Michaël Tauxe, ostéopathe, nous parle du trail. CapRol
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Podcast Santé Sport de CapRol avec Michaël Tauxe Le trail

 | 2023

Michaël Tauxe, ostéopathe, nous parle du trail.

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Les intervenants

Michaël Tauxe : Ostéopathe

Juliette Corgnet : Physiothérapeute

Transcription du podcast

Juliette : Bonjour et bienvenue sur le podcast Santé Sport de CapRol. Aujourd’hui, on se retrouve avec Michaël Tauxe, ostéopathe à Sion. Bonjour Michaël. Est-ce que tu peux te présenter s’il te plaît ?

Michaël : Alors comme tu as dit, je m’appelle Michaël Tauxe, j’ai 35 ans. Je suis ostéopathe à Sion depuis 2015 en tant qu’indépendant. Je me suis spécialisé dans la prise en charge des coureurs, des patients coureurs, dans la prévention et la prise en charge des blessures en course à pied. Grâce à des formations que j’ai fait à la Clinique du Coureur.

Juliette : La fameuse clinique du coureur connue de tous !

Michaël : Oui, elle est maintenant bien reconnue. Je suis parti au mois de juin à Québec faire le cours expert chez Blaise Dubois. S’il nous écoute, je le salue.

Juliette : Tu as fait toutes les formations, tous les modules de la clinique du coureur ?

Michaël : Pas tous, Non. Car il y a certains modules, avec des thématiques qui jusqu’à présent m’intéressaient un peu moins. Tout ce qui est nutrition, ce n’est pas mon domaine, donc je ne l’ai pas fait. Je pourrais le faire d’un point de vue personnel, ça viendra, mais pour l’instant ce n’est pas le cas. J’ai vraiment axé sur les blessures en course à pieds.

Juliette : Pour pouvoir faire le cours expert, il faut quand même déjà avoir fait passablement de modules. Donc tu en a fait déjà une énorme partie ! Ils t’en reste quelques uns.

Son entraînement personnel en tant que traileur et ostéopathe

Juliette : Au niveau sport, tu fais du trail, c’est ça?

Michaël : Oui, exactement. Alors dans le privé, j’ai une compagne et un petit garçon de quatre ans. Et, je fais du trail. De la course en général, mais axée trail en compétition. Avec en moyenne six entraînements par semaine, pour aboutir aux résultats que j’espère avoir.

Juliette : Au niveau de ton entrainement, il est constitué de quoi ? Que de la course, ou tu inclus d’autres choses ?

Michaël : Dans les six entraînements par semaine, il y a en tout cas une fois du vélo, une fois du renforcement musculaire. Une à deux fois du renforcement, cela varie en fonction des semaines et de quand sont les courses. Mais ce n’est pas que de la course, non !

Juliette : Donc il faut un petit peu de tout. Il ne faut pas que courir pour être performant en trail.

Michaël : Exactement.

Qu’est-ce que le trail ?

Juliette : Est-ce que tu peux nous expliquer à quoi correspond le trail ?

Michaël : Alors le trail, il y a plusieurs définitions. Ce n’est pas clair. Qu’est-ce que le trail ? On parle de trail running, donc de la course en sentiers, donc de la course en nature. Pour la différencier de la course à pied sur route qui est de la course sur du bitume ou sur de la piste. C’est la différence. Quand tu vas courir dans un parc en ville, le long des bisses ici, en montagne, c’est du trail. Le trail ce n’est pas forcément de la course en montagne comme pas mal de gens le pensent.

Juliette : Ok, donc c’est plus général que juste de la course en montagne.

Michaël : Exactement. Après tu as vraiment la course de montagne spécifique, les formats en compétition course de montagne qui sont différents des courses de trail, c’est vraiment ce qui se passe en montagne pur. C’est de la montée, c’est que de la montée généralement. Puis après tu as encore d’autres catégories comme le sky running ou bien les kilomètres verticaux qui sont aussi du trail, mais encore spécifiquement, en haute altitude sur des trucs techniques. C’est assez assez vaste, et flou.

Juliette : Et encore plus dur !

Michaël : Effectivement.

Quelles capacités physiques pour du tail ?

Juliette : Est-ce qu’il y a une capacité physique qu’il faut avoir en plus pour pratiquer du trail en comparaison à la course sur route ?

Michaël : Alors là aussi, je crois qu’il n’y a pas de généralité. Généralement, il y a un peu des profils types quand même, mais il y a des trucs qui se regroupent j’ai l’impression. C’est vrai que sur route, on a souvent des gens qui sont assez légers, assez sveltes. Alors qu’en trail, à priori, pour encaisser les montées, les descentes, il faut un peu de masse musculaire. Maintenant, je pense que ça dépend aussi les distances qu’il y a en trail.

Juliette : S’il y a beaucoup d’endurance ou pas ?!

Michaël : Si tu allonge les distances … Disons que sur les courses rapides, c’est vrai que cette masse musculaire te coûte de l’énergie aussi en terme de rapidité donc c’est plus compliqué. On a des traileurs qui sont très bons en montagne, en montée, sur des courtes distances. Ils ont des profils type marathoniens. On voit les Kenyans sur les courses qu’ils y avaient par là, Thyon-Dixence, Sierre-Zinal, qui ont un profil type marathonien et qui performent sur des courses comme Sierre-Zinal.

Michaël : Après, si tu prends de l’ultra distance, c’est vrai que là tu as plutôt des gens qui ont des bonnes cuisses, des bons mollets pour vraiment tolérer cet effort là, qui est plus long, qui est plus géré, qui est un peu moins rapide quand même.

Juliette : Ok. Quelque part c’est pour pouvoir encaisser toute la pression exercée. Il y a toujours un débat entre la musculature protège, mais en même temps la musculature coûte, parce qu’elle coûte en poids, elle est plus lourde et elle consomme aussi plus d’énergie. Donc il faut trouver le juste milieu. Après chacun fait en fonction de sa morphologie, je pense. Si tu es plus apte à faire tel ou tel type d’activité.

Photo de Joseph Mestrallet

Michaël : Par exemple, tu as un exemple typique. Enfin tu as plusieurs exemples, mais quelqu’un comme Mathieu Blanchard, qui a quand même des bonnes cuisses, qui est performant sur des ultra distances, il a quand même fait 2 h 22 au marathon de Paris. Donc ça court quand même assez vite. Donc ils sont capables de le faire. Et puis comme je disais, à l’inverse des marathoniens qui explosent des records sur des courses en montagne qui restent assez performants, et eux, ils n’ont pas forcément de la grosse musculature. Donc il y a quand même un peu aussi un côté peut être génétique.

Juliette : La génétique et la capacité de récupération certainement. Et moi je mettrais énormément d’importance sur le mental. Au final s’ils veulent, ils peuvent. Matthieu Blanchard, s’il voulait faire son marathon, il était parti pour faire son marathon.

Michaël : C’est vrai que le mental fait énormément.

Juliette : C’est vraiment tout un ensemble !

Débuter la course à pied en version trail ou sur route ?

Juliette : Pour un débutant qui n’a jamais fait de course à pied. Toi tu conseillerais d’aller courir version trail soft ou sur route?

Michaël : Bon, un débutant,… J’y réfléchis souvent. Où il veut aller en fait, c’est surtout ça d’après moi.

juliette : Son objectif.

Michaël : Son objectif en fait. Parce que si c’est l’idée de faire un peu de course en nature, dehors, pour moi, il peut commencer directement sur du terrain type trail. Pour autant qu’il y ait une notion de progressivité vraiment assez importante, qui est sur route ou sur chemin, de ne pas de ne pas y aller trop rapidement et trop fort. Donc il pourrait commencer comme ça. Il enchaîne, il progresse gentiment, il écoute son corps et selon moi, ça doit bien fonctionner.

Michaël : Après, si tu veux entrer dans le côté, je veux m’améliorer, j’ai tout à coup un chrono sur une course parce qu’il y a un challenge familial ou autre. Je pense qu’il y a intérêt à faire de la route d’abord. Pour le côté développement de ta foulée, ta biomécanique de course. Pour travailler la vitesse. Tu fais un peu ta vitesse, tu augmentes ta VO2, tu travailles ta foulée par de l’école de course par exemple, tu fais des fractionnés, … Puis ensuite tu passes sur du sentier où là tu intègre un peu plus de volume et du dénivelé. Du dénivelé qui peut venir un peu au bout. Mais quand tu as fait cette base avant, ça peut être intéressant dans l’aspect, je veux commencer à performer.

Juliette : Peut-être aussi à sentir aussi, ce que cela provoque sur ton corps au niveau fatigabilité. C’est peut être plus facile de faire ça sur un sol plat, où tu n’as pas à gérer le sol.

Michaël : C’est peut-être plus gérable.

Juliette : Toi tu travailles un peu sur piste ou pas du tout.

Michaël : Personnellement, oui. Je fais généralement une fois par semaine la vitesse sur piste, dans les sorties de course. Donc finalement je fais du trail, une fois du vélo 1 à 2 fois du renforcement, une fois de la piste, il n’y a plus énormément de côté trail. Il ne reste pas beaucoup de séances.

Juliette : Tu travailles pour le trail !

