimuler sur beaucoup de choses, sur l’équilibre, sur la réactivité, et plein d’autres choses, ça, je ne le renie pas. Mais en contrepartie, le problème, c’est lorsque la trottinette remplace la marche et qu’il n’y a plus de marche. On ne va plus à l’école à pied, on dépose l’enfant devant la porte. Le week end, lorsqu’on a envie d’aller marcher dans les vignes ou au bord du lac, l’enfant ne marche pas, mais nous suit en trottinette. Souvent, à aucun moment les enfants marchent réellement. On observe de plus en plus les enfants se plaindre rapidement de douleurs partout après avoir un peu marché. Directement, on va penser aux douleurs de croissance, car l’enfant est en pleine croissance. Mais parfois, il faut prendre un peu de recul, car ce n’est peut être pas des douleurs de croissance. L’enfant n’est peut être pas suffisamment stimulé dans cette activité. Activité qui est censée être une activité basique. On est censé marcher avant de courir.

Gabriel: C’est vrai qu’au niveau mécanique, il y a cet aspect contrainte, impact qui va justement stimuler la synthèse osseuse. Donc ça, c’est important, et il vrai qu’on ne retrouve pas tellement cela dans la trottinette, encore moins dans la trottinette électrique.

Juliette: On va parler de trottinette récréatif. Parce que pour ceux qui font de la vraie trottinette sportive, c’est encore autre chose.

Gabriel: C’est encore autre chose, c’est sûr.

Juliette: Comme on l’a vu au final, tout ce qu’on cherche, c’est d’essayer d’être actif, de se remettre en question, de se poser des questions par rapport à son environnement ou son planning. Qu’est ce qu’on peut changer ? Qu’est ce qu’on peut améliorer, sans avoir des objectifs de Jeux olympiques ? Rester simple pour essayer de bien vieillir. Puis peut être arrêter de vouloir la solution miracle tout de suite sous forme de pilule en 2 secondes. Chercher les solutions, c’est bien. Vouloir une solution dans la seconde, ça ne marche pas.

Gabriel: Patience est mère de raison.

Le problème des écrans

Juliette: Est ce qu’il y aurait d’autres choses que tu aimerais partager, d’autres réflexions ?

Gabriel: Alors je trouve qu’on a bien fait le tour et on a bien parlé de la sédentarité, du mouvement, de l’activité physique. Tu nous as aussi parlé longuement de la trottinette (lol).

Juliette: J’aime bien le « longuement » (lol).

Gabriel: C’était très intéressant, mais c’est vrai que je ne m’étais jamais posé la question sous cet angle. Je n’ai jamais vu un enfant sur une trottinette suivre sa maman, et me dire tient elle le prend pour se décharger un petit peu.

Juliette: Elles ou ils, les papas ne le font pas consciemment. On ne le fait pas consciemment.

Gabriel: Mais c’est vrai que lorsque je pense, par exemple à mon petit frère ou aux enfants, actuellement l’aspect le plus problématique, pour moi, lié au manque de mouvement, à l’inactivité, c’est plus les écrans. En l’occurrence tout ce qu’il est accès au téléphone. Pour faire un parallèle avec la trottinette, par exemple, je dis ça sans son jugement et je ne suis pas papa, donc c’est purement un constat. Mais j’ai l’impression que parfois, on met dans les mains de l’enfant un écran, un smartphone pour qu’il ne fasse rien et reste calme. Pour qu’on puisse faire nos trucs tranquille. Que c’est une solution, une facilité.

Juliette: C’est la même facilité que la trottinette. On le fait inconsciemment ou consciemment des fois, mais c’est la même chose.

Gabriel: Je trouve que les écrans, pour n’importe qui, ce n’est pas forcément bien. Après, tout est question d’équilibre et de faire les choses raisonnablement avec les écrans. Sur les téléphone, il y a des options pour voir le temps d’écran. Parfois je confronte mon petit frère au temps qu’il a passé sur l’écran. Cela peut aller jusqu’à 4-5 heures. Il ne se rend pas compte. J’ai parfois l’impression qu’on a peur, et je m’inclue dedans, de ne rien faire. Je pense qu’il y a beaucoup de gens qui auraient du mal si on leur disait : maintenant tu dois durant 5 minutes ne rien faire, tu restes assis et tu ne fais rien. Je pense que beaucoup de gens seraient super mal.

