L'initiative d'un APAS de l'HRC pour faire bouger les patients - CapRol

 | 2020

L’initiative d’un APA de l’HRC pour faire bouger les patients en chambre durant la crise du COVID

CapRol a voulu interviewer Gabriel Duchemin pour qu’il nous explique l’initiative qu’il a mis en place au sein de l’HRC durant la crise du COVID. Voilà ses réponse à nos questions.

Bonjour Gabriel peux-tu te présenter rapidement ?

Je m’appelle Gabriel Duchemin, j’ai 26 ans et j’ai grandi à Rivaz, au bord du lac Léman dans le canton de Vaud.

Je travaille à l’Hôpital Riviera-Chablais (HRC) en tant que moniteur en activités physiques adaptées et suis dans le service de physiothérapie.

Je suis un mordu de sport, ce qui m’a amené à faire des études en sciences du sport à l’Université de Lausanne durant 5 ans. Ce cursus m’a permis d’acquérir des compétences pratiques et théoriques dans le domaine de la santé. 

Passionné de sport, je touche à tout, que ce soit le triathlon, la gymnastique, l’athlétisme, les sports nautiques, les sports d’hiver, les sports de balles, le trekking, les sports de montagne et j’en passe. 

En somme, j’adore bouger et transmettre cette passion. Je suis également animé par le fait de mener des projets et des initiatives dans le domaine de la santé. 

En tant que titulaire d’un master APAS (activité physique adaptée) comment se fait-il que tu te sois retrouvé à travailler en soins aigus à l’HRC ?

Depuis des années, j’avais à cœur d’apporter l’activité physique et le mouvement en milieu hospitalier. Cela me motive d’autant plus lorsque je vois des patients se remettre à bouger. 

Je pense par exemple aux personnes suivant un programme de rééducation cardiaque qui ne se pensaient plus capables de faire des efforts intenses. Cela leur redonne confiance et leur offre de nouvelles possibilités de faire de l’activité physique à leur niveau, et de façon adaptée. 

Je considère que l’activité physique est un très bon médicament, pour ne pas dire le meilleur.

J’ai par ailleurs longtemps hésité à faire des études en médecine du sport. Ma mère et mon médecin de famille m’y encourageaient fortement. C’est au final ma passion pour le sport qui a fait que j’ai suivi un cursus en sciences du sport et en psychologie. J’ai donc fait un bachelor suivi d’un master, où j’ai pu étudier l’anatomie, la physiologie, la biomécanique, la biologie, la psychologie du sport et autres branches en lien avec la santé humaine.  

Je tenais vraiment à trouver une façon de concilier les domaines du médical et du sport. Le cursus APAS me paraissait être le plus adéquat pour atteindre cet objectif.

La profession est récente en Suisse, le master APAS existant depuis un peu plus de 10 ans. Cela en fait une profession en pleine définition. Il faut savoir se valoriser et monter qu’on a des compétences et un savoir-faire à apporter. 

Durant toutes mes études, l’armée cherchait à me convoquer. Je me suis dit qu’il fallait que je trouve un moyen pour allier l’obligation de servir mon pays avec quelque-chose d’utile d’un point de vue professionnel. C’est pour cela que j’ai choisi de faire un service civil et d’envoyer une demande spontanée à l’HRC. Je leur ai dit que j’avais tels diplômes, telles expériences, des projets à proposer et que j’avais un service civil de 365 jours à accomplir. Ils n’avaient donc pas besoin de me rémunérer. 

J’ai envoyé ma demande à deux hôpitaux et les deux m’ont envoyé des réponses positives, l’hôpital de Lavaux et l’HRC. 

On a estimé que mon activité se rapprochait de celle d’un physiothérapeute et j’ai eu des entretiens. Suite à ces entretiens, j’ai immédiatement choisi l’HRC. J’ai fait ce choix par instinct, car j’ai rencontré les responsables physio, des personnes incroyables avec de belles idées. Je suis heureux chaque jour d’aller travailler à l’hôpital et très fier de faire partie de cette équipe extraordinaire que je remercie du fond du cœur. 

Voilà donc comment je me suis retrouvé en soins aigus pour accomplir mon service civil. Comme cela s’est bien passé, j’ai reçu une proposition pour un poste à 100% et c’est top !

Avec quels types de patients travailles-tu au sein de l’HRC ?

La population de patients avec laquelle je travaille est assez variée. Il y a des patients en gériatrie, oncologie, neurologie, pédiatrie, chirurgie, cardiologie, soins palliatifs ou en situation psychosociale difficile. 

La rééducation cardiovasculaire occupe par ailleurs une grande place dans mon emploi du temps. J’ai également des expériences et des futurs projets en santé au travail. 

C’est assez marrant de se dire qu’indirectement, je travaille un peu partout dans l’hôpital. En effet, nous avons créé, en collaboration avec mes supérieurs et le service informatique, deux vidéos d’exercices qui passent chaque heure dans les chambres de l’hôpital. Cela motive bien les personnes à bouger en chambre. Je suis comblé ! 

J’ai la chance de communiquer avec les physiothérapeutes travaillant dans différentes unités. Ils me confient des patients qui ont besoin de travailler spécifiquement sur certains aspects, notamment le renforcement, l’endurance, la relaxation ou certaines modalités de la coordination comme l’équilibre. Il m’arrive de proposer du ludique ou des séances en groupe lorsque j’en ai la possibilité. J’utilise mon imagination pour trouver des exercices stimulant les personnes à faire de l’activité physique. 

Comment est venue l’idée de mettre en place des vidéos pour les patients COVID ?