Le travail de vitesse

Michaël : Travailler la vitesse, dans l’aspect performance. Même en trail si tu fais du dénivelé, comme on le disait avant, il faut de la musculature pour encaisser ça. Mais si tu travailles la vitesse pour les formats que je fais, … j’ai oublié de préciser que jusqu’à présent je fais des maximum de 50 kilomètres. Donc, ce côté vitesse, si tu veux faire ta meilleure performance, elle est importante. Il faut la bosser. C’est moins le cas sur de l’ultra distance je pense où tu as d’autres approches qui te permettent aussi d’aboutir à un sacré résultat.

Juliette : Donc la vitesse il faudrait vraiment la travailler sur du plat et travailler en intervalles.

Michaël : Pour moi c’est comme ça que cela se fait le plus facilement, plat piste ou plat route, effectivement.

Juliette : Ce que les coureurs du dimanche comme moi ont beaucoup de difficulté à faire, parce que c’est pas fun.

Michaël : Il faut être motivé. Il faut faire ça sous forme de challenge.

Juliette : Après il faut aimer. Mais c’est bien parce que comme tu le montres au niveau du programme, ce n’est pas : j’aime faire du trail, je ne fais pas que du trail ! Je protège en faisant du renforcement musculaire, je travaille la technicité vraiment à la limite sur piste. Tu travailles la mobilité aussi à certains moments, quand tu sens que ton corps est un peu raide. Tu fais vraiment tout l’ensemble.

Michaël : Exactement.

Juliette : C’est comme dans tout les sports. C’est ce que je rappelle souvent, les gens vont faire un sport et en fait ils sont dans ce sport là. Mais ils oublient qu’il faut préparer le corps à ce sport. Et ils ne font pas de renforcement, de mobilité et ils finissent par se blesser.

Il faut préparer son corps à son sport !

Les blessures les plus fréquentes en course à pied concernent le membre inférieur.

Juliette : Au niveau de tes patients ou de ton entourage, quelle est la blessure la plus fréquente que tu rencontres en course à pied ?

Michaël : Ça concerne vraiment les membres inférieurs, ce qui est logique.

Juliette : Il y a très peu de dos ?

Michaël : Il y en a un petit peu, mais en course à pied, ce n’est pas ce qui ressort. Quand les patients disent, je fais de la course, je me suis blessé, j’ai une douleur liée à ma pratique, pour moi, jusqu’à présent, ce n’est pas énormément de dos. Contrairement à la patientèle, parce que je ne fais pas qu’en course à pied, j’ai tous types de patients, c’est clair que les maux de dos dans la société actuelle, il y en a énormément. En course à pied, c’est pas tant le cas, c’est vraiment les pathologies plutôt genou. J’ai énormément de genou en fait, que ce soit syndrome de la bandelette ou le syndrome rotulien ou des tendinopathies …

Pourquoi plus d’atteinte du genou que de la cheville ?

Juliette : Comment tu l’expliques que ce soit plus le genou que la cheville? Est-ce que toi tu as une idée du pourquoi ?

Michaël : Je sais pas. Non, je ne sais pas. Probablement, parce qu’on n’est pas certain, mais probablement lié à la biomécanique de course des gens. Peut-être leur façon de courir, peut-être que le matériel rentre en ligne de compte aussi, qui va favoriser des mouvements de grande amplitude et des grands pas. La cadence assez basse, qui chargerait plus les articulations genou, bassin. Mais ça charge aussi le bassin. Et c’est vrai qu’il y a plus de genou parce que l’anatomie complexe du genou avec des ménisque, des ligaments croisés, …

Juliette : Des fois on n’est pas forcément très stable au niveau du genou. Mais je me dis que les gens se préoccupent beaucoup de l’entorse de cheville. Donc peut-être aussi que si tout bêtement, les gens se préoccupent tellement de l’entorse de cheville qu’ils font plus attention à leurs appuis au niveau du pied. Mais quand la force remonte, ils n’ont pas le schéma neuromusculaire de dire il faut que je stabilise mon genou. Tu vois ce que je veux dire ?

Michaël : C’est vrai que la cheville, elle fait peur, liée à l’entorse. C’est clair, quand tu cours sur sentier, c’est le premier truc. Et effectivement, ils ont probablement peur de ça car c’est hyper connu.

Juliette : Ils font peut-être plus attention.

Michaël : Plus de focus.

Le syndrome de l’essai glace

Juliette : La pathologie nommée le syndrome de l’essuie glace est très connue. Est-ce que tu peux l’expliquer ?

Michaël : Le syndrome de l’essuie glace ! Donc, il y a une bandelette sur l’extérieur de la cuisse qui est tendue par un muscle, le tenseur du facial lata (TFL). Jusqu’à présent, on a appelé ça syndrome de l’essuie glace parce qu’on pensait que c’était dû à des frottements tel un essuie glace.

Michaël : Il semblerait que ce ne soit pas le cas. Je crois que c’est assez débattu encore jusqu’à présent. Mais il semblerait que ça soit plus un phénomène de trop de tension et trop de compression au niveau de la bourse qui gère le plan de glissement. Qu’il y ait trop de compression sur ça et que cela crée une irritation et une inflammation de cette zone. Donc, c’est une problématique, qu’on appelle de répétition. C’est une problématique qui est hyper fréquente chez les coureurs route, qui vont tout à coup faire plus, plus de volume, plus d’intensité, trop vite, trop fort on va dire. Et du coup, ils irritent cette zone, parce qu’il y a ce mouvement répétitif. Ça se voit aussi en descente sur les trails, des gens qui commencent à faire beaucoup de descentes, qui ne sont pas adaptés encore ou qui ne travaillent pas en renforcement à côté pour pallier un peu ça. Ils peuvent vite développer cette problématique. Contrairement au syndrome fémoro-patellaire, ou au syndrome rotulien qui est plus un problème de charge. Là on en a un peu moins sur route j’ai l’impression. Il y en aura toujours, mais c’est plus le côté j’ai fait trop d’intensité, j’ai été trop rapide, que ce soit en montée, en descente ou sur plat.

Le syndrome de l’essuie glace est un problème de répétition. Contrairement au syndrome fémoro-patellaire ou syndrome rotulien qui est un problèmes de charges.

Juliette : Il y a toujours cette notion de progression, où le corps doit s’adapter à l’effort qu’on lui demande. Il faut qu’il y ait un certain effort pour avoir une adaptation. S’il n’y a pas suffisamment d’effort, il n’y a pas d’adaptation. D’où l’intérêt des fois de faire des entraînements sur piste pour travailler la vitesse, etc. Mais il faut quand même que ce soit progressif, il faut s’écouter.

Michaël : Il y a cette phrase le corps s’adapte dans la mesure où le stress appliqué n’est pas plus forte que ses capacités d’adaptation. Ça, c’est la clinique du coureur, ils la disent. Et c’est vrai !

Le corps s’adapte dans la mesure où le stress appliqué n’est pas plus grand que sa capacité d’adaptation.

La clinique du coureur

Juliette : Par contre sur une pathologie type essuie glace, qu’est-ce qu’on doit faire dans un premier temps ou quel symptôme doit-on surveiller ? Par exemple quand tu as une douleur sur la face externe du genou, que tu as couru, que tu sais que tu n’as pas été super progressif, que tu as un petit peu abusé. Est-ce que tu dois directement m’inquiéter ? Est-ce que tu dois t’arrêter ? Qu’est-ce que tu préconiserai ? Alors après c’est toujours pareil, on n’a pas le patient en face. Là on parle de généralités, on essaye d’amener des réflexions. Selon le patient, les choses à faire sont souvent différentes. Mais de façon générale, comment tu décrirai la chose?

Il est important d’écouter sa douleur

Michaël : Bon, moi j’accorde beaucoup d’importance à cette notion de douleur, que ce soit là ou ailleurs. Pour moi, dès qu’il y a une douleur, il faut la prendre vite au sérieux. Parce que le corps nous indique qu’il y a eu quelque chose qu’il ne tolère pas. Que ce soit un syndrome de l’essuie glace, on commence à avoir mal, c’est ok. J’ai mal, pourquoi ? Déjà essayer de comprendre un peu ? Est-ce que j’ai fait quelque chose de différent ? Est-ce que j’ai changé quelque chose ? Est-ce qu’il y a eu une modification qui me permet déjà de comprendre ? Si c’est le cas, tant mieux. Parce qu’ainsi on met le doigt assez vite dessus.

Michaël : C’est peut être un repos, très rapide le repos, jusqu’à ce que la douleur se calme. Et puis reprendre progressivement, sans répéter les mêmes erreurs, forcément. Après, si on n’a rien changé, ça arrive aussi. A priori, les patients disent qu’ils n’ont rien changé et qu’ils ont mal. Il faut prendre encore un peu plus de recul et de voir dans leur situation. Il y a probablement un changement, que ce soit même au job, dans leur vie privée, etc… et qui s’accumule avec la charge qu’on a avec le sport en question. Et ça il faut la prendre en compte.