Juliette: Ça, ce serait un test intéressant, face à des gens qui sont continuellement sur leur écran, de les poser face à ce type de panorama (vignes de Lavaux, face au lac) sans téléphone, sans musique, sans rien. Et de leur dire maintenant essaye de profiter de l’instant. S’ils n’y arrivent pas, peut être que ce test les amènerait à se remettre en question et peut être à changer 2-3 petites choses dans leur vie.

Gabriel: Tu prend conscience souvent que tu ne fais pas quelque chose d’utile sur le téléphone. Simplement tu fais défiler, tu navigues ou tu regardes un peu les publications des autres. Dans l’absolu, tu ne fais rien de plus intéressant que de ne rien faire, mais ça donne l’impression de faire quelque chose. Les gens maintenant l’embarquent aux toilettes …

Juliette: Ne pas amener son téléphone aux toilettes.

Gabriel: C’est le seul endroit où à proprement parler tu peux « te faire chier » et même là, les gens ont peur de se faire chier, de ne rien faire. Donc, ils embarquent le téléphone.

Juliette: C’est vrai que c’est la panique quand tu n’as plus ton téléphone, alors que le natel (portable) ce n’est pas si vieux. C’est comme Internet, ce n’est pas si vieux.

Gabriel: Tout va très vite. On ne sait pas encore les répercussions que cela peut avoir. On verra dans quelques dizaines d’années. Il y a forcément des répercussions positives, et négatives. On les constatera plus tard, on ne sait pas encore.

Juliette: Pour l’instant, on ne voit que l’aspect pratique de la modernité par rapport au natel, on ne voit pas les effets négatifs.

Gabriel: Quand je vois les plus jeunes, les enfants, c’est plus cet aspect lié aux réseaux sociaux, au temps passé sur tous les écrans, …

Juliette: Qui diminue les vraies interactions sociales. On le voit quand ils sont en famille. Au final, ils ne sont pas là. Ils sont sur leurs écrans et ils ne sont pas en train de communiquer avec nous. Ce qui n’est pas constructif non plus.

Gabriel: Ça donne l’impression que tu as des interactions sociales, que tu connais du monde. ça augmente l’estime de soi … Il y a tous ces mécanismes de valorisation, s’est construit comme ça. J’imagine qu’ils ne sont pas stupides, tout ce qui est like, le coeur, …

Juliette: Ça peut amener plein d’interactions intéressantes, te permettre de rencontrer de nouvelles personnes …

Gabriel: C’est un outil.

Juliette: En effet, il faut le voir comme un outil. Maintenant, tu le fais assis. En général, tu n’es pas en train de marcher pendant que tu regardes tes réseaux. Si tu marches pendant que tu regardes ton écran, c’est dans ce type de moment qu’on observe des accidents avec les voitures, ou entre piétons, …

Gabriel: Il y a des répercussions. On voit souvent le coté physique, sur les yeux, sur la posture … On est souvent affalé quand on l’utilise.

Les enfants et les réseaux sociaux

Gabriel: Mais il y a toutes les répercussions aussi plus psycho-sociales. Je parle des réseaux sociaux. C’est vrai que ce n’est pas un thème qui concerne forcément la sédentarité ou l’activité physique. Mais si je prends l’exemple, de jeunes qui sont malheureusement harcelés à l’école. Avant quand il n’y avait pas les réseaux sociaux, les jeunes qui subissaient ça, cela se cantonnait un peu aux limites de l’école. De nos jours, la majorité des jeunes sont sur les réseaux. Ceux qui subissent le harcèlement, celui-ci les poursuit jusqu’à la maison. Donc les répercussions sur la santé, et au niveau psycho social sont dévastateurs. On en voit à l’hôpital, en pédiatrie !

Juliette: Ces enfants se renferment sur eux même, et la reconstruction en est d’autant plus difficile. Comme on disait, ce n’est plus qu’au niveau local, c’est 24h/24. Cela prend une ampleur démesurée, c’est la ville d’à coté, c’est le pays d’à coté, ça implique des gens que l’on a jamais vu.

Gabriel: C’est H24. Et comme on disait avant, il y a des choses, des phases précises du développement. Des choses qui ne se construisent qu’à un certain âge. Et si cela se passe mal, malheureusement, ça conduit à des dérives qui peuvent être dramatiques.

Gabriel: On ne vend pas trop les natels (lol). Biensur qu’il y a du positif. Mais on s’éloigne un peu du sujet.