Durant la période du COVID, j’ai eu la chance de continuer à travailler. C’était important pour moi de lutter contre cette crise à mon échelle en apportant ce que je pouvais. C’est justement de là qu’est parti l’idée de diffuser des vidéos en chambre. Les visites n’étaient pas autorisées et les patients étaient isolés en chambre. Mon rôle fut essentiellement de lutter contre le déconditionnement et d’apporter du soutien moral lorsque le pronostic était mauvais. 

Les personnes hospitalisées bougent fatalement moins à l’hôpital qu’à domicile. Il y a toutes les activités de la vie quotidienne en moins et ils passent facilement 20-22 heures couchés au lit. Perte de force et diminution des capacités cardiovasculaires sont donc des choses fréquentes. La condition physique est susceptible de se dégrader et il est capital que la personne à risque continue de se mobiliser au cours de son hospitalisation.  

Au final, le corps c’est un peu comme de l’eau car tant qu’il y a du mouvement ça va mais lorsque l’immobilité s’installe, ça commence à sentir mauvais. On parle d’eau stagnante qui risque de croupir et c’est pareil pour le corps !

Avant le confinement, on avait émis l’idée, avec mes responsables, d’utiliser les téléviseurs. Il faut savoir que chaque lit dispose d’un écran. On s’est dit qu’il serait judicieux de s’appuyer sur la technologie pour promouvoir le mouvement et l’activité physique. Comme je l’ai dit avant, les personnes hospitalisées sont à risque de se déconditionner. Tu ajoutes à ça l’isolement en chambre et l’impossibilité de recevoir des visites et tu obtiens le parfait cocktail pour ruiner ta santé physique et ton moral. Il fallait agir rapidement et nous avons sorti la vidéo en à peine 10 jours. On s’est très bien coordonnés et on était sur la même longueur d’onde.

Lorsque le COVID est arrivé en tant que soignant as-tu eu des appréhensions, as-tu eu peur du virus ?

Du virus en lui-même pas plus que ça. Bien sûr il faut avoir peur car cela permet d’adopter des comportements adéquats et rationnels pour protéger autrui et soi-même. Sans peur ou à l’inverse en paniquant on fait n’importe quoi et on représente un danger. Il y avait des directives claires et il s’agissait de les respecter.

Personne n’avait vécu ça avant et on parlait de ce virus depuis des semaines. Avec du recul, je me sentais plus en sécurité à l’hôpital qu’à l’extérieur car au moins j’étais face à une personne diagnostiquée donc je prenais des précautions lors des prises en charge. À l’extérieur c’était plus incertain et ce semi-confinement rendait la chose un peu délicate je trouve.

Comment cette initiative a-t-elle été accueillie par tes collègues de l’hôpital et les patients ? 

Cette initiative a été très bien accueillie. Les collègues en font régulièrement la promotion en chambre. On a eu les félicitations de quelques médecins qui voient leurs patients faire de la gymnastique au lit. 

Ça me fait toujours plaisir d’aller voir les patients en chambre pour faire la vidéo avec eux. J’ai parfois l’occasion de le faire avec des patients qui sont deux en chambre et on se retrouve à trois à faire des mouvements. Certains patients demandent s’il existe un support pour pouvoir continuer à faire ces exercices à la maison. Je vais donc m’organiser pour les proposer en format papier. Je sais par ailleurs que les exercices sont sur YouTube sur la chaîne « Hôpital Riviera-Chablais ». 

Nous avons finalement sorti une seconde vidéo d’exercices qui fut tout aussi bien accueillie. Je suis ravi de voir l’engouement qu’il y a eu autour de ce projet. Cela me motive à trouver d’autres moyens pour encourager les personnes à bouger !

Que tires-tu de cette expérience ?

Que du positif ! J’ai été très touché par la confiance de mes collègues, je me sens valorisé dans mon travail. Je suis infiniment reconnaissant envers l’hôpital et envers l’ensemble du personnel qui y travaille. Donc à refaire !

Comment as-tu vécu personnellement cette période de COVID ?

Cette période ne fut pas terrible pour moi. J’ai eu la chance de continuer à travailler en apportant tout ce que je pouvais. Mon chef m’a d’ailleurs demandé si je voulais ne pas travailler pendant cette période. J’avais à cœur d’apporter mon aide donc je suis naturellement resté. 

En tant que thérapeute physique, mon activité consiste principalement à agir sur des paramètres qui sont liés à l’aspect moteur, mais il faut savoir que tout un pan de ma formation porte sur les facteurs psychosociaux. Cette période de crise m’a permis de valoriser ces compétences en apportant du soutien aux personnes qui étaient en situation de vulnérabilité sur un plan plus émotionnel.

As-tu d’autres projets à nous partager ?

Oui quelques projets, entre autres développer d’avantage l’activité cardiaque, notamment l’activité ambulatoire. Nous avons d’ailleurs, le 2 septembre 2020, lancé le projet « Benefit » à l’espace santé Valerette (pôle de physiothérapie et d’ergothérapie de l’HRC). C’est un programme de rééducation phase III pour les personnes ayant vécu un évènement cardiaque.

J’aimerais aussi aller plus loin dans un protocole destiné aux patients de 65 ans et plus en proposant des programmes d’activité physique adaptée pour valoriser les capacités de ces personnes dans leur vie de tous les jours. 

J’aimerais encore mener une étude et proposer des initiatives en santé au travail. 

J’ai encore d’autres idées donc je dois continuer à bosser dur. « Un jour en vaut trois pour qui fait chaque chose en son temps ».

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Gabriel Duchemin
APA - Thérapeute du sport

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