Michaël : Maintenant c’est vrai que lorsqu’il y a une douleur qui est là et qui peine un peu à passer ou qui revient, même si on a fait un jour de pause, deux jours de pause ou quelques jours, je pense que d’aller vite consulter un professionnel de la santé qui saura aiguiller sur ce que c’est et comment la prendre en charge. Parce que dans ces pathologies là, je parlais de répétition ou de surcharge. On ne va pas forcément préconiser la même chose pour aller vite mieux. Moi je ne suis pas partisan du fait de stopper, de ne plus rien faire, repos six semaines. Dans le monde médical, on entend souvent le nombre six. Il est assez marrant six semaines, six mois…

C’est quoi cette histoire de 4-6 semaines ?

Michaël : Et pourquoi, en fait il y a une douleur, il faut faire six semaines de pause ?Avec la course, ne plus rien faire. Ça, je ne suis pas forcément pour, parce qu’il y a une désadaptation qui est énorme. Après ça va mieux, c’est clair qu’on ne fait plus rien, donc ça va mieux. Mais le patient, il recourt et puis il recourt un petit peu moins que ce qu’il faisait avant par exemple. Mais très vite, ça revient en fait.

Juliette : Parce qu’il s’est totalement adapté et qu’il devrait courir beaucoup, beaucoup, beaucoup moins. Mais on a la même chose en physio. On le voit assez fréquemment sur des pathologies plus ou moins graves. Au final, ils immobilisent les gens, 4 à 6 semaines, et vous allez voir le physio au bout de six semaines. En fait moi je me retrouve parfois, quand les patients me connaissent, ils m’appellent et selon la pathologie, je leur dis vous venez à J1. Il y a plein de choses qu’on ne va pas faire. Parce qu’au niveau médical, personnellement, je pense qu’ils ont, ils ont mis en place des protocoles de sécurité. Ils font une généralité sur les gens et par sécurité ils immobilisent ou ils mettent une attelle pendant 4 à 6 semaines sans explication autre parce qu’ils n’ont pas le temps.

Juliette : Donc ce n’est pas pour les dédouaner mais en fait ils se sécurisent. Alors que quelque part, c’est vrai que si vous pouvez avoir accès à un professionnel de santé à J1 J2, vous êtes blessé, le professionnel va pouvoir avoir un regard plus rééducationnel. Et dire l’attelle oui, mais vous pouvez l’enlever pour faire cet exercice par exemple. Après vous remettez l’attelle. Le médecin il n’a pas le temps et quelque part il se dit que le patient va mal faire l’exercice.

Juliette : Souvent c’est un peu le problème. Et nous on se retrouve, avec des gens qui sont complètement enraidis. Où ensuite on va perdre du temps à récupérer des amplitudes articulaires. Et ça c’est un peu problématique. Mais je ne suis pas sûr qu’on ait une solution idéale d’un point de vue prise en charge médicale. Parce qu’ils sont obligés de suivre des protocoles. Et il y a tellement de différences entre les sportifs athlètes, des sportifs de base et les gens sédentaires, que c’est compliqué.

Michaël : D’où le fait que ce soit ostéo, physio ou coach, qu’ils aient ces notions là c’est important. D’échanger, discuter, d’écouter et après d’éduquer. C’est vraiment de l’éducation.

Juliette : On a un rôle d’éducation. Et puis après les gens, comme tu l’as dit tout à l’heure, quand ils se blessent, quand il y a une douleur, ce que je trouve intéressant, c’est de ne pas se dire j’ai mal, je me suis blessé. C’est de dire, tiens, qu’est-ce qui a changé ? Et ce n’est pas le premier réflexe. Nous, c’est notre premier réflexe parce qu’on est thérapeute. Mais pour les gens au quotidien, ce n’est pas leur premier réflexe. C’est directement de se dire mon Dieu, je me suis blessé, il faut que j’aille voir le médecin. Oui, c’est bien d’aller voir le médecin, mais déjà si vous arrvez vers un thérapeute en lui expliquant un petit peu votre propre analyse et ressentis, le diagnostic est déjà plus facile. Et après par la suite, c’est de discuter avec coach, ostéo, physio ou autre.

Juliette : Et pour moi c’est le patient qui doit faire qui doit faire ses choix. Le médecin il a dit quatre semaines d’attelle. Si on discute et qu’au bout de deux semaines on considère ou que moi par exemple, je considère qu’il peut l’enlever, c’est au choix du patient de l’enlever ou pas. Après le médecin, il a donné ses indications, moi j’ai donné mon ressenti et le dernier décideur, ça devrait, pour moi, être tout le temps le patient. Mais c’est vrai que pour ça il faut que tout le monde lui apporte l’éducation qu’on peut lui donner, avec les regards différents.

Deux exemples de blessures durant le cours d’experts au Québec

Michaël : On a eu un exemple à Québec, enfin même deux dans la cohorte où on était. On était quinze à suivre le cours expert, il y a eu le trail là-bas de la clinique du coureur durant cette période. On l’a un peu tous fait, sur plusieurs distances et on a eu deux cas de fracture parmi les quinze. Il faut savoir que là-bas ce n’est que des racines, c’est du trail, c’est en forêt et tu ne mets pas souvent le pied sur de la terre. C’est que de la racine, c’est hyper technique. Peut-être qu’on n’est pas habitué, mais on a eu un cas de fracture de la base du cinquième métatarsien et une fracture de la fibula.

Fracture du 5ème métatarsien

Michaël : Et là du coup, c’était intéressant parce qu’on était quinze jours ensemble. C’était tout au début en plus. On a fait des cas cliniques avec eux. Le cas de la fracture au niveau méta, il y a quand même une radio qui a été faite pour voir où c’était. Sachant que ça peut être dans ce cas là une fracture de stress, et que c’est une zone à moins bon pronostic. Il a été immobilisé.

Juliette : Il était en décharge ?

Michaël : Il était avec une botte de décharge. Durant ces quinze jours, vu qu’on avait beaucoup d’activités en course à pied, alors c’est clair que lui ne pouvait plus courir. Mais il a tout compensé en vélo. Il a fait du vélo avec sa botte de décharge, etc. L’idée c’était que dès qu’il avait moins la douleur, c’était d’enlever. Après il est retourné chez lui, et on a eu des feedbacks. Il n’a pas attendu ce délai de six semaines. On a eu des échanges avec un ortho québécois là-bas qui disait que 6 c’était le chiffre miracle en médecine. Étant physiothérapeute, il était peut-être un peu plus protecteur de par son rôle, mais que c’était valable de faire aussi en fonction de la douleur. Et c’est vrai qu’il a assez vite enlevé sa décharge, il a assez vite rechargé le pied et maintenant ça se passe bien, alors qu’il n’a pas suivi ce protocole qu’il suivrait ici.

Suspicion de fracture de la fibula

Michaël : L’autre cas de la fibula, là il n’y a rien qui a été fait. En gros, c’était écouter les symptômes. C’est un très très bon coureur d’ailleurs.

Juliette : C’était une fracture ou c’était une fissure ?

Michaël : Alors ce n’est pas déplacé. On n’a pas eu de radio. Mais effectivement, il y a une suspicion de fracture assez notable.

Juliette : Ils n’ont pas fait de radios ?

Michaël : Non, Ils n’ont pas fait de radios. Lui, il pouvait marcher. Alors il marchait, il boitait un peu, il avait un peu mal mais c’était gérable. Il a fait pas mal de vélo et puis maintenant il est reparti comme avant. C’était au mois de juin, donc ça date un petit peu. Mais j’ai souvenir qu’assez rapidement après il nous a fait des vidéos photos de lui. Il habite sur l’île de la Réunion, il a fait des vidéos photos de lui en train de recourir etc… Alors qu’il n’a rien suivi en terme de protocole médical.

Juliette : À écouter sa douleur.

Michaël : Il a écouté sa douleur. Voilà, c’est peut-être une prise de risque parce que s’il avait mal écouté …, lui il est dans le domaine donc il connaît bien. C’est vrai que c’est un patient assez facile, mais ça aurait pu être plus risqué si effectivement il gambadait, qu’il avait toujours mal, que ça consolide mal…

Juliette : C’est ça un peu la difficulté et c’est pour ça que c’est le patient pour moi qui doit qui doit faire le choix. Mais là tu es face à des physio qui connaissent bien leur corps, qui connaissent les pathologies, qui ont un recul avec des patients. Donc le fait d’avoir eu des patients, d’avoir eu les ressentis des patients, ça fait quand même une expérience. Ils ne l’ont pas vécu, mais ça reste une expérience intéressante. Alors que face à des patients X, qui n’ont pas forcément de schéma corporel, c’est plus difficile. Ou quand tu prends à l’inverse des sportifs qui parfois n’ont pas de schéma corporel non plus et qui sont dans la souffrance de dire je pousse, je pousse, je n’ai pas mal, j’y vais encore. Et qui même aime se faire mal, pas par plaisir, mais parce que lorsqu’on veut évoluer dans le sport, il faut quand même un peu de souffrance. C’est toujours dur de leur dire écoute la douleur.

Difficile de dire à certains sportifs de se fiers à leur douleur

Juliette : C’est dur de dire écoute la douleur face à certains sportifs. Moi j’ai des difficultés parce qu’on est face à une population qui n’a jamais mal.

Michaël : Ils n’ont jamais pas mal.

Juliette : Oui, c’est ça.