Juliette: C’est cette notion de prendre les choses avec un certain équilibre, de trouver de l’alternance, de prendre la modernité avec ce qu’elle nous apporte de positif. D’avoir conscience des mauvaises choses, que ce soit à cause des natels, ou que ce soit nos habitudes. Il faut essayer de trouver un juste milieu pour évoluer dans le temps de façon la plus optimale et bienveillante possible.

Gabriel: Oui, l’équilibre et faire les choses en connaissance de cause. S’informer. C’est vrai que tout ces outils sont aussi positifs pour s’informer, on a accès à l’information.

Juliette: Merci Google.

Gabriel: Merci Google.

Juliette: Parce que oui, on utilise Google tous les jours. C’est vrai que Google, c’est quand même pas mal …

Gabriel: En somme, on n’a pas de recette miracle et de remède magique à vendre.

Juliette: Essayons de faire simple. De la mobilité classique, de pas chercher les extrêmes, de se connaître par rapport à ses capacités, de se faire accompagner par des thérapeutes, des physiothérapeutes, des thérapeutes du sport, des coachs, … ce que vous voulez. Avancer progressivement en fonction de ses propres capacités.

Gabriel: Je n’aurais pas dis mieux.

Juliette: Autre chose à rajouter ?

Gabriel: C’est bon pour moi. Je te remercie infiniment, en tout cas pour ton temps. Si quelques collègues voient ce podcast, je les embrasse fort et je les salue.

Juliette: Et puis, il faut liker et partager (lol). Merci à tous.

La réadaptation cardiaque – Episode 1

Vous pouvez écouter et voir ce podcast sur notre chaîne youtube

Vous pouvez écouter ce podcast sur :

 

Les intervenants

  • Juliette Corgnet : Physiothérapeute
  • Marisa Azevedo : Physiothérapeute à l’HRC

Transcription du Podcast

Juliette: Bonjour et bienvenue sur le podcast Santé Sport de CapRol. Aujourd’hui, nous allons parler de la réadaptation cardiaque avec Marisa Azevedo. Marisa peux-tu te présenter stp ?

Marisa: Je suis physiothérapeute. Je travaille depuis quelques années à l’HRC (Hôpital Riviera Chablais) à Rennaz. J’ai fait une spécialisation en rééducation cardio-vasculaire. Je suis une des référente à l’hôpital en ce moment.

A quoi correspond la réadaptation cardiaque ?

Juliette: On a donc la bonne personne pour parler de la réadaptation cardiaque. Est-ce que tu arriverais à nous expliquer à quoi correspond la réadaptation cardiaque?

Marisa: Elle est destinée aux patients qui ont connu un problème, un soucis au niveau cardiaque ou cardio-vasculaire. Notre rôle en tant que physiothérapeute est de les éduquer, pour avoir une hygiène de vie plus saine. Et surtout de les réentraîner à l’effort, pour qu’il puisse par la suite le faire seuls. Nous voulons ainsi éviter une récidive.

Juliette: OK, c’est donc une rééducation, une réhabilitation à l’effort, dont un des buts est d’amener les patients à devenir autonomes dans leur prise en charge. A faire, ainsi en sorte qu’ils reviennent dans la vie de tous les jours, de façon la plus normalement possible. D’une certaine façon, la réadaptation cardiaque c’est le mouvement?

Marisa: Oui.

Juliette: Donc, même si on a eu un accident cardiaque, le premier message qu’on peut déjà retenir, c’est qu’il ne faut pas avoir peur de l’activité physique ?!

« Même en cas d’accident cardiaque, il ne faut pas avoir peur de l’activité physique »

Marisa: Non, il ne faut pas avoir peur ! Bien sûr que lorsque quelqu’un a eu un infarctus, selon la sévérité, il faut qu’il apprenne avec des professionnels de la santé, qu’il apprenne jusqu’où il peut aller au niveau de l’effort. Il a un coeur qui est un peu sensible à l’effort. C’est pour cela qu’il y a ces programmes de réadaptation cardiaque.

Les 3 phases de la réadaptation cardiaque

Phase 1 de la réadaptation cardiaque

Juliette: On veut réadapter le coeur à l’effort, d’où l’intérêt d’aller chez les professionnels dans un premier temps. A ma connaissance, il y a trois phases pour la réadaptation cardiaque. Est ce que tu peux nous expliquer déjà la phase numéro 1 ?

Marisa: Numéro 1, c’est lorsque le patient arrive à l’hôpital. C’est la phase critique, quand il a fait son premier malaise, premier ou deuxième peu importe. Mais c’est la phase d’hospitalisation, où l’on va essayer de résoudre ce problème, vraiment dans une phase initiale. La phase 1, c’est la phase d’hospitalisation si on veut.

Juliette: Donc la réadaptation elle commence déjà au lit du patient, quand on se retrouve à l’hôpital. Vous commencez par quoi, c’est du mouvement ou … ?

Marisa: Cela peut être des exercices respiratoires aussi dans un premier temps, cela dépend vraiment de la sévérité, et de ce qu’ils ont fait comme intervention. Il y a des patients qui ont un problème tellement grave qu’ils n’arrivent pas à sortir du lit tout de suite parce que leur coeur bat trop vite ou qu’ils ont une tension artérielle trop haute. Il faut qu’on contrôle tout cela avant. Mais on peut déjà faire quelque chose. On peut déjà travailler au niveau respiratoire. On peut commencer à bouger un petit peu les bras, voir comment le corps fonctionne. On surveille tout ça avec les médecins, les infirmiers, … On regarde la progression avec aussi la prise en charge médicamenteuse qui va avoir un rôle important dans la phase 1 pour pouvoir progresser dans les exercices. Mais l’objectif principal, c’est de les bouger le plus tôt possible.

Juliette: Donc, il y a vraiment une collaboration très étroite entre l’aspect purement médical, médicamenteux, et l’aspect physiothérapie.

Marisa: Oui c’est sur !

Phase 2 de la réadaptation cardiaque

uliette: La phase numéro 2 elle correspondrait à quoi ?

Marisa: La phase numéro 2, c’est lorsque le patient sort de l’hôpital et qu’il a besoin de poursuivre son entraînement, le mouvement. Un bilan cardiologique est fait chez un cardiologue. A ce moment là, le cardiologue l’envoie chez nous en ambulatoire ou en stationnaire. Je sais qu’il y a des centres qui le font en stationnaire. Il y aura alors, toute une rééducation physique qui se met en place. Mais il n’y a pas que physique. Il aussi des patients qui ont besoin de savoir comment ils mangent parce que ils mangent mal. L’alimentation est primordiale pour notre santé, mais pas que cardiaque, mais pour tout le reste. Donc, il y a toute une prise en charge tellement grande avec ses patients …

Juliette: C’est de la rééducation et aussi de l’éducation.

Marisa: Oui. Nous, notre rôle de physiothérapeute, c’est de les réentraîner, de les faire bouger, et de leur faire comprendre jusqu’où ils peuvent aller. Ce qu’on utilise à l’entraînement, c’est la fréquence cardiaque. On regarde jusqu’où ils peuvent aller, comment ils se sentent, pour ne pas qu’ils fassent de malaise. Et puis, on essaye de progresser l’effort chaque fois que les séances avancent.

Juliette: Puis on les dirige aussi, je pense à gérer la respiration durant l’effort pour éviter que le pulse n’augmente ?!

Marisa: Oui, oui c’est tout un l’entraînement.

Juliette: Donc, à la phase 2, le cardiologue va vous faire un bilan. Selon ce bilan, vous aurez des données chiffrées, qui vont vous permettre de travailler et de rassurer le patient, et de surveiller le patient pendant un certain temps.

Marisa: Oui, il faut qu’on connaisse sans problème et qu’on sache s’il y a des indications spécifiques. Le cardiologue, par exemple ne veut pas qu’on atteigne une fréquence cardiaque X pour ce patient, donc on va respecter ça.

Juliette: Le travail de rééducation est toujours pluridisciplinaire, mais est-ce surtout à la phase 2 qu’on va avoir les diététiciens ou le psy ou d’autres professionnels, ou c’est durant toute la réadaptation ?

Marisa: Ça pourrait déjà commencer dans la phase 1, la phase d’hospitalisation. Mais très souvent, le temps est tellement court qu’on n’a pas le temps de le faire. Ou alors, les diététiciennes ne sont pas tout de suite disponibles, ou bien ils ont un abordage tellement court qu’ils n’ont pas le temps de tout leur dire, ou de tout mettre en place.

Juliette: Elle dure combien de temps à peu près cette phase 2. Y-a-t-il y a un temps déterminé ?

Marisa: Alors ce sont 30 séances de physiothérapie chez nous, trois fois par semaine, donc trois à quatre mois. En stationnaire je pense que ça dure six semaines environ.