Michaël : C’est clair que dans le cas des sportifs élite même pro, il y a une charge telle que des douleurs, il y en a, c’est sûr. Maintenant, il faut voir à quel point c’est une douleur, ou une gêne. Dans un monde idéal, il faudrait l’écouter. Maintenant, si tu réduis un petit peu un moment et que tu trouves des activités de transfert de charges, etc… pourquoi pas. Mais c’est vrai que s’il faut plus de temps, c’est compliqué. Ils ne vont pas le faire, ils vont rester là dedans et pour eux c’est normal d’avoir mal.

Juliette : C’est pour ça qu’il faut aussi des fois pouvoir les diriger. Ça reste du coaching. Accompagner le patient, que ce soit à distance ou pas. De poser des questions : tu te sens comment là ? Est-ce que tu as des douleurs ? Comment sont tes performances. Rien que l’absence d’évolution dans les performances, ou une régression, ça nous donne des informations. Puis trouver des activités de transfert. Qui sont moins en charge sur le membre problématique.

Michaël : Ça c’est sûr. Mais même pour un patient en course à pieds, qui court pour le plaisir 1 à 2 fois par semaine, et qui se fait mal, lui dire de stopper, c’est compliqué. Parce qu’il avait plein de bonne volonté de commencer. On le stoppe, ça ne va pas. Et pour la cicatrisation, pour la récupération, pour tout, pour son corps en général, ce n’est pas bon de faire un repos strict. On revient sur ce truc arrêter trop longtemps c’est pas bon. Donc très rapidement, faire des activités de transfert de charges qui permettent quand même de bouger, ça c’est important, ça permet aussi de mieux cicatriser. Et puis dès que possible, reprendre l’activité en question progressivement.

Juliette : À un niveau moindre de là où on en était. Des fois, il oublie aussi.

Pour la cicatrisation, pour son corps en général, ce n’est pas bon un repos strict

Michaël Tauxe

Importance de la quantification du stress mécanique

Michaël : Il y a cette cette schématisation à la clinique du coureur, la quantification du stress mécanique dans ses prises en charge. Fondamentalement, c’est ce que pas mal de gens font instinctivement. Là, il y a un mot, il fallait trouver un peu un titre mais c’est exactement ça. C’est de la mise en charge progressive pour stimuler suffisamment afin de générer de l’adaptation, mais sans dépasser ce que les structures peuvent tolérer pour ne pas continuer à les irriter. C’est un jeu entre en faire assez pour se renforcer, mais pas trop pour ne pas irriter.

La Clinique du Coureur

Que faire en cas de douleur de genou lorsqu’on débute en course à pied ?

Juliette : Après, c’est difficile. J’ai l’exemple d’une amie qui commence à faire un peu de course à pied et elle me dit qu’elle a mal au genou. Elle revient courir et je lui demande si elle a toujours mal. Elle me dit : oui, mais tu m’as dit que ce n’était pas bien d’arrêter. On est parfois un peu dans l’entre deux. Parfois tu te retrouves face à des gens qui ne sont pas des coureurs, qui ont la volonté de se mettre à la course à pied pour X ou Y raison et qui sont super motivés, mais qui n’ont pas forcément la masse musculaire adéquate aussi pour supporter. Donc des fois tu as envie de leur dire, fais moins de course à pied et fait plus de squat, de renforcement, etc… Mais c’est compliqué parce qu’à ce moment là tu es déjà en train de leur mettre un programme qui au niveau planning ou autre, ils n’avaient prévu pas prévu.

Michaël : Un plan, qui peut faire peur.

Juliette : C’est compliqué quand tu dis la course à pied a quand même énormément de bienfaits, donc c’est bien courez, courez. Il ne faut pas que je la limite trop, il faut que je la stimule. Mais en même temps, moi j’aimerais bien qu’elle fasse un peu plus de squats. C’est un peu compliqué.

Juliette : Toi, face à un semi sédentaire ou quelqu’un qui au niveau des membres inférieurs ne fait pas d’activité qui muscle, et qui te dit la course à pied me fait mal aux genoux. Qu’est-ce que tu réponds?

Michaël : Ça ne devrait pas.

Juliette : Au début s’ils ne sont pas en forme, c’est soit les genoux, soit je suis en train d’étouffer parce que mon cardio ne suit pas.

Michaël : Avec la douleur, de nouveau, c’est de voir en fait le sédentaire qui a des bonnes résolutions de début d’année qui se met à courir… Ça dépend aussi du passé des gens, les antécédents et ce qu’ils ont pu faire auparavant. Mais s’il a de bonnes volontés, qu’il n’a plus fait de sport depuis quelques années, qu’il se remet à la course, mais qu’il n’est pas fort musculairement, et qu’il se fait mal au genou. C’est peut être qu’il a été trop fort. Des fois on ne se rend pas compte, mais 20 minutes de course à pied le long du Rhône, ici, il y en a des impacts. Et ces structures, si les tissus ne sont pas adaptés à ça, et bien ça va vite crier, ça va vite faire mal.

Juliette : C’est ça qui est difficile. Quand tu es un groupe d’amis et que tu essayes de faire de la course sociale, les gens suivent et c’est difficile de leur dire, non, aujourd’hui tu ne viens pas avec moi parce que c’est trop pour toi.

Michaël : On est vite entraîné par le groupe, et par les réseaux sociaux, c’est clair que ça stimule. Ça fait aller trop vite, trop fort je pense. Maintenant c’est clair que ce sédentaire, s’il a mal après une course de 20 minutes, il doit en faire moins au début. Et là ça implique quelque chose que beaucoup de gens ne veulent pas. C’est-à-dire qu’ils se disent que le temps de mettre les chaussures si ils doivent aller courir cinq minutes, et bien non. Alors que oui, en fait, en théorie. Si ils chargent progressivement, ça peut aller assez vite. Mais il y a des gens pour qui moins que 20 minutes, ça n’en vaut pas la peine. Et c’est dommage ! À ce moment là, pourquoi pas essayer de discuter et de travailler avec un côté renforcement musculaire. Qui dans tous les cas serait intéressant. Et dire vous allez courir cinq minutes, vous faites un peu de renforcement,… ça se discute de le faire pendant. S’il veut courir 20 minutes, du coup là, il fait une pause, il a mal au genou, il fait peut être pas mal de renforcement pour renforcer ce genou. Puis il essaie de reprendre 20 minutes, pourquoi pas.

Juliette : Ou calmer selon les impacts, en faisant de l’intervalle gentil.

Attention en cas de changement de chaussure

Juliette : On a la même chose dès que tu vas changer les chaussures. Si tu changes pour des chaussures un peu plus minimalistes, il faudrait y aller progressivement. Personnellement j’ai changé de chaussures et j’avais dit, ce que je n’ai pas fait, je vais sortir dix minutes avec des chaussures minimalistes, je vais revenir et puis je vais reprendre avec mes anciennes chaussures pour faire le reste.

Michaël : Ça, c’est ce que tu t’es dit.

Juliette : C’est ce que je m’étais dit. Et c’est vrai que c’est difficile à suivre au niveau progression. Je l’ai peut faire. En contrepartie, avec les chaussures minimalistes, je n’ai pas couru autant. J’ai couru beaucoup moins dans la semaine et j’ai couru sur un temps beaucoup plus petit. Simplement parce que je sentais que je chargeais beaucoup mes jambes et mes mollets. Je n’avais pas envie de forcer parce que je connais le risque de blessure.

Juliette : Parfois, certaines personnes se permettent de ne pas suivre la progression. Mais dans ces cas là, faut vraiment compenser par l’écoute, par du repos, par de la mobilité derrière. Ce qui ne veut pas dire que durant le premier mois, à chaque fois je me disais : tu fais des bêtises, tu fais des bêtises. Mais par chance je ne me suis pas blessée. Mais il y a toujours cette notion de progression dès que tu changes une activité ou du matériel d’ailleurs.

Michaël : Exactement. Pour les chaussures, c’est clair que c’est le côté transition. Quelqu’un qui est intéressé par changer de gamme de chaussures, minimaliste, le maximaliste ou je sais pas comment on l’appelle exactement, il y a l’entre deux aussi. D’un coup ils veulent changer, souvent ils ne savent pas dans quelle catégorie ils se situent. La plus part du temps ils ont de grosses chaussures. Sur le marché, on en trouve beaucoup, en tout cas dans les commerces ici il y a beaucoup de grosses chaussures. Donc c’est clair que là, le changement de chaussures ça passe normalement facilement.

Michaël : Maintenant, des gens qui veulent passer plus sur du minimaliste, il y a la nécessité d’une transition. On parle d’un mois de transition pour chaque tranche de 10% de différence à l’indice minimaliste (la clinique du coureur). Donc en fonction du genre de chaussures, tu en as vite pour quatre, cinq mois, voire plus. Et du coup il faut être sacrément motivé.

Juliette : Quand tu changes de chaussures pour des chaussures identiques mais neuves, les premières courses, j’aurais vraiment tendance à dire qu’il ne faut pas faire comme s’il ne s’était rien passé. La chaussure est neuve, elle n’est donc pas aussi souple. La semelle elle n’est pas faite. Même si c’est la même marque, j’aurais tendance à dire, vous faites la moitié de ce que vous faites d’habitude la première semaine pour voir si les choses s’adaptent de façon naturelle ou pas.