Juliette: Donc, ça veut dire que pendant toute la phase 2, le patient peut être demandeur, et c’est à ce moment là qu’il devrait ou qu’il faut qu’il soit demandeur d’aide supplémentaire auprès de vous pour faire intervenir des collègues.

Marisa: Après, nous on peut aussi leur proposer de l’aide. Parce que lorsqu’on connaît le dossier du patient, on sait déjà si c’est un patient qui a un peu de poids , qui a un IMC un peu élevé. Ou si c’est un patient qui a déjà eu une aide psychologique, il faut peut être voir si il a encore cette aide psychologique, si il en a besoin ou autre. Si c’est des fumeurs, voir si ils ont besoin d’aide. Très souvent, lorsque les fumeurs ont un infarctus, ces patients là, et ils arrêtent directement de fumer.

Juliette: C’est le traumatisme qui fait l’élément déclencheur.

Marisa: Excat. Et souvent, ils n’ont pas le réflexe de demander de l’aide. Et là, on les informe qu’on on a des tabacologues à l’hôpital, des psychologues. Et normalement, ils acceptent de l’aide, un premier rendez vous, en tout cas. Et puis ils viennent les voir ou ils prennent rendez vous par téléphone.

Juliette: C’est là où on voit quelque part que notre métier de physiothérapeute, il est global. On traite le patient dans sa globalité. Même si on ne fait pas tous les métiers, notre métier, ça reste physiothérapeute ; On est à l’écoute du patient et c’est aussi à nous d’amener le patient, à aller voir des collègues, que ce soient les psy et que ce soit les nutritionnistes …

Marisa: Mais je pense que les autres collègues ont aussi un peu ce rôle.

Juliette: Oui, la sphère médicale. Nous, on a accès plus facilement aux patients, plus longtemps ?!

Marisa: Après c’est vrai qu’ils passent beaucoup de temps avec nous. Donc on a cette chance de pouvoir les voir pendant deux heures, trois fois par semaine. On discute beaucoup, donc on connaît davantage leurs besoins.

La phase 3 de la réadaptation cardiaque

Juliette: ça c’est intéressant. Et la phase numéro 3 correspond à quoi ?

Marisa: Alors la phase numéro 3, c’est lorsque le patient est passé par la phase 1, la phase 2 et qu’il a pris l’autonomie de se prendre en charge tout seul.

Juliette: Il a tout appris. Il est autonome dans la poursuite de sa rééducation.

Marisa: C’est ça. Donc, le but, c’est qu’il choisisse une activité, un endroit où la faire, avec une régularité par semaine.

Juliette: C’est là où on rappelle que l’important, c’est la régularité. Si on veut obtenir des résultats, il faut une certaine régularité.

Marisa: Oui ça ne serre à rien de faire une par mois …

Juliette: Vous vous avez maintenant la phase 3 à l’hôpital de Rennaz ?

Marisa: Oui, on a des APA qui travaillent avec nous. Ils nous aide à faire la phase 2 aussi, en travaillant en binôme avec nous. Et c’est eux qui prennent en charge la phase 3. En ce moment, ils font une fois par semaine, une heure de temps pour les patients qui veulent faire avec nous. Ils font en fin de journée, surtout pour que les gens qui travaillent puissent venir. Ce sont des groupes donc c’est plus stimulants pour eux. Et comme c’est à l’hôpital, je pense qu’ils sont un peu plus rassurés.Juliette00:10:36La réadaptation est forcément en groupe ou peut être en individuel.Marisa00:10:40Elle peut être en individuel.

Juliette: C’est selon la gravité du patient ou le besoin du patient ?

Marisa: Oui, il y a des patients qui sont très faible et qui n’arriveraient pas à suivre un groupe, au niveau des efforts. Donc, à ce moment là, c’est mieux de les prendre en individuel pour avoir des exercices plus adéquats et être vraiment tout le temps à côté. Parce qu’avec un groupe, on est là, mais on les voit en global, on passe souvent vers les uns et les autres. Mais des fois, on a le dos tourné sur ceux qui sont en train de faire du vélo, par exemple derrière nous. Donc on n’est pas rapprochés tout le temps, autant qu’en individuel.

Juliette: Donc on peut passer à côté. En même temps, l’émulision de groupe, elle est intéressante.

Marisa: Oui, c’est beaucoup plus stimulant et les patients apprécient énormément.

Juliette: Ils font un partage d’expérience, ils se rendent compte qu’ils ne sont pas tout seul.

Marisa: Oui c’est ça !

Evolution des patients ces dix dernières années

Juliette: ça fait longtemps que tu fais de la réadaptation cardiaque. Est-ce que tu as vu une différence dans les patients ? Est-ce qu’ils sont plus jeunes, plus vieux, plus gros, avec plus de comorbidités, plus de femmes? As-tu observé un changement particulier ou pas du tout, sur les dix dernières années ?

Marisa: Pas forcément… Des jeunes, ça dépend quel âge tu entends par jeune ?

Juliette: Mais ça dépend toujours quel âge on a (rire).

Marisa: 50 ans, c’est jeune, 60 ans aussi. Et ça dépend.

Juliette: Vous avez plus de 40 ans, vous avez plus du 70-80 ans ?

Marisa: On a plus de 50 ans.

Juliette: OK, plus de 50 ans.

Marisa: Oui, je pense que les jeunes, maintenant ont tellement d’informations qu’une bonne partie arrive à avoir une hygiène de vie plus saine qu’il y a 30 ans en arrière. Mais on a aussi des jeunes, mais moins fréquemment, heureusement. Mais c’est très souvent des pathologies génétiques. Ce n’est pas des pathologies dégénératives, si on peut le dire comme ça …

Juliette: Est-ce qu’il y a une différence entre les hommes et les femmes par rapport au risque cardiaque ? Est ce que vous avez plus de patientes ? Est ce que vous avez plus de patients ?

Marisa: On a clairement plus de patients hommes que de femmes. Les femmes, elles sont un peu protégées par les hormones, jusqu’à la phase initiale de la ménopause. Et puis après, les risques sont les mêmes que les hommes. Donc on n’a pas très souvent des femmes jeunes. Même dans les âges un peu plus avancés, on a qu’en même un pourcentage plus petit que les hommes. Je ne sais pas pourquoi. Peut-être parce qu’elles aiment la vie à la maison et qu’elles s’occupent un petit peu moins d’elle. Je ne sais pas. Et il y a aussi le fait que les femmes aient des symptômes un peu différents des traditionnels quand elles font un infarctus. Et très souvent, on arrive à les récupérer un peu tard. Donc, ça, c’est un facteur aussi qui fait que on est moins de femmes.

Juliette: C’est à dire qu’elles arrivent en post accident un peu plus blessées ?

Marisa: Oui. Et puis ça se peut qu’elle fasse un arrêt cardiaque parce que on n’a pas détecté le problème cardiaque à temps.

Juliette: Il y a aussi le fait que les femmes ont tendance à être moins plaintives. Je pense que tout le monde sera d’accord là dessus. Mais en même temps, dans notre éducation, l’infarctus, la douleur à la poitrine, etc…, c’est surtout les hommes. Les hommes, on pense directement infarctus, alors que la femme pas forcément. C’est peut être un a priori de ma part, mais c’est le sentiment que j’ai. Donc peut être aussi qu’elles font moins de prévention, qu’elles se préoccupent moins et qu’au final elles appellent peut être trop tard.

Marisa: Oui, mais tu sais, Juliette, les femmes, elles ont vraiment des symptômes très atypiques souvent. J’ai eu le cas, je me souviens, il y a quelques années, d’une patiente qui est venue aux urgences parce qu’elle avait des douleurs affreuses à l’estomac. Elle est restée, je ne sais pas combien de temps à l’hôpital pour ça. Et au final, c’était un infarctus qu’elle était en train de faire.

Juliette: Elle avait quel âge ?

Marisa: Je me souviens plus, mais elle était, je crois, 50/60 par là autour.

Juliette: On cherchait autre chose.

Marisa: On cherchait autre chose qu’un problème cardiaque.

Juliette: Et puis, l’ECG n’était peut être pas si flagrant que ça. Mais comme quoi, souvent, au niveau médical, on peut passer à côté de choses sans forcément s’en rendre compte. ça c’est encore un autre débat sur le tri. Faire le tri aux urgences, je pense que ce n’est pas facile ! Après, c’est aussi la problématique des gens d’être trop plaintif ou pas assez plaintif. Des fois, il faut savoir insister, mais certains insistent trop. Et après au niveau médical, on ne sait plus si c’est du sérieux ou pas.

Les facteurs de risques cardio-vasculaires

Juliette: Est-ce que tu peux nous citer les facteurs de risque cardio vasculaires? A quoi on doit faire attention ?