Michaël : Même le même modèle, de la même marque, effectivement une usée ou pas usée, elles n’auront pas forcément exactement les mêmes contraintes. Tu as des variations liées à l’usure de la semelle, etc. Puis effectivement du coup, on ne peut pas repartir sur un volume de 60 km par semaine avec des nouvelles chaussures juste comme ça, c’est clair.

Les bâtons en trail

Juliette : D’ailleurs, j’avais une question sur le matériel, les bâtons en trail. Est-ce que tu peux m’expliquer à quoi ça sert, comment ça marche, comment on les utilise ?

Michaël : Les bâtons en trail, c’est débattu. Il n’y a rien de clair là dessus, mais rien. Beaucoup de trailers sont contre parce qu’ils trouvent que ce n’est pas dans la nature de la course d’avoir ce matériel. Et ils font sans par principe. Après je trouve que ça a quand même une utilité particulièrement en montée, sur des montées raides. Tu viens quand même soulager tes membres inférieurs par la poussée des bras. Donc il y a plusieurs techniques, en double planter dès que c’est vraiment assez en pente ou en alterné. Tu viens quand même soulager indéniablement ta musculature. Tu peux le compenser par pousser avec les mains. On le voit beaucoup, mais ça demande quand même plus d’énergie.

Michaël : D’autres voient l’utilité en descente. Moins souvent quand même, mais il y en a quelques uns qui voient l’utilité en descente par rapport à l’équilibre. C’est probablement des gens qui ont peur de se casser la figure. Bien que ça comporte un risque. Tu coinces le bâton dans un caillou, ça te fait pivoter… Ou des gens qui sont partisans de planter en descente les bâtons et puis de faire des « vols ». Moi, je ne suis pas persuadé. Je pense que l’impact est énorme en descente. T’as intérêt à plutôt gérer, à freiner, à faire des petits pas et puis laisser aller dès que c’est plus roulant.

Michaël : L’utilité pour moi, c’est en montée. Alors personnellement je connais pas mal de gens qui quel que soit le trail qu’ils font, ont les bâtons que ce soit 12 km, 20 km, 100 km etc… Moi j’ai un peu ma limite. Généralement au delà de 30 km, plus que 1800 de dénivelé, ça commence à bien chauffer chez moi en tout cas. Et là je prends les bâtons, parce que c’est une aide. Après, ça dépend aussi du profit de la course. Mais en règle générale, c’est comme ça. Moins que 30 km, j’arrive à faire sans par exemple.

Michaël : Et le désavantage des bâtons, c’est que c’est un peu du poids en plus. Alors on s’entend, ils sont légers maintenant les bâtons, mais ça reste quand même quelque chose à prendre. Ça fait gling gling gling derrière quand tu cours, c’est assez pénible. Pour moi, le plus gros désavantage, c’est que durant les courses, tu te questionnes un petit peu, je sors ou je ne sors pas les bâtons ? Est ce que la pente elle est suffisamment longue pour les sortir ? D’où le fait de connaître le profil. Si tu es constamment en train de les prendre, les ranger, les prendre, ça coûte pas mal d’énergie. Ça c’est le désavantage. Mais c’est une décision personnelle.

Juliette : Sur un syndrome de l’essuie glace, ça pourrait être une aide pour la reprise par exemple ? Ou au final, s’il reprend et qu’il y a des bons dénivelés qui nécessitent des bâtons, c’est qu’il ne doit plus avoir de douleurs ?

Michaël : Moi je pense que c’est plutôt sur cet axe là. Car de toute façon, la reprise, il la fait progressivement. Il a plutôt intérêt de le faire sans aide pour aboutir à augmenter progressivement sans sa douleur jusqu’à un point. Le jour où il prend les bâtons, qu’il ait un essuie glace ou pas, il va avec les bâtons et il aura de toute façon pas mal. Tandis que de reprendre peut être avec des bâtons en post blessure comme ça et que tu ne vas pas forcément les utiliser par la suite, il y a peut-être un risqueque la stimulation soit un peu différente et puis que ça refasse mal.

Juliette : Oui ce n’est pas forcément rentable.

Michaël : Moi je ne m’aventurerais pas avec ça, mais peut être.

Le renforcement musculaire pour le trail

Juliette : Au niveau renforcement musculaire, est-ce tu renforces spécifiquement certains muscles pour le trail ou tu fais du général ?

Michaël : Alors moi j’axe beaucoup, et je conseille aux gens d’axer sur les membres inférieurs. C’est assez vaste, on est d’accord. Je trouve surtout que c’est au niveau cuisse mollet que ça se joue. Et un grand oublié dans le renforcement c’est le pied. Très très peu de gens font du gainage du pied alors que c’est lui qui est en ligne de front, aux premiers contacts.

Juliette : Ce que tu appel le gaignage du pied, c’est des positions de semi entorse, de contre appui sur le pied ?

Michaël : Pas forcément, non. Vraiment, travailler la musculature intrinsèque du pied par des exercices. Tu peux prends un linge, que tu tires gentiment. Tu peux mettre un papiers sous tes orteils et tu écrases la feuille avec tous tes orteils sauf le premier que tu essayes de soulever… Écarter tous les doigts de pied. Et c’est assez intéressant de voir que très peu de gens sont capables de coordonner tous le éléments du pied, d’écarter les doigts, de serrer… de faire ce genre d’exercices. Il n’y en a pas beaucoup qui sont capables de le faire. Nos pieds à l’heure actuelle sont hyper rigides, et désadaptés de par les chaussures qu’on a au quotidien.

Juliette : Sur certains patients, tu as dû le voir aussi. Lorsqu’on explique ces exercices, tout le monde panique car ils n’y arrivent pas. Et petit à petit, ils sentent que le mouvement apparait. Alors ce n’est jamais un truc extraordinaire, mais de sentir qu’il y a des choses vivantes dans leurs pieds et qu’ils arrivent à les bouger, c’est assez fun.

Michaël : Mais le pied, c’est un peu le tabou. Parce que même si tu fais du gainage du pied, contrairement aux cuisses, aux mollets ou bien au gainage de la sangle abdominale, le bénéfice du gainage, l’aide que ça te procure elle n’est pas aussi grande, je trouve. Si tu fais un peu des cuisses tu es plus puissant et plus fort.

Juliette : Elle est moins visible.

Michaël : Les pieds on n’en prend pas beaucoup soin. C’est dans des chaussettes, dans des chaussures. Les ongles, c’est détestable en course à pied. C’est vraiment un oublié en terme de soins et de renforcement.

Le pied est un oublié en terme de soins et de renforcement.

Juliette : Toi , est-ce que tu vas chez la chez la pédicure-podologue ?

Michaël : Non

Juliette : Dans le passé j’ai rencontré un formateur à la clinique du coureur qui disait que depuis qu’il s’était accordé un budget pédicure ça avait changé sa vie. Simplement parce que les cors qui sont dus à la course à pied, les ongles, etc… Le nettoyage du pied de façon générale, l’assouplissement du pied, lui, il voyait que c’était bénéfique, moins de crispation dans le pied, donc moins de crispation qui remontent. Lui, il a vraiment vu un changement. Comme tu dis, je pense qu’on ne s’en occupe pas assez. Alors qu’il est vrai que si tu fais tes squats, rapidement tu vas voir la différence, tu vas sentir que tu montes plus vite, tu vas sentir que tu fatigues moins vite. Mais si tu fais tes exercices de pieds, tu ne vas pas forcément sentir grand chose. Mais en contrepartie, au niveau prévention des blessures intrinsèques aux pieds, de surcharge, fracture de fatigue au niveau des méta ou autres, ce n’est pas négligeable je pense.

Michaël : C’est clair. Et même de manière générale, le pied, c’est quand même le premier contact au sol. Donc s’il est faible, tu as beau être tout fort des mollets, des cuisses, des abdos et de tout, cette faiblesse, elle aura un impact global sur le corps. Elle sera compenser par le reste peut être, mais elle aura un impact quand même.

Pied creux, pied plat, que penser ?

Juliette : Entre un pied creux et un pied plat, quel est le meilleur pied pour toi ? C’est question piège. J’adore cette question.

Michaël : Je reste d’avis, mais je n’ai pas une grande expérience avec ça, que ce n’est pas un problème. Ni l’un ni l’autre n’est bon ou mauvais.

Juliette : On fait avec ce qu’on a.

Michaël : C’est un peu ça. Et de nouveau, le corps s’est adapté avec un pied plat, s’est adapté avec un pied creux. Donc en général ce n’est pas un problème. Maintenant, il y a peut être des cas particuliers qui nécessitent une correction ou une attention particulière, mais je pense que ce n’est pas un grand problème.

Juliette : Après c’est le même principe quand tu as déjà une petite scoliose. Alors on ne parle des cas chez les enfants, mais chez les adultes, ça sert à rien de sur corriger. Il faut aussi voir comment on est fait et voir si c’est une faiblesse ou pas.