Les facteurs de risques sur lesquels on peut agir

Marisa: La sédentarité, on peut on peut corriger ça, tout le monde pour corriger ça. Le tabac. Ceux qui fument, je sais que c’est difficile d’arrêter de fumer, mais chercher de l’aide. C’est tellement important. Il n’y a pas que les problèmes cardiaques qui surviennent du tabac, il y en a plein d’autres.

Juliette: Je rappelle que le sevrage à la nicotine, c’est 15 jours, sauf erreur. Donc, ce n’est pas si énorme que ça. Après, c’est facile à dire quand on le vit pas. Et par la suite, c’est vraiment psychologique, avec une notion de perte d’habitudes.

Marisa: Mais c’est pour ça que je dis il faut demander de l’aide.

Juliette: Il faut demander de l’aide. Et pour moi, étant une ancienne fumeuse, je pense qu’il faut aussi se préparer. Il y a des gens qui ont peur d’arrêter de fumer parce qu’ils ont peur de grossir. Et c’est vrai qu’en général, le métabolisme de base est plus élevé quand vous fumez. Donc, lors de l’arrêt du tabac, en général, vous prenez 5 kilos. Mais ça peut être aussi une motivation pour regarder son alimentation. Et puis, les bienfaits de l’arrêt du tabac sont clairement démontrés.

Marisa: Tu te sens mieux maintenant que tu as arrêté ?

Juliette: Ah oui ! Pour rappel, quand on arrête avant 40 ans, on récupère la courbe de survie de quelqu’un qui n’a pas fumé. Cela ne veut pas dire que votre système respiratoire n’a pas souffert et qu’on ne voit pas de conséquences. On en voit, on peut en voir. Mais il faut garder en tête que l’arrêt du tabac avant 40 ans vous ramène à une courbe de survie classique. Et qu’en même temps, cela peut être que du bien pour beaucoup de choses. Et peut être pour le portefeuille aussi. Donc, il y a le tabac …

Marisa: Il y a le tabac. Le cholestérol, l’hypertension, ça c’est des choses qu’il faut contrôler chez le médecin et un autre …

Juliette: Le stress …

Marisa: Et oui le stress. Et oui, il y a plein d’infarctus qui se font sous stress. Le stress surtout, le stress cumulé. Il faut vraiment essayer de contrôler ça et encore une fois, chercher de l’aide si besoin.

Juliette: Surtout à l’époque actuelle. Parler, parler et éviter d’accumuler de la surcharge mentale qui fait qu’à un moment ça ne va plus.

Les facteurs de risques sur lesquels on peut agir : La sédentarité, le tabac, l’hypercholestérolémie, la tension artérielle, l’alimentation, le surpoids, le diabète, l’alcool, et le stress.

Les facteurs de risques sur lesquels on ne peut pas agir

Juliette: Par contre, il y a des facteurs aussi sur lesquels on ne peut pas forcément agir. Il y a de l’hérédité, à ma connaissance ?

Marisa: Oui, il y a l’âge aussi. On ne peut pas le changer. Les facteurs génétiques, tu viens de le dire.

Juliette: Le fait d’être un homme, c’est un facteur un peu plus important que celui d’être une femme, sachant qu’on est protégé avant la ménopause. Après la ménopause de souvenirs, il y a aussi la cholestérolémie qui a tendance à augmenter. Donc, c’est pour ça qu’on a peut-être tendance à prendre un peu de poids. D’où l’intérêt de l’alimentation avec l’âge qui avance. L’intérêt du mouvement avec l’âge qui commence.

Marisa: Plus l’âge avance, plus on a besoin de bouger !

Juliette: Et de prendre soin de soi.

Les facteurs de risques sur lesquels on ne peut pas agir : Hérédité, âge, sexe masculin.

Juliette: Est ce que il y avait d’autres choses que tu voulais nous partager par rapport à la réadaptation cardiaque?

On a compris qu’il y avait trois phases. Qu’on commençait le mouvement dès la phase 1, dès le lit de l’hôpital, que ce soit un petit mouvement ou un grand mouvement.

On a compris aussi qu’il faut éviter le stress, éviter les facteurs de risques externes du type le tabac par exemple. Qu’il existe des centres, que vous êtes là aussi pour aider les patients.

Comment intégrer un groupe de réadaptation cardiaque

Juliette: Tous les patients peuvent-ils venir vous voir ? Alors je ne parle pas forcément en phase 1. Imaginons qu’on ait un problème cardiaque, qu’on est suivi par notre cardiologue, et qu’on sente que l’âge avance, qu’on commence a avoir du mal à souffler, à respirer à la montée des escaliers. Est ce qu’on peut rentrer dans un cadre de réadaptation cardiaque?

Marisa: Oui. Il faut que le cardiologue soit d’accord, parce que tant que le cardiologue n’est pas d’accord, on ne peut pas le faire. On ne peut pas prendre l’autonomie de dire vous, vous venez en réadaptation cardiaque. On a besoin d’un bilan et on a besoin d’être sûr que la patient a tous les médicaments qu’il faut pour qu’il puisse faire des efforts contrôlés.

Juliette: Etre sûr que tout est bien stabilisé.

Marisa: Oui bien stabilisé, exactement. Si des choses ne sont pas contrôlées, on ne commence pas.

Centre spécialisé, physiothérapeute, coach ou fitness ?

Juliette: A partir du moment où le patient est stable et que les choses vont bien, il peut toujours se tourner vers les physio pour l’amener à être autonome dans sa réhabilitation à l’effort. Est-ce qu’un patient cardiaque qui est stabilisé, qui a eu son problème cardiaque il y a plusieurs années, qui est suivi par son cardiologue et qui voit qu’avec le temps sa capacité diminue, qu’il a des difficultés à monter les escaliers et qui a entendu parler de cette réadaptation cardiaque ; Est ce qu’il peut venir vous voir, vous? Ou est ce qu’il peut aussi aller voir des physio en cabinet privé ou dans des centres ?

Marisa: Oui. Alors oui, tout à fait. Il faut juste qu’il refasse un bilan chez le médecin, ou le cardiologue, et qu’il soit suivi par des professionnels de la santé dans un premier temps.

Juliette: A partir du moment où on est sûr qu’au niveau médical, les choses sont stables, il peut faire une réadaptation, une rééducation comme tout le monde. En poussant un petit peu, arrivé à un certain stade d’autonomie, puisqu’en fait, c’est ce qu’on cherche à leur apprendre avec la réadaptation cardiaque, est ce que par la suite, on les incite à aller au fitness tout seul ou à s’aider d’un coach, d’un Personal Trainer?

Marisa: Soit l’un, soit l’autre. Moi, ce que je leur dis : ils ont le choix, ils peuvent choisir l’activité qu’ils veulent faire par la suite puisque ils savent maintenant jusqu’où ils peuvent aller en termes d’effort. Fitness ou un coach ? Moi, je préfère toujours qu’il y ait une surveillance. Mais s’ils veulent allez en fitness, ils sont libres de le faire. S’ils veulent être suivis par un coach, ça me va aussi.

Juliette: Oui, le principal, c’est de continuer à bouger, de faire une activité physique. Et d’utiliser les coachs ou les personal trainer pour se motiver si besoin. Mais en contrepartie, il faut aussi prévenir. Parfois, les gens oublient, une fois qu’ils ont l’impression d’être en bonne santé. C’est toujours intéressant de prévenir de ses antécédents cardiaques qu’on soit au fitness ou autre.

Ne pas oublier de prévenir de ses antécédents cardiaques !

Marisa: Ce n’est pas la période où ils ont eu la réadaptation cardiaque qui va faire toute la différence, c’est le après. Donc, c’est du long terme.

Juliette: C’est ce qu’on disait sur le sport. Faire une fois par mois, ça sert à rien. C’est la même chose. C’est un nouveau départ. Il y a eu un accident, et on fait un nouveau départ en mettant toutes les chances de notre côté : du mouvement, de la nutrition, et no stress … Et puis, on essaye de profiter. Est ce que tu aurais un autre message à faire passer, à part le mouvement?

Marisa: Moi, comme physio, je dis à tout le monde il faut bouger, tout le monde est capable de le faire pour votre santé. Et maintenant que vous avez entendu les facteurs de risque, si vous en avez un ou plusieurs d’entre eux, chercher de l’aide. Et puis, ayez une vie saine, une hygiène de vie saine, c’est tellement facile. Il faut juste la mettre en route et c’est simple.

Juliette: La mettre en route. Ça devient une habitude et on se rend compte que ça fait du bien.

Juliette: Merci Marisa pour toutes ces informations. Et puis pour nous à bientôt sur le podcast de CapRol.