Juliette : Après j’avais vu un chirurgien orthopédiste justement, qui nous avait posé cette question, donc face à des physio ou tout le monde s’est dit c’est le pied plat mais on sait que ce n’est pas le pied plat. Mais dans notre tête, inconsciemment, culturellement, on nous avait toujours dit ça. Et il nous dit, en fait le meilleur pied c’est le pied plat pour lui. Pourquoi ? Parce que c’est un pied qui absorbe mieux alors que le pied creux est plus rigide. En même temps, à la limite, on peut dire que pour courir, c’est le meilleur pied puisqu’il qui va permettre de transmettre la force plus facilement. Donc il y en a un qui absorbe mieux, mais l’autre qui transmet mieux la force. Donc c’est quoi le mieux ? En fait, il y en a pas un des deux.

Michaël : Après ça fait typiquement partie des trucs où c’est beaucoup des mythes ou des ancrages qu’on a depuis très très très longtemps. Les choses ont pas mal évolué, mais certaines choses sont restées ancrées comme ça. Et puis on reste là dessus.

Juliette : Le principe il ne faut pas bouger parce qu’on a mal, par exemple.

Michaël : Ce qu’on entend souvent aussi dans ces mythes : j’ai mal au genou. J’ai de l’arthrose donc je ne peux pas courir, ça je l’entends encore énormément. Ou je suis en surpoids, je ne peux pas faire de course à pied sur route.

Juliette : J’ai mal aux genoux, donc il ne faut pas courir, il n’y a pas de logique.

Michaël : C’est clair, ça fait partie des mythes. Donc le pied creux plat, pied plat, je pense qu’on a pas mal de mythes là dessus.

Ne pas attendre avant de consulter

Juliette : Après il faut garder cette notion, comme dirait aussi la clinique du coureur, la quantification du stress mécanique, y aller progressivement. Au final, notre corps s’adapte. Donc on fait avec le corps qu’on a, on regarde l’objectif qu’on veut et puis après on est censé y aller progressivement. Maintenant, si on n’est pas capable de le faire seul, il faut se faire accompagner. Et puis quand il y a blessure, comme tu disais par rapport à la douleur, c’est pourquoi j’ai mal, et aller consulter, ne pas attendre.

Juliette : Lorsqu’on a une inflammation au genou, ne pas attendre trois mois pour consulter car ça ne passe pas. Alors qu’entre temps on a continué son entraînement en serrant les dents. Ce n’est pas intéressant non plus.

Michaël : Et ça, malheureusement, c’est ce qu’on voit tout le temps. J’ai peu de patients qui me disent que c’est depuis la semaine passée et qui sont très alertes. Alors il y en a qui font attention, et ça va probablement passer, mais ils ne le font peut être pas assez attention. D’autres qui arrêtent complètement, ce qui n’est pas très bon. Et puis ils recommencent deux semaines après et ça revient. Mais c’est vrai que j’ai très peu de patients qui sont très réactifs. Souvent c’est des gens qui disent que ça fait deux mois, trois mois, voire plus, une année, deux ans qu’ils ont une douleur. Et là le problème c’est qu’effectivement, il faut comprendre qu’il y a des compensations qui s’installent. Il y a de l’irritation qui s’est chronicité. Et face à ça j’explique que ce n’est pas parce que tout à coup ils viennent voir un professionnel que ça ira tout de suite mieux. Quand ça fait quatre, cinq mois, une année ou deux qu’il y a une douleur, ce n’est pas en une ou deux séances, ou en deux semaines que ça va passer. Et là, je pense quand même que si on le prend à la base le problème, donc rapidement, oui, ça peut passer vite. Ça peut passer beaucoup plus vite, que si on a laisser la situation s’installer pendant plusieurs mois.

Juliette : Comme tu dis, il y a de compensation qui se sont mis au niveau des tissus aussi. Parce que les gens vont penser aux compensation par rapport à la hanche par exemple, mais rien qu’au niveau des tissus il y a des compensations qui s’installent. On peut aussi parler des changements au niveau du schéma corporel, au niveau des appuis, la prise de conscience, des choses s’installent dans la chronicité, et pour les enlever, ce n’est pas un thérapeute qui va réussir à les faire disparaître en claquant des doigts.

Michaël : Au niveau neurologique aussi, inconscient. Cet échange neural qui avec ces douleurs sera modifié.

Juliette : Y a tout un ensemble. Plus on prend tôt, mieux c’est. Après, il y a un problème dans le système de santé. Car ce n’est pas forcément évident d’avoir accès au médecin tout de suite. Donc il y a aussi cet élément qui retarde la prise en charge et le diagnostic. Je dis souvent ne traînez pas trop, mais je comprends qu’on ne consulte pas tout de suite.

Juliette : Et ensuite c’est l’expérience. Si vous vous êtes blessé une fois. Oui, parfois vous allez devoir aller payer de notre poche un thérapeute ou autre chose. Mais l’objectif c’est d’apprendre. D’apprendre de cet événement et de ne pas se reblesser par la suite. Parfois, il faut passer par des cliniques privées ou autre chose. C’est dommage, mais le système de soins fera, de plus en plus, que ça sera compliqué. Donc soit on aura les patients tard, soit on aura les patients tôt. On verra comment les choses évolueront. Maintenant, il y a énormément d’infos sur le site de la clinique du coureur, par exemple. On a accès à notre époque a beaucoup d’informations.

Michaël : En libre accès.

Les informations en libre accès, et les consultations à distance

Juliette : Alors on dit souvent aux patients de ne pas aller regarder sur Google. Là, on parle quand même de problématiques souvent mécaniques. Donc oui, sur Google, il faut que ça fasse le buzz. Donc la première chose qui va apparaître, c’est un truc catastrophique. En général ce n’est donc pas ça que vous avez Mais ça peut être intéressant d’aller s’instruire sur tous les réseaux sociaux pour voir un petit peu ce que je dois faire ou ne pas faire.

Michaël : Certains canaux effectivement spécialisés que ce soit sur la clinique du coureur, que ce soit chez Volodalen ou d’autres organisations. Je pense qu’il y a des canaux de confiance et qu’on peut aller voir. Le seul risque, c’est que face à une douleur de genou qui est mal différenciée, il ne faudrait pas prendre de raccourci. Il y a quand même des tests cliniques qui permettent de s’assurer que du diagnostic. Et comme je disais tout au début, on ne fait pas la même prise en charge en termes de coupure de volume, coupure d’intensité pour continuer à maintenir l’entraînement, ce n’est pas la même chose en fonction de certaines pathologies.

Juliette : C’est toujours le problème avec les réseaux. Les réseaux vont pouvoir nous éduquer. Mais toute thérapie, c’est du cas par cas. Donc c’est une face à face entre le patient et le thérapeute. Et il n’y a rien qui remplacera votre thérapeute en face et et vous qui lui communiquer vos ressentis. Et c’est pour ça que de toute façon il faudra à un moment ou à un autre consulter. Mais c’est vrai qu’il faut se préparer dans l’avenir à avoir justement des petits repères de référence parce qu’il y aura certainement de l’attente au niveau médical.

Michaël : Moi je fais un truc jusqu’à présent, à voir si je maintiendrai longtemps. C’est que je reste très disponible, que ce soit sur les réseaux ou bien par téléphone. Alors là aussi, je n’ai pas le patient en face. Tout ce qui est tests cliniques qui permettent d’orienter, vers telle ou telle pathologie, ils ne se font pas. Mais déjà on a un peu le côté coaching. Je ne suis pas coach donc je ne fais pas de plan d’entraînement. Mais je viens coacher dans la blessure, ça c’est plus mon truc forcément. Et par téléphone, on peut déjà aider. Je suis assez joignable justement à faire ça les choses comme ça. J’ai mal là depuis deux jours, qu’est ce que je fais ? On peut déjà pas mal orienter. Ce n’est pas tout de suite, viens au cabinet, on va voir ça. Parce que souvent, dans ces pathologies de course à pied en ostéopathie, je ne fais pas énormément de choses.

Juliette : Il n’y a pas forcément beaucoup de manipulation au départ.

Michaël : Il n’y a pas de manipulation. Dans certains cas, oui, ça ne va pas être mal de rééquilibrer. C’est clair qu’il y a des tensions donc ça ne va pas faire de mal. Mais le 80 % du job, ça va être cette quantification du stress mécanique. Et qui peut être mise en place déjà comme ça, par téléphone, sans forcément de diagnostic précis. C’est à dire ok tu réduis, … , essaye de faire comme ça ces deux ou trois prochains jours et puis on refait le point en fin de semaine. Et si ça ne change pas, il faut peut être venir comme ça, on est sûr de ce que c’est. Et puis là on prend en charge de manière encore plus ciblée. Mais le côté ok, j’ai réduit, j’ai fait un peu, ça va passer, réaugmente un peu progressivement sur une ou deux semaines. Très vite, les gens atteignent de nouveau leur potentiel d’avant. Et en fait, la petite alerte, elle est assez vite passée quoi.

Juliette : Oui et puis ça leur permet de se concentrer sur eux et de voir si par la suite il y a des choses à changer dans leur entraînement. Mais je pense que nous ostéopathes, physiothérapeutes, les coachs ils le font déjà, on sera amené à faire des consultations à distance, pour essayer de compenser la difficulté de consultation avec les médecins. Et c’est vrai que parfois juste sur la direction a donner, comme tu le dis, par téléphone, on arrive déjà a faire des choses.

Michaël : C’est pas idéal parce qu’il n’y a pas la personne en face. On peut pas toucher, c’est clair. Mais très rapidement ça peut donner une ligne de conduite à très court terme, qui peut être assez vite changer dans un sens ou dans l’autre.

Juliette : C’est toujours un peu compliqué. On verra comment les choses évoluent parce qu’on veut tout, mais en même temps, comme tu le dis, ce n’est pas idéal. En même temps, on ne peut pas toujours voir les patients. En même temps on va se poser la question sur les erreurs diagnostic … C’est compliqué, mais je pense que oui, à distance, on arrive de toute façon à faire des choses. C’est pour ça que lorsque vous êtes suivi par un coach, il faut en parler et lui même, il peut déjà commencer à diriger un petit peu. Maintenant, ça dépend des connaissances de chacun.

Michaël : Si il y a une douleur, c’est quelque chose à prendre en compte. Donc s’il y a un coach, il est censé le prendre en compte dans leur planification. Si un coach n’arrive pas à réadapter ce qui a été fait lors de l’apparition d’une douleur, je pense qu’il manque quelque chose. Mais beaucoup y arrivent, et revoient le plan, il est reconstruit à partir de là. Alors c’est assez assez optimal.

Juliette : Quand tu es accompagné dans ton sport, c’est souvent plus facile parce que tu as directement quelqu’un vers qui te tourner. Il y a cet aspect manque de progression, il y a aussi l’aspect de la charge mentale dû au stress de la vie. J’appellerais ça aussi la charge au niveau nutrition. Une nutrition qui n’est pas bonne ou au final tu récupères pas bien. Ça aussi c’est à prendre en considération.

Michaël : Oui, on parle souvent de charges d’entraînement. C’est cette courbe qu’on a en fonction de la charge qu’on met. Mais elle est à prendre en compte dans son contexte global de vie. C’est sûr que la fatigue, le job, le stress, la nutrition, enfin tout finalement charge le corps et en même temps on manque de récupération. Donc c’est clair que la récupération est un point clé aussi dans la prévention des blessures. On va accumuler des contraintes et puis à un moment donné ça peut casser.

Juliette : Après c’est toujours le même message, c’est qu’au final chaque individu est différent. Donc un programme doit être adapté à l’individu. La douleur, la prise en charge d’une douleur doit être aussi adaptée à l’individu. Il n’y aura jamais un message type. Globalement, le message il s’adapte à la personne qui est en face. Après il faut regarder la globalité, penser à la progression et y aller doucement, et s’écouter. Et puis aller interroger les professionnels de la santé ou les professionnels du sport pour pouvoir évoluer et progresser en toute sécurité.

La musculature du dos en trail

Juliette : L’importance du dos. Est-ce que pour toi la musculature du dos est importante ? J’ai vraiment le sentiment qu’on ne travaille pas assez le buste de façon générale, mais aussi les muscles du dos. On travaille toujours les abdos, etc …, mais les muscles du dos, … rien que pour la descente. C’est un apriori de ma part ?

Michaël : Non, les problèmes de lombalgies en course à pied, c’est des problèmes d’amplitude. Donc effectivement, c’est pas mal la descente, où on fait des foulées différentes, on laisse plus aller, etc… Avec un travail musculaire qui est différent aussi. Donc on a tout intérêt à avoir un dos qui est bien solide. Moi j’ai un peu cette notion en course à pied, en trail, cette notion de bas du corps. Pour moi le dos il est important au niveau lombaire en course à pied. Le gainage est important dans tous les sports, une sangle abdominale tonique pour tenir le bassin et le dos justement, c’est important. Mais ce n’est pas qu’une notion de grands droits, ce n’est pas que les abdos, ce serait de faire aussi les lombaires, les paravertébraux. Après, ce qui est plus haut du dos, ce serait de façon bien de le renforcer, ça ne ferait pas de mal. Mais je le trouve un peu moins important. Peut-être que des préparateurs physiques ont un autre avis.

Juliette : Il est peut-être plus important pour la vitesse ?

Michaël : Peut-être, ça je ne sais pas exactement. C’est moins mon domaine. Mais le côté lombaire, c’est certain. C’est certain qu’il faut le travailler. Si tu as des douleurs de dos après, pendant un effort c’est hyper handicapant de toute manière.

Les courbatures

Juliette : Je ne parle pas d’un trail longue distance ou d’un entraînement vraiment intensif, mais si tu fais un entraînement de charge moyenne, et que tu as des petites douleurs, des petites courbatures, elles devraient durer combien de temps, d’après toi ?

Michaël : Je ne sais pas le temps qu’elles peuvent durer. De nouveau c’est discutable. Mais pour moi, des courbatures, c’est normal. Il y a eu un effort, qui était peut être un peu plus fort que ce que le corps pouvait tolérer. Mais on n’est pas dans la blessure. Si on écoute ça, que ça passe assez vite, on peut très vite repartir. Et c’est qu’il y a eu au moins de l’adaptation. Quelqu’un qui fait quelque chose en sport, puis il y a rien. Alors soit c’est qu’il a fait le truc dans lequel il était très bien adapté, soit ce n’était pas assez fort pour générer de l’adaptation.

Michaël : Donc le fait d’avoir des courbatures, moi je suis assez content quand j’en ai. Parce que l’effort que j’ai fait la veille ou deux jours avant était suffisant pour au moins générer des modifications. Mais je sais que ça va passer. Là je reviens du trail de la Vallée de Joux, j’ai encore de bonnes tensions dans les cuisses. Mais potentiellement demain elles seront encore moins importantes. On est déjà à trois jours donc les tensions sont très bonnes. J’ai eu d’autres problèmes durant la course. Mais en fin de semaine, je pourrai reprendre mon plan d’entrainement sans problème.

Juliette : Il faut savoir s’écouter pour pouvoir redémarrer gentiment. Comme tu dis, si tu as des courbatures, c’est que tu as engendré une charge suffisante pour créer des adaptations. Mais on peut faire aussi une activité physique comme entretien. Si vous n’avez pas de douleurs, ça ne veut pas forcément dire que le sport que vous avez fait vous a servi à rien. Pas du tout.

Michaël : Non, non. C’est que c’est de l’entretien. On est peut être dans le côté je suis adapté, pleinement adapté à ce que je fais et j’entretiens ça. Je maintiens un peu sur cette charge là.

Juliette : Si je veux de l’adaptation, oui, il est normal. Mais si au final je cherche à faire mon activité sportive pour le plaisir, pour m’entretenir et pour bouger, je ne dois pas forcément avoir des courbatures.

Michaël : Et pour générer de l’adaptation, il n’y a pas spécialement besoin de courbatures non plus. On peut très bien faire un entraînement très spécifique en montée, ne pas avoir de courbatures le lendemain, c’est pas pour autant que ça n’a pas travailler. Mais cette notion de courbatures, elle indique juste que l’effort était peut-être un tout petit peu plus que ce que le corps pouvait tolérer. Donc il réagit comme ça. Mais ce n’est pas mauvais pour moi.

Juliette : À la limite, c’est l’indication de où se trouve votre charge. Là j’ai une bonne courbatures, je sens qu’elle va mettre quelques jours, je ne vais peut-être pas encore grimper l’intensité parce que là, peut être que je me dirigerais vers la blessure.

Michaël : Effectivement c’est une indication.

Juliette : Tu as déjà eu durant une course un énorme spasme musculaire qui t’a obligé de t’arrêter ? Comment on réagit à ce moment là ? Parce que je présume qu’on a envie de finir sa course. C’est difficile de savoir si on est en train de se faire une déchirure, un claquage ou si c’est simplement un spasme. Comment toi, tu as réagi ? As-tu des conseils par rapport à ça ?

Michaël : Je parle des crampes. C’est un vaste sujet, les crampes, très peu connu. Très peu traité, parce que de mon point de vue, pendant la course, tu n’as pas grand chose à faire. Au trail de la Vallée de Joux, j’ai eu des grosses crampes, parce que j’ai dû courir un peu plus vite pour rattraper le temps. Les crampes sont venues donc des deux côtés progressivement. À différencier de la déchirure qui peut arriver comme un coup de couteau, un coup de poignard généralement sur quelque chose d’intense. Donc tu accélères, tu as le coup de poignard, ça c’est clair qu’il y a un problème. Ça ne passe pas et ça te fait mal. Tu t’arrêtes, tu ne peux plus, à mon avis, à un moment donné, il faut stopper.

Juliette : On distingue bien la différence entre les deux.

Michaël : Une crampe, tu sens que ça commence à arriver. Qu’est-ce qu’il y a à faire pendant ? Soit tu serres les dents et que tu essayes de jongler avec ça. Généralement, d’expérience, elles ne passent pas trop. Mais tu peux moduler ça. Donc tu varies l’allure, tu fais de la marche, de temps en temps tu reprends et ou bien tu dis sur une allure où ça n’apparaît pas.

Michaël : Soit, sinon tu t’arrêtes. Tu essayes un peu d’étirement, du massage, c’est assez discuté scientifiquement sur l’intérêt réel. Mais ça va faire du bien, c’est clair. Quand tu t’arrêtes, lorsque tu repars peut-être que pendant quelques minutes, tu n’auras plus de crampes mais probablement qu’elles vont revenir. À l’heure actuelle, les crampes, on ne met plus le point sur le déficit en électrolytes ou sur la déshydratation. Si tu n’est pas bien hydraté, ça ne va probablement pas aider. Mais il y a plein de gens déshydratés qui n’ont pas de crampes.

Michaël : C’est plus une fatigue musculaire. Ce que je vois parmi les trailers, les coureurs, c’est qu’on part trop fort par exemple. En début de course, on a de l’énergie, et on grille nos cartouches. La fatigabilité musculaire est importante et c’est là que ça crampe. C’est cet arc réflexe qui ne module plus la contraction – relâchement.

Michaël : À l’heure actuelle tous ces produits miracles, jus de cornichon, poudre de magnésium qu’on prend durant une course, de bouillons… il n’y a rien de avéré en fait là dedans.Ça aide des gens.

Juliette : C’est pour ça que tu axes le renforcement musculaire, quand tu parlais des mollets, etc… pour vraiment qu’ils soient habitués à la charge.

Michaël : C’est clair que si tu n’es pas renforcé, si tu n’as pas travaillé ça, c’est compliqué. Et puis même en étant renforcé, si tu pars plus fort que ce que tu devrais faire sur telle ou telle course, c’est un risque qui peut arriver. Mais voilà, du coup, moi je serre les dents et puis je finis comme je peux. Tu perds du temps, c’est dommage parce qu’on cherche à gagner du temps au début, on a l’énergie, l’adrénaline, etc… Et au final, on en perd beaucoup plus après, parce qu’on a ce phénomène là.

Juliette : C’est pour ça que tu dois calculer comment tu veux faire ta course. Si tu donnes l’énergie au départ, quelle forme physique tu as, comment tu penses que ton corps va tenir selon les kilomètres que tu dois faire ?

Michaël : Si ça arrive, selon moi, il n’y a pas grand chose à faire, entre ces deux cas, serrer les dents, finir d’une manière ou d’une autre ou s’arrêter. Par contre, analyser pourquoi pour empêcher que ça arrive. Donc s’en tenir à son plan de course, pas partir trop vite et être reposer. Si tu es dans un état hyper fatigué avant une course, c’est clair qu’il y a un impact là-dessus. Être adapté aussi, une notion de climat qui peut jouer un rôle. Si tu habites dans des pays qui sont super humide, et que tu vas faire le marathon des Sables ou l’inverse. Il y a peut-être des choses physiologiques à prendre en compte.

Michaël : On parlait du renforcement, effectivement dans la notion de crampe, le renforcement est un élément important. Mais une part importante c’est l’assouplissement, que je ne fais pas beaucoup, et que peu de gens font. Mais c’est vrai que sur la notion de crampe, de travailler sur les étirements, ça peut aider à prévenir.

Les rouleaux d’auto massage et l’électrostimulation

Juliette : Est-ce que tu utilises les rouleaux d’auto massage ?

Michaël : Moi je l’utilise et je le conseille beaucoup. Il y a une douleur, il y a une fatigue musculaire, il y a une petite tension parce que c’était un effort important, travaillez le rouleau, c’est vraiment un bon outil, je trouve.

Juliette : C’est facile.

Michaël : C’est facile et ça peut faire mal sur le moment, mais on voit assez vite un relâchement. Ça ne prend pas énormément de temps. Et puis c’est assez efficace.

Juliette : C’est plus facile que de faire une session de mobilité ou de stretching.

Michaël : Ouais, c’est clair, ça parle plus aux gens.

Juliette : Par contre ça ne compense pas. Il faut faire un petit peu de stretching, un petit peu de mobilité.

Michaël : Oui ça ne compense pas. Ce qui ressort souvent aussi, c’est le complexe ou les appareils d’électro stimulation. Pour la récupération et le renforcement musculaire. Pour la récupération, je l’utilise assez souvent. Je trouve que ça ne fait pas de mal après une sortie. Par contre ça prend un peu de temps, de poser la machine. Après bon moi j’ai l’appareil avec les fils, donc du coup une fois que t’es posé, …

Juliette : Oui mais une fois que tu es posé, tu es zen. Ils ont démontré que tous ces appareils, ce n’était pas Evidence-Based Medicine. Par contre si ça amenait la personne dans une atmosphère positive de récupération, au final, ça favorisait la récupération. La même chose avec le massage de récupération. J’ai l’exemple d’un sportif professionnel (football) qui ne supportait pas de se faire masser. Sauf qu’après chaque match toute l’équipe se faisait masser. C’était un moment ou il se crispait, par conséquent le massage allait à l’inverse de l’objectif initial qui était de favoriser la récupération.

Juliette : Si tu utilises quelque chose qui t’amène dans une atmosphère cool, relaxe, de mise au repos, je pense que ça favorise la récupération. Ça sera une aide.

Michaël : Ce n’est pas le plus efficace, mais c’est au moins une aide qui est toujours bonne à prendre.

Juliette : Il n’y a rien de magique. Soit ça te correspond ou pas. Moi le Compex pour la récupération, ça va plus m’énerver qu’autre chose. Ça dépend de chacun.

Juliette : Le rouleau, il a quand même un petit côté mécanique. Mais c’est le même principe que pour le massage. Allez vous faire masser pour récupérer ? Ce n’est pas forcément démontré. C’est toute l’atmosphère autour. Car bizarrement, vous allez mieux manger, vous allez mieux vous hydrater, ainsi de suite. Donc si ça amène du bien être, c’est le bien être qui va permettre une meilleure récupération, je pense.

Michaël : Le rouleau c’est le côté le côté actif ou les gens, alors ça dépend à quel niveau… Mais que ce soit celui qui court une deux fois par semaine, il n’a pas forcément envie de faire du rouleau trois ou quatre fois dans la semaine. Et puis l’athlète élite qui s’entraîne deux fois par jour, il faut encore lui caser du rouleau actif en plus … , il n’en n’a pas spécialement envie. C’est pour ça que ça dépend pour qui. Moi j’aime bien ce côté rouleau. C’est un bon atout, une bonne arme pour des douleurs, des tensions. Le Complex, ou le TENS ça peut marcher aussi, ça a un côté plus passif où tu peux faire autre chose en même temps. Pour autant qu’il t’aide, il ne fera pas de mal à priori. Le rouleau ou les appareils électriques peuvent peut-être faire du mal, mais on le sent tout de suite à mon avis. Donc effectivement, si on sent que ce qu’on est en train de faire, est en train de péjorer la problématique, il faut stopper, ça c’est clair. Mais si c’est fait de manière tranquille et qu’on voit qu’il faut y aller, c’est assez intéressant.

L’électrostimulation

Juliette : Mais c’est vrai, comme tu dis, si c’est sur des gens qui manquent vraiment de temps, mettre des patchs, le programme de récupération et faire autre chose en même temps ça peut être intéressant. Si tu apprécies le côté un peu vibratoire.

Michaël : Il faut aimer. Ma compagne, elle déteste. En renforcement, par contre, c’est vrai que ça peut être intéressant, ces électrostimulations, mais en complément d’un renforcement actif. Ou en même temps, je ne sais pas, je n’ai jamais testé en même temps . Je ne sais pas vraiment l’intérêt qu’il y a. Mais pour moi ça me parle, ça parait assez logique. Mais c’est vrai qu’il y a pas mal de gens qui comptent sur ces appareils là pour ne pas faire de renfort.

Juliette : Le problème c’est que ça fait de la gonflette, mais niveau neuromusculaire, … Personnellement, je l’utilise de moins en moins à part en post opératoire, simplement pour essayer de maintenir un petit peu de la masse. Sinon, la fonte, elle est énorme, donc on récupère quand même beaucoup plus vite. En réveil musculaire c’est intéressant. Peut-être que j’y reviendrais, mais je l’utilise moins chez les sportifs une fois qu’ils arrivent à un certain niveau en même temps que les exercices.

Juliette : Parce que j’ai vraiment pas le sentiment qu’il y ait vraiment une plus value. Et en contrepartie je trouve que ça perturbe la personne d’avoir cette électricité et cette stimulation neuro musculaire par la machine. Parce que c’est quand même un peu douloureux. Moi, ce que je cherche, c’est le contrôle. Maintenant on manque de temps aussi. Si la personne je la voyais quatre fois par semaine, peut être que je lui ferais une fois dans la semaine.

Juliette : Mais actuellement je le fais de moins en moins en actif, en réhabilitation parce que je vois pas de plus value et que je me dis que je perds du temps par rapport à ce contrôle neuromusculaire, ce contrôle vraiment actif du patient. Mais ce regard est très personnel.

Juliette : Mais peut être que j’y reviendrai. Et puis, c’est du cas par cas. Si on a un patient où ça le motive et il a l’impression que ça l’aide, pourquoi ne pas le faire quoi. Je ne pense pas que ça lui fasse de mal en tout cas.

Juliette : Est ce que tu aurais autre chose à rajouter?

Michaël : Non, je ne crois pas comme ça.

Juliette : Je te remercie de ton temps.

Michaël : Merci à toi.

Juliette : Et puis si on veut te trouver, il y a les réseaux sociaux, il y a ton cabinet qui a Sion. Sinon on va te suivre dans tes courses, et on va te souhaiter bon courage et bon entrainement.

Michaël : Merci à toi. Ciao !

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Michaël Tauxe
Ostéopathe